- Les
tueurs, il faut les tuer, c'est tout ! - Et les forcenés, tu les forcènes, pine de con ? - Ah, là tu m'as eu ! - ... - Loucher, ça doit être insupportable. - Pas pire que d'être aveugle. - Peut-être, mais je parle pas de ça. - ... - J'ai un cancer des os, à mon avis je suis foutu. - Qu'est-ce que t'as dit ? - Tu fais chier ! Tu pourrais m'écouter de temps en temps ! |
Le taulier, beurré comme toute la Normandie, est allé se zoner.
Berthier, sur le coup de huit plombes, il flanche. C'est l'heure
que sa tronche a triplé de volume. Sa cervelle ressemble a un
édredon crevé dont les plumes sèment à tout va dans des
courants d'air Laroussiens. Il déclare forfait, le vioque, car il
a atteint ses limites. Ça lui prend d'un seul coup, derrière le
vieux rade en vrai zinc. Son teint se couvre. Il se met à crépusculer de la trogne.
Pousse deux ou trois hoquets.
Y'a du brouillard dans son retard de bourrin fatigué. Il le
proméne vaille que vaille sur la salle mélancolique, aux tables
cirées par les coudes de plusieurs générations d'ivrognes.
Puis, d'un geste automatique, il rafle la comptée du jour dans
le tiroir-caisse, n'abandonnant que la morniflette. D'un pas
funambulesque il gagne l'escadrin menant à sa chambre après avoir clamé d'une voix
pyrénéenne : « Je mets en touche »!
C'est le signal.
Au cri, un long lézard verdâtre radine d'on ne sait où, un
magazine pour enfant à la main.
C'est Roro, le fils du précédent qui serait probablement au
sanatorium si Alexander Fleming avait découvert « Canigou et
Ronron » au lieu de ce que tu sais.