A Belgian Family Magazine
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Aides-toi et le Ciel t'aidera.



A non for profit magazine - BlackYellowRed@yahoo.com
"The Belgae are the bravest!" Julius Caesar (58 B.C.)



Hi families of the world, This unique web page is created by a Belgian family: a father, a mother and their four children and of course a dog and two red fishes.


We invite you to a walk in the nice forest in the south of Brussels: la Forêt de Soignes in French or Zoniënwoud in Flemish or Sonian Forest in English. If you are careful, you can see a roe deer.

While we are walking, we would like to tell you about a fairy tale actually happening in Belgium. Our four children have been fascinated (especially then our last daughter, 3 years old then) by the wedding of Prince Philippe and Princess Mathilde on the 4th of December 1999. Our little daughter has already a lot of interesting ideas about how a princess should dress. She decided that rose is the most decent color for a princess.

In the Mémorial de Saint-Hélène, it is reported that, speaking about Léopold I, Napoléon have said: “C’est le plus beau jeune homme que j’aie vu aux Tuileries.” [“He is the most handsome young man I have seen at the Tuileries.”] The following text is extracted from "L'Aiglon", the son of Napoléon, written at the beginning of the 20th century by Edmond Rostand. We were kindly surprised by a "brocanteur" on the "Marché aux puces" in Brussels citing these sentences:

L'AIGLON
By Edmond Rostand

[...]
LE LAQUAIS, descendant peu à peu vers Marmont.

Et nous, les petits, les obscurs, les sans-grades,
Nous qui marchions fourbus, blessés, crottés, malades,
Sans espoir de duchés ni de dotations ,
Nous qui marchions toujours et jamais n'avancions;
Trop simples et trop gueux pour que l'espoir nous berne
De ce fameux bâton qu'on a dans sa giberne;
Nous qui par tous les temps n'avons cessé d'aller,
Suant sans avoir peur, grelottant sans trembler,
Ne nous soutenant plus qu'à force de trompette,
De fièvre, et de chansons qu'en marchant on répète;
Nous sur lesquels pendant dix-sept ans, songez-y,
Sac, sabre, tourne-vis, pierres à feu, fusil,
-- Ne parlons pas du poids toujours absent des vivres! --
Ont fait le doux total de cinquante-huit livres;
Nous qui, coiffés d'oursons sous les ciels tropicaux,
Sous les neiges n'avions même plus de shakos;
Qui d'Espagne en Autriche exécutions des trottes;
Nous qui, pour arracher ainsi que des carottes
Nos jambes à la boue énorme des chemins,
Devions les empoigner quelquefois à deux mains;
Nous qui, pour notre toux n'ayant pas de jujube,
Prenions des bains de pied d'un jour dans le Danube;
Nous qui n'avions le temps, quand un bel officier
Arrivait, au galop de chasse, nous crier
«L'ennemi nous attaque, il faut qu'on le repousse!»
Que de manger un blanc de corbeau, sur le pouce,
Ou vivement, avec un peu de neige, encor,
De nous faire un sorbet au sang de cheval mort;
Nous...
[...]
MARMONT, au Duc.
Vous n'allez pas ainsi l'écouter jusqu'au bout?

LE DUC
Oui, vous avez raison, pas ainsi -- mais debout!

[Il se lève.]

MARMONT
Monseigneur...

LE DUC, à Marmont.
Dans le livre aux sublimes chapitres,
Majuscules, c'est vous qui composez les titres,
Et c'est sur vous toujours que s'arrêtent les yeux!
Mais les mille petites lettres... ce sont eux!
Et vous ne seriez rien sans l'armée humble et noire
Qu'il faut pour composer une page d'histoire!
[...]

PONT DES ZOUAVES
EN CET ENDROIT LES 14, 15 ET 16 MAI 1940
LES ZOUAVES FRANCAIS DU 11 REGT
COMBATTIRENT HÉROÏQUEMENT
LES ENVAHISSEURS ALLEMANDS.

LA COMMUNE DE LIMELETTE RECONNAISSANTE.

LEOPOLD II

PRESTATION DE SERMENT
le 17 décembre 1865

«Je jure d'observer la Constitution et les lois du peuple belge, de maintenir l'indépendance nationale et l'intégrité du territoire».

DISCOURS D’INAUGURATION
Prononcé par le Roi Léopold II le 17 décembre 1865

«Messieurs,

» La Belgique a, comme moi, perdu un père. L 'hommage si unanime que la nation rend à sa mémoire répond dignement aux sentiments qu'elle lui a voués pendant sa vie. J'en suis aussi touché que reconnaissant. L'Europe elle-même n'est pas restée indifférente à ce deuil: les souverains et les princes étrangers ont voulu prendre part aux derniers honneurs que nous rendons à celui qu'ils avaient placé si haut dans leur confiance et dans leur amitié. En votre nom et au nom de la Belgique, je les en remercie.

» Succédant aujourd 'hui à un père si honoré de son vivant, si regretté après sa mort, mon premier engagement devant les élus de la nation est de suivre religieusement les préceptes et les exemples que sa sagesse m'a légués, de ne jamais oublier les devoirs qu'impose ce précieux héritage.

» Si je ne promets à la Belgique ni un grand règne comme celui qui a fondé son indépendance, ni un grand roi comme celui que nous pleurons, je lui promets du moins un roi Belge de cœur et d'âme dont la vie entière lui appartient.

» Premier Roi des Belges à qui la Belgique ait donné le jour, je me suis depuis mon enfance associé à toutes les patriotiques émotions de mon pays. Comme lui, j'ai suivi avec bonheur ce développement national qui féconde dans son sein toutes les sources de force et de prospérité. Comme lui, j'aime les grandes institutions qui garantissent l'ordre en même temps que la liberté et sont la base la plus solide du trône.»

«Dans ma pensée, l'avenir de la Belgique s'est toujours confondu avec le mien et toujours je l'ai considéré avec cette confiance qu'inspire le droit d'une nation libre, honnête et courageuse, qui veut son indépendance, qui a su la conquérir et s'en 'montrer digne, qui saura la garder.»

«Je n'ai point oublié, Messieurs, les marques de bienveillance que j'ai reçues à l'époque de ma majorité quand je suis venu m'associer à vos travaux législatifs, et quelques mois après, lors de mon mariage avec une princesse qui partage tous mes sentiments pour le pays et les inspire à nos enfants.

» Il m'a été doux de reconnaître, dans ces manifestations spontanées, l'accord unanime des populations. De mon côté, je n'ai jamais fait de distinction entre les Belges. Tous dévoués à la patrie, je les confonds dans une affection commune. Ma mission constitutionnelle me range en dehors des luttes d'opinion, laissant au pays lui-même à décider entre elles.

»Je désire vivement que toutes leurs dissidences soient toujours tempérées par cet esprit de fraternité nationale qui réunit en ce moment autour du même drapeau tous les enfants de la famille belge.

» Messieurs, pendant les trente-cinq dernières années, la Belgique a vu s'accomplir des choses qui, dans un pays de l'étendue du nôtre, ont rarement été réalisées par une seule génération. Mais l'édifice dont le Congrès a jeté les fondements peut s'élever et s'élèvera encore.

» Mon sympathique concours est assuré à tous ceux qui dévoueront à cette œuvre leur intelligence et leur travail. C'est en persistant dans cette voie d'activité et de sage progrès que la Belgique affermira de plus en plus ses institutions au-dedans et qu'au dehors elle conservera cette estime dont les puissances garantes de son indépendance et les autres Etats étrangers n'ont cessé de lui donner et lui renouvellent aujourd'hui encore le bienveillant témoignage.

» En montant sur le trône, mon père disait aux Belges: «Mon cœur ne connaît d'autre ambition que de vous voir heureux». Ces paroles, que son règne entier a justifiées, je ne crains pas de les répéter en mon nom.

» Dieu a daigné exaucer le vœu qu'elles exprimaient. Puisse-t-il encore l'entendre aujourd'hui, me rendre le digne successeur de mon père et, je le Lui demande du fond de mon âme, continuer à protéger notre chère Belgique!»

La Belgique au XIXe siècle
Par James Ensor en 1889

Ce dessin témoigne des opinions d’Ensor à propos de la situation politique de la Belgique à la fin du XIXe siècle. Dieu le père qui domine le monde et le regarde en myope, n’est autre que le Roi Léopold II. Les manifestants qui sont repoussés par l’armée, brandissent un étendard avec leurs revendications : service personnel, instruction obligatoire et suffrage universel.

Quelles sont les revendications des Belges au XXIe siècle ? Justice, sécurité, allègement des impôts ?

MINISTÈRE DES COLONIES

ARRÊTÉ

LÉOPOLD II
Roi des Belges

À tous présents et à venir Salut.

Vu l’article 4 du traité de cession conclu le 28 novembre 1907 entre la Belgique et l’Etat Indépendant du Congo approuvé par la loi du 18 octobre 1908 ;

Sur la proposition de Notre Conseil des Ministres ;

Nous avons arrêté et arrêtons :

Article unique. La Belgique assumera, à la date du 15 novembre 1908, l’exercice de son droit de souveraineté sur les territoires composant l’Etat Indépendant du Congo.

Nos Ministres de Affaires Etrangères et des Colonies sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent arrêté.

Donné à Bruxelles le 4 novembre 1908

(S) LEOPOLD

PAR LE ROI :

Le Ministre des Affaires Etrangères
(S) J. Davignon

Le Ministre des Colonies
(S) Renkin

Le Ministre de l’Intérieur et de l’Agriculture
(S) F. Schollaert

Le Ministre de la Justice
(S) Léon De Lantsheere

Le Ministre des Finances
(S) Jul. Liebaert

Le Ministre des Sciences et des Arts
(S) Baron Descamps

Le Ministre de l’Industrie et du Travail
(S) Arm. Hubert

Le Ministre des Travaux Publics
(S) Aug. Delbeke

Le Ministre des Chemins de fer, postes et télégraphes
(S) G. Hellepute

Le Ministre de la Guerre
(S) J. Hellebaut

WOESTE HELLEPUTTE DELBEKE BEERNAERT DAVIGNON en 1909.

ACTE DE DECES

«L'an mil neuf cent neuf, le 17 décembre, à cinq heures de l'après-midi, Nous, Léon de Lantsheere, Ministre de la Justice et membre de la Chambre des Représentants, ayant été informé de la mort du Roi par M. le Comte d'Oultremont, Grand-Maréchal de la Cour, nous nous sommes transportés au Pavillon des Palmiers, à Laeken, accompagné de M. G. de Rode, Secrétaire général du Ministère de la Justice, à l'effet de constater le décès de S. M. Léopold II, Roi des Belges.

» Ayant été introduits dans une salle du rez-de-chaussée, nous avons trouvé le corps de SA MAJESTE LEOPOLD-LOUIS-PHILIPPE-MARIE-VICTOR, DUC DE SAXE, PRINCE DE SAXE-COBOURG-GOTHA, né à Bruxelles, le 9 avril 1835, fils de feu Léopold Ier Georges-Chrétien-Frédéric, Roi des Belges, et de feue Louise-Marie-Thérèse-Isabelle, princesse d'Orléans; veuf de Sa Majesté Marie-Henriette-Anne, archiduchesse d'Autriche, INAUGURE COMME ROI DES BELGES après prestation de serment le 17 décembre 1865;

» MM. les docteurs Thiriar, Stienon, Depage nous ont déclaré que Sa Majesté est décédée ce matin à 2 h. 37.»

Hommage à Sa Majesté LÉOPOLD II, Roi des Belges

NOS SOLDATS

Chant Patriotique. - Paroles de Nic. Schwartz - Musique de Emile Henckels

Luxembourg

Gardez toujours, soldats de nos provinces
Le souvenir du joug de l’étranger.
Le Belge, heureux aujourd’hui sous ses Princes,
Compte sur vous à l’heure du danger.
Luxembourgeois, soldat calme, énergique,
Chez qui la force à la raison s’unit,
Pour le maintien de la libre Belgique,
Comme ton sol, sois de fer, de granit.

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

Namur

Salut, province où tout rit, tout abonde,
Vergers et champs, les fruits de la moisson !
On dit de toi, te voyant si féconde,
Namur pour tout ; et c’est avec raison.
Tu peux en paix vivre au foyer rustique.
Vois dans les forts tes fils, soldats de cœur ;
Pour le maintien de la libre Belgique,
Ils sont au poste, ô peuple laboureur !

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

Liège

Quel est ce brave à la superbe allure ?
Tout parle en lui d’audace et de vigueur.
J’entends sa voix résonner mâle et pure,
Lançant au ciel un chant venant du cœur.
C’est le Liégeois, soldat patriotique ;
Son refrain dit à nous qui frissonnons :
Pour le maintien de la libre Belgique,
On est de fer au pays des canons.

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

Hainaut

Hainaut prospère, ami de l’industrie,
Ton dur labeur est ta seule fierté :
Tu tiens au pain, donné par la patrie,
Pétri de cœur, fait par la liberté.
Bannis la crainte, ô peuple sympathique,
Ce pain jamais on ne te le prendra :
Pour le maintien de la libre Belgique,
Jusqu’au dernier de tes fils, soldats, sont là !

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

Anvers

Anvers, à toi le sceptre du commerce !
Ton port si sûr voit tous les pavillons.
Là de l’Escaut le sein mouvant les berce,
La brise en fait de flottants papillons.
Le monde entier pour toi se meut, trafique ;
Ta royauté ne craint pas le hasard,
Grâce au maintien de la libre Belgique,
Dont sont gardiens tes fils sur le rempart.

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

Limbourg

Il fut un peuple au loin dans la bruyère,
Entre les eaux de la Meuse et du Rhin.
L’amour du sol fut sa vertu guerrière
Qu’Ambiorix fit sentir au Romain.
Nous, Limbourgeois, soldats de race antique,
Vrais descendants des vaillants Eburons,
Pour le maintien de la libre Belgique,
Nous combattrons, et s’il faut, nous mourrons !

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

Flandres

Si l’étranger, dans sa haine éternelle,
Voulait encore asservir le pays,
La liberté, sainte et noble rebelle,
Dirait toujours, ainsi qu’au temps jadis :
Debout, lion du vieux sol héroïque !
Rugis au loin ton cri le plus ardent !
Pour le maintien de la libre Belgique,
Debout, Flamands d’Orient et d’Occident !

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

Brabant

Tonnez, canons ! Retentissez, fanfares !
Aux vents, drapeaux, livrez nos trois couleurs !
Ils sont partis, les oppresseurs barbares ;
Il est passé le temps de nos douleurs !
Vieux Brabançons, dont l’élan magnifique,
Fut le signal de l’affranchissement :
Pour le maintien de la libre Belgique,
Vos fils tiendront jusqu’au dernier moment.

Refrain

Que chacun s’écrie :
Tout pour la Patrie !
Patrie ! (ter)
Les anciens ont pour elle à flots versé leur sang ;
Leur sang revit en vous : Soldats, serrez les rangs !

ELISABETH DE BELGIQUE

«Elle ira loin cette petite !…»

Ces mots furent la conclusion laconique de Léopold II lorsque lui fut présentée sa future nièce. Pour mériter une appréciation aussi flatteuse de la part d’un homme sans indulgence pour les hommes et sans illusions sur les femmes, il fallait vraiment qu’Elisabeth de Wittelsbach, Duchesse en Bavière, présentât des qualités tout à fait particulières. Le vieux Roi ne s’était pas trompé.

C’est sur les bords du lac de Starnberg, au château de Possenhoven qu’elle naquit le 25 juillet 1876. Peut-être y a-t-il des êtres prédestiné et sans doute quelqu’astre favorable avait-il marqué à sa naissance la petite Elisabeth d’un signe souverain. L’atavisme et l’exemple peuvent expliquer bien des choses. Pas tout. Il est un fait, c’est que son père, le duc Charles-Théodore, c’était lui aussi, un être exceptionnel. Devenu veuf alors qu’il n’avait que 27 ans, il laissa s’égrener huit ans de sa vie en douloureux et amer souvenir d’un amour mort à 21 ans. Vint alors la duchesse Marie-Josèphe qui sut apaiser l’homme toujours ulcéré.

La guerre de 1870 l’avait beaucoup marqué et il avait vu beaucoup de morts, des soldats mutilés, des aveugles notamment. Un hasard le fit rencontrer l’oculiste russe Ivanof qui l’initia à l’ophtalmologie. Dès lors, il n’eut rien de plus pressé que de s’inscrire en qualité d’élève à la Faculté de médecine de Munich. Il voulait devenir praticien.

Mais à Munich c’était chose impossible, la Maison de Wittelsbach était régnante en Bavière. Il résolut donc de se fixer à Tegernsee.

Et voici cet homme qui eut pu vivre dans une oisiveté entrecoupée des plaisirs réservés aux grands de ce monde, créant une clinique sur sa propre cassette, en fondant une deuxième à Munich et une troisième à Méran dans le Tyrol autrichien. Bientôt le Duc eut une réputation d’oculiste de très grand talent. C’est ainsi qu’il pratiqua plus de cinq mille opérations de la cataracte, sans un seul échec.

Artiste, il trouvait dans la musique, la peinture, la sculpture, les dérivatifs indispensables à sa profession médicale. Sans doute est-ce davantage l’exemple de cette existence vouée à la fois à la charité sous toutes ses formes et à la beauté qui forma à jamais le caractère d’Elisabeth.

Très naturellement, le duc Charles-Théodore se faisait assister par ses filles, à qui il avait appris à panser les malades. Elisabeth, en particulier, se passionnait pour l’œuvre entreprise par son père et, après sa sortie de l’Institution où elle avait terminé ses études, on la vit pratiquement tous les jours en clinique.

Dédaignant les futilités chères aux adolescentes, Elisabeth acquit de sérieuses notions de médecine. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’à cette époque, Elisabeth n’avait cure des ragots de salon ni des jugements arbitraires. Avec la tranquille certitude d’accomplir son devoir, elle allait de l’avant.

Jamais il ne lui venait à l’idée qu’elle courût quelque danger, ne serait-ce que de contagion dans les hôpitaux ou les cliniques qu’elle visitait. Jamais elle n’eut un mouvement de recul devant la plaie la plus hideuse. Mais cette même grandeur d’âme lui permettait , jeune fille ou femme, de comprendre d’autres tourments, plus subtils, ceux qui broient le cœur et l’esprits des artistes.

Petite et fluette, Elisabeth le demeurera toujours. Est-ce cette gracilité qui séduisit Albert, homme de force tranquille, d’une robustesse sportive et qui, comme elle, ne se complaisait que dans les réalités de la vie ? Comment se rencontrèrent-ils ?

C’était le 4 mai 1897. La haute société parisienne avait organisé rue Jean-Goujon un «Bazar de la Charité» dans un baraquement en planches. Alors que les invités étaient réunis en très grand nombre, le feu pris pour l’on ne sait quelle raison et, en quelques minutes toute l’installation n’était qu’un brasier. Cent dix-sept cadavres furent retirés des décombres, dont celui de la duchesse d’Alençon, née Sophie-Charlotte de Bavière, sœur de l’Impératrice d’Autriche et du duc Charles-Théodore. Elisabeth et Albert se rencontrèrent aux funérailles de la duchesse d’Alençon. Tout de suite ils se sentirent attirés l’un vers l’autre. Puis ils se revirent chez la reine de Naples qui était également la tante de la Princesse et chez le duc de Vendôme, lequel avait épousé la sœur d’Albert de Belgique, Henriette.

Léopold II avait perdu son fils unique et le trône revenait donc de droit à son frère le Comte de Flandre. Mais celui-ci avait manifesté l’intention de renoncer à la couronne en faveur de son fils. Cependant, quelques années plus tôt, l’aîné, Baudouin, avait été emporté par un mal foudroyant et c’est le cadet, Albert, qui se trouvait ainsi l’héritier présomptif du trône.

Le futur Roi des Belges demanda la main de la princesse Elisabeth et le 2 octobre, le mariage avait lieu au château de Possenhofen près de Munich.

L’union civile s’accomplit dans la petite salle du trône du château, transformée pour la circonstance, en un vaste salon blanc et or.

Après la signature de l’acte de mariage par les époux et les témoins, le document fut transmis par le héraut du Royaume à l’Archevêque de Munich, le Dr F. von Stein qui célébrerait la messe nuptiale.

Si Elisabeth était heureuse, elle n’avait pas moins conscience de l’importance du rôle qu’elle devrait assurer un jour. Peut-être est-ce pour cette raison que l’émotion lui pâlissait le visage lorsqu’elle gravit le magnifique escalier en marbre jaune décoré de plantes et de fleurs menant à la chapelle. La Princesse paraissait plus frêle encore sous ses voiles, touchante à force de grâce. Elle portait une robe de satin blanc dont le corsage était orné d’une berthe en dentelle et d’un bouquet de myrtes verts. D’autres petits bouquets semblables parsemaient la traîne de Cour, longue de quatre mètres et portée par un page dont le costume blanc et bleu rappelait les couleurs de la Bavière.

A pas mesurés, comme l’exige le protocole, la future Reine des Belges avançait entre deux haies de hallebardiers, ayant à sa droite le roi Léopold II et à sa gauche, le Prince Régent Luitpold de Bavière.

Le Prince Albert suivait, en uniforme de major du régiment des Grenadiers, avec, à sa droite, sa mère, la Comtesse de Flandre vêtue d’une somptueuse robe de brocart et, à sa gauche, le roi Carol de Roumanie, en grand uniforme de général.

Cortège éblouissant dans un décor fastueux, révolu…

C’était la Cour…

L’Archevêque de Munich s’adressa à chacun des deux époux en ces termes :

«Prince, vous ceindrez un jour la couronne. Puisse alors retentir au loin votre renommée à cause de votre amour dévoué et clément, de votre bonté paternelle pour vos sujets et de votre souci incessant pour leur bien !

» Et vous, fiancée princière, puissiez-vous alors être célébrée comme la bienfaitrice des pauvres, le refuge des affligés et l’image rayonnante de la charité chrétienne en faits et en œuvres.»

Et ce fut le retour du prince Albert de Belgique accompagné de sa gracieuse épouse.

A Verviers, ce fut du délire et les Princes durent descendre du train pour répondre aux ovations de la foule.

Debout près de la portière, le Prince et la Princesse souriaient, lui, tranquille, elle, un peu intimidée par ces ovations, par ces cris mille mille fois répétés : «Vive le prince Albert ! Vive la princesse Elisabeth !»

A Bruxelles, ce fut bien autre chose encore. Ce fut un véritable triomphe. Le roi Léopold II, souriant, tendit la main à la jeune Princesse dont le visage trahissait une émotion qu’elle ne pouvait plus contenir. Et ses lèvres tremblaient imperceptiblement lorsque le bourgmestre de la capitale, M. Emile De Mot, salua le couple princier au nom des administrations communales de l’agglomération bruxelloise.

Le Roi offrit alors le bras à sa nièce et ce fut la sortie de la gare sur la place Rogier noire de monde. Ce fut comme un roulement de tonnerre ! De partout fusaient des cris de joie, des applaudissements frénétiques qui, à aucun moment ne s’interrompraient tout au long du parcours, qui mènerait le couple princier, le Roi et toute la Famille Royale au palais de la rue de la Régence où ils durent, avec le Comte et la Comtesse de Flandre, apparaître plusieurs fois au balcon pour répondre au interminables ovations.

Le lendemain de cette entré triomphale serait consacré à la visite de l’hôtel de ville et à la revue des écoles et des sociétés bruxelloises.

Lorsque le Prince et la Princesse parurent au balcon, des milliers d’enfants agitaient sur la place une forêt de petits drapeaux tricolores et bavarois en chantant la «Brabançonne».

Si Elisabeth, durant la première année de son mariage, parut très souvent en public, ce fut toujours avec la plus grande simplicité.

Tantôt on la rencontrait se promenant paisiblement aux côtés de son époux dans les rues ou les avenues, tantôt elle assurait par sa présence, le succès de fêtes de charité. Elle faisait aussi du cheval, car elle était excellente cavalière. Toutefois, elle ne put se livrer longtemps à son sport favori durant cette deuxième année du siècle, car, bientôt, elle sut qu’elle attendait un heureux événement.

Le 3 novembre 1901 fut jour de fête au palais de la rue de la Science où naissait Léopold qui, plus tard, deviendrait quatrième roi des Belges. Un peu moins de deux ans plus tard, le 10 octobre 1903, c’était le prince Charles qui voyait le jour, tandis que, le 4 août 1906, une fille, Marie-José, venait au monde à Ostende.

Cette vie paisible allait cependant bientôt prendre fin. Le 17 décembre 1909, Léopold II mourait d’une affection abdominale.

Le 23 du même mois, Albert devenait roi des Belges et Elisabeth entrait de plain-pied dans le domaine des reines. La solide formation humaniste, intellectuelle et culturelle qu’elle avait reçue allait faire d’elle une souveraine inégalable. Léopold II avait eu raison. Elle irait loin. Jusqu’au fond des cœurs des plus humbles de ses sujets, tout comme elle trouverait les attitudes qui désarment les moins bien intentionnés. Dans un monde où, les uns après les autres, les trônes tomberaient dans le monde, elle maintiendrait celui de Belgique.

Il y a en Belgique une Reine petite de taille et d'âme grande qui sût toujours mettre sa modestie de Reine à dire: "Je ne suis qu'une artiste" et sa modestie d'artiste à dire: "Je ne suis qu'une Reine".

Jean Cocteau
de l'Académie Française

INTRODUCTION TO KING ALBERT'S BOOK
By Hall Gaine
Christmas 1914

THE immediate object of this Book is to offer, in the names and by the pens of a large group of the representative men and women of the civilised countries, a tribute of admiration to Belgium, on the heroic and ever-memorable share she has taken in the war which now convulses Europe, and at the same time to invoke the world's sympathy, its help and its prayers for the gallant little nation in the vast sorrow of its present condition.

With nothing to gain by taking up arms, with no territory to annex, no commerce to capture, no injury to revenge, having neither part nor lot in any European quarrel, desiring only to be left alone that she might pursue the arts of peace, Belgium found herself suddenly confronted by the choice of allowing her soil to be invaded by a powerful neighbour on his way to destroy his enemy, or of protecting her independence as a separate nation by the whole strength of her armed resistance.

Although one of the smallest and least aggressive of the countries of Europe, the daughter among the nations, Belgium, true to her lofty political idealism, chose the latter part, not counting the cost, only realising that a ruthless crime was about to be committed, and drawing the sword, after the sword had been drawn against her, in defence of her honour, her national integrity, her right to be mistress in her own house, her historic heritage of freedom and all the spiritual traditions of her race. In doing this during the past fateful months, Belgium has fought not only her own battle but also the battle of France, the battle of Great Britain and the battle of Freedom. By her brave stand against incalculable odds she has added a new and inspiring chapter to the heroic annals of humanity and perhaps lifted to a higher level the future destinies of man.

But she has paid a terrible penalty. Her beautiful country has been laid waste. Her harvests, which were ripe for the gathering, have been trodden into the earth. Her villages have been given up to the flames. Her cities have been made to resound with the screams of shell and the cries of slaughter. Her historic monuments, venerable with the associations of learning and piety, have been razed to the ground. And, above all, Death has taken an awful toll of her manhood on the field of battle, while multitudes of her surviving people, the very young, the very old, the very weak, the very poor, all innocent and all helpless, have been driven forth on the verge of winter from their smoking, blackened and outraged homes into an exile in foreign lands from which there can hardly be any hope that many of them will return.

No more woeful and terrible spectacle of a country in utter desolation ever came from earthquake, eruption or other convulsion of Nature in her wrath than has been produced in Belgium by the hand of man. A complete nation is in ruin. A whole country is in ashes. An entire people are destitute, homeless and on the roads. A little Kingdom, dedicated to liberty, has kept the pledge and died for it.

As Belgium has thus become the martyr nation of the war, however great the sacrifices which the other Allies have had to make, it seems reasonable to expect that in view of her limitless and undeserved sufferings, the deepest feelings of human nature will be stirred to an infinite pity, and that in the present dark hour of her utmost need the world will see that it is not more important that the material succour of food and clothing should be found for the bodies of her stricken and impoverished people than that comfort and solace should be offered to their souls. Therefore this book is published as the united voice of the World's gratitude to Belgium for her unexampled heroism, and of its sympathy with her in the heavy price she has to pay in discharging the sublime duty which Destiny laid upon her of fighting by our side for the liberties of all.

Especially it has been intended that the present volume should address itself, as far as possible, to the King of the Belgians, who, from his first moving appeal to Great Britain and to France, to help him to resist the gigantic and unconscionable ambition which was preparing to stalk over his country, down to the last agony of his dauntless stand behind the for tresses of Antwerp, has by his matchless courage in Council and on the battlefield, where he makes common cause with his soldiers in the trenches, displayed some of the noblest energies of the human character, and sustained those highest traditions of Kingship which, among free nations, unite the people to the throne.

Such is the aim and character of this book, and if so high an object has been in some measure achieved, it has only been by the ready and whole-hearted co-operation of the leaders of thought, of art and of action who are prominent throughout the world for their love of justice and freedom. There are many thousands of such leaders in every country, fully capable of interpreting, each in his or her own way, the immense emotion which now fills the heart of humanity at the spectacle of Belgium's sorrows, but the exigencies of space in a single volume have made it necessary to limit the number of contributors whom it has been possible to invite to join in this world's tribute to the martyr nation.

With the utmost care, and not without many misgivings about illustrious names which well merited inclusion, a list was compiled of princes, statesmen, churchmen, authors, artists, and composers of all civilised countries, except the countries of our enemies, in the hope that each in his own medium, whether of word or picture or song or story, might be impelled, according as the spirit moved him, to present his view of Belgium's sacrifice and of the measureless calamity which has befallen her.

The result is now offered to the public in the present volume, which it is hoped to publish in various editions, and as nearly as possible simultaneously, in most of the countries of the authors, especially France, Russia, Italy, and America, thus making it a work of international interest, calculated to be a moral inspiration to posterity and to take its place as one of the luminous pages in the world's history.

Never before, perhaps, have so many illustrious names been inscribed within the covers of a single volume, but KING ALBERT' S BOOK has a significance which even transcends its distinction. Out of the storm of battle a great new spirit of brotherhood has been born into the world, calling together the scattered and divided parts of it, uniting them in a single mind, a single sentiment, a single purpose, so that here, in love of justice and in hatred of oppression, speaking in many voices and many tongues but from only one soul, which enkindles the earth as with a holy fire, men and women of all civilised countries have drawn closer and clasped hands.

Nor is that everything. In sight and witness of this World-league of some of the spiritual leaders of mankind, who labour for and live by peace, and in memory of this Covenant of princes, statesmen, soldiers, sailors, teachers, preachers, and artists of the great and historic races, signed on the desecrated altar of a little nation's liberty, is it too much to hope that the peoples they represent may never again, from any narrower or less noble aims, draw the sword against each other as long as the world may last?

So be it. God grant so may it be. But meantime it is perhaps enough that as sons and daughters of many lands, sufferers ourselves by a fratricidal war, we should bring to Belgium, in this solemn moment when her heart is cruelly and almost incurably wounded, the expression of our love, our sympathy, and our unbounded admiration, as the spiritual message of the civilised world to the suffering millions of her people, in the midst of the ruin and desolation which still lie heavy upon her even at this sacred Season when the holiest aspirations of humanity are towards peace on earth and good-will to men.

Belgians, in the person of your heroic young Sovereign we salute you. The statesmanship, the learning, the wisdom, the genius of the world lay their tribute at your feet.

THANKS
By Maurice Maeterlinck
To the Editor of KING ALBERT's BOOK
Christmas 1914

Il ne m'appartient pas de célébrer en ce moment la gloire de ma petite patrie. Vous l'avez fait du reste de si admirable façon, avec une éloquence si précise et si belle qu'il n'y a rien à ajouter à votre Introduction. Vos paroles m'ont ému jusqu'aux larmes. Elles nous apportent le plus haut témoignage que l'on puisse espérer dans l'histoire parce qu'elles sont prononcées au nom d'un grand peuple pour qui l'honneur, la loyauté, la fidélité aux engagements solennels, le courage silencieux, tenace et invincible, furent toujours les lois mêmes de la vie. De tout mon cœur, merci!

PATRIOTISME ET ENDURANCE

Par le Cardinal MERCIER, Archevêque de Malines. Noël 1914.

MES BIEN CHERS FRÈRES,

Il ne me serait pas possible de vous dire, à quel point votre souvenir m'est demeuré présent, durant ces mois de souffrance et de deuil, que nous venons de traverser. J'ai dû brusquement vous quitter, le 20 août, pour aller rendre au Pape vénéré et aimé, que nous venions de perdre, mes derniers devoirs, et pour m'acquitter d'une obligation de conscience à laquelle je ne pouvais me soustraire, l'élection du successeur de Pie X, le Pontife qui régit aujourd'hui l'Eglise, sous le nom, plein de promesses et d'espérances, de Benoît XV.

A Rome même j'appris, coup sur coup, la destruction partielle de la collégiale de Louvain, l'incendie de la bibliothèque et d'installations scientifiques de notre grande Université, la dévastation de la ville, les fusillades, les tortures infligées à des femmes, à des enfants, à des hommes sans défense. Et tandis que je frémissais encore de ces horreurs, les agences télégraphiques nous annonçaient le bombardement de notre admirable église métropolitaine, de l'église de Notre-Dame au delà la Dyle, du palais épiscopal, et de quartiers considérables de notre chère cité malinoise.

Eloigné de mon diocèse, sans moyen de communication avec vous, je dus concentrer en mon âme ma douleur et la porter, avec votre souvenir qui ne me quittait point, au pied du crucifix. Et cette pensée soutint mon courage et me fut une lumière: une catastrophe s'abat sur le monde, me disais-je, et notre chère petite Belgique, si fidèle à Dieu, pourtant, dans la masse de sa population, si fière dans son patriotisme, si grande dans son Roi et dans son gouvernement, en est la première victime. Elle saigne, ses fils tombent, par milliers, dans nos forts, sur les champs de bataille, pour défendre son droit et l'intégrité de son territoire; bientôt, il n'y aura plus sur le sol belge une seule famille qui ne soit en deuil; pourquoi, ô mon Dieu, toutes ces douleurs? Seigneur, Seigneur, nous avez-vous abandonnés?

Alors, je regardai mon crucifix; je contemplai Jésus, le doux et humble agneau de Dieu, meurtri, enveloppé de son sang comme d'une tunique, et je crus entendre tomber de ses lèvres les paroles que le Psalmiste profère en son nom: «Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné? Pourquoi refusez-vous de me secourir et d'entendre mes plaintes?» (Ps. XXI, 1.) Et le murmure s'arrêta sur mes lèvres, et je pensai à ce qu'avait dit dans son Evangile Notre divin Sauveur: «Il ne faut pas que le serviteur soit mieux traité que son Maître.» (Matth. X, 24.) Le chrétien est le disciple d'un Dieu qui s'est fait homme pour souffrir et pour mourir. Se raidir contre la douleur, se révolter contre la Providence, parce qu'elle permet la souffrance et le deuil, c'est oublier ses origines, l'école où l'on a été formé, l'exemplaire que chacun de nous porte incrusté dans son nom de chrétien, qu'il honore à son foyer, contemple sur l'autel devant lequel il prie, et souhaite sur la tombe où il doit dormir son dernier sommeil.

Mes très chers Frères, nous reviendrons tout à l'heure sur la loi providentielle de la souffrance, mais vous ne nierez pas que, s'il a plu à un Dieu fait homme, saint, innocent, sans souillure, de souffrir et de mourir pour nous, pécheurs, coupables, criminels peut-être, il nous sied mal de nous plaindre, quoi que nous ayons à endurer: la vérité est qu'aucune catastrophe au monde, tant qu'elle n'atteint que des créatures, n'est comparable à celle, que nos péchés ont provoquée et dont un Dieu voulut être Lui- même, au Calvaire, l'innocente victime.

Cette vérité fondamentale rappelée, je me sens mieux à l'aise, pour vous inviter à regarder en face la situation qui nous est faite à tous, et pour vous parler, sans ambages, de nos devoirs aussi bien que de nos espérances.

Ces devoirs, je les résume en deux mots: Patriotisme et endurance.

I PATRIOTISME

Nos très chers Frères, j'aspirais à me faire l'interprète de la reconnaissance qui nous anime, vous et nous, que l'âge, la situation sociale, les circonstances font bénéficier de l'héroïsme d'autrui sans nous y associer d'une façon immédiate et positive. Lorsque, dès mon retour de Rome au Havre, déjà, j'allai saluer nos blessés belges, français ou anglais; lorsque, plus tard, à Malines, à Louvain, à Anvers, il me fut donné de serrer la main à ces braves, qui portaient dans leurs tissus une balle ou, au front, une blessure, pour avoir marché à l'assaut de l'ennemi ou soutenu le choc de ses attaques, il me venait spontanément aux lèvres pour eux une parole de reconnaissance émue: Mes vaillants amis, leur disais-je, c'est pour nous, pour chacun de nous, pour moi, que vous exposez votre vie et que vous souffrez. J'ai besoin de vous dire mon respect, ma gratitude, et de vous assurer que le pays entier sait ce qu'il vous doit.

C'est que, en effet, nos soldats sont nos sauveurs. Une première fois, à Liège, ils ont sauvé la France; une seconde fois, en Flandre, ils ont arrêté la marche de l'ennemi vers Calais: la France et l'Angleterre ne l'ignorent point, et la Belgique apparaît aujourd'hui devant elles, et devant le monde entier, d'ailleurs, comme une terre de héros. Jamais, de ma vie, je ne me suis senti aussi fier d'être Belge que, lorsque, traversant les gares françaises, faisant halte à Paris, visitant Londres, je fus partout le témoin de l'admiration enthousiaste de nos alliés pour l'héroïsme de notre armée. Notre Roi est, dans l'estime de tous, au sommet de l'échelle morale; il est seul, sans doute, à l'ignorer, tandis que, pareil au plus simple de ses soldats, il parcourt les tranchées, et encourage de la sérénité de son sourire, ceux à qui il demande de ne point douter de la patrie.

Le premier devoir de tout citoyen belge, à l'heure présente, est la reconnaissance envers notre armée.

Si un homme vous avait sauvé d'un naufrage ou d'un incendie, vous vous jugeriez lié envers lui par une dette d'éternelle gratitude.

Ce n'est pas un homme, ce sont deux cent cinquante mille hommes qui se battent, souffrent, tombent pour vous, afin que vous demeuriez libres, afin que la Belgique garde son indépendance, sa dynastie, son union patriotique et que, après les péripéties qui se déroulent sur les champs de bataille, elle se relève plus noble, plus fière, plus pure, plus glorieuse que jamais. . Priez tous les jours, mes Frères, pour ces deux cent cinquante mille hommes et pour les chefs qui les conduisent à la victoire; priez pour nos frères d'armes; priez pour ceux qui sont tombés; priez pour ceux qui luttent toujours; priez pour les recrues qui se préparent aux luttes de demain.

En votre nom, je leur envoie d'ici le salut de notre confraternelle sympathie et l'assurance que, non seulement nous prions pour le succès de leurs armes et pour le salut éternel de leurs âmes, mais que nous acceptons, à leur intention, tout ce qu'il y a de pénible, physiquement et moralement, pour nous, dans notre oppression momentanée, tout ce que l'avenir peut nous réserver encore d'humiliations temporaires, d'angoisses ou de douleurs.

Au jour de la victoire finale, nous serons tous à l'honneur: il est juste qu'aujourd'hui nous soyons tous à la peine.

D'après des échos que j'ai pu recueillir, il semble que, de certains milieux où la population a le moins souffert, il s'élève parfois, contre Dieu, des paroles amères qui, si elles étaient froidement calculées, seraient presque blasphématoires.

Oh! je ne comprends que trop les révoltes de l'instinct naturel contre les maux qui se sont abattus sur la catholique Belgique: le cri spontané de la conscience est toujours, que le succès couronne sur l'heure la vertu, et que l'injustice soit aussitôt réprimée. Mais les voies de Dieu ne sont point les nôtres, dit l'Ecriture; la Providence donne libre cours, durant l'intervalle que sa sagesse a mesuré, au jeu des passions humaines et à l'entrechoquement des intérêts. Dieu est patient, parce qu'il est éternel. Le dernier mot, celui de la miséricorde, est pour ceux qui ont foi à l'amour. «Pourquoi es-tu triste, ô mon âme, et pourquoi te troubles-tu?» Quare tristis es anima mea et quare conturbas me? «Espère en Dieu; bénis-Le quand même, n'est-il pas ton Sauveur et ton Dieu?» Spera in Deo quoniam adhuc confitebor illi, salutare vultus mei et Deus meus. (Ps. XVII, 5.)

Lorsque le saint homme Job, que Dieu voulait offrir en modèle de constance aux générations futures, avait été, coup sur coup, privé par Satan, de ses biens, de ses enfants, de sa santé, ses amis défilaient devant lui en le narguant, et l'incitaient à la révolte; sa femme lui suggérait des pensées de blasphème et d'imprécation: «Que gagnes-tu à demeurer intègre, lui disait-elle; maudis donc Dieu et meurs.» Dixit autem illi uxor sua: adhuc tu permanes in simplicitate tua! Benedic Deo et morere. (Job Il, 9.) Seul l'homme de Dieu était inébranlable dans sa foi. «Tu tiens le langage d'une insensée, répliquait-il; lorsque Dieu nous comblait de ses dons, nous les recevions de sa main; pourquoi refuserions-nous aujourd'hui les maux dont il nous afflige? Il est le maître. Il donne, il rcprend. Que son saint Nom soit toujours béni!» Dominus dedit, Dominus abstulit; sicut Domino placuit ita factum est. Sit nomen Domini benedictum! (Job Il, 10; 1, 21.)

Or l'expérience a démontré que le saint homme avait raison: il plut au Seigneur de récompenser, dès ici-bas, son serviteur fidèle; Il lui rendit, au double, tout ce qui lui avait été repris et, par égard pour lui, fit grâce à ses amis. (XLI, 8-10.)

Moins que personne, peut-être, j'ignore ce qu'a souffert notre pauvre pays. Et aucun Belge ne doutera, j'espère, du retentissement, en mon âme de citoyen et d'évêque, de toutes ces douleurs. Ces quatre derniers mois me semblent avoir duré un siècle.

Par milliers, nos braves ont été fauchés; les épouses, les mères pleurent des absents qu'elles ne reverront plus; les foyers se vident, la misère s'étend, l'angoisse est poignante. A Malines, à Anvers, j'ai connu la population de deux grandes cités livrées, l'une durant six heures, l'autre durant trente-quatre heures d'un bombardement continu, aux affres de la mort. J'ai parcouru la plupart des régions les plus dévastées du diocèse: Duffel, Lierre, Berlaer-Saint-Rombaut, Konings-Hoyckt; Mortsel, Waelhem, Muysen, Wavre-Sainte-Catherine, Wavre-Notre-Dame; Sempst, Weerde, Eppeghem; Hofstade, Elewyt; Rymenam, Boort-Meerbeek, Wespelaer, Haecht, Werchter-Wackerzeel, Rotselaer, Tremeloo; Louvain et les agglomérations suburbaines, Blauwput, Kessel-Loo, Boven-Loo, Linden, Herent, Thildonck, Bueken, Relst; Aerschot, Wesemael, Hersselt; Diest, Schaffen, Molenstede, Rillaer, Gelrode, et ce que j'y ai vu de ruines et de cendres dépasse tout ce que, malgré mes appréhensions pourtant très vives, j'avais pu imaginer. Certaines parties de mon diocèse, que je n'ai pas encore trouvé le temps de revoir, Haekendover, Roosbeek, Bautersem, Budingen, Neerlinter; Ottignies, Mousty, Wavre; Beyghem, Capelle-au-Bois, Humbeek, Nieuwenrode, Liezele, Londerzeel; Heyndonck, Mariekerke, Weert, Blaesvelt, ont subi les mêmes ravages. Eglises, écoles, asiles, hôpitaux, couvents, en nombre considérable, sont hors d'usage ou en ruines. Des villages entiers ont quasi disparu. A Werchter-Wackerzeel, par exemple, sur 380 foyers, il en reste 130; à Tremeloo, les deux tiers de la commune sont rasés; à Bueken, sur 100 maisons, il en reste 20; à Schaffen, d'une agglomération de 200 habitants, 189 ont disparu, il en reste Il. A Louvain, le tiers de l'étendue bâtie de la cité est détruit; 1.074 immeubles ont disparu; sur le territoire de la ville et des communes suburbaines, Kessel-Loo, Herent et Héverlé, réunies, il y a un total de 1.823 immeubles incendiés.

Dans cette chère cité louvaniste, dont je ne parviens pas à détacher mes souvenirs, la superbe collégiale de Saint-Pierre ne recouvrera plus son ancienne splendeur; l'antique collège Saint-Ives; l'école des beaux-arts de la ville; l'école commerciale et consulaire de l'Université, les halles séculaires, notre riche bibliothèque, avec ses collections, ses incunables, ses manuscrits inédits, ses archives; la galerie de ses gloires depuis les premiers jours de sa fondation, portraits des recteurs, des chanceliers, des professeurs illustres, au spectacle desquels, maîtres et élèves d'aujour-d'hui s'imprégnaient de noblesse traditionnelle et s'animaient au travail: toute cette accumulation de richesses intellectuelles, historiques, artistiques, fruit de cinq siècles de labeur, tout est anéanti. De nombreuses paroisses furent privées de leur pasteur.

J'entends encore l'accent douloureux d'un vieillard à qui je demandais s'il avait eu la Messe, le dimanche, dans son église ébréchée; voilà deux mois, me répondit-il, que nous n'avons plus vu de prêtre. Le curé et le vicaire étaient dans un camp de concentration à Munsterlager, non loin de Hanovre.

Des milliers de citoyens belges ont été ainsi déportés dans les prisons d'Allemagne, à Munsterlager, à Celle, à Magdebourg. Munsterlager seul a compté 3.100 prisonniers civils. L'histoire dira les tortures physiques et morales de leur long calvaire.

Des centaines d'innocents furent fusillés; je ne possède pas au complet ce sinistre nécrologe, mais je sais qu'il y en-eut, notamment, 91 à Aerschot et que là, sous la menace de la mort, leurs concitoyens furent contraints de creuser les fosses de sépulture. Dans l'agglomération de Louvain et des communes limitrophes, 176 personnes, hommes et femmes, vieillards et nourrissons encore à la mamelle, riches et pauvres, valides et malades, furent fusillées ou brûlées.

Dans mon diocèse seul, je sais que treize prêtres ou religieux furent mis à mort. (Leurs confrères en religion ou dans le sacerdoce seront soucieux de connaître leurs noms; les voici: Dupierreux, de la Compagnie de Jésus; les Frères Sébastien et Allard, de la Congrégation des Joséphites, le Frère Candide, de la Congrégation des Frères de la Miséricorde; le Père Maximin, capucin, et le Père Vincent, conventuel; Lombaerts, curé à Boven-Loo; Goris, curé à Autgaerden; l'abbé Carette, professeur au Collège Episcopal de Louvain; De Clerck, curé à Bueken; Dergent, curé à Gelrode; Wouters Jean, curé au Pont-Brûlé. Diverses circonstances nous induisent à penser que le curé de Hérent, Van Bladel, vénérable vieillard de soixante et onze ans, a aussi été tué; cependant, jusqu'à cette heure, son cadavre n'a pas été retrouvé.) L'un d'eux, le curé de Gelrode est, selon toute vraisemblance, tombé en martyr. J'ai fait un pèlerinage à sa tombe et, entouré des ouailles qu'il paissait, hier encore, avec le zèle d'un apôtre, je lui ai demandé de garder du haut du ciel, sa paroisse, le diocèse, la patrie.

Nous ne pouvons ni compter nos morts, ni mesurer l'étendue de nos ruines. Que serait-ce, si nous portions nos pas vers les régions de Liège, de Namur, d'Andenne, de Dinant; de Tamines, de Charleroi; vers Virton, la Semois, tout le Luxembourg; vers Termonde, Dixmude, nos deux Flandres ? (Je disais qu'il y a eu treize ecclésiastiques fusillés dans le diocèse de Malines. Il y en a, à ma connaissance actuelle, plus de trente dans les diocèses de Namur, de Tournai, et de Liège: Schlögel, curé d'Hastière; Gille, curé de Couvin; Pieret, vicaire à Etalle; Alexandre, curé à Mussy-la-Ville; Maréchal, séminariste de Maissin; le R. P. Gillet, bénédictin de Maredsous; le R. P. Nicolas, prémontré de l'abbaye de Leffe; deux Frères de la même abbaye; nn Frère de la Congrégation des Oblats; Poskin, curé de Surice; Hoùet, curé des Alloux; Georges, curé de Tintigny; Glouden, curé de Latour; Zenden, curé retraité à Latour; l'abbé Jacques; Druet, curé d'Acoz; Pollart, curé de Roselies; Labeye, curé de Blegny-Trembleur; Thielen, curé de Haccourt; Janssen, curé d'Heure-le-Romain; Chabot, curé de Forêt; Dossogne, curé de Hockay; Rensonnet, vicaire d'Olne; Bilande, aumônier des sourds-muets, à Bouge; l'abbé Docq, etc. )

Là même, où les vies sont sauves et les édifices matériels intacts, que de souffrances cachées! Les familles, hier encore dans l'aisance, sont dans la gêne; le commerce est arrêté; l'activité des métiers est suspendue; l'industrie chôme; des milliers et des milliers d'ouvriers sont sans travail; les ouvrières, les filles de magasin, d'humbles servantes sont privées de leur gagne-pain; et ces pauvres âmes se retournent, fiévreuses, sur leur lit de douleur, et vous demandent: à quand la fin?

Nous ne pouvons que répondre: C'est le secret de Dieu. -Oui, mes bien chers Frères, c'est le secret de Dieu. Il est le Maître des événements et le Souverain régulateur des sociétés. Domini est terra et plenitudo ejus; orbis terrarum et universi qui habitant in eo. «La terre est à Vous, Seigneur, avec tout ce qu'elle contient; à Vous notre globe et tous ceux qui l'habitent.» (Ps. XXIII, 1.) La première relation qui surgit entre la créature et son Créateur est celle d'une dépendance absolue de la première au second. L'être est dépendant; la nature, les facultés, les actes, les œuvres le sont. A chaque instant qui s'écoule, la dépendance se renouvelle, parce que, sans le soutien du Tout-Puissant, l'exis tence de la première seconde s'évanouirait à la suivante. L'adoration, c'est-à-dire la reconnaissance de la souveraineté divine, n'est pas l'objet d'un acte fugitif, elle doit être l'état permanent de la créature consciente de ses origines. A chaque page de nos Ecritures, Jehovah affirme son souverain domaine. Toute l'économie de la Loi ancienne, toute l'histoire du peuple élu tendent au même objectif: maintenir Jehovah sur son trône, abattre les idoles. «Je suis le premier et le dernier, dit-il dans Isaïe, et, hors moi, il n'est point de Dieu. Qui est comme moi? Qu'il s'avance et qu'il parle!... Existe-t-il un refuge autre que moi?.. Je forme la lumière et je crée les ténèbres; je fais la paix et je crée le malheur : c'est moi Jehovah qui fais tout cela... Malheur à qui dispute avec Celui qui le forme, lui, tesson parmi les tessons de terre! L'argile dit-elle au potier: Que fais-tu? et l'œuvre à l'ouvrier: Tu es maladroit!... Parlez, exposez, oui délibérez. Mais, sachez-le, de Dieu juste et sauveur il n'en est point que moi.» (Isaïe XLV, 4 et suiv.)

Ah! raison superbe, tu croyais pouvoir te passer de Dieu! Tu ricanais quand, par son Christ et par son Eglise, il prononçait les paroles graves de l'expiation et de la pénitence. Enivré de tes succès éphémères, homme frivole, repu d'or et de plaisir, tu te suffisais insolemment à toi-même! Et le vrai Dieu était relégué dans l'oubli, méconnu, blasphémé, avec éclat, parfois, par ceux que leur situation chargeait de donner à autrui l'exemple du respect de l'ordre et de ses assises. L'anarchie pénétrait les couches inférieures; les consciences droites se sentaient tentées de scandale: Jusques à quand, pensaient-elles, jusques à quand, Seigneur, tolérerez-vous l'orgueil de l'iniquité? Où êtes-vous, Maître, et donnerez-vous donc finalement raison à l'impie qui proclame que vous vous désintéressez de votre œuvre?

Un coup de foudre, et voici tous les calculs humains bouleversés. L'Europe entière tremble sur un volcan.

La crainte du Seigneur est le principe de la sagesse.

Les émotions se pressent dans les âmes, mais il en est une qui domine, c'est le sentiment que Dieu se révèle le Maître.

Les nations qui, les premières, ont donné l'assaut, et celles qui se défendent, se sentent également dans la main de Celui, sans qui rien ne se fait, rien n'aboutit.

Des hommes déshabitués depuis longtemps de la prière se retournent vers Dieu. Dans l'armée, dans le monde civil, en public, dans le secret des consciences, on prie. Et la prière n'est pas, cette fois, une parole, apprise par cœur, qui effleure les lèvres, elle monte du fond de l'âme et se présente devant la Majesté Souveraine sous la forme sublime de l'offrande de la vie. C'est tout l'être qui s'immole à Dieu. C'est l'adoration, l'accomplissement du premier et fondamental précepte de l'ordre moral et religieux: Dominum Deum tuum adorabis et illi soli servies (Deut. Matth. IV. 10), «Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu ne te mettras qu'à son service.»

Même ceux qui murmurent et ne se sentent pas le courage de courber le front sous la main qui nous frappe et nous sauve, reconnaissent implicitement que Dieu est le Maître suprême, car ils ne le blasphèment que parce qu'il se hâte trop peu, à leur gré, de s'accommoder à leurs désirs.

Quant à nous, mes Frères, nous voulons sincèrement L'adorer. Nous ne voyons pas encore, dans tout son éclat, la révélation de sa sagesse, mais notre foi Lui fait crédit. Nous nous humilions devant sa justice et nous espérons en sa miséricorde. Avec le saint homme Tobie, nous reconnaissons qu'Il nous châtie, parce que nous avons péché, mais nous savons qu'Il nous sauvera, parce qu'Il est miséricordieux. Ipse castigavit nos propter iniquitates nostras : et ipse salvabit nos propter misericobrdiam suam. (Tobie XIII, 6.)

Il serait cruel d'appuyer sur nos torts, au moment même où nous les payons si durement et avec tant de grandeur d'âme. Mais n'avouerons-nous pas que nous avions quelque chose à expier? A qui Il a beaucoup donné, Dieu a le droit de beaucoup redemander: Omni autem cui multum datum est, multum quœretur ab eo. (Luc XII, 48.) Or, le niveau moral et religieux du pays montait-il de pair avec sa prospérité économique? Le repos dominical, l'assistance à la Messe du dimanche, le respect du mariage, les lois de la modestie, qu'en faisiez-vous? Que devenaient, même dans les familles chrétiennes, la simplicité de nos pères, l'esprit de pénitence, la confiance dans l'autorité? Et nous, religieux, prêtres, évêque, nous surtout, dont la sublime mission est de traduire dans notre vie, plus encore que dans nos discours, l'évangile du Christ, nous donnions-nous assez le droit de redire à notre peuple la parole de l'apôtre des nations: «Copiez votre vie sur la mienne, comme la mienne est copiée sur celle du Christ. Imitatores mei estote, sicut et ego Christi?» (1 Cor. XI, 1.) Nous travaillions, oui; nous priions, oui encore; mais c'est trop peu. Nous sommes, par devoir d'état, les expiateurs publics des péchés du monde. Or, qu'est-ce qui dominait dans notre vie, le bien-être bourgeois, ou l'expiation?

Oh! oui, tous nous tombions, à nos heures, sous le reproche, que faisait d'Eternel à son peuple élu, après la sortie d'Egypte : «J'avais engraissé mon peuple et il a regimbé; mes fils ont été infidèles, ils m'ont traité comme si je n'étais pas leur Dieu; je les traiterai comme s'ils n'étaient plus mon peuple.» Incrassatus est dilectus et recalcitravit... Infideles filii; ipsi me provocaverunt in eo, qui non erat Deus, et ego provocabo eos in eo, qui non est populus.

«Je les sauverai, cependant, car je ne veux pas que leurs adversaires se méprennent et disent: Notre main a été puissante; c'est nous, et ce n'est pas l'Eternel qui a fait toutes ces choses.» Sed propter iram inimicorum distuli, ne forte superbirent hostes eorum et dicerent : Manus nostra excelsa, et non Dominus, fecit hœc omnia. «Sachez donc que c'est moi qui suis Dieu, et qu'il n'y a point de Dieu autre que moi; je fais vivre et je fais mourir, je blesse et je guéris.» Videte quod ego sim solus et non sit alius Deus prœter me. Ego occidam, et ego vivere faciam : percutiam et ego sanabo. (Deuter., Canticum Moysis XXXII, 15 et seq.)

Dieu sauvera la Belgique, mes Frères, vous n'en pouvez point douter. Disons mieux: Il la sauve.

En vérité, à travers les lueurs des incendies et les vapeurs du sang, n'entrevoyez-vous pas, déjà, les témoignages de son amour?

Est-il un patriote qui ne sente que la Belgique a grandi? Qui de nous aurait le courage de déchirer la dernière page de notre histoire? Qui ne contemple avec fierté le rayonnement de la gloire de la patrie meurtrie? Tandis que, dans la douleur, elle enfante l'héroïsme, notre mère verse de l'énergie dans le sang de ses fils.

Nous avions besoin, avouons-le, d'une leçon de patriotisme. Des Belges, en grand nombre, usaient leurs forces et gaspillaient leur temps en querelles stériles, de classes, de races, de passions personnelles.

Mais lorsque, le 2 août, une puissance étrangère, confiante dans sa force et oublieuse de la foi des traités, osa menacer notre indépendance, tous les Belges, sans distinction ni de parti, ni de condition, ni d'origine, se levèrent comme un seul homme, serrés contre leur Roi et leur Gouvernement, pour dire à l'envahisseur: tu ne passeras pas. Du coup, nous voici résolument conscients de notre patriotisme: c'est qu'il y a, en chacun de nous, un sentiment plus profond que l'intérêt personnel, que les liens du sang et la poussée des partis, c'est le besoin et, par suite, la volonté de se dévouer à l'intérêt général, à ce que Rome appelait «la chose publique», Res publica : ce sentiment, c'est le Patriotisme.

La Patrie n'est pas qu'une agglomération d'individus ou de familles habitant le même sol, échangeant entre elles des relations plus ou moins étroites de voisinage ou d'affaires, remémorant le mêmes souvenirs, heureux ou pénibles: non, elle est une association d'âmes, au service d'une organisation sociale qu'il faut, à tout prix, fût-ce au prix de son sang, sauvegarder et défendre, sous la direction de celui ou de ceux qui président à ses destinées.

Et c'est parce qu'ils ont une même âme, que les compatriotes vivent, par leurs traditions, d'une même vie dans le passé; par leurs communes aspirations et leurs communes espérances, d'un même prolongement de vie dans l'avenir.

Le patriotisme, principe interne d'unité et d'ordre, liaison organique des membres d'une même patrie, était regardé par l'élite des penseurs de la Grèce et de la Rome antiques, comme la plus haute des vertus naturelles. Aristote, le prince des philosophes païens, estimait que le désintéressement au service de la cité, c'est. à-dire, de l'Etat, est l'idéal terrestre par excellence.

La religion du Christ fait du patriotisme une loi: il n'y a point de parfait chrétien, qui ne soit un parfait patriote.

Elle surélève l'idéal de la raison païenne, et le précise, en faisant voir qu'il ne se réalise que dans l'Absolu.

D'où vient, en effet, cet élan universel, irrésistible, qui emporte, d'un coup, toutes les volontés de la nation dans un même effort de cohésion et de résistance aux forces ennemies qui menacent son unité et son indépendance? Comment expliquer que, sur l'heure, tous les intérêts cèdent devant l'intérêt général; que toutes les vies s'offrent à l'immolation?

Il n'est pas vrai que l'Etat vaille, essentiellement, mieux que l'individu et la famille, attendu que le bien des familles et des individus est la raison d'être de son organisation.

Il n'est pas vrai que la patrie soit un dieu Moloch, sur l'autel de qui toutes les vies puissent être légitimement sacrifiées.

La brutalité des mœurs païennes et le despotisme des Césars avaient conduit à cette aberration, - et le militarisme moderne tendait à la faire revivre, - que l'Etat est omnipotent et que son pouvoir discrétionnaire crée le Droit.

Non, réplique la théologie chrétienne, le Droit c'est la Paix, c'est-à-dire l'ordre intérieur de la nation, bâti sur la Justice. Or, la Justice elle-même n'est absolue, que parce qu'elle est l'expression des rapports essentiels des hommes avec Dieu et entre eux.

Aussi, la guerre pour la guerre est-elle un crime. La guerre ne se justifie qu'à titre de moyen nécessaire pour assurer la paix.

«Il ne faut pas que la paix serve de préparation à la guerre, dit saint Augustin; il ne faut faire la guerre que pour obtenir la paix.» Non enim pax quœritur ut bellum excitetur; sed bellum geritur ut pax adquiratur. (S. Aug., Ep. ad Bonifacium, 189, 6.)

A la lumière de cet enseignement, que reprend à son compte saint Thomas d'Aquin (Sum. Theol., 2. 2, q. 40, art. 1), le patriotisme revêt un caractère religieux.

Les intérêts de famille, de classe, de parti, la vie corporelle de l'individu sont, dans l'échelle des valeurs, au-dessous de l'idéal patriotique, parce que cet idéal c'est le Droit, qui est absolu. Ou encore, cet idéal, c'est la reconnaissance publique du Droit appliqué à la nation, l'Honneur national.

Or, il n'y a d'Absolu, dans la réalité, que Dieu. Dieu seul domine par sa Sainteté et par la Souveraineté de son empire, tous les intérêts et toutes les volontés. Affirmer la nécessité absolue de tout subordonner au Droit, à la Justice, à l'Ordre, à la Vérité, c'est donc implicitement affirmer Dieu.

Et quand nos humbles soldats, à qui nous faisions compliment de leur héroïsme, Nous répondaient avec simplicité: «Nous n'avons fait que notre Devoir», «l'Honneur l'exige»; ils exprimaient, à leur façon, le caractère religieux de leur patriotisme.

Qui ne sent que le patriotisme est «sacré», et qu'une atteinte à la dignité nationale est une sorte de profanation sacrilège?

Un officier d'Etat-Major me demandait naguère si le soldat qui tombe au service d'une cause juste, - et la nôtre l'est à l'évidence, - est un martyr.

Dans l'acception rigoureuse et théologique du mot, non, le soldat n'est pas un martyr, car il meurt, les armes à la main, tandis que le martyr se livre, sans défense, à la violence de ses bourreaux.

Mais si vous me demandez ce que je pense du salut éternel d'un brave, qui donne consciemment sa vie pour défendre l'honneur de sa patrie, et venger la justice violée, je n'hésite pas à répondre, que sans aucun doute le Christ couronne la vaillance militaire, et que la mort, chrétiennement acceptée, assure au soldat le salut de son âme. «Nous n'avons pas, dit Notre Seigneur, de meilleur moyen de pratiquer la charité, que de donner notre vie pour ceux que nous aimons.» Majorem hac dilectionem Remo habet, ut animam suam ponat quis pro amicis suis. (Joan. XV, 13.)

Le soldat qui meurt pour sauver ses frères, pour protéger les foyers et les autels de la patrie, accomplit cette forme supérieure de la charité.

Il n'aura pas toujours, je le veux, soumis à une analyse minutieuse la valeur morale de son sacrifice, mais est-il nécessaire de croire que Dieu demande au brave entraîné au feu du combat, les précisions méthodiques du moraliste ou du théologien?

Nous admirons l'héroïsme du soldat: se pourrait-il que Dieu ne l'accueillît pas avec amour?

Mères chrétiennes, soyez fières de vos fils. De toutes nos douleurs, la vôtre est, peut-être, la plus digne de nos respects. Il me semble vous voir en deuil, mais debout, à côté de la Vierge des douleurs, au pied de la Croix. Laissez-nous vous offrir nos félicitations en même temps que nos condoléances. Tous nos héros ne figurent pas à l'ordre du jour des armées, mais nous sommes fondés à espérer pour eux la couronne immortelle qui ceint le front des élus.

Car telle est la vertu d'un acte de charité parfaite, qu'à lui seul il efface une vie entière de péché. D'un coupable, sur l'heure, il fait un saint.

Ce doit nous être à tous une consolation chrétienne de le penser, ceux qui, non seulement parmi les nôtres, mais dans n'importe quelle armée belligérante, obéissent de bonne foi, à la discipline de leurs chefs pour servir une cause qu'ils croient juste, peuvent bénéficier de la vertu morale de leur sacrifice. Et combien n'y en a-t-il pas, parmi ces jeunes gens de vingt ans, qui n'auraient pas eu, peut-être, le courage de bien vivre, et dans l'entraînement patriotique, se sentent le courage de bien mourir?

N'est-il pas vrai, mes Frères, que Dieu a l'art suprême de mêler la miséricorde et la sagesse à la justice, et ne devrez-vous pas reconnaître que, si la guerre est pour notre vie terrestre un fléau, dont nous mesurerions difficilement la force de destruction et l'étendue, elle est aussi pour les âmes un agent de purification, un facteur d'expiation, un levier qui les aide à gravir les hauteurs du patriotisme et du désintéressement chrétien?

II ENDURANCE

Nous pouvons le dire sans orgueil, mes Frères, notre petite Belgique a conquis le premier rang dans l'estime des nations. Il s'est bien rencontré, je le sais, en Italie et en Hollande, notamment, des personnages habiles qui ont dit: Pourquoi exposer la Belgique à cette perte immense de richesses et d'hommes? N'eût- il pas suffi de protester verbalement contre l'agression ennemie ou de tirer, au besoin, un coup de canon à la frontière?

Mais tous les hommes de cœur seront avec nous contre les inventeurs de ces calculs mesquins.

L'utilitarisme n'est, ni pour les individus ni pour les collectivités, la norme du civisme chrétien.

L'article 7 du traité signé à Londres, le 19 avril 1839, par le Roi Léopold, au nom de la Belgique, d'une part; par l'empereur d'Autriche, le Roi de France, la Reine d'Angleterre, le Roi de Prusse, l'empereur de Russie, d'autre part; énonce que «la Belgique formera un Etat indépendant et perpétuellement neutre, et qu'elle sera tenue d'observer cette même neutralité envers tous les Etats».

De leur côté, les cosignataires du traité, «promettent pour eux et pour leurs successeurs, sous la foi du serment, d'accomplir et d'observer le dit traité en tous ses points et articles, sans y contrevenir, ni permettre qu'il y soit contrevenu».

La Belgique était engagée d'honneur à défendre son indépendance: elle a tenu parole.

Les autres Puissances s'étaient engagées à respecter et à protéger la neutralité belge: l'Allemagne a violé son serment, l'Angleterre y est fidèle. Voilà les faits.

Les droits de la conscience sont souverains: il eût été indigne de nous, de nous retrancher derrière un simulacre de résistance.

Nous ne regrettons pas notre premier élan, nous en sommes fiers. Ecrivant, à une heure tragique, une page solennelle de notre histoire, nous l'avons voulue sincère et glorieuse. Et nous saurons, tant qu'il le faudra, faire preuve d'endurance.

L'humble peuple nous donne l'exemple. Les citoyens de toutes les classes sociales ont prodigué leurs fils à la patrie; mais lui, surtout, souffre des privations, du froid, peut-être de la faim. Or, si je juge de ses sentiments en général, par ce qu'il m'a été donné de constater dans les quartiers populaires de Malines, et dans les communes les plus affligées de mon diocèse, le peuple a de l'énergie dans sa souffrance. Il attend la revanche, il n'appelle point l'abdication.

L'épreuve est, dans les mains de la toute-puissance divine une arme à deux tranchants. Si vous vous révoltez contre elle, elle vous blessera à mort. Si vous courbez la tête et l'acceptez, elle vous sanctifiera.

Dieu nous éprouve, dit l'apôtre saint Jacques, mais ce n'est jamais Lui qui nous incite au mal. Tout ce qui vient de Lui est bon; tout ce qui descend du ciel vers nous est, dans le dessein de Dieu, un jet de lumière et une marque d'amour. C'est nous qui, obéissant à l'attrait de passions désordonnées, transformons parfois les bien-faits de la Providence en un poison mortel. «Heureux, conclut hardiment le vieil apôtre, heureux celui qui supporte avec patience ses tribulations: car, après qu'il aura fait preuve d'endurance, il recevra la couronne immortelle promise par Dieu à ceux qui l'aiment.» (Jac. 1, 12 et seq.)

Trêve donc à nos murmures, mes Frères.

Volontiers, je vous appliquerais les paroles que l'apôtre saint Paul dans sa Lettre aux Hébreux, adressait à tous les chrétiens, en leur rappelant l'exemple de l'immolation sanglante de Notre-Seigneur sur sa croix. «Vous n'avez pas encore résisté jusqu'au sang», leur dit-il. Nondum usque ad sanguinem resististis. (Hebr. XII, 4.) Ce n'est pas seulement cet exemple universel et transcendant du Calvaire que je vous invite à regarder, c'est celui aussi de nos trente, peut-être quarante mille soldats qui ont versé leur sang pour la patrie. En regard de ces braves, dites-moi, vous qui êtes momentanément privés de votre confort habituel, de vos journaux, de vos facilités de voyage, de vos communications de familles, qu'avez-vous enduré, qu'avez-vous souffert?

Que le patriotisme de notre armée, que l'héroïsme de notre Roi, de notre Reine bien-aimée, si touchante dans sa grande âme, nous servent de stimulant et de soutien! Ne nous plaignons pas; ne nous plaignons plus. Méritons notre libération. Hâtons-la par notre vertu, plus encore que par les prières de nos lèvres.

Courage, mes Frères, la souffrance passera; la couronne de vie pour nos âmes, la gloire pour la nation ne passeront pas.

Je ne vous demande point, remarquez-le, de renoncer à aucune de vos espérances patriotiques.

Au contraire, je considère comme une obligation de ma charge pastorale, de vous définir vos devoirs de conscience en face du Pouvoir qui a envahi notre sol et qui, momentanément, en occupe la majeure partie.

Ce Pouvoir n'est pas une autorité légitime. Et, dès lors, dans l'intime de votre âme, vous ne lui devez ni estime, ni attachement, ni obéissance. L'unique Pouvoir légitime en Belgique est celui qui appartient à notre Roi, à son gouvernement, aux représentants de la nation. Lui seul est pour nous l'autorité, lui seul a le droit à l'affection de nos cœurs, à notre soumission.

D'eux-mêmes les actes d'administration publique de l'occupant seraient sans vigueur, mais l'autorité légitime ratifie tacitement ceux que justifie l'intérêt général et de cette ratification seule leur vient toute leur valeur juridique.

Des provinces occupées ne sont point des provinces conquises; pas plus que la Galicie n'est province russe, la Belgique n'est province allemande.

Néanmoins, la partie occupée du pays est dans une situation de fait qu'elle doit loyalement subir. La plupart de nos villes se sont rendues à l'ennemi. Elles sont tenues de respecter les conditions souscrites de leur reddition.

Dès le début des opérations militaires, les autorités civiles du pays recommandèrent avec insistance aux particuliers de s'abstenir d'actes d'hostilité envers l'armée ennemie. Ces recommandations restent en vigueur.

Notre armée a seule, en partage avec les vaillants bataillons de nos alliés, l'honneur et la charge de la défense nationale. Sachons attendre d'elle la délivrance définitive.

Envers les personnes qui dominent par la force militaire notre pays et qui, dans le fond de leurs consciences, ne peuvent pas ne pas admirer l'énergie chevaleresque avec laquelle nous avons défendu et défendons notre indépendance, ayons les égards que commande l'intérêt général. Plusieurs d'entre elles protestent qu'elles veulent, aujourd'hui, dans la mesure où elles le pourront, atténuer nos épreuves et aider à la reprise, parmi nous, d'un minimum de vie publique régulière. Respectons les règlements qu'elles nous imposent, aussi longtemps qu'ils ne portent atteinte ni à la liberté de nos consciences chrétiennes, ni à notre dignité patriotique. Ne faisons pas consister le courage dans la bravade, ni la bravoure dans l'agitation.

Vous, en particulier, mes bien chers Confrères dans le sacerdoce, soyez à la fois et les meilleurs gardiens du patriotisme, et les soutiens de l'ordre public. Sur les champs de bataille, vous avez été magnifiques. Le Roi et l'armée admirent l'intrépidité de nos aumôniers militaires en face de la mort, la charité de nos ambulanciers et de nos brancardiers. Vos évêques sont fiers de vous.

Vous avez beaucoup souffert. Vous avez été durement calomniés. Soyez patients. L'histoire vous vengera. Dès aujourd'hui, j'y apporte mon témoignage. Partout où je l'ai pu, j'ai interrogé les populations, le clergé, notamment un nombre déjà considérable de prêtres qui avaient été déportés dans les prisons d'Allemagne et qu'un sentiment humanitaire, auquel je me plais à rendre hommage, a remis en liberté. Or, j'affirme sur l'honneur et je suis prêt à déclarer sous la foi du serment, que je n'ai pas jusqu'à présent, rencontré un seul ecclésiastique, séculier ou régulier, qui ait excité la population civile à se servir d'armes contre l'ennemi. Tous, au contraire, ont obéi fidèlement aux instructions épiscopales qu'ils avaient reçues, dès les premiers jours d'août, et qui leur prescrivaient d'user de leur influence morale auprès de nos populations, pour les porter au calme et au respect des règlements militaires.

Persévérez dans ce ministère de paix qui est pour vous la forme la plus saine du patriotisme.

Acceptez de grand cœur les privations que vous avez à subir. Simplifiez encore, si vous le pouvez, votre vie. L'un des vôtres, réduit, par le pillage, à un état voisin de la misère, me disait, ces derniers jours: Je vis maintenant comme je voudrais avoir vécu toujours.

Multipliez les efforts de votre charité, corporelle et spirituelle. A l'exemple du grand Apôtre, «laissez-vous assiéger chaque jour par les soucis que vous donne votre église; que personne ne dépérisse, sans que vous dépérissiez; que personne ne tombe, sans que vous vous sentiez vous-même tout en feu» (II Cor. XI, 29).

Faites-vous les champions des vertus, que vous commandent à la fois l'honneur civique et l'évangile. «Que tout ce qui est vrai, tout ce qui est honnête, tout ce qui est juste, tout ce qui est pur, tout ce qui est aimable, tout ce qui est digne d'éloge, vertueux et méritoire, fasse l'objet de votre application.» Puisse la dignité de notre vie nous autoriser à faire nôtre, mes bien chers Confrères, cette fière conclusion de saint Paul: «Ce que je vous ai enseigné, ce que vous avez entendu de moi, ce dont vous avez été les témoins dans ma vie, pratiquez-le: et le Dieu de paix sera avec vous.» Quœ et didicistis, et accepistis, et audistis, et vidistis in me, hœc agite: et Deus pacis erit vobiscum. (Philipp. IV, 8-9.)

CONCLUSION

Continuons donc, mes bien chers Frères, à prier, à faire pénitence, à assister à la sainte Messe et à communier pour la cause sainte de notre chère patrie.

Le dimanche, 3 janvier, en particulier, sera un jour de prière universelle pour la Belgique et pour nos alliés. Une communion générale et un salut solennel seront organisés en ce jour pour le succès de nos armes. Le samedi de chaque semaine, je recommande, à nouveau, à MM. les curés de élébrer un service funèbre pour le repos de l'âme de nos soldats.

Les ressources pécuniaires sont, je le sais, rares chez tous néanmoins, si vous avez peu, donnez du peu que vous avez, afin d’alléger la misère de ceux de vos compatriotes qui se trouvent sans abri, sans charbon, sans pain à suffisance. J'ai chargé MM. les curés de former à cet effet, dans chaque paroisse, un Comité de secours. Secondez-le et faites-moi charitablement parvenir les aumônes que vous pouvez soustraire à votre superflu, sinon à votre nécessaire, afin que je les distribue d'après les besoins qui me sont révélés.

Nos malheurs ont ému les autres nations. L'Angleterre, l'Irlande et l'Ecosse; la France, la Hollande, les Etats-Unis, le Canada rivalisent de générosité pour soulager notre détresse. Ce spectacle est à la fois lugubre et grandiose. Ici encore se révèle la Sagesse Providentielle qui tire le bien du mal. En votre nom et au lien, mes Frères, j'offre aux gouvernements et aux nations qui se tournent si noblement vers nos malheurs, le témoignage ému de notre admiration et de notre reconnaissance.

Avec une bonté touchante, notre Saint-Père le Pape Benoît XV a été le premier à pencher son cœur paternel vers nous.

Lorsque, quelques instants après son élection, il daigna m'accueillir dans ses bras, j'eus la confiance de Lui demander, que sa toute première bénédiction pontificale fût pour la Belgique, alors déjà si durement éprouvée par la guerre. Il répondit avec empressement à mon désir, que je savais être aussi le vôtre.

Aujourd'hui, avec une délicatesse exquise, Il prend l'initiative de renoncer à votre obole annuelle pour le Denier de Saint-Pierre.

Dans un document, daté du beau jour de la fête de la Vierge Immaculée, Il daigne nous dire, combien vivement Il prend part à nos peines; Il prie pour nous, appelle sur la nation belge la protection d'en haut, et nous invite à saluer dans la venue prochaine du

Prince de la Paix l'aurore de jours meilleurs. Voici le texte de ce précieux document: A Notre Cher Fils Désiré Mercier, Cardinal Prêtre de la Sainte Eglise Romaine, du titre de Saint-Pierre-ès-Liens, Archevêque de Malines, à Malines.

NOTRE CHER FILS,

SALUT ET BÉNÉDICTION APOSTOLIQUE.

La sollicitude paternelle que nous portons à tous les fidèles que la divine Providence a confiés à nos soins, nous fait partager leurs malheurs plus encore que leurs joies.

Pouvions-nous donc ne point éprouver une très vive douleur, en considérant la nation belge, que nous aimons tant, réduite par une guerre, on ne peut plus cruelle et désastreuse, à une situation vraiment lamentable?

Nous voyons, en effet, le Roi des Belges et son auguste famille, les membres du Gouvernement, les personnages considérables de la nation, les Evêques, les prêtres, le peuple entier endurer des maux qui remplissent de pitié tout cœur bien-né, et que notre âme, tout ardente d'amour paternel, est la première à ressentir. Aussi, sous le point de cette tristesse et de ce deuil, appelons-nous de tous nos vœux la fin de tant de malheurs. Puisse le Dieu de miséricorde hâter ce moment! Entre temps, nous nous efforçons, autant qu'il est en nous, d'adoucir d'aussi cuisantes douleurs. A ce titre, la démarche de Notre Cher Fils le Cardinal de Hartmann, Archevêque de Cologne à l'effet d'obtenir que les prisonniers prêtres Français ou Belges, détenus en Allemagne, fussent traités comme officiers, nous fut très agréable, et nous voulûmes lui en témoigner publiquement notre gratitude.

Quant à la Belgique, on nous a rapporté récemment, que les fidèles de cette nation si éprouvée ne laissaient pas, dans leur piété, de tourner vers Nous leurs regards et leurs pensées: sous le coup eux-mêmes de tant de calamités, ils se proposent encore de recueillir, cette année, comme les années précédentes, le denier de Saint-Pierre, pour subvenir aux nécessités du Saint-Siège Apostolique. Ce témoignage vraiment incomparable de piété et d'attachement nous remplit d'admiration: nous l'agréons avec toute bienveillance qu'il mérite et d'un cœur reconnaissant; mais, eu égard à la situation pénible dans laquelle Nos Chers Fils se trouvent, Nous ne pouvons absolument pas nous résoudre à encourager la réalisation de ce projet, si noble soit-il. Si l'on venait recueillir quelque argent, notre volonté est qu'il soit destiné à secourir le peuple belge aussi illustre par sa noblesse et par sa piété, qu'il est en ce moment digne de compassion.

Au milieu des difficultés et des angoisses de l'heure présente, Nous invitons ces fils qui nous sont chers à se souvenir, que «le bras de Dieu n'est pas raccourci, qu'il peut toujours nous sauver, et que son oreille n'est pas sourde, mais peut toujours entendre notre prière».

Et que cet espoir du secours divin grandisse encore à l'approche des Fêtes de Noël, dont le mystère célèbre la naissance de Notre Seigneur et nous rappelle cette paix que Dieu a annoncée aux hommes par ses anges.

Puissent aussi les âmes tristes et affligées trouver réconfort et consolation dans l'assurance de la tendresse paternelle qui inspire notre prière; oui, que Dieu ait pitié de la nation belge, qu'Il la comble de l'abondance de ses biens.

Comme gage de ces vœux, nous accordons de grand cœur à tous et à chacun, et tout d'abord à vous Notre Cher Fils, la Bénédiction Apostolique.

Donné à Rome, près Saint-Pierre, en la fête de la Conception Immaculée de Notre-Dame, l'année MCMXIV, de notre Pontificat la première.

Benoît XV, Pape.

Un dernier mot, mes bien chers Frères. Au début de cette crise, je vous disais, qu'au jour de la libération de notre territoire, nous saurions donner au Sacré Cœur et à la très Sainte Vierge un témoignage public de notre reconnaissance. Depuis cette date, j'ai pu consulter mes collègues de l'épiscopat et, d'accord avec eux, je vous demande de faire, dès que nous le pourrons, un nouvel effort pour hâter la construction de la Basilique nationale, que la Belgique a promis de dédier au Sacré Cœur. Aussitôt que le soleil de la paix luira sur notre pays, nous relèverons nos ruines, nous rendrons leur abri à ceux qui n'en ont plus, nous rebâtirons nos églises, nous réédifierons nos bibliothèques, et nous espérons bien mettre le couronnement à cette œuvre de reconstruction, en élevant, sur les hauteurs de la capitale de la Belgique, libre et catholique, la Basilique nationale du Sacré-Cœur.

Puis, chaque année, nous nous ferons un devoir de célébrer avec solennité, le vendredi après l'octave de la Fête-Dieu, la fête du Sacré-Cœur.

Enfin, dans chaque région du diocèse, le clergé organisera, annuellement, un pèlerinage d'actions de grâces à l'un des sanctuaires privilégiés de la Sainte Vierge, afin d'honorer spécialement la Protectrice de notre indépendance nationale et la Médiatrice universelle de la société chrétienne.

La présente lettre sera lue en plusieurs fois, le premier jour de l'an et les dimanches qui suivront le jour où elle vous sera parvenue.

Agréez, mes bien chers Frères, les vœux que je forme pour vous et pour le bonheur de vos familles, et recevez, je vous prie, ma paternelle bénédiction.

D. J. Card. MERCIER,

Archevêque de Malines.

«Chaque fois que, sous ses lettres, il mit sa signature, il y mit aussi sa tête.»
Eugène Hubert, recteur de l'Université de Liège

LE CARDINAL MERCIER
DEVANT LA SOUFFRANCE ET LA MORT

Par Henri Davignon

«DIEU n'a besoin d'aucun de nous.» Cette phrase fut écrite par le cardinal Mercier à la prieure du Carmel de Lisieux pour lui faire part de l'aggravation du mal qui devait l'emporter. «J'ai sur le métier plusieurs travaux que je désirerais certes poursuivre pour la gloire de Dieu et pour mon clergé. Mais d'en faire le sacrifice personnel, n'est-ce pas mieux encore servir les intérêts de la gloire divine?»

Ce 8 décembre 1925 donc, où les médecins révélèrent au malade qu'il portait une tumeur à l'estomac, le Cardinal dit de bon cœur son Magnificat, en union avec celui de sa Mère du Ciel. Et il s'abandonne sans réserve à la Divine Providence. Depuis qu'il se sent souffrant, il n'a jamais cru pouvoir demander sa guérison. Il en a eu, sans nul doute, la pensée; et son intimité avec Dieu lui aurait rendu facile une prière que tant de raisons humaines et surnaturelles eussent contribué à faire exaucer.

Le 15 novembre encore, au moment de donner un salut chez les Carmes de Bruxelles, en l'honneur de la nouvelle petite Sainte, son esprit s'arrête devant la perspective d'une maladie dont il ne savait pas encore la gravité mais dont il pressentait l'éventualité. Arrivé à son prie-Dieu, le célébrant hésite un instant et «n'ose pas».

«Je fis une demande conditionnelle, avoue-t-il, qui se résolvait en un, acte d'abandon.»

Lettre précieuse, lettre intime, lettre admirable qui nous ouvre, sur l'attitude du saint Cardinal dans la souffrance et devant la mort, des clartés décisives. Tout doit être rapporté, interprété à leur lumière.

L'attitude du cardinal Mercier, au moment où la vision de la mort prochaine se présente à lui, est conforme à toute sa vie antérieure.

La souffrance n'a point manqué au cours de ces soixante-quinze années si remplies d'œuvres. Ni la science, ni le talent, ni la gloire ne les en ont faites exemptes, non plus qu'une santé solide malgré de frêles apparences.

La discipline ascétique n'a cessé d'y ajouter des peines physiques volontaires qui trempent l'âme et rendent le corps esclave de l'esprit: longue station matinale à genoux, dont on relève la trace visible sur le plancher; sommeil écourté sur un lit sans ressort, à même une simple paillasse, dans une chambre nue comme une cellule monastique.

En plongeant d'emblée le Prélat aux affres d'une angoisse mortelle sous les yeux du peuple et du monde, la Providence nous a laissé l'image résumée de toute sa grandeur.

Le mal qui frappe le Cardinal est interne. Il devait le porter en lui depuis assez longtemps. Sans en connaître le nom, il l'a dompté comme il vainquait toute fatigue, en renonçant à l'écouter.

Les quelques périodes pendant lesquelles l'Archevêque avait dû céder à des conseils médicaux, acceptés seulement quand ils étaient donnés comme des ordres, furent toujours mises à profit par lui pour un travail plus intense.

Notamment en 1924, une plaie variqueuse à la jambe, exigeant l'immobilité, facilita la mise au point de maintes pages qui, sans elle, n'auraient point vu le jour.

Cette fois, il y a des signes d'une action secrète, minant l'organisme et provoquant une inappétence rendant l'affaiblissement général inévitable.

L'indifférence voulue du Cardinal à l'égard des plaisirs de la table, si recherchés en Belgique, se traduisait par un régime extrêmement sobre tant qu'il ne s'agissait que de lui.

Au début de son épiscopat, il avait d'ailleurs limité lui-même le menu des curés et doyens quand ils le recevaient, de façon à imposer la réserve même dans le repas de fête.

Voici qu'il ne pouvait plus rien prendre si ce n'est des aliments liquides.

C'est dans ces conditions qu'il s'imposa ses dernières grandes fatigues: la célébration à Sainte-Gudule de la messe jubilaire pour les noces d'argent du Roi et de la Reine, la participation à l'anniversaire de l'Institut Catholique de Paris.

En revenant à Malines, le verdict de la faculté est net: une intervention chirurgicale est nécessaire, tout au moins pour constater la nature du mal.

Elle sera radicale et permettra la guérison si la tumeur est saine; si, comme certains indices le font craindre, elle est cancéreuse, tout espoir d'amendement devra être écarté.

Pour sa part, nous le savons, le malade accepte les deux hypothèses et il s'en remet à Dieu.

Il a lui -même indiqué une ligne de conduite aux médecins: «Si vous voyez que j'ai chance de fournir encore du travail, opérez-moi; s'il ne s'agit que de me faire traîner, n'opérez pas.»

Il est préoccupé pourtant de dissiper les appréhensions de l'opinion.

Et il prend l'initiative d'écrire lui-même une Lettre qui sera lue en chaire.

Et il se rend au sein de sa famille de prédilection, ses séminaristes, pour leur faire part de la décision médicale à laquelle il se soumet. .

C'est le 26 décembre.

Le lendemain, une ordination doit avoir lieu, à laquelle il ne pourra procéder lui-même.

Il veut laisser à tous l'espérance d'un revoir.

Cependant il insiste sur la résolution prise par lui lors de son jubilé sacerdotal: ne jamais monter à l'autel sans se dire que, prêtre, on est aussi victime: Sacerdos et victima. Et avec force, en guise d'adieu, il a laissé la devise: «Dieu seul.»

Dieu seul, le Cardinal allait le rencontrer dans la modeste chambre de la clinique de la rue des Cendres à Bruxelles.

Quand les religieuses et l'infirmier le ramenèrent de la salle d'opération, en dépit de bulletins sibyllins, tout espoir de vie prolongée était perdu.

L'intervention s'était bornée à une constatation d'impuissance.

L'inexorable cancer dévorait des tissus vitaux.

La nutrition demeurait impossible.

Le Cardinal mourrait de faim.

Dans ce grand corps déjà émacié, la vie matérielle durerait tant qu'il resterait assez de substance pour répondre à l'énergie indomptable de l'âme.

Le règne de celle-ci serait souverain.

Pendant trois semaines le Cardinal s'est survécu grâce à elle.

Le monde entier, peut-on dire, suivit émerveillé la palpitation d'un cœur visité par le rayon céleste.

«Maintenant il n'y a plus qu'à attendre» : la forte parole a été dite.

Le cardinal Mercier avait tout réglé à l'avance en ce qui concerne l'administration du diocèse et ses affaires personnelles.

De ce côté, il est en paix.

Le souci de l'apostolat, l'amour des âmes hanteront seuls la méditation presque continue que sera sa préparation à la mort.

A certaines heures, pensant à toutes les prières qui se font en faveur d'un miracle, et auxquelles, sans s'y mêler, il ne refuse pas son consentement, c'est aux âmes sacerdotales, aux âmes de ses séminaristes qu'il reporte la reprise d'une activité réelle.

«J'irai vers eux tout d'abord.» La nuit qui suit l'opération, alors qu'on lui refuse toute boisson, il se répète comme un allègement la parole de Jésus crucifié: Sitio, mais avec ce correctif sublime: «Seigneur, j'ai soif de vous donner des âmes.»

N'est-ce pas pour cela qu'il se prête à tant de réceptions, qui transforment en antichambre de palais princier le modeste parloir de la clinique?

Visites répétées du Roi, de la Reine, visite attendue du prince Léopold retour d'Amérique, visite protocolaire et par ordre de leurs gouvernements et chefs d'Etat, des ambassadeurs de France, d'Espagne, d'Amérique et du Japon, visite de ministres et ministres d'Etat, d'évêques et de prélats.

Le Saint-Père est, peut-on dire, au chevet du mourant en la personne de Mgr Micara, confident et instrument de ses dernières délicatesses.

Tout cela interrompt-il le contact de l'âme, déjà détachée, avec le Christ dont l'image ne quitte pas les yeux, la main, les lèvres du Cardinal?

Tout cela, au contraire, renforce l'intimité divine, la distribue, la rend présente aux esprits les moins mystiques.

Et voici, à mesure que l'heure avance, les témoignages multipliés, décisifs d'une sainteté rayonnante, sans cesse en action, concentrée sur les grands objets d'un apostolat qui va recevoir sa récompense.

Lord Halifax, l'abbé Portal sont accourus après l'opération.

Le noble anglican, plus âgé que le Cardinal et de santé débile, s'abîme entre ses bras, assiste à la messe célébrée dans la chambre, écoute mettre au point l'état des «conversations» désormais fameuses, et se retire après un adieu presque définitif.

On le rappelle, on a encore quelque chose à lui dire.

Est-ce doctrinal ou positif?

Non, seulement une effusion du cœur et qui prend la plus touchante expression matérielle: le don de l'anneau pastoral, qui n'a jamais quitté le doigt de l'Evêque et qui portera à ce frère séparé le signe d'une amitié, d'une union symbolique et prophétique.

Le 22 janvier, une prescience surnaturelle fait demander au mourant: « Quel jour sommes -nous et quelle heure?» -Vendredi et bientôt 3 heures, est la réponse. -«Appelez ma famille et les vicaires généraux et qu'on récite les prières des agonisants.»

Un ordre semblable avait imposé l'extrême-onction, quelques jours auparavant, non sans avoir réclamé au préalable l'autorisation des médecins seuls juges de «l'état grave».

Un souci extraordinaire de la discipline religieuse et liturgique préside à ces suprêmes cérémonies. Pendant la lecture des prières, tournant les pages du rituel, le Cardinal observe que le lecteur, Mgr Legraive, n'a pas la dernière édition.

Il la fait chercher.

L'émotion du récitant hésite devant le mot fatal: «Proficiscere, partez.»

Le mourant se substitue à lui et donne à sa propre âme congé de quitter la terre.

Le lendemain, jour de la mort, il indique à l'abbé Mercier, son neveu, la messe qu'il faut célébrer, celle en l'honneur de Marie Médiatrice, dont le Pape a approuvé le culte à son initiative.

Son confesseur, un rédemptoriste, répond au vœu qu'il devine, en proposant la récitation du Te Deum, suprême action de grâces.

Mais ce n'est pas assez.

La voix, qui n'est plus qu'un souffle, articule nettement Magnificat.

Et après qu'on eut dit l'hymne de la joie, elle murmure encore De Profundis, psaume de la pénitence et de l'anéantissement.

Aucun mot ne sort plus des lèvres, mais le bras, qui n'a pas cessé de bénir autour de lui, élève encore la main au verset qui parle d'iniquité et de justice.

A 3 heures enfin, l'âme est détachée du corps et chacun, autour de la dépouille émaciée, la voit dans l'éternelle béatitude.

Mort de saint et mort de grand homme.

Mort qui est un testament, dont à l'avance le Cardinal a exprimé le sens dans un document publié, le lendemain, en même temps que la Lettre aux prêtres, dictée de son lit.

Mort de philosophe et mort de patriote.

Elle accroît la vérité d'une doctrine surnaturelle et scientifique enseignée ex professo.

Elle enrichit le patrimoine d'un sentiment national arboré dans le danger.

Double couronnement d'une vie qui a ajouté à la grandeur humaine de l'Eglise et de l'Etat.

Le plus humble participant aux funérailles grandioses de Bruxelles et de Malines a ressenti profondément la force de cette alliance.

Jamais la collaboration de l'humanité et de la spiritualité ne s'est offerte au monde dans une image aussi magnifique.

Jamais l'unité de la vie et de la mort sur le plan divin ne s'est réalisée d'une façon plus simple et plus haute à la fois.

LES HOMMAGES AU CARDINAL MERCIER FURENT NOMBREUX ET UNIVERSELS

Au nom du barreau de cassation, M. le bâtonnier Alphonse Le Clercq salua le Primat «l’homme complet selon la grandeur» : les trois aspects de notre nature : pensée, action, cœur, le cardinal Mercier les possédait avec une supériorité écrasante. La grandeur morale impose toujours ses droits.

Alfred E Smith, Governor of the State of New York, wrote on the 6th of May 1926:

“The outstanding figure of the perilous days of 1914-1918”. The world pays deserving recognition to Désiré Cardinal Mercier by that characterization. Scholar, priest and comforter of his people in misfortune and afflictions he rose to the heights of attainment.

de Paul-Emile Janson

Le Cardinal Mercier a été, en temps de guerre, l’un des pôles de la résistance patriotique en Belgique occupée et opprimée par l’ennemi. Il reste pour les Belges un grand souvenir et un noble exemple.

de Lord Halifax

Hukelton, Doncaster, ce mois de mars 31, 1926

Malgré les multiples préoccupations de son ministère pastoral le Cardinal Mercier avait consenti à donner quelques heures du meilleur de son temps à la cause de la réunion des Eglises.

Tous les membres de l’Eglise d’Angleterre comme sur le continent lui en doivent garder une particulière reconnaissance.

Son action les encouragent, et l’esprit de charité qu’il montra dans les conversations de Malines leur donne le modèle de l’esprit qu’ils doivent avoir pour répondre à la prière de notre Seigneur, que le Cardinal aimait à répéter, «ut unum sint».

(s.) Halifax

L'ENFANCE DE DÉSIRÉ MERCIER - SA FAMILLE

Par Charles Mercier
Professeur de Philosophie à la Notre-Dame University (USA)

Cette esquisse voudrait être plus qu'une simple notice biographique, de quoi se satisfait d'ordinaire notre curiosité. L'admiration que nous éprouvons pour le cardinal de Malines est autrement profonde: elle touche à l'âme. C'est dans ce sentiment qu'il convient d'évoquer ces souvenirs discrets de la première enfance et de l'intimité de la famille, où se forment insensiblement les qualités de l'esprit et les vertus du cœur.

Désiré-Félicien-François- Joseph Mercier naquit à Braine-l'Alleud, dans la nuit du 21 au 22 novembre 1851, d'une famille de bonne et vieille bourgeoisie originaire des environs de Cambrai, qui, vers le milieu du XVIIe siècle, s'était établie en Belgique. Cette famille possédait des armoiries; elles se voyaient encore naguère sur un cartouche surmontant la porte d'un pavillon de l'ancienne demeure de l'avocat Jean-Joseph Mercier, en son temps premier échevin de la ville de Nivelles: un écu français, écartelé aux premier et quatrième d'argent à trois tourteaux de sable, aux deuxième et troisième d'azur à six étoiles à cinq rais d'or.

A partir de 1658, nous trouvons les ancêtres du Cardinal établis près de Nivelles sur la terre de Willambroux. Ces héritages avaient dépendu autrefois de l'abbaye des Dames nobles de Sainte-Gertrude, et sainte Marie d'Oignies, au XIIIe siècle, y soignait les lépreux. C'est dans ce Brabant wallon, pays de riche culture, que se fixeront désormais les membres de cette famille, aux environs de Nivelles d'abord, puis à Braine-l'Alleud. Dans ce gros bourg, les Mercier prenaient rang de notables. L'un d'eux, François -Joseph, le grand -père du futur archevêque de Malines, qu'en langage du terroir on nommait el vî maire (le vieux maire), y avait exercé pendant plus de trente -quatre ans la première magistrature municipale. Son neveu Edouard Mercier sera trois fois ministre et l'un de ses propres fils, Siméon, directeur général au ministère des Finances.

Un peu en dehors du village se trouve la maison familiale. C'est une vaste bâtisse wallonne, d'apparence un peu sombre, que les gens du pays appellent le «château du Castegier». Le «vieux maire» et sa famille y vivaient des jours d'un bonheur paisible, entourés de l'estime et de la considération générale. Eclate la révolution de 1830; ses fils, Lucien en tête, courent à Bruxelles faire le coup de feu pour l'indépendance de la Belgique, entraînant à leur suite les volontaires brainois.

Paul-Léon Mercier, le père du Cardinal, avait un tempérament d'artiste. S'il eût pu donner libre cours à ses inclinations, il s'en serait allé à Paris étudier la peinture. Tel n'était pourtant pas l'avis du «vieux maire », et force lui fut de rester au pays. Son talent de peintre, qui était réel, ne dépassera guère le cadre de sa famille. Celle -ci garde précieusement le portrait du jeune artiste peint par lui-même, ainsi qu'une scène d'intérieur où la gravité des grands-parents s'allie à la bonhomie de leurs enfants et à l'espièglerie délicieuse d'un tout petit. Ces toiles avaient été reçues au Salon de Paris.

Des liens d'une nature plus tendre devaient bientôt l'attacher définitivement au sol natal. Un séminariste de l'endroit, Adrien Croquet, venait d'être proclamé primus perpetuus en philosophie à Malines. Il convenait de recevoir le jeune lauréat avec toute la solennité que comporte ce genre de fête dans un village. Immédiatement Paul-Léon se charge d'organiser la cavalcade. Et son zèle dans la circonstance trouve peut -être quelque correspondance dans le cœur d'une demoiselle Barbe Croquet, sœur du lauréat, dont il s'était épris.

Neuf maternités honorèrent leur mariage. Lorsque le petit Désiré vint au monde, succédant à quatre filles, les vœux de Paul-Léon Mercier furent enfin accomplis. Ce fils faisait vraiment la joie de son père. Il se plaisait à le prendre sur ses genoux pour lui enseigner les premiers éléments des mathématiques, et le jeune collégien se rendra compte plus tard de tout ce qu'il lui avait déjà fait entrevoir à un âge aussi tendre.

Par ailleurs, c'était le plus généreux des pères. On le disait même plus empressé à rendre service à autrui qu'à s'occuper de ses propres intérêts. Sa maison était toujours ouverte à ceux -et ils étaient parfois nombreux - qui désiraient l'entretenir de leurs difficultés. Ainsi s'écoulèrent les années de la première enfance, toute imprégnée des douceurs des vertus familiales, dans l'accomplissement des devoirs simples et des tâches discrètes.

Demeurée veuve avec sept enfants en bas âge, -le plus jeune, Léon, avait à peine un an lorsque mourut son père, -Barbe Croquet, la mère du Cardinal, se consacra entièrement à l'éducation de ses enfants.

Tous les matins, le petit Désiré et sa sœur Léontine se rendaient en classe, accompagnés d'une fidèle servante. Et c'était plaisir de voir le frère et la sœur, se tenant par la main, partir et revenir ensemble à la maison. Tels nous les retrouvons plus tard, unis par les liens d'une amitié d'inspiration vraiment divine. Lorsque cette sœur lui sera ravie dans toute la pureté de ses vingt ans, ce frère exprimera sa douleur en des pages si émues et si célestes, que l'on tressaille malgré soi à la pensée du bonheur qu'ont eu ces âmes de se revoir là-haut.

Les premiers au jeu sont rarement les premiers de leur classe. Appliqué à l'étude, le petit Désiré n'en était pas moins gai pendant les récréations. Entre ses petits condisciples et lui régnait la plus franche camaraderie; un jour, au catéchisme, son voisin avait été mis en punition, à genoux devant tous les autres, pour avoir causé: spontanément Désiré Mercier s'était levé et avait demandé de prendre sa place, s'accusant d'avoir parlé le premier.

Sa nature enjouée ne manifestait pourtant rien de cette insouciance frivole, si commune aux personnes dont la jeunesse fut heureuse. Mme Paul-Léon Mercier avait eu des revers de fortune; ce sont là des peines que les enfants devinent, et leurs âmes en gardent toujours une profonde impression. Cependant des parents influents de Bruxelles s'offraient à protéger la carrière des fils de Paul- Léon. De plus hautes ambitions soutenaient le courage de leur vaillante mère. Son frère, l'abbé Croquet, dont la charité est demeurée proverbiale à Braine, venait de donner l'exemple du plus beau dévouement sacerdotal : répondant à l'appel de l'épiscopat des Etats -Unis, il s'en était allé, à un âge où l'on ne connaît plus les enthousiasmes de la jeunesse, évangéliser les Peaux-Rouges. Et là-bas, dans le Far-West, Mgr Adrien Croquet sera appelé un jour («le saint de l'Orégon». Plus près d'elle, son demi -frère, l'abbé Anthyme Charlier, doyen de Virginal, ecclésiastique d'une vertu austère, l'encourageait dans ses saintes dispositions. Un autre demi-frère, le Dr Louis Charlier, avait fait preuve du plus beau dévouement professionnel pendant une épidémie de choléra qui ravageait la région brainoise.

Une amie de Mme Mercier, Mère Philomène, supérieure des Sœurs de Braine, sera la confidente discrète des nobles sentiments dont s'inspirait son veuvage. Au cours de la semaine, l'abbé Oliviers, vicaire à la paroisse, venait de grand matin au couvent célébrer la sainte Messe, et régulièrement, respectueux des choses saintes, le jeune Désiré, devançant l'heure, l'attendait à la sacristie. Sa piété était vraiment angélique; elle forme le trait saillant qu'ont rapporté de lui tous ceux qui l'ont connu dans sa jeunesse. En le voyant répondre si respectueusement la messe, le doyen M. Hoofs, un jour, dit à la supérieure: «Cet enfant deviendra évêque».

Mais ce sont les premiers éléments du latin qu'il s'agit d'apprendre à présent. L'abbé François Oliviers, qui fut son premier guide spirituel, sera aussi son premier professeur. Le cher vieillard garda jusqu'à la fin de sa vie le souvenir ému d'un petit garçon, d'une politesse exquise, timide un peu, mais d'une telle franchise qu'il suffisait de le regarder un instant pour voir son âme limpide se refléter dans ses yeux.

La sérénité de l'âme est le rayonnement de l'abnégation chrétienne. Lorsque Mme Mercier quitta sa propriété du Castegier, -le Cardinal avait alors treize ans, -pour aller occuper une demeure plus modeste près de l’église, elle se révéla vraiment ce que les gens du pays disaient d'elle: «La sainte Madame Barbe». Dans l'intimité du foyer, ses enfants s'inspireront de l'exemple de leur mère: Estelle d'abord, en religion sœur Marguerite, si dévouée; Emérence, sœur Salésia, l'abnégation en personne; Cara, nature généreuse, intelligente et vive qui, sur le conseil de son frère, se fera «Pauvre Caire», véritablement amoureuse de la souffrance; Désiré, le futur archevêque de Malines; Léon enfin, devenu médecin à Bruxelles, qui, sur son lit de mort, recommandait à ses enfants de « penser d'abord aux autres, puis à eux -mêmes». Admirable famille, que Dieu éprouvait ainsi aux yeux du monde afin de pouvoir, un jour, y choisir son apôtre; admirable mère surtout, de qui ce fils, parvenu à l'apogée de sa perfection morale, pourra dire: «Oui, mon intention, mon désir constant, mon aspiration profonde fut toujours de monter et de faire monter moralement ceux sur qui je pouvais avoir de l'influence. Que ce besoin d'ascension morale m'ait été inculqué par ma mère, je n'en puis douter. C'est chez elle qu'inconsciemment d'abord, consciemment plus tard, j'ai deviné, compris, que l'amour est fait d'oubli de soi et de dévouement à autrui. C'est dans son cœur, dans la virilité sereine de ses résolutions, que j'ai lu cette grande leçon de la vie: l'homme n'est rien, les succès et les revers ne sont rien, Dieu seul importe. Attendre quelque chose de soi, c'est folie; ne compter finalement que sur Dieu, c'est la sagesse même. Ce fut là, autant qu'il m'en souvient, ma première orientation.» Mais déjà les aspirations généreuses de l'adolescent remontaient à la source de cet amour dont la sollicitude, empreinte dans la nature, se révélait à lui au sein de ces affections familiales. Pendant les vacances, il entraînait son frère Léon dans ses promenades à la campagne, s'arrêtant par moment pour mieux admirer le paysage; d'où ce surnom d'amitié « Panorama» que lui donnait : fort irrévérencieusement ce jeune frère, témoin de son enthousiasme devant la beauté de ces scènes familières de la nature: un champ de blés mûrs, qu'il comparait à une mer d'épis dorés; -le labour d'une belle pièce de terre que la charrue entrouvre au travail généreux des semailles; -le coucher du soleil sur cette vaste plaine de Waterloo. Son âme si pure y découvrait j à la fois tant de grandeur sublime et tant de charmes qu'elle se sentait envahie par le sentiment de la bonté infinie de son Dieu.

«Puis un jour vint où je pris connaissance du Sermon sur la montagne. J'y lus ce que je pressentais; le sens du livre de la nature: Dieu est bon pour nous, Il ne nous laisse pas seuls; ce que notre père et notre mère sont en petit au foyer, Lui l'est pour nous, en tout, partout, toujours.» L'humanité n'est qu'une famille, au sein de laquelle tous les hommes sont ; frères, où tous ont le même père: Nous sommes de la race de Dieu. Et Dieu prend soin de chacun de nous. Il fait luire sur nous son soleil, dont la lumière et la chaleur guident nos pas, réchauffent nos membres, fécondent nos terres et nous procurent le pain de chaque jour. Regardez donc les lis qui ouvrent à l'air pur leurs blanches corolles: est- ce que jamais Salomon, dans tout le resplendissement de sa gloire, fut vêtu et paré comme l'un d'eux? Et les petits oiseaux du ciel qui ne peuvent ni semer ni moissonner: n'est- ce pas votre Père céleste qui les nourrit? A l'enfant qui vit de la vie des champs, ces spectacles sont familiers; à les voir sous la conduite d'une mère, le cœur s'attendrit, il s'ouvre à la confiance... et nos âmes vibrent quand nous disons: Notre Père.»

Rencontrant un jour des enfants dans le chemin de Tout-li-faut à L' Hermite, le cardinal Mercier, chargé d'ans et de mérites, leur faisait admirer à l'horizon la splendeur du soleil couchant: «Regardez, mes petits enfants, comme tout cela est beau. -Oui, Monseigneur. -Et qui a créé toutes ces belles choses, mes enfants? -C'est le bon Dieu. -Eh bien, il faut bien aimer le bon Dieu, n'est-ce pas, mes chers enfants.» A soixante ans de distance ce sont toujours les mêmes accents de piété filiale.

Nous avons dit l'enfance. Pour un esprit d'une telle envergure, quel admirable cadre que cette plaine de Waterloo! Elle est adossée à la forêt de Soignes, et semble figée là, sans mouvement, comme le théâtre où vient de se dérouler un grand drame. Seul le silence y plane depuis le jour où l'aigle est venu s'y abattre, après avoir mesuré du regard son vaste horizon.

La vision que Mgr Mercier, devenu professeur de philosophie à l'Université de Louvain, y entreverra un jour, en ses méditations solitaires, devait être bien plus large lorsque, de la contemplation de ce monde sensible, il s'élèvera dans une vaste synthèse, jusqu'à la connaissance de la cause première, dominant les événements et les hommes dont cette plaine évoquait en raccourci le saisissant spectacle, parce que les regardant de plus haut.

On se représente difficilement le cardinal Mercier habitant dans la vallée. Un jour, qu'on nous permette de rappeler ici quelques souvenirs intimes, -nous nous rendions à pied de Bruxelles à Braine -l'Alleud, après avoir salué, comme de coutume, en passant, Notre-Dame d'Alsemberg. La route est longue et quelque peu accidentée; elle s'étend entre le champ de bataille de Waterloo et le bois de Hal, sur un plateau qu'on appelle L 'Hermite. C'est là que le professeur Mercier découvrit tout à coup l'endroit où, pendant tant d'années, il aimera venir se recueillir et travailler dans le calme. Son frère et lui y firent construire une maison de campagne. La demeure est spacieuse, sans prétention aucune, située à l'écart dans le hameau. Mais cette solitude a bien des charmes, et il n'est point de lieu plus propice pour méditer. Au loin, à gauche, se dresse la masse sombre qu'est la forêt de Soignes; à droite, c'est la grande plaine, la commune de Braine-l'Alleud et son clocher. Des terres fertiles partout, des prairies, des maisonnettes çà et là dans les champs; à l'arrière -plan, le bois de Hal et ses nombreuse clairières, aux teintes claires, baignées dans un air vif.

Paysages familiers, remplis de souvenirs de la première enfance, auxquels devait se mêler, trop tôt hélas, le sentiment d'une séparation bien douloureuse. C'est à L' Hermite que Mgr Mercier perdit son frère, Léon, médecin à Bruxelles, si dévoué à sa personne et à son œuvre, au développement de laquelle le rattachaient les liens de l'affection la plus vive et de la plus grande intimité. Son agonie fut longue et pénible; nuit et jour, son frère avait voulu le veiller. Un matin, on nous fit approcher de son chevet plutôt que de coutume... Au sanglot qui tout à coup secoua notre oncle, nous comprîmes que notre père venait d'expirer. Alors nous montâmes tous ensemble à la chapelle faire le chemin de la croix...

A vingt-trois ans de distance, quittant la chambre où venait d'expirer le Cardinal, nous tâchions de redire les paroles d'abandon filial à la volonté divine, ainsi qu'il nous les avait dites en face de ce premier grand deuil familial. Sur la pierre tombale au cimetière de Braine, où reposent tous les siens, Mgr Mercier avait fait graver ce texte surmonté d'une croix : Surrexit Christus Spes Mea. Ces paroles, il nous les commentait encore le soir de l'enterrement de notre père, en nous prenant sur ses genoux.

Les vacances nous réunissaient tous en famille à L'Hermite. C'est là que le professeur Mercier apprit, le 8 février 1906, son élévation au siège archiépiscopal de Malines. Il était assis à sa table de travail, occupé à rédiger une préface, lorsque la dépêche de la nonciature de Bruxelles lui fut remise. Ce n'est pourtant qu'après avoir terminé sa phrase qu'il déposa la plume, prit connaissance du contenu de cette missive et se rendit tout droit à l'église de L 'Hermite où il récita son Miserere. Puis il gagna à pied la gare la plus proche par un chemin de traverse. Déjà, sur son passage, les cloches sonnaient à toute volée. Quelques semaines plus tard, ses concitoyens, enthousiastes, recevaient triomphalement dans sa commune natale, celui dont la grandeur affable savait se concilier l'affection des plus modestes.

Absorbé désormais par l'écrasant fardeau d'un épiscopat dont la sollicitude s'étendait bien au-delà des limites de son diocèse, c'est à L'Hermite que le cardinal Mercier se retirera de préférence, chaque fois que ses nombreuses occupations lui laisseront enfin quelques moments de loisir. «Votre frère galérien», signait-il un jour une des lettres à notre mère, lui mandant que les charges absorbantes de son administration diocésaine ne lui permettaient pas d'y venir. On eût dit qu'à L'Hermite le temps s'éternisait dans le calme de cette vie d'ascète toute tournée vers la spéculation intellectuelle et l'oraison. «La substance du présent est éternelle» : sans doute la tranquillité sereine de ce lieu l'inspirait-elle lorsqu'il écrivit cette phrase magistrale de ce livre qui sera le couronnement de son œuvre, La Vie intérieure.

Pénétrons un instant dans l'intimité de cette existence simple et frugale que le Cardinal menait dans sa maison de campagne. Levé de grand matin, il passe de sa modeste chambre à la chapelle, située au même étage, s'agenouille sur le plancher devant les marches de l'autel pour y faire son heure d'oraison. Qui a pu l'entrevoir ainsi, les yeux fixés sur le tabernacle, sait où il allait chercher son inspiration: dans le silence du matin il écoutait parler le Maître.

Nous montons vers 6 heures et demie pour assister à sa messe, suivie d'un quart d'heure d'action de grâces. A un mouvement familier du Cardinal tout le monde se lève, puis tous ensemble nous faisons la génuflexion. Sitôt parvenus dans l'escalier, chacun de nous l'entoure, les bonjours s'entrecroisent de taquineries plaisantes que le Cardinal émaille, par moments, de son esprit de finesse. La conversation se poursuit ainsi, intime et animée, pendant le petit déjeuner jusqu'à l'arrivée du facteur. A ce moment notre oncle se retire dans son bureau. C'est une grande pièce blanchie à la chaux, très éclairée, ayant vue sur la plaine de Waterloo. Mgr Mercier s'est assis à sa table de travail et dépouille son volumineux courrier. Rien ne le sépare plus désormais de ses chères études et les inclinations naturelles de son vaste esprit pourront enfin se donner libre cours. Vers 10 heures, le Cardinal rassemble ses feuilles et s'en va dans la campagne, poursuivant sa méditation tout le long du sentier. Il s'arrêtait parfois pour crayonner quelques notes, puis se remettait en marche, de son pas de péripatéticien, quelque peu saccadé. Sa haute silhouette, effleurée par la brise, se détachait ainsi au milieu des champs jusqu'au moment où on le voyait disparaître dans les bois de son ami le baron Snoy. Que de fois l'y avons -nous surpris assis à l'ombre des grands hêtres, entouré d'écureuils, «les spirous», qui se jouaient sur les branches jusqu'au- dessus de sa tête. A l'heure convenue, nous nous rendions à sa rencontre dans le sentier. Comment exprimer ici le souvenir pieux que nous gardons tous de ces conversations intimes? La grande supériorité du Cardinal n'intimidait jamais personne; à son simple contact on se sentait devenir meilleur; les gens du pays connaissaient son bienveillant sourire et spontanément ils venaient à lui.

L 'heure des repas était fort irrégulière; le plus souvent, lorsqu'il était seul, le Cardinal poursuivait, même à table, le travail de pensée qui l'absorbait. Mais, comme il s'appliquait à bien faire toute chose en son temps, notre oncle savait aussi se distraire en famille et sa conversation était tantôt sérieuse, tantôt enjouée. Puis, il se remettait à l'ouvrage jusque vers 5 heures et demie. C'était l'heure de sa visite du Saint-Sacrement, suivie de la récitation du bréviaire et du chapelet, dans le jardin, lorsque le temps le permettait.

La collation du soir était très frugale: une soupe au lait, des légumes cuits, un léger dessert; pour boisson, de l'eau.

Le Cardinal remontait ensuite à la chapelle et se retirait dans sa chambre, une véritable cellule d'ermite, vers 9 heures et demie.

Etait-ce un pressentiment de sa fin prochaine? Un jour, tout au début de novembre de cette année 1925, le Cardinal, contrairement à son habitude, décide de faire une longue promenade en automobile. Au sortir de Malines, l'auto s'engage sur la route qui mène à Mont Saint -Jean, traverse la forêt de Soignes que borde au sud la vaste plaine de Waterloo. L'on s'arrête à Braine -l'Alleud ; le Cardinal revoit, en passant, le petit château du Castegier où s'était écoulée son enfance; de là, il se rend à pied au cimetière tout proche pour y prier sur la tombe de ses parents. Puis il se fait conduire à Virginal, repasse par Haut-Ittre, où avaient enseigné ses sœurs religieuses. Découvrant tout à coup un site familier: «C'est ici que nous venions nous promener pendant les vacances lorsque j'étais au séminaire; mais le paysage est bien plus beau, vu de ce côté».

C'était bien un pèlerinage d'adieux que notre oncle accomplissait là, aux lieux de sa jeunesse. Jamais on ne l'avait vu si préoccupé. A une vieille cousine qui lui parlait d'une réunion prochaine, il avait répondu ces simples mots: «Oui, si je vis encore».

De retour à Malines, le Cardinal travaille plus que de coutume. Cependant son mal empire et il sent ses forces diminuer. Qu'importe, il se domine.

Le 14 décembre, quelque temps avant son opération, il retourne à L 'Hermite pour quatre jours; et, malgré la neige abondante qui recouvre les champs, veut encore revoir les lieux préférés de ses promenades. Il se dirige vers la ferme de Tout-li-faut, s'arrête un instant devant la chapelle du «bon Dieu d'Giblou» [en wallon du pays pour : …du «bon Dieu de Gembloux»] . Mais déjà ses forces le trahissent et l'obligent à revenir vers la maison. Il remonte dans son bureau et c'est là qu'il éprouve les premiers symptômes pénibles du mal qui devait bientôt le terrasser.

Lorsque, après sa mort, nous vînmes nous entourer de son souvenir, dans ce grand vide qu'était désormais pour nous L'Hermite, nous trouvâmes, mise en évidence sur sa table de travail, une petite photographie représentant le Cardinal bénissant... Sans nul doute, notre oncle vénéré avait voulu, par cette marque suprême de sa délicate bonté, nous assurer que, de là-haut, il nous bénit toujours.

GELOOFSBELIJDENIS VAN EEN EMBUSKEE

Ik begin met te zeggen dat ik als sergeant bij de infanterie heb gediend en nooit officier ben geweest, dit alleen maar voor diegenen die beweren dat er alleen maar officieren deel maken van de Verbroederingen.

Laat ik mij voorstellen:

gekwetst op 26 Augustus 1914,
gekwetst op, 20 Oktober 1914,
gereformeerd en uit den dienst ontslagen in 1915,
vrijwillig terug dienst genomen in 1916,
gegazeerd in 1917,
gegazeerd in 1918,
veel straffen (allemaal meer dan verdiend),
beschouwt als vrienden alle oud-front-strijders en
heeft reuzen-sympathie voor zijne vroeger oversten en in 't bijzonder voor diegenen die hem «er in gelapt» hebben.

Ik ben niet wat men noemt een «patriotaard» maar ik ben steeds bereid alles, wat mij nog overblijft aan gezondheid en hoop ik de toekomst, op te offeren indien ooit weer onze buren, uitwelken hoek de wind dan ook moge waaien, zouden proberen ons te komen verdrukken.

Ik ben PACIFIST. Knagende «oorlogsherinneringen» zoals longkwalen, zenuwaandoeningen en andere aangename souvenirs houden mij ieder nacht uren lang wakker. Ik weet dus ook wat de weldaden van den oorlog betekenen. Ik heb één zoontje en ik ben bereid, om mijn kind die verschrikking te besparen, met hart en ziel mede te werken aan alles wat den Vrede kan verzekeren, aan alles wat den oorlog kan vermijden. Maar zolang dat ideaal net bereikt is ben ik van mening dat de VERDEGIGING VAN ZIJN LAND, dus van zijne haardstede, voor IEDERE MAN EEN HEILIGE PLICHT is.

Ik ben niet voor dat agressief patriottisme dat alleen maar kent wij «über alles». Neen, men kan zijn vaderland beminnen bovenal en nochtans zijne naburen alle goed toewenschen en ook bewijzen als de gelegenheid zich voordoet. Maar de goede verstandhouding kan alle en maar berusten op wederzijdsche verdraagzaamheid en goeden wil.

Ik tel vele vrienden onder de officieren in aktieven dienst. 't Zijn menschen die ik goed ken. Ik neem niet aan dat men van hen zeggen: sabelslepers, bloedzuigers, vergulde bedelaars, parasieten, enz. Zij hebben genoeg geleerdheid en verstand om in het burgersleven, in de veronderstelling dat men, geen leger meer nodig zou hebben, hun dagelijksch brood te verdienen even goed en misschien beter dan hunne belagers.

Ik ben voor den vrede, op alle gebied... Daarom kan ik slecht aannemen dat men weigeren kaki te dragen maar vrijwillig een feldgrau-plunje aantrekken, de nationale militaire dienst weigeren maar dien op alle mogelijke wijzen na-apen, «weg met den oorlog» brullen en fatsoenlijke menschen te lijf ga met knuppels en gummistokken en openlijk zichtbare slachtoffers vanden oorlog met eiren bestoken... WEG MET DEN OORLOG? t'Akkoord, maar ook WEG MET BURGEROORLOG. De wereld is, min of meer juist, verdeeld in landen die, min of meer juiste, natuurlijke grenzen hebben. De politieke en de natuurlijke grenzen zijn oorzaak dat de volkeren, zelfs als zij den zelfden oorsprong hebben, van elkaar verschillen op velerlei gebied. Daarom moet ieder volk vrij zijn van zich in te richtén zo als het dat verkiest. Men mag zich daar nooit in mengen en altijd trachten onze naburen beter te kennen om beter te begrijpen wat zij gevoelen en waar zij heen willen. Zo heeft ieder volk, ieder land, zijn eigen behoeften en ook zijn eigen moeilijkheden die, het zelf, in volle vrijheid, moet trachten en kunnen oplossen... Wat voor den ene goed is, schaadt voor den andere en dat zien wij o. a. in twee europeesche landen: Italië en Rusland. Is het huidige regiem goed of slecht voor die landen? Wie weet het? Maar wat wij wel weten dat is dat wij noch ’t ene noch 't andere regiem in ons landje wenschen te zien invoeren. Ieder volk moet geregeerd worden volgens zijn inborst, zijn verleden, zijn welbegrepen belang.

Voor wat wij noemen «politiekers» heb ik geen respect, zij laten mij over 't algemeen koud ofschoon ik mij er wel eens warm over maak. Maar er is verschil tusschen «politiekers» en «staatslieden». De eersten werken uitsluitelijk voor hun eigen partij of, neen, liever voor hun eigen belang, in den engsten-laagsten zin des woords. De anderen denken alleen aan het algemeen belang, aan den stoffelijken, en geestelijken welstand van hun volk en van de gemeenschap. De menschen en de samenleving zijn ver van volmaakt, veel blijft te doen. Daar toe bijdragen, zich daarvoor opofferen, is de plicht van elk j eerlijk man. Daarom bewonder en eerbiedig ik de politieke mannen wier streven en doel met dien plicht overeenkomt. Men kritiseert veel te veel bij ons, men vergeet gemakkelijk dat «de beste stuurlieden staan aan den wal» Al wie bij onze overheid is, al wie bij ons een «baantje» aan Staat, Provincie, Gemeente bekleedt, wordt eenvoudig betiteld als «luiaard», opvreter van het Gouvernement». Dat is toch klinkklare onzin want in alle vakken, in alle betrekkingen, zijn menschen die hun werk ter harte nemen terwijl er overal zijn die zo weinig mogelijk do en of anderen voor hen laten zwoegen. Zo ook bij de Parlementairen.

Ik ben Belg, pro-Belg, en als zodanig vind ik het helemaal niet onmogelijk ook goed Vlaming, pro-Vlaming en stambewust Vlaming, te zijn. Het ene sluit het andere niet uit. De geschiedenis? Het verleden? Daarom bekommer ik mij alleen om er nuttige lessen uit, te putten en niet om ze zodanig uit te pluizen en de verdraaien tot er niets overblijft dan reden tot klagen en tot HATEN. Alles is sommige kerels (?) welkom als 't geldt het Belgische Vaderland te besmeuren. Wat kon de Belgische gemeenschap eraan doen dat de Fransche koningen steeds belust waren op het graafschap Vlaanderen? Hebben de Walen van Jan van Namen te Groeninghe niet dapper meegeholpen om den Franschen de betekenis van «GOEDENDAG» in den kop te kloppen? Wat kon de Belgische gemeenschap er aan verhelpen dat Jozef II zodanig met ONZE VRIJHEDEN te werk ging dat het nodig was openlijk in verzet te komen? En 1830? Te betreuren was het dat Noord en Zuid niet, zoals voor 1539, samen konden blijven maar is er één kalm, bezadigd, onbevooroordeeld, man die zou durven beweren dat Koning Willem I en zijne Raadslieden niet de schuld dragen van de scheiding? Wij zijn dien vorst veel dank schuldig want hij heeft - vooral in den beginne - veel voor onze provinciën gedaan, maar Hij was een man van het OUDE REGIEM en Hij, en zijne landgenoten, beschouwden ons al te veel als een wingewest. Nu, gedane zaken nemen geen keer. Niemand, noch in Nederland noch in België, acht een nieuwe politieke gemeenschap wenschelijk of mogelijk. Maar er zijn andere manieren voor een goede verstandhouding en die moeten, in de eerste plaats, gezocht worden op het gebied der economie. Oslo en Ouchy zijn mijlpalen en zij wijzen ons den weg aan. En wij waren denkelijk al veel verder gevorderd indien er niet van beide zijden door eng-nationalistisch gezanik stokken in het wiel werden gestoken. De mannen (?) van «Oranje boven, Belgikske, nikste» zijn de hevigste tegenstanders van alle mogelijke verstandhouding tusschen Nederland en België (niet uit liefde voor U, Broeders uit het Noorden, maar omdat zij de afstammelingen zijn van die koppigaards die door de eeuwen heet! Door de eeuwige ontevredenheid en muitzucht hun eigen Land en Volk zoveel kwaad hebben berokkend, en ze verbeelden zich misschien dat de hulp die zij uit sommige Noord-Nederlandsche kringen ontvangen voortspruit uit liefde tot Vlaanderen, ons Vlaanderen werd langen tijd door Moeder België stiefmoederlijk behandeld. Wij willen nu niet onderzoeken in hoe verre dit aan omstandigheden, noodzakelijkheden en eigen schuld der Vlamingen is toe te schrijven. Maar dit betreft feitelijk alleen maar de taalkwestie want op economisch gebied hebben wij ons niet te beklagen, meer, ik, voor zover de economie niet te lijden had onder de achteruitstelling onzer taal. En laten wij toch het stoffelijk belang niet uitschakelen, a.u.b. Vlaanderen is steeds groot geweest voor Schone Kunsten maar zou dat ooit mogelijk geweest zijn zonder den groten rijkdom onzer steden, edelen en poorters? En hoe hadden wij dien blakenden welstand verkregen? Door onze werken, natuurlijk, maar nog meer door onze geografische ligging. En waarom is onze geschiedenis als 't ware doorweven van oorlog (vooral BURGEROORLOG, helaas), opstand, muiterij, enz., enz. Alleen maar omdat onze voorvaderen er steeds op uit waren hun eigen welstand te bevoordelen, te vergroten, en te verdedigen tegen al, vreemdeling of Vlaming, die hunne macht wilde fnuiken om des te gemakkelijker hunnen rijkdom te kunnen binnenpalmen. Neen, de Belgische gemeenschap, mag in sommige opzichten tegenover Vlaanderen te kort zijn gekomen maar over 't algemeen heeft zij ons ook meer gegeven dan wij ooit zouden verkregen hebben of zouden kunnen verkrijgen indien wij deel gemaakt hadden van een land waar onze «minoriteit» steeds en altijd de «tweede viool» moest spelen, zonder hoop op beterschap. Wij hebben steeds betreurd dat men zolang heeft getreuzeld om rekening te houden van de vlaamsche «grieven» maar men moet alle reden plaats geven en alle goeden wil belonen. Daarom is het niet verstandig, niet rechtvaardig, niet billijk, maar altijd aan te klagen, ter verwijten, te bedreigen; men moet zelf meewerken om de misbruiken uit te roeien en de onrechtvaardigheden. Daarom is het nodig van eerlijk te blijven en onze kinderen niet te bedriegen door leugenachtige aantijgingen, door moedwillige verdraaiingen van de Vaderlandsch geschiedenis. Is het algemeen belang moeten wij steeds trachten opbouwende kritiek te geven en niet, zoals het nog al tamelijk in ons karakter ligt, alles afbreken.

Zoals ik reeds vroeger zegde, ben ik nooit een voorbeeld van tucht geweest. Maar, aan het front, heb ik nooit kunnen velen en heb ik ook nooit toegelaten dat men de passerellen opbrak zelfs om er vuur mee te maken, omdat ik wist dat, bij gebrek aan passerellen, niet alleen de aflossers in het water zouden sukkelen, maar dat ik zelf ook hetzelfde lot zou kunnen ondergaan. De oude frontmannen zullen wel begrijpen wat ik met die vergelijking bedoel.

Aan het front begreep ik nooit de mentaliteit van menschen, onderwijzers, priesters of andere toekomstige pedagogen, die liever onrust, ontevredenheid, ongehoorzaamheid, defaitisme verspreidden dan hunne ongeletterde makkers te leren lezen en schrijven. Gelijkerwijze kan ik nu geen hoogte krijgen van hetgeen sommige onderwijzers en andere personen die zielenzorg dragen, beheersacht wanneer zij den kinderen niets dan HAAT inprenten. Jawel, HAAT voor alles wat Belgisch is.

Men zal mij antwoorden dat zij den kinderen LIEFDE voor Vlaanderen leren maar wat betekent LIEFDE DIE OP HAAT BERUST? Neen, ofschoon het voor alle Belgen - ook Vlamingen - onmogelijk is veel liefde voor Duitschland te voelen, ik gevoel geen liefde tot België OMDAT ik Duitschland geen liefde toedraag maar OMDAT België mijn Vaderland is. Daarom ook HEB IK MIJN VLAANDEREN HARTELIJK LIEF, zoals de dichter zegt, omdat het mijn Vaderland (België, en Vlaanderen zijn voor mij één en onafscheidelijk) is maar niet omdat ik enig ander land of volk zou haten.

Zo is mijn geloofsbelijdenis en ik geloof te mogen verklaren dat alle onze makkers het met mij eens zijn. Onder alle koren is kaf en in elke kudde is een schurftig schaap en in de Fraternellen is dat denkelijk ook zo evenals in alle andere verenigingen. Wij zijn noch fascisten, noch militaristen, wij zijn ook geen engelen noch brave hendriken. Wij willen zijn en wij beweren te zijn, eenvoudig, verenigingen van echte oud-frontmannen.

En dat zegt alles en dat is ook genoeg.

Ensor et le général Leman (1851-1920) discutant peinture en présence d'une médiatrice des querelles
Huile sur bois par James Ensor en 1890

Recently looking at pictures of their father a bit younger in military dress, our children asked questions about the military service and what is the reserve.

Well, I told them that compulsary military service has been cancelled in Belgium but the reserve still exists composed of men like their father, a reserve artillery officer who spent some time in Brasschaat (Belgian Artillery School) near Antwerp and in Bastogne (1A) in the Ardennes.

Royaume de Belgique

Ministère de la Défense Nationale

N° 32599 de la Matricule

LETTRE D'AVIS

Le Ministre de la Défense Nationale a l'honneur d'informer

le Sous-Lieutenant de réserve LE CLERCQ, P. qu'il a été nommé par Arrêté Royal N° 28432 du 29 mars 1993 au grade de lieutenant de réserve dans le corps de l'artillerie, à la date du 27 mars 1993.

Il prend rang d'ancienneté à la date du 27 décembre 1990.

(s) Leo DELCROIX, Ministre de la Défense Nationale

Bruxelles, le 19.04.93

Many Russian soldiers fought our common ennemy during World War II. One of them, Alexander Solzhenitsyn was born in 1918 and grew up in Rostov-on-Don. He graduated in physics and mathematics from Rostov University and studied literature by correspondence course at Moscow University. In World War II he fought as an artillery officer, attaining the rank of captain. In 1945, however, after making derogatory remarks about Stalin in a letter, he was arrested and summarily sentenced to eight years in forced labour camps, followed by internal exile. In 1957 he was formally rehabilitated, and settled down teaching and writing, in Ryazan and Moscow. The publication of “One Day in the Life of Ivan Denisovich” in Novy Mir in 1962 was followed by publication in the West, of his novels “Cancer Ward” and “The First Circle”. In 1970 he was awarded the Nobel Prize for literature, and in 1974 his citizenship was revoked and he was expelled from the Soviet Union. He settled in Vermont, USA. In 1990 his citizenship was restored.

LETTRES PATENTES DE NOBLESSE DE LA FAMILLE DE POTTER

Marie-Thérèse, par la Grâce de Dieu, Impératrice des Romains ; Reine d’Allemagne, de Hongrie, de Bohème, de Dalmatie, de Croatie, d’Esclavonie &c. Archiduchesse d’Autriche ; Duchesse de Bourgogne, de Lothier, de Brabant, de Limbourg,…

De la part de Notre Cher et aimé Joseph-Jean de Potter, natif de la ville de Gand en Notre Province et Comté de Flandre, Conseiller assesseur du Mont de Piété de la même ville. Nous a été très humblement représenté, qu’il seroit le fils légitime de Livin De Potter en son vivant Echevin de la Keure de ladite ville de Gand, et de Catherine Grenier, qu’à l’exemple de son Père et de ses ancêtres, il auroit toujours vécu honorablement et dans un état de décence, que l’exercice d’un commerce considérable lui auroit aidé à soutenir ; que désirant néanmoins illustrer cet état, il Nous souplioit de daigner l’annoblir avec sa postérité légitime, et lui permettre de porter les armoiries dont ceux de sa famille se seroient servis jusques à présent, savoir un Ecu d’azur à un croissant d’argent, au chef de même, chargé de trois roses de gueules, surmonté d’un heaume d’argent grillé et liseré d’or, fourré de gueules, hachemens et bourlets d’argent et d’azur, cimier au croissant de l’écu ; Nous cèque dessus considéré, et faisant une attention favorable à la demande du suppliant, Avons de l’avis de Notre Chancelier de Cour et d’Etat, accordé et octroyé, de Notre certaine science, grâce, libéralité, pleine puissance et autorité souveraine, comme Nous accordons et octroyons par les présentes, le titre de Noblesse à Joseph Jean De Potter, ainsi qu’à sa Postérité légitime, voulant et entendant que lui, ses Enfans et Descendans de l’un et l’autre sexe nés et à naître de mariage légitime, jouissent et servent d’orénavant et à toujours du même Titre, comme Gens nobles en tous leurs faits et actes, des honneurs, franchises, Proéminences, Privilèges, libertés et exemptions de noblesse, tout ainsi qu’en usent et sont accoutumés d’en user les autres Nobles aux Païs-Bas, et dans tous Nos Roïaumes et Etats, qu’ils soient et seront tenus pour nobles en toutes places et lieux, soit en, soit hors de jugement, capable d’avoir Etat et dignités, soit de Chevaleries ou autres, et qu’ils puissent en tout temps acquérir et posséder, Terres, Seigneuries, Rentes et Revenus, Possesions et autres choses mouvant de nos fiefs et arrière fiefs, ainsi que tous autres Nobles tenemens, les prendre de Nous ou autres seigneurs féodaux, de qui ils seront dépendans, et s’ils en sont déjà acquis, les tenir et posséder sans être contraints de s’en défaire, à quel effet Nous les habilitons et rendons suffisans et idoines, en faisant vers Nous, nos Hoirs et Successeurs, les devoirs nécessaires selon la nature et condition des mêmes fiefs et bien acquis ou à acquérir, et suivant la coutume de la Province des Pays où ils sont situés et afin que l’état de Noblesse du même Joseph De Potter et de ses Enfans et descendans de l’un et l’autre sexe soit d’autant plus notoire, Nous leur avons accordé et permis comme nous l’accordons et permettons de porter les armoiries blasonnées ci-dessus, en la mêmeforme et manière qu’elles sont fpeintes et figurées au milieu des Présentes ; Chargeons son Altesse Roïale Le Duc Charles Alexandre de Lorraine et de Bar, Notre Très-cher et très-aimé Beau-frère et cousin, administrateur de la Grande Maîtrisse en Prusse,

Grand Maître de l’ordre Teutonique en Allemagne et Italie, Notre Lieutenant Gouverneur et Capitaine Général des Pays-Bas ; Donnons en Mandements à Tous Nos conseils et autres Nos justiciers, officiers et sujets que ce peut regarder et toucher, qu’ils fassent et laissent pleinement et paisiblement jouir et user le même Joseph Jean De Potter, ainsi que ses Enfans et descendans de l’un et l’autre sexe, nés et à naître de mariage légitime, de cette Notre présente Grâce, Octroy, Port d’armoiries, et de tout le contenu dences Présentes, sans leur faire, mettre, ou donner, ni souffrir être fait, mis ou donné aucun trouble ou empêchement au contraire ;…

Donné à Vienne le 27 Avril de l’an de Grâce Mil sept-cent soixante-quatre, et de nos Règnes le 24me.

(signé) Marie-Thérèse

Branche de TORHOUT

AYMAR-Joseph-Paul-Marie-Ghislain de POTTER d'INDOYE est le quatrième fils de Joseph et de Pauline van der Straten-Waillet, né au château de Melle le 16 août 1907, épouse à Pepinster le 1er septembre 1930, la vicomtesse Claire-Françoise-Julienne-Marie-Ghislaine DAVIGNON, née à Oostakker le 1er juin 1910.

Claire est la fille du vicomte Henri-Pierre-M.-Fr., docteur en droit, écrivain, chevalier de la Légion d'honneur (*), et de la baronne Jeanne-Hélène-Flore-M.-G. van Loo; elle est la petite-fille du baron Albert-André-Valentin van Loo. et de Françoise-Julienne-M.-G. de Hemptinne, ainsi que du vicomte Julien Davignon, ministre des Affaires Etrangères

qui reçut en 1914 la déclaration de guerre et obtint concession de noblesse, le 11 mars 1916, et de Hélène Calmeyn.

La famille Davignon est originaire de la province de Liège et fut représentée au Congrès National par Gilles-François, élu plus tard membre de la Chambre des Représentants, par le district de Verviers (**).

Aymar de Potter d'Indoye, commença par s'occuper d'agriculture, puis créa à Torhout une laiterie modèle (KOSTO MELK), destinée à la production du lait AA et répondant aux sévères critères du Ministère de la Santé publique.

En 1964, la Flandre ne possède que cette laiterie, produisant ce type de lait, dont les doubles initiales signifient qu'il est exempt de bacilles et de bactéries, et qui fournit environ 5.000 litres par jour.

La propriété de Torhout, jadis couverte de sapinières et connue de tout temps sous le nom de «Verloren kost», c'est-à-dire lieu perdu où on faisait paître le bétail, fut achetée en 1820 à la famille Schoutheete par Edouard de Potter (1769-1846), époux d'Hortense de Loose, dame de Comines (1782-1808), qui imitait en cela ses ancêtres, dont il avait déjà hérité de nombreuses terres et fermes à Torhout.

Edouard mourut sans descendance et légua Torhout à son frère Joseph de Potter d'Indoye (1778-1850), époux de Reine-Jeanne de Bay (1785-1874). Ceux-ci le laissèrent à leur fils Joseph (1813- 1893), époux de Marie-Colette de Ghellinck de Walle (1827-1857), qui mourut sans descendance, et choisit comme héritier son petit-neveu à la mode de Bretagne, Joseph de Potter d'Indoye (1870-1917), père d'Aymar.

Ce dernier transforma le bâtiment principal de l'ancienne ferme en habitation.

Aymar de Potter d'Indoye et Claire Davignon ont 11 enfants (Janine, Claude, Eric, François, Luc, Henri, Marie-Claire, Elisabeth, Vinciane, Brigitte, Annick).

Leur première fille Janine-Pauline-Henriette-Marie-Jeanne (***) est née à Rhode-Saint-Genèse le 6 octobre 1931

et épouse à Torhout le 25 août 1956, Roger-Paul-Charles-Marie-Ghislain Le Clercq, avocat à la Cour d'appel de Bruxelles, né à Bruxelles le 29 juin 1931, fils de Paul, avocat près la Cour d'appel et de Léonie Coupez, petit-fils d'Alphonse, avocat à la Cour de cassation, bâtonnier de l'Ordre, et de Sidonie Dupont, et arrière-petit-fils d'Idesbalde-Victor-Joseph, époux de Dame Zoé Lefebvre, avocat à la Cour d'Appel, chevalier de l'ordre de Léopold, né a Tournai, le 9 août 1813 et décédé à Bruxelles, le 28 octobre 1900.

Alphonse Le Clercq a été avocat à la cour de cassation de 1913 à 1929. Le Premier Président Goddyn, le Procureur général Paul Leclercq et le bâtonnier Georges Leclercq lui ont rendu hommage dans leurs discours prononcés à l'audience du 3 octobre 1929. [BIBL.: J.B.C., Me Alphonse Leclercq, Journal des Tribunaux 1929 p.588]

Alphonse Le Clercq est né à Bruxelles le 20 Août 1860. Il preste le serment d'avocat à Bruxelles le 6 octobre 1882. Il est membre du conseil de l'ordre de 1902 à 1905. Il est nommé avocat à la cour de cassation par arrêté royal du 7 janvier 1913, en remplacement d'Alfred Convert. Il est élu bâtonnier de l'ordre des avocats de cassation de 1924 à 1926. Alphonse Le Clercq a défendu l’Etat belge contre les filles du roi Léopold II lors du procès lié à sa succession. Par la suite, on lui a proposé le titre de baron qu’il a décliné. Il est décédé le 30 septembre 1929.

Il publie en 1898 "Quelques mots sur la profession d'avocat-Conseils pratiques". En 1919, il publie "La succession commerciale" dans la Belgique judiciaire. Enfin en 1929, avec son fils Henri Le Clercq, il publie "Notre franc; souvenirs; vers le code du franc" paru dans le Journal des tribunaux.

ainsi que de Léon Coupez, colonel breveté d'état-major de cavalerie, bourgemestre de Limelette et de Zoé-Marguerite Witmeur décédés lors du bombardement de Limelette le 20 avril 1944.

Janine de Potter d'Indoye et Roger Le Clercq ont 4 enfants:

1° Patrick Le Clercq, né le 3 avril 1957.
Ingénieur, Lieutenant d'Artillerie de réserve.

Le 13 avril 1985,

ont contracté mariage à Woluwe-Saint-Pierre

Patrick Paul Claire Marie Ghislain Le Clercq,
né à Uccle, le 3 avril 1957; fils de Roger Paul
Charles Marie Ghislain Le Clercq et de Janine Pauline
Henriette Marie Josèphe de Potter d'Indoye; d'une part

et

DIOS Y EL REY

Isabelle Hélène Jacques Michelle Guy Cornet (****),
née à Berchem-Sainte-Agathe, le 31 juillet 1959; fille
de Guy Gilbert Edgard Marie Cornet et de Michelle Marie
Thérèse Emilia Victoria Christiaens; d'autre part.

Patrick Le Clercq et Isabelle Cornet ont 4 enfants:

Adrien Le Clercq
Raphaëlle Le Clercq
Alix Le Clercq
Lavinia Le Clercq

2° Sabine Le Clercq, née le 1er mars 1958. Avocate
3° Juan Le Clercq, né le 27 mars 1960. Avocat
4° Christine Le Clercq, née le 27 mars 1964.

_____________________________________
(*) Né en 1879 à Saint-Josse-ten-Noode (Bruxelles), membre de l'Académie royale de Langue et de Littérature françaises, le vicomte Henri Davignon est romancier et remarquable critique.

En 1956. à l'occasion du 50e anniversaire de la parution de son premier ouvrage. les Scriptores Catholici l'ont fêté pour ses «nombreux romans qui reflètent véritablement l'humanisme chrétien moderne» . (Discours de H. van Puyvelde, président, dans La Libre Belgique du 29 janvier 1956.)

Son fils Pierre, ordonné prêtre en 1935, mourut, victime de son patriotisme et de sa charité notamment envers les Juifs, lors de l'évacuation du camp de Gross-Rosen le 8 février 1945. («Cœurs Belges» ; Bull. Ass. Nobl.. n° 18, 15 sept. 1949.)

(**) Voir lithographie de Baugniet dans le Catalogue de la Belgique Indépendante, 1830-1930, n° 387. et illustr. XXIII; Met den Ancxt, II, p. 213.

(***) Voici les 4 quartiers de noblesse de Janine de Potter d'Indoye et ses frères et sœurs :

{Potter
{van der Straten-Waillet

{Davignon
{van Loo

(****) La maison des parents de Guy Cornet a été entièrement détruite durant le bombardement de Vieux Dieu (Oude God - Mortsel) le 5 avril 1943 à Anvers durant la deuxième guerre mondiale. Le "terrain" a ensuite été exproprié pour en faire un parc public... Guy Cornet, 24 rue d'Edegem, Vieux Dieu les Anvers

LETTRE À HENRI DAVIGNON

Par la Princesse Bibesco,
de l’Académie Royale de Langue et de Littérature française de Belgique.

Je vous écris, mon cher ami, pour remédier à ce grand mal, l’absence. Aujourd’hui on m’apprend de Bruxelles que vous êtes parti. Ainsi je ne vous verrai plus, ni dans ce monde, ni dans ce petit salon d’angle, – tout en fenêtres du XVIIe siècle, fermant mal, – posé comme une lanterne à la pointe de l’Ile Saint-Louis, où vous aimiez à venir, où vous êtes venu ce soir-là, choisi par vous, faire la «dînette» avec Julien Green, notre grand confrère de l’Académie. Il était accompagné par sa sœur, elle-même écrivain de qualité, comme le furent Eugénie de Guérin, Lucile de Chateaubriand, et peut-être aussi Henriette Renan, la sœur qui s’est sacrifiée. Mon hospitalité d’aujourd’hui, vous le saviez, ne peut aller plus loin – la journée de travail finie – que d’offrir à mes amis un repas du soir, servi sur deux guéridons et limités à cinq convives. Notre ami, Robert de Saint-Jean, alors président de la Presse Internationale, était le cinquième. Je vous avais suggéré de choisir vous-même mes invités, et le choix me parut bon. Ce que fut la conversation, vous l’aviez deviné et souhaité ; et vous y avez contribué de tout votre esprit. En désignant Julien Green vous aviez demandé le plus difficile, mais il était venu pour vous revoir sans se faire prier. Car vous aviez réussi cette mission de représenter la littérature belge en France, et la française en Belgique, dans ce Royaume des Lettres, notre belle République sans frontières. Vous saviez choisir dans la foule nombreuse des écrivains, vos amis, ceux qui ne se mettent pas d’eux-mêmes au premier rang, mais attendent plutôt d’y être poussés, comme dans la parabole des invités de la noce.

Ainsi, je ne vous verrai plus, souriant et discret, bon, d’une bonté sans fadeur, relevée par ce grain de sel attique, indispensable dans toutes les sociétés humaines. Je ne vous verrai plus, – ni parmi nos collègues de l’Académie Royale lors des grandes séances, ni dans l’intimité des séances de travail, ni dans les salons de l’Ambassade de Belgique, rue de Suresnes, – ni dans nos agapes fraternelles de la « Taverne de Londres» à Bruxelles, ni chez vous, square Frère-Orban, au milieu de vos livres, de vos enfants, de nos confrères de la rue Ducale, et des membres du Pen-Club de Belgique, où je fus présentée par vous, dans une réunion pour moi inoubliable qui s’est terminée par une distribution de muguets apportés de France. Votre compagnie rassurante, et votre bras, ne me guideront plus dans les méandres de ce que Jean Cocteau et moi appelions «l’entrée des artistes» au Palais des Académies.

On peut être intimidé à tout âge, et vous le saviez. Vous deviniez que je l’étais sincèrement, émue d’être admise dans un lieu où chacun est jugé sur ses seuls mérites, abstraction faite de toutes les valeurs de convention, où les barrières sociales sont inexistantes, où les genres masculin et féminin ne sont plus qu’une division grammaticale.

Combien j’appréciais votre présence, et ce que vous appeliez plaisamment «nos conversations à bâtons rompus», lorsque vous me faisiez l’amitié de venir me chercher à la gare et de me reconduire à l’aéroport, quand traversant la Belgique, je m’en allais parler, sous l’égide de l’Alliance Française, de Voltaire et de Charles XII à Stockholm, et de Marcel Proust à Upsal. Vous étiez mon confident, vous saviez qu’en vérité, j’y allais pour obtenir de telle ou de telle autre organisation charitable, privée ou publique, la délivrance de ma fille, séparée de moi par des barrières en apparence infranchissables, élevées par la folie des Européens, dans une Europe divisée contre elle-même. Et cela dura sept ans.

- Venez me tenir la main, vous écrivais-je, j’ai besoin de voir un ami pour passer le pont, comme l’éléphant dans le conte de Kipling.

Et chaque fois que l’occasion s’en présenta je me réjouissais de pouvoir m’entretenir avec vous de votre ouvrage dernier-né, car vous étiez un écrivain fécond, ayant trouvé dans l’assiduité au travail créateur le seul remède à des épreuves cruelles que la guerre ne vous avait pas épargnées.

Votre fils consacré à Dieu, mort avec d’autres prêtres belges, était le garant de notre amitié, fondé sur les assises profondes de la douleur humaine. Vous aviez la politesse d’être gai, comme il arrive seulement à ceux qui ont mis leur espérance hors d’atteinte, au-dessus de ce qui se passe dans ce monde-ci. Et nous parlions du «Pénitent de Furnes», et de cette «Petite Béguine, voulez-vous danser ?» qui m’avaient tenu bonne compagnie en route, tandis que je poursuivais ma quête, que vous compariez à celle de Cérès cherchant sa fille Proserpine, enlevée par le dieu des Infernaux Palais.

«Visite à Henri Davignon aux Mazures.» C’est ce que j’ai noté sur mon calendrier aux pages tournantes. Ce nom, en abrégé, semblait indiquer une visite à quelque région dévastée. Or, il n’en était rien ; c’est dans votre maison paternelle, au milieu de votre beau domaine que vous m’attendiez : Château des Mazures, par Pépinster, Province de Liège, telle était l’adresse complète, en tête de vos lettres que j’ai gardées. La belle journée de septembre n’en finissait plus, dans ce climat du Nord où l’été des pays d’Occident met longtemps à s’en aller. J’avais le sentiment d’un retour à la maison, bien que sachant qu’il était devenu impossible pour moi. Où donc étais-je, au pied des Carpathes, en Dacie-Heureuse, ou dans la Province de Liège, en Belgique ? La ressemblance des lieux était parfaite. Une telle sérénité, une telle beauté régnaient sur les choses, sur les hautes collines, sur les grands bois, dans les prairies traversées de courant d’eau vive, dans le jardin clos, parfumé d’héliotropes et de roses d’arrière-saison, comme aussi dans la maison où le goûter des enfants et des petits-enfants nous attendait, déjà disposé sur la table ronde où le cercle de famille se renouvelait avec les générations, comme les fleurs et les fruits des corbeilles. Une telle journée était faite pour s’éterniser dans le temps. J’en étais parfaitement consciente. Là se sont affirmées au cours de longue promenade, lente à souhait, sous les hêtres centenaires et dans les prés où le «regain», - les foins fauchés pour la seconde fois – embaumait l’air, non seulement l’identité hallucinante des deux paysages, mais aussi cette profonde parenté entre nous, ce que Goethe eût appelé «nos affinités électives».

C’est alors que je découvris que votre père et le mien, tous deux d’éducation française, classique et romantique à la fois, chacun d’eux ayant tenu dans leur pays la charge difficile de Ministre des Affaires Etrangères en temps de déséquilibre européen, avaient trouvé dans l’amour de leur terre natale la force de supporter leur destin. Julien Davignon était ministre en 1914 ; mon père, Jean Lahovary, avait cessé de l’être en 1913. Mais au Conseil de la Couronne, tenu à Sinaïa, à la date même où la neutralité de la Belgique avait été foulée aux pieds, ce fut la protestation de mon père qui entraîna la Roumanie à rompre son traité secret avec les Empires Centraux.

Nous avions, vous et moi, le même culte pour la mémoire de nos deux pères, qui mirent l’un et l’autre le droit des gens, la justice et l’honneur de leur peuple au-dessus de leur intérêt. L’harmonie invisible, «Armonié Aphanès» d’Héraclite, cela est mieux que le monde visible.

A l’hôtel Saint-James, rue Saint-Honoré, je vous retrouvais avec votre fille, dans ce décor rare, connu seulement des anciens amoureux de Paris. Cette maison fut autrefois l’hôtel de Noailles, où le général de La Fayette, revenu des Etats-Unis, reçut la visite de la reine. Marie-Antoinette voulait ainsi témoigner sa reconnaissance à l’officier français qui s’était battu pour l’indépendance de l’Amérique. Ce même lieu était hanté pendant mon enfance par les parents de mes parents, quand nous habitions la rue de Rivoli toute proche. Vous y reveniez toujours, parce que votre père l’avait habité lorsque vous traversiez Paris en route pour le Midi de la France où vous alliez chercher le soleil qui poudroie sur les mimosas, récompense des longs labeurs pour les bons ouvriers de l’écriture, au déclin de leur âge.

Et c’était dans ce salon aux blanches boiseries Louis XVI, que nous reprenions cette conversation, commencée aux Mazures, et que nous avions reprise plus d’une fois à l’ «Astronomie» comme nous appelions la maison, toujours pleine d’étoiles de toutes dénominations et de toutes grandeurs, où règne notre amie, la baronne Vaxelaire, présidente à Bruxelles de l’Alliance Française et Parisienne à Paris.

Ainsi, je ne vous verrai plus. Ni ici, ni là… Mais quand donc l’absence a-t-elle eu le pouvoir de détruire ce qui fut ? Une parole de Shakespeare que nous aimions l’un et l’autre nous donne la réponse dans «La Tempête» : «And nothing is, but what is not.»

Si l’absence était vraiment le plus grand des maux, qui donc aurait construit des cathédrales, pour ce Dieu qui n’est présent sur la pierre du sacrifice que par une opération de L’Esprit ?

Qui me donne le courage de vous écrire, quand on me dit que vous avez cessez de vivre ? C’est à présent que je sais tout ce que je vous dois, c’est maintenant que je comprends non pas ce que j’ai perdu, mais ce que j’ai gagné à vous connaître.

On the 21st of July 2000, we went with friends to the park in front of the Royal Palace in Brussels to see the traditional fireworks organized for the Belgium’s “fête nationale feestdag”. The children were interested by the Belgian Army presentation of its mission. We took a picture of our little four years old daughter with her little friends on an artillery tank. After that, we enjoyed the superb fireworks very well orchestrated. They will remember the “bouquet final”. We used the Metro to get back to our cars parked near the Cinquentenaire. It was very crowed. Success!

During the week-end at a brocante in Waterloo, I found the “Livre d’Or de la Résistance en Belgique”. In this book, a precise list (but probably never complete) of Belgian Résistants is given. Some heroic stories and horrible sufferings of these men and women are compiled as well as the role of the press to maintain the morale of the occupied Belgium during the second world war. As Marechal Montgomery [Monty] said, the important thing is to remember. All these lives were not lost in vain. When watching fireworks, let’s have a thought for those who really sacrificed their lives for our freedom.

SECRET
Supreme Headquarters
ALLIED EXPEDITIONARY FORCE
Office of the Supreme Commander

ORDER OF THE DAY

To the officers and men of all Belgian Resistance Organizations.

Now that the soil of Belgium is almost liberated, I wish as Supreme Commander of the Allied Expeditionary Forces to pay sincere tribute to the officers and men of the resistance groups who in carrying out my orders, have fought so magnificently. They can be justly proud of having by their devoted heroism contributed so largely to the liberation of their beloved homeland. The rapidity of the advance of the Allied Forces which has spared your country the horrors of war has been due in no small measure to your help. I salute especially your honoured dead and wounded.

The success which has attended our arms has led us out of Belgium into other theatres of operations. Fighting is therefore over for most of you as soldiers of resistance groups. This does not necessarily mean that your services are no longer needed. The war is being carried into the enemy’s country, and if you are required by your government to continue the struggle as members of the regular Belgium Armed Forces, I shall be proud to have you once more under my command.

Meanwhile, in my capacity of Supreme Commander, I wish to say to the soldiers of the resistance groups that those of them who are no longer engaged in fighting or on guard duties etc., upon orders of the Allied Commanders, can best assist the military effort by handing in their arms to the authorities and awaiting their instructions as to how they can best play their part in the struggle ahead. These arms are urgently needed for other purposes.

Until hostilities cease, all activities, whether in the workshop or at the front, must be directed against our common enemy.

(Signed) Dwight D. Eisenhower [Ike]

Kids, the leadership of Neville Chamberlain proved insufficient during the war, and in May 1940, Winston S. Churchill was appointed Prime Minister of an all-party government. Churchill proved to be an inspiring leader in the fight with Germany. On May 13, 1940 he gave his first speech to the House of Commons, a speech which displays the oratorical skills which were so effective in keeping up public morale.


On Friday evening last I received from His Majesty the mission to form a new administration. It was the evident will of' Parliament and the nation that this should be conceived on the broadest possible basis and that it should include all parties. I have already completed the most important part of this task.

A war cabinet has been formed of five members, representing, with the Labour, Opposition, and Liberals, the unity of the nation. It was necessary that this should be done in one single day on account of the extreme urgency and rigor of events. Other key positions were filled yesterday. I am submitting a further list to the king tonight. I hope to complete the appointment of principal ministers during tomorrow.

The appointment of other ministers usually takes a little longer. I trust when Parliament meets again this part of my task will be completed and that the administration will be complete in all respects. I considered it in the public interest to suggest to the Speaker that the House should be summoned today. At the end of today's proceedings, the adjournment of the House will be proposed until May 21 with provision for earlier meeting if need be. Business for that will be notified to MPs at the earliest opportunity.

I now invite the House by a resolution to record its approval of the steps taken and declare its confidence in the new government.

The resolution:

"That this House welcomes the formation of a government representing the united and inflexible resolve of the nation to prosecute the war with Germany to a victorious conclusion."

To form an administration of this scale and complexity is a serious undertaking in itself. But we are in the preliminary phase of one of the greatest battles in history. We are in action at many other points-in Norway and in Holland-and we have to be prepared in the Mediterranean. The air battle is continuing, and many preparations have to be made here at home.

In this crisis I think I may be pardoned if I do not address the House at any length today, and I hope that any of my friends and colleagues or former colleagues who are affected by the political reconstruction will make all allowances for any lack of ceremony with which it has been necessary to act.

I say to the House as I said to ministers who have joined this government, I have nothing to offer but blood, toil, tears, and sweat. We have before us an ordeal of the most grievous kind. We have before us many, many months of struggle and suffering.

You ask, what is our policy? I say it is to wage war by land, sea, and air. War with all our might and with all the strength God has given us, and to wage war against a monstrous tyranny never surpassed in the dark and lamentable catalogue of human crime. That is our policy.

You ask, what is our aim? I can answer in one word. It is victory. Victory at all costs - Victory in spite of all terrors - Victory, however long and hard the road may be, for without victory there is no survival.

Let that be realized. No survival for the British Empire, no survival for all that the British Empire has stood for, no survival for the urge, the impulse of the ages, that mankind shall move forward toward his goal.

I take up my task in buoyancy and hope. I feel sure that our cause will not be suffered to fail among men. I feel entitled at this juncture, at this time, to claim the aid of all and to say, "Come then, let us go forward together with our united strength."

Winston Churchill - May 13, 1940

GANDHI'S SALT MARCH IN 1930

British law made it illegal for Indians to extract salt from the sea washing their own beaches. They were obliged to buy it, with its high tax, for the benefit of the British Raj. But it was precisely the undernourished and the peasants who needed more salt than the rich. This and numerous other injustices “are maintained”, Gandhi wrote in a letter to the British viceroy, ‘in order to support an alien administration which is demonstrably the most expensive in the world. … Only organized nonviolence can stand up the violence of the British government. … If you see no possibility of concerning yourself with this evil, and if my letter has no influence on your heart, I shall set out on the eleventh of this month with suitable co-workers to break the salt law.”

It was a year of increasing unrest and also of violent outbreaks on both sides. The closer the March 11 came, the more tension grew throughout the country. Many journalists besieged Gandhi’s ashram; telegrams arrived from all over the world. For the viceroy it was a now to late to have Gandhi arrested once again. When on March 12 the morning prayers had been said, 78 men set out on foot for the sea, 200 miles away. A horse had been brought along for the 61-year-old mahatma, but he never made use of it and called the 24 days of marching “child’s play”; in addition he sat at his spinning wheel an hour a day, wrote letters, and kept his diary. Hundreds and soon thousand joined him. In the districts they passed through, more than 300 Indians in British service resigned their duties as village superintendants. The police were already powerless against this avalanche of a compact nonviolent army. For those taking part, April 5 was and remained the most moving day. Gandhi went to the water’s edge and took up some salt that the British had stored there. “A great idea can have the explosive force of a drop of water that becomes lodged in a fissure in a rock. When it freezes, it can split the rock” (Albert Schweitzer). With a few grains of salt Gandhi endowed his movement with the strength and direction that was to free India and reveal to the world a secret of nonviolent struggle.


Young children are marvelous when making remarks about the world as they perceive it. It is one of the most refreshing and joyful moments parents can have sometimes at strange time of the day or the night. Carefully listening to culturally uncensored ideas of young children could give us a flavor of our future. Of course many ideas fail, a lot of effort is wasted and money lost but when it succeeds it is great, big and give work to a lot of people. Kids! To give you an example here is the short story of a famous Belgian inventor Ernest Solvay: Ernest Solvay was born in 1838, the son of a quarry master from Rebecq-Rognon in Belgium. From a very young age he exhibited a passion for physics, chemistry and natural history, and at the age of 23 he and his brother Alfred developed a new process for the industrial production of sodium carbonate. They founded the company Solvay & Cie on December 24, 1863, and flirted with bankruptcy on several occasions due to the nearly 10 years it took them to perfect the process. But in the end they succeeded, thanks both to their perseverance and to the active support of their friends and family. More recently in 1996, another inventor Mr Thomas Cane, San Rafael, CA 94901, USA was granted a US patent (US5523741) for a Santa Claus Detector: A children's Christmas Stocking device useful for visually signalling the arrival of Santa Claus by illuminating an externally visable light source having a power source located within said device. It is not silly at all! It is new, original and useful. It is obviously meeting the criteria to get a patent granted. At the origin, patent was a royal initiative. It was granted to small inventors to give them exclusive rights on their inventions for a given period of time to allow them to develop and market their invention and therefore protecting them from the big business appetites.

Another example: In 1992, a Belgian inventor was granted an US patent: US5138653: System for automatic notification of the receipt of messages in an electronic mail system . His name is Patrick Le Clercq. He is as well the father of this Belgian family. "Thanks dear wife and children for your support in this intellectual and financial marathon!". Belgium is a creative country, with only 10 millions inhabitants, the word "Belgium" is mentionned 11384 times in the inventor field of the US patents database on a total of 2551578.

A difficult aspect is to fund this creativity. Actually Belgian venture capitalism is rediscovering very small companies. You know kids, it is the money needed to start and as with skateboarding there is a risk to crash but as well to succeed a superb jump! Should we politely suggest to bankers some skateboard exercise? It could be fun!


Q-Drum, show its simplicity and durability but innovative water transport system. A child can pull a full of 50 liter Q drum over a flat terrain for several kilometers without undue strain. Children transform the Q-Drum into a useful toy, making fetching water a lot more fun.

CITATIONS

Kids, we mentioned invention above. When you get a patent for your invention a way to evaluate it is to count the number of citations your patent received from later patents. This allows you to assess the technological impact of patents. High citation counts are often associated with important inventions, ones that are fundamental to future inventions. Companies with highly cited patents may be more advanced than their competitors, and have more valuable patent portfolios.

In counting citations, CHI Research Inc., 10 White Horse Pike Haddon Heights, NJ 08035 USA, counts how many citations a patent receives from subsequent patents. This is a way of counting how many times a patent becomes prior art in future technological advances. Research has established that highly cited patents represent economically and technically important inventions.

So here is the same exercise for our patent! See the names of the companies referencing our patent. Some very well known gentlemen! But as usual they have no stamps to reply to our polite letters. We will ask our intellectual property lawyer how to solve this problem.

"May it please the Court. Ladies and Gentlemen of the Jury. We are here today, and for the coming weeks, to decide if Patrick Le Clercq's patent rights, rights granted him by the government of the United States under the Constitution, have been willfully violated by XYZ Corporation's widget."

United States Patent

 5,138,653

Le Clercq

 August 11, 1992

System for automatic notification of the receipt of messages in an electronic mail system

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IBM

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AT&T

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Cranberry Properties LLC

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Adaptive Microsystems

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Sony Corporation

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Netgong Ltd

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Individual Inventor 2

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USA Net

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Rooster Ltd

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SNI (Siemens Nixdorf)

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SamSung Electronics C., Ltd

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US West

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Murata Kikai Kabushiki Kaisha

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COMPOSITION DU COMITÉ NATIONAL DE SECOURS ET D'ALIMENTATION DE BELGIQUE
(1914-1918)

MINISTRES PROTECTEURS:

S. E. le marquis de Villalobar, ministre d'Espagne à Bruxelles
S. E. M. Brand Whitlock, ministre des États-Unis d'Amérique à Bruxelles
S. E. M. van Vollenhoven, ministre résident des Pays-Bas à Bruxelles

PRÉSIDENT:

M. Ernest Solvay, industriel

VICE-PRÉSIDENTS:

MM. Jean Jadot, gouverneur de la «Société Générale de Belgique»
L. Van der Rest, gouverneur de la Banque Nationale

MEMBRES:

MM. Josse Allard, banquier
Louis Bertrand, membre de la Chambre des Représentants, échevin de Schaerbeek
Ed. Bunge, vice-président du Comité provincial d'Anvers
le baron Evence Coppée, industriel
Jean de Hemptinne, industriel, président du Comité provincial de la Flandre Orientale
Georges de Laveleye, président du Conseil d'administration de la Banque de Bruxelles
le comte Jean de Mérode, Grand Maréchal de la Cour. président du Comité provincial du Brabant
le chevalier Emmanuel de Wouters d'Oplinter, administrateur délégué de la Banque Belge pour l'Étranger
le baron Albert d'Huart, membre de la Chambre des Représentants, président du Comité provincial de Namur
Louis Franck, avocat, membre de la Chambre des Représentants, échevin d'Anvers. président du Comité provincial d'Anvers
Emile Francqui, directeur de la Société Générale de Belgique, président du Conseil d'administration de la Banque d'Outremer
le baron Auguste Goffinet, Grand Maître de la Maison de S. M. l'Impératrice Charlotte, président du Comité provincial du Luxembourg
Max Hallet, sénateur, échevin de Bruxelles, président du Comité de l'agglomération bruxelloise
Eugène Hanssens, avocat, membre de la Chambre des Représentants
Alphonse Harmignie, vice-président de la Chambre des Représentants, président du Comité provincial du Hainaut
C. Heynderyckx, avocat, échevin de Gand, vice-président du Comité provincial de la Flandre Orientale
MM. W. Hulse, administrateur délégué de la Mutuelle des Tramways
le baron Janssen, vice-gouverneur de la Société Générale de Belgique
Emmanuel Janssen, industriel
Michel Levie, président du Conseil d'administration de la Société Nationale des Chemins de fer vicinaux et de la Caisse de Reports
Fulgence Masson, avocat, membre de la Chambre des Représentants. président du Comité provincial du Hainaut
Alfred Orban, administrateur de sociétés
Clément Peten, membre de la Chambre des Représentants, vice-président du Comité provincial du Limbourg
F.-M. Philippson, banquier
F. Portmans, sénateur, bourgmestre de Hasselt, président du Comité provincial du Limbourg
le baron Albert Ruzette, sénateur, vice-président du Comité provincial de la Flandre Occidentale
Louis Solvay, industriel
Firmin van Brée, ingénieur à la Société Générale de Belgique
E. Van Elewyck, président de la Chambre de Commerce de Bruxelles
Paul Van Hoegaerden, industriel, membre de la Chambre des Représentants, président du Comité provincial de Liége.
J. Verhaeghe, président de la Députation permanente, président du Comité provincial de la Flandre Occidentale

SECRÉTAIRE:

M. Joseph Olyff, chef de division au Ministère des Colonies

MEMBRES DÉCÉDÉS:

MM.
le général Albert Thys
le chevalier de Bauer
P. Dansette
Charles Janssen
le baron Lambert

COMITÉ EXÉCUTIF (DIRECTION)

PRÉSIDENT:

M. Emile Franqui, directeur de la Société Générale de Belgique, président du Conseil d'administration de la Banque d'Outremer

VICE-PRÉSIDENTS:

MM. Emmanuel Janssen, industriel
le chevalier Emmanuel de Wouters d'Oplinter, administrateur délégué de la Banque Belge pour l'Etranger
Firmin van Brée, ingénieur à la Société Générale de Belgique

SECRÉTAIRE:

M. Albert Henry, directeur au Ministère de l'Agriculture

Kids, Louis is the given name of many French Kings. It is as well the surname of an inventor, Monsieur Louis Braille, who really deserves our admiration.

LOUIS BRAILLE
By the British Royal National Institute for the Blind

One day a small boy crept into his father's workshop to play. He had often seen his father making shoes and he decided he would like to try. He picked up an awl, a sharp, pointed tool used for making holes in leather. As he bent over, the awl slipped and pierced his eye, destroying it forever. Some time later his other eye became infected by the first and he lost his sight altogether. So how did this child, blinded at the age of 4, become one of the most famous Frenchmen ever to live? Louis Braille was born in a small town near Paris in 1809. Despite his impaired vision the young child attended the village school with his sighted friends for two years. Eventually it became clear that he would not be able to learn much more, largely because he could not read or write. Without an education it was likely that he would have to beg on the streets, like other blind people. At the age of ten he was lucky enough to be sent to a school for blind boys in Paris, one of the first in the world. Conditions in the school were very harsh. The building was damp and unhealthy and discipline was severe. Pupils who misbehaved were beaten, locked up and given stale bread and water. In fact this kind of discipline was common in all schools at that time. Life was harsh for nearly everyone and most sighted children left school at the age of 12 and went to work in factories or down mines. At the school in Paris the blind pupils were taught practical skills like chair caning and slipper making so that when they left the school they would be able to make a living. Once a week, after lunch, the boys were taken for a walk in the park, linked together by a long rope. They were also taught to read but not to write. The letters they read were raised above the surface of the page so that they could feel them with their fingertips. This form of writing was very difficult to read because it was very hard to tell the letters apart. The letters were printed by pressing copper wire into one side of the paper to make a raised shape on the other. Because each individual letter had to be made out of wire first and because the wire then had to be forced into the paper with a press blind people were unable to write anything for themselves. One day something happened that changed their lives forever. In 1821 a soldier named Charles Barbier came to visit the school. He bought with him a system he had invented called 'night writing'. 'Night writing' had originally been designed so that soldiers could pass instructions along trenches at night without having to talk and give their positions away. It consisted of twelve raised dots which could be combined to represent different sounds. Unfortunately it proved to be too complex for soldiers to master and was therefore rejected by the army. The young Louis Braille quickly realised how useful this system of raised dots could be, provided it was simplified. Over the next few months he experimented with different systems until he found an ideal one using six dots. He continued to work on the scheme for several years after, developing separate codes for maths and music. In 1827 the first book in braille was published. Even so the new system did not catch on immediately. Sighted people did not understand how useful braille could be and one head teacher at the school even banned the children from learning it. Fortunately this seemed to have the effect of encouraging the children even more and they took to learning it in secret. Eventually even sighted people began to realise the benefits of the new system. Not only could people with impaired vision read braille but they could also write it for themselves using a simple stylus to make the dots. For the first time they began to be truly independent and to take control of their own lives. Louis Braille eventually became a teacher in the school where he had been a student. He was admired and respected by his pupils but, unfortunately, he did not live to see his system widely adopted. He had always been plagued by ill health and in 1852, at the age of 43, he died from tuberculosis. For a while it seemed as if his system would die with him. Fortunately a few key people had realised the importance of his invention. In 1868 a group of four blind men, led by Dr Thomas Armitage , founded the British and Foreign Society for Improving the Embossed Literature of the Blind. This small band of friends grew and grew to become the Royal National Institute for the Blind, the largest publisher of braille in Europe and Britain's largest organisation for people with impaired vision. By 1990 braille was being used in almost every country in the world and had been adapted to almost every known language, from Albanian to Zulu. In France itself, Louis Braille's achievement was finally recognised by the state. In 1952 his body was moved to Paris where it was buried in the Pantheon, the home of France's national heroes.

As Belgian, we would like to add that Monsieur Louis Braille is certainly a world's hero.

INVITATION
Par Pierre Loti

Mercredi 14 mai 1890

Arrivant à l’hôtel, toujours sans hâte malgré mes vêtements trempés, j’y trouve un mot de son Excellence le Grand Vizir, m’informant que Sa Majesté le Sultan veut bien m’inviter à venir ce soir, au palais de Yeldiz, assister aux illuminations du Kadir-Guidjeci : «Un chaouch, me dit-il, et une voiture seront là pour vous prendre…»

Environ trois quarts d’heure après, presque en retard, ayant dîné à la diable et fait avec fièvre ma toilette de cour, je roule à toute vitesse vers Yeldiz, dans un landau découvert escorté d’un chaouch au galop, fendant la foule de Péra. Le ciel s’est dégagé, les étoiles brillent. Les illuminations merveilleuses du Ramadan s’allument partout ; entre les banales maisons, quand une échappée de lointain apparaît, on dirait une féerie.

C’est loin, ce palais de Yeldiz, presque dans la campagne, du côté opposé à Stamboul, auquel nous tournons le dos dans notre course empressée. Le Bosphore, qu’on aperçoit aussi de temps en temps, et, au-delà, Scutari, sont illuminés comme la côte d’Europe ; la féerie se prolonge de tous côtés, jusqu’aux dernières limites du champ de vue.

En avant de nous, courant en sens inverse, voici un flot de monde, une masse humaine qui se précipite comme furieuse, des hommes demi-nus galopant et criant ; et au loin je distingue le sinistre appel : Yangun vâr !

Le feu ! c’est le feu ! Avec autant de maisons en bois, ici, c’est continuel. Tout un quartier brûle là-bas, jetant dans le ciel une grande lueur rouge, ajoutant à la fête une illumination imprévue. Ces choses que l’on traîne si vite avec un bruit lourd, ce sont les pompes, attelées d’hommes affolés qui courent à toutes jambes ; elles accrochent les roues de ma voiture… Cris et bousculades… Mais on reconnaît le chaouch du palais, on s’écarte, et nous passons…

Maintenant, des avenues de banlieue, larges et droites, presque vides, où nous reprenons notre train ventre à terre.

Puis, devant nous, une grande lueur blanche et verte, non plus d’incendie, mais de feux de Bengale : les jardins de Yeldiz. Nous franchissons des grilles : - alors, subitement, plus de foule ni de bruit ; nous galopons dans des allées vides, silencieuses, illuminées à profusion, qui forment des guirlandes et des girandoles. Rien que des feux blancs dans la verdure ; aucun bariolage, ici, sur la terre, tandis que, par contre, le ciel est entièrement étoilé de fusées bleues et rouges, rayé de pluies de feu de toutes les couleurs.

Les allées, où il n’y a toujours personne, vont en montant ; il y fait de plus en plus clair, de lumière blanche, tandis que d’un côté de l’horizon reste ensanglanté par du rouge d’incendie. Une grille encore. Puis des bataillons de cavaliers et de fantassins nous barrent le passage, formant la haie serrée ; ils portent des torches ou des lanternes, comme quelque gigantesque retraite aux flambeaux. Des centaines d’officiers sont là aussi, vêtus pour la plupart du dolman oriental aux longues manches flottantes. – Oh ! la belle et imposante armée !

Ces milliers d’hommes, si immobiles, semblent absorbés dans un recueillement religieux, au milieu de cette clarté étrange qui éblouit, sous cette pluie de feux de couleurs changeantes dont le ciel de la nuit est traversé.

Le chaouch qui me guide a les mots de passe, et les rangs s’ouvrent devant nous. Il me conduit au premier étage, dans un pavillon du palais : salons vides où il fait étonnement clair – clair des lampes intérieures et de l’illumination du dehors, dont la lueur immense entre par les fenêtres grandes ouvertes. Les boiseries, les meubles sont blancs et or ; tout est lumineux et blanc. A je ne sais quelle forme particulière du silence, on a le sentiment de cette agglomération d’hommes en armes qui sont là, muets, retenant presque leur souffle, oppressés par la présence du Souverain. Et une admirable musique religieuse arrive du dehors : un chœur de voix d’hommes très fraîches, très limpides, qui psalmodient sur des notes singulièrement hautes, avec quelque chose de pas naturel, d’extra-terrestre si l’on peut ainsi…

Un aide de camp me reçoit dans ces salons. «Le Sultan, me dit-il, est encore à la mosquée impériale, d’où partent ces chants suaves.» Mais la prière touche à sa fin, et, en m’approchant d’une fenêtre, je verrai tout à l’heure Sa Majesté sortir.

A une cinquantaine de pas de moi, un peu en contre-bas de la fenêtre où je suis, cette mosquée m’apparaît. Elle est toute fraîche et toute blanche, très dentelée d’arabesques, en style d’Alhambra. Illuminée par en dedans et en dehors, elle semble transparente autant qu’une fine découpure d’albâtre, et cette musique qui s’en échappe lui donne quelque chose d’irréel ; elle est comme la principale pièce de l’immense feu d’artifice qui, ce soir, brûle partout. Alentour de son dôme étrangement lumineux apparaissent, avec leurs myriades de globes blancs, les avenues, les jardins par lesquels je suis arrivé. Des nuages de feu de Bengale embrouillent devant moi les lointains, confondent toutes les perspectives – déjà compliquées par la hauteur d’où je regarde. Un gigantesque transparent, suspendu on ne sait comment dans l’air, porte une inscription arabe brillante sur un fond couleur de nuit ; avec toutes les fantasmagories éblouissantes qui rendent la vue imprécise, il est impossible de deviner à quelle distance cette inscription aérienne est placée : elle paraît grande et lointaine comme un signe du ciel ; elle préside à cette fête des lumières ; c’est elle qui lui donne son caractère musulman, son caractère sacré. – Et au-delà encore, on distingue des coins de vrai lointain ; sur une vague étendue noire, qui doit être le Bosphore, posent des petits objets brillants, d’une forme spéciale – qui sont des navires illuminés jusqu’aux pointes de leurs mâts…

Directement au-dessous de moi, la superbe armée, toujours immobile et recueillie, suit en esprit les prières qui se chantent dans la lumineuse mosquée d’en face. Il semble qu’en ce moment l’âme de l’Islam se soit concentrée dans ce blanc sanctuaire. Oh ! ces chants, qui vibrent sous cette coupole, monotones comme des incantations de magie et d’une sonorité si belle et si rare ! Voix d’enfants ou voix d’anges, on ne sait trop. C’est aussi quelque chose de très oriental ; cela se maintient sans fatigue dans des notes surélevées, tout en restant d’une inaltérable fraîcheur de hautbois ; c’est long, long, sans cesse recommencé ; c’est très doux, très berceur ; et pourtant cela exprime avec une infinie tristesse le néant humain, cela donne le vertige des grands abîmes.

Cependant le Sultan va sortir. Les troupes frémissent d’un léger mouvement attentif. Un landau attelé de chevaux de parade – qui trottent tout cabrés, tout debout – vient se ranger devant les marches de marbre de la mosquée, sur lesquelles on a jeté des tapis rouges ; en même temps, une trentaine de visiteurs accourent, chacun portant une de ces énormes lanternes de soie blanche, d’un mètre de haut qui sont d’étiquette depuis un temps immémorial pour les sorties nocturnes des Califes. Sous la coupole, le chœur religieux chante plus vite et plus fort, dans l’exaltation finale…

Allah ! Voici le Sultan ! Le palais, les jardins, le ciel s’embrasent d’un feu plus clair. Le canon tonne comme un grand orage et toutes les troupes inclinées jusqu’à terre, prient ensemble, avec leurs milliers de voix : «Allah ! Allah !» en longue clameur profonde…

Pour franchir les cent mètres qui séparent la mosquée des portes du palais, le landau a pris le galop de course, emportant le Souverain ; derrière lui, d’autres voitures magnifiques galopent aussi, ramenant les princesses, voilées, qui ont assisté à la prière ; les serviteurs, affolés, courent alentour, agitent leurs grandes lanternes blanches, et les troupes se referment sur ce cortège avec un cliquetis d’armes. C’est fini…

A la suite d’un aide de camp, je traverse des salons, des couloirs aux murailles et aux colonnes de nuances claires et légèrement dorées. Il y a ici, à Yeldiz, une grande sobriété d’ornementation et comme une trêve de luxe : le Souverain, qui possède, le long du Bosphore, des palais de fées dans des sites incomparables, préfère, pour son travail et pour son repos, la simplicité relative de cette résidence, qu’il a fait construire lui-même à côté d’un grand parc d’ombre.

Me voici enfin dans une sorte d’immense antichambre de cour, également simple, dont le seul luxe consiste en tapis magnifiques étouffant le bruit des pas. Elle est, ce soir, peuplée de généraux, d’aides de camp de toutes armes, en grand uniforme, les uns portant de longue tunique droite, les autres le dolman oriental à grandes manches flottantes, les uns coiffés du fez rouge, les autres du bonnet d’Astrakan noir. Ils ont très grand air guerrier ; leur assemblée, à ce seuil des appartements impériaux, est plus imposante que toutes les magnificences – et parmi eux, voici l’héroïque figure d’Osman le Ghazi, le défenseur superbe de Plevna. Tous sont debout, parlant à voix basse – ce qui semble indiquer le voisinage très proche du Souverain.

En effet, dans un petit salon latéral où me conduit le grand maître des cérémonies, se tient Sa Majesté le Sultan, seul, assis sur un canapé. Il porte un uniforme de général, que recouvre une capote militaire en drap brun, et rien d’extérieur ne le distingue des officiers de son armée.

Il y avait très longtemps que je n’avais eu l’honneur de voir Sa Majesté, et, tandis que je m’incline pour le salut de la cour, je songe tout à coup, avec un peu de mélancolie, à une première entrevue irrégulière, dont le Souverain évidemment ne peut avoir gardé aucun souvenir…

C’était il y a tantôt quinze ans, sur le Bosphore, le matin de son avènement au trône – un de ces matins de clair soleil qui, revus au fond du passé, nous semblent plus lumineux que ceux de nos jours. Les grands caïques impériaux, à éperon d’or, étaient venus le prendre à la pointe du Vieux-Sérail pour le conduire au palais de Dolma-Bagtché ; c’était de très bonne heure, il n’y avait aucune foule sur la mer, ni du reste aucune garde autour du cortège, et mon caïque, à moi qui passait pas là sans savoir, avait, par une maladresse de nos bateliers, abordé le sien : alors le jeune prince, qui allait tout à l’heure devenir Calife suprême, avait machinalement jeté sur moi un de ces regards distraits qui ne voient pas, son œil noir paraissant plonger avec anxiété dans les choses de l’avenir…

Hélas ! L’avenir de ce jour-là est devenu le passé d’aujourd’hui, et cette image, évoquée dans ma mémoire, me fait mesurer soudainement l’abîme de temps mort qui déjà nous sépare, l’un et l’autre, de cette matinée de soleil et de prime jeunesse…

L’accueil du Sultan pour ses hôtes est toujours d’une bienveillance exquise, d’une distinction très simple, d’une bonne grâce toute naturelle. Ils resteront pour moi inoubliables, les instants de ce soir-là pendant lesquels j’ai eu l’honneur de causer avec le Souverain – dans le calme un peu étrange de ce petit salon très sobrement meublé, très quelconque en somme, mais dont le seuil était si noblement gardé par ces chefs militaires parlant à voix basse, et dont les fenêtres s’ouvraient vers le tumulte lointain de la grande ville en fête, sur le ciel tout clair de feux de Bengale et de lueurs d’incendie.

Assuré d’être compris et d’être excusé avec la plus charmante indulgence, j’ai osé dire tout mon regret mélancolique de voir s’en aller les choses anciennes, de voir s’ouvrir et se transformer le grand Stamboul.

Mais j’ai arrêté là ma plainte d’artiste ; ce que j’aurais aimé y ajouter, un passant comme moi ne peut se permettre de le faire dans une causerie avec un souverain, même pendant la plus gracieuse des audiences.

Pauvre grande Turquie, si fière à l’époque où la foi, le rêve et la noble bravoure personnelle faisaient la force des nations, comment sera-t-elle bientôt, entraînée fatalement dans l’universelle banalité moderne, aux prises avec les mille petites choses mesquines, pratiques, utilitaires, qu’elle pouvait dédaigner jadis ? Comment sera-t-elle, surtout quand ses fils ne croiront plus ?

En exprimant mon attachement si profond pour ce peuple brave, j’aurais été tenté pourtant de laisser paraître un peu d’inquiétude attristée, - d’essayer de savoir si le Calife, au-delà des transitions effroyables du présent, entrevoit quelque mystérieuse aurore de temps nouveaux, que mes yeux moins clairs ne peuvent pas distinguer encore.

ALPHABET
By Lord Kinross

The first act of the third Grand National Assembly was to round off the religious reform by deleting from the Constitution the formula that ‘the religion of the Turkish State is Islam’. Turkey thus became, legally and constitutionally, a secular state, in line with those of the West. Religious belief became a matter of individual conscience. There remained, however, one tie with the East and Islam – the Arabic script, in which Turkish had been written. It thus became the first task of the new Assembly to reform the Turkish alphabet.

The simplification of the script had been discussed at intervals, against strong opposition from the Islamic authorities, for the hundred years past. The alphabet was that of Islam, as used by the Arabs and Persians, and was originally adopted by the Turks for religious reasons, despite the fact that it did not fit the sounds of their language. With its complexity of character and accents, its paucity of vowels and its ambiguity of sounds in differing contexts, it was hard for an ordinary person to read, and even an educated Ottoman Turk would often make mistakes in its spelling. This led to the growth of two separate languages, that of the Ottoman mandarin class, which was written but largely unspoken, and that of the people, which was unwritten but spoken. This excluded the bulk of the population from most written literature. How could popular sovereignty thrive without an alphabet which all the people could learn and read?

At the time of the Triumvirate, Enver had made a half-hearted attempt at a change in the offices of the War Ministry, by separating the Arabic letters instead of running them together into the normal script. But this was abandoned on the outbreak of the war. For fear of religious opposition he had not dared introduce the Latin script. Nor did Kemal, until the people had grown used to this other more radical religious reforms. In 1926 however, at a congress in Baku, the Latin alphabet was adopted for all Turco-Tatar republics in the Soviet Union. This meant that two large groups of Turkish people would no longer be able to read one another’s language, and it provided an argument for change. In the following year the Latin script was used on a new issue of postage stamps. Ismet, however, was at first strongly opposed to a general change. With his methodical staff officer’s mind he was dismayed at the prospect of the consequent confusion in government offices, in the army, in the universities and the schools and in the press, while the people learnt the new letters.

Kemal, though he was determined on the reform and had been discussing it with intellectuals for some years past, did not intend to implement it without unanimous backing. Thus it was not until 1928 that, after a few preliminary fanfares, he launched his campaign. He appointed an Alphabet Commission to prepare a new script. Knowing that, left to itself, the Commission might take years to accomplish its task, he attended its meetings in person and gave it the benefit of his forceful views. Early in the proceedings he asked Falih Rifki, his own principal nominee on the Commission, how long the change was likely to take. The consensus of opinion, said Falih Rifki, was five years. This allowed for a period in which both scripts would be taught in the schools and printed side by side in the newspapers. Kemal protested that in this case people would continue to read the old script, disregarding the new, and decreed, ‘The change will happen in three months or it will not happen at all.’

Thus within six weeks the new alphabet was ready. Kemal was always shrewd in his choice of an audience. For his introduction of the hat he had chosen a reactionary part of the country. For the introduction of the new letters he chose the more advanced centre of Istanbul. He picked, moreover, on a popular audience, assembled one August evening in the Sarayburnu Park, below the Sultan’s Old Seraglio, for the People’s Party fête. It was in this park that, in defiance of Moslem taboos against the portrayal of the human figure, a statue of the Gazi had been unveiled two years earlier. The Gazi took his place on a platform amid plaudits from the crowd, many of whom had not set eyes on their hero before. On a rival platform a modern jazz band played, and alternatively a troupe of Egyptian entertainers sang in a mournful Arabic wail. After listening to the impatiently for a while, Kemal called for a notebook and started to scribble in it. As he did so he tore out the sheets and passed them over to Falih Rifki, remarking, ‘Take a look at this.’ Falih Rifki saw and approved it as a draft for a speech, written in Latin script.

When he had done so the Gazi rose to his feet, said a few introductory words, then brandished the papers in his hand and called for someone who could read Turkish to come up to the platform and recite their contents. A youth ran up, but on seeing that they were in the Latin script, was silent. Kemal explained: ‘This young man is puzzled because he does not know the true Turkish alphabet. I will therefore have one of my comrades read it to you.’ He handed it to Falih Rifki, who read it aloud:

“Our rich and harmonious language will now be able to display itself with new Turkish letters. We must free ourselves from these incomprehensible signs that for centuries have held our minds in an iron vice. You must learn the new Turkish letters quickly. Teach them to your compatriots, to women and to men, to porters and to boatman. Regard it as a patriotic and national duty…and when you perform that duty, bear in mind that for a nation to consist of ten or twenty percent of literates and eighty or ninety per cent of illiterates is shameful. …We shall repairs these errors, and in doing so I want the participation of all our compatriots. …Our nation will show, with its script and with its mind, that its place is with the civilized world.”

A pandemonium of applause followed his words. The jazz band and the Arabic singers were silenced. Here was a far more unusual entertainment, with the Gazi himself as its star, a fascinating new game which all, whether or not they could yet read, must now learn, to please their hero. Kemal rose to his feet to drink a toast to the crowd with – to Ismet’s consternation – a glass of raki in his hand. Raising it to his lips, he said, ‘Sultans drank this. Kings have drunk it. I want to drink it with my people.’ His people showed no signs of disapproval. On his way out of the park he noticed an attractive woman, wearing a charshaf, with her husband. He asked her to lift it and reveal her beautiful face. She did so eagerly and gave him an embrace. From that August evening onwards the populace of Istanbul were at his feet.

With the literate classes he knew that he had a harder task before him. A few days later he summoned a conference of scholars, men of letters, journalists, deputies and others to discuss the reform in the Dolma Bahche Palace. Determined to have his way, but expecting certain members of his audience to be critical, he encouraged them to express their views from the platform, but conveyed to them privately a hint that their criticism, if too strongly worded, would not be welcome.

Opposition thus effectively stifled, he announced that passages in the new alphabet would be inserted from now onwards in the newspapers, and that within three months it would entirely supersede the old. He ordered that, from the autumn onwards, all teaching in the schools should be done with the new alphabet – an order which caused consternation among schoolmasters, who did not themselves know it. They had neither the necessary text-books nor the means of having them printed. The presses had no Latin characters until they could be procured by air from abroad, and no compositors to set the type until they themselves could learn them.

Kemal then instructed all the deputies to proceed to their constituencies, to organize the teaching of the new alphabet and to make propaganda in its favour. Ismet himself was sent for this purpose to his own constituency of Malatya. Expounding the new alphabet to his constituents, as the means of raising Turkey to the level of the literate nations of the West, he remarked, ‘Today the whole country has been transformed into a classroom, and the headmaster in that classroom is the Gazi himself. The Turkish people are going to work hard until they pass the exam of that school.’

This was a role that suited Kemal nicely. He has once declared that, after winning his victory, he would like to become Minister of Education and really educate the people of Turkey. And now he had achieved his ambition. Blackboards were disposed around the Dolma Bahche Palace, an article of furniture to which its marble halls had not been accustomed, and Kemal as he moved through the rooms gave lessons to visitors who came for audience, to officials, to friends, to guests, to his personal servants. The blackboard became the symbol of the new Turkish Republic.

He became so carried away by these educational activities that he even composed an Alphabet March for the people to sing and so master their letters more quickly. He called the leader of the Presidential band, and recited the march to him with instructions that it should be orchestrated and played back to him early next morning. The musicians worked on it the whole night through. But when they played it he listened morosely and said, ‘Children, though I composed this march I don’t like it a bit.’ Thus the Alphabet March was abandoned.

In November 1928 the new script became law. Introducing it into the Assembly as the ‘key which would enable the people of Turkey to read and write easily,’ he artfully referred to it not as the Latin but as the Turkish script, thus pointing its distinction from the Arabic, whose use was prohibited from the end of the year onwards. For the first time his speech was broadcast over the rudimentary Turkish radio. As ‘a token of gratitude of the Turkish people’, the Assembly presented him with a golden board, on which the letters of the new alphabet were carved in relief. That evening they were displayed, in coloured lights, on the main building in Ankara.

A few days later civil servants throughout the country sat for an examination in the script, and a ‘School of the Nation’ was founded, whose ‘chief instructor’ was to be ‘His Excellency the President of the Republic, Gazi Mustafa Kemal’. Its object was to create a literate population – from those who could not read and write at all to those who could do so only in the old characters. Within a year more than a million citizens had received its diploma. Inevitably the children and the illiterates were those who learnt the quickest, their minds unencumbered with knowledge of a previous alphabet, and their were soon giving lessons to their parents and grand-parents. For the older generation some effort and strain was involved in the change, and many continued in private to use the old script. But for the younger generation it was the reform above all which appealed to their imagination and aroused their patriotic enthusiasm. It liberated them effectively from the Ottoman past, and made them feel that they had a stake in the new Turkey of the Republic.

For the youth of Turkey henceforward, as one dramatic change followed another with the promise of new and expanding horizons, this was an exciting time to be alive.

NEVER ABANDON HOPE, YE WHO ENTER HERE. Dante. Enterpriso.
One Week - One Enterprise

The idea is very simple: we would like to demonstrate that it is possible to establish one Belgian very small enterprise in one week using only Internet resources. If we succeed we will put the full story on the web, if we fail we will debrief and list the main reasons why we failed and try it again.

This idea (date stamp: 27 january 2000) is not protected. Kids, this is a family challenge.

READY! STEADY! GO!

**** Belgian Business Plan sample:
http://www.generalebank.be/sf/ electronic business plan sample/template
http://www.bbl.be/ Entreprise Etablir un Business Plan
http://www.buce.ucl.ac.be/public/before/index.html
**** Belgian Business angels:
http://www.aepartners.be/
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http://www.bbl.be/
http://www.generalebank.be/sf/ downloaded starter handbook written by Pr Rik Donckels (KMO Studiecentrum) and Pr Dirk Deschoolmeester (Vlerik School voor Management)
**** Belgian notary:
http://www.notaire.be
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**** Belgian administration first entry point:
http://mineco.fgov.be/enterprises/
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http://www.advocaat.be/online/
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**** Belgian Digital Commerce Chamber Network:
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**** Encouragement received from Belgian Economic Affairs Ministery
**** Encouragement received from UCL Business Center +32 10 473856

**** Thanks for feedback and encouragement.
**** Good ongoing process.
**** NEW TRY WILL START SOON. FASTEN YOUR SEAT BELTS.

"JAMAIS CONTENTE"
Jentazy's electric projectile in 1899

Kids, Treasures in the vast Palace of Compiegne's museum include the “Jamais Contente”. Shaped like a large howitzer shell, this is the electrically powered car in which the Belgian Camille Jentazy hoisted the land speed record to 100km/h (65.79mph) in 1899. Jentazy's death was tragic and bizarre: the “Red Devil” was mistaken for an animal and shot while hunting wild boar.

LET'S GO FLY A KITE

SHOULD I HAVE TO EXPLAIN YOU HOW TO MAKE SABENA FLY AGAIN?

My mother was a SABENA air hostess, so fasten your seat belts!

We want airplanes with Black Yellow Red flags to fly again for our children and little princess Elisabeth to discover the world.

Terrorism? Call the reserve. We will escort SABENA flights. Belgian light arms are the best in the world and we know how to use them.

Bankers and other capitalists, show that belgian venture capitalism is not only gentle "discussions de salon" but real acts. Support the new SABENA.

And think big figures in EURO!

My kids know that I am colorblind but nevertheless here are some Maltese crosses or Jerusalem crosses for mother's day!

Do you like sciences? Nature and mathematics? How would it be possible to conciliate both? We would like to introduced a person who was quite successful trying this exercise: George Louis Leclerc, comte de Buffon (1707-88), French naturalist and author. From 1739 he was keeper of the Jardin du Roi (later Jardin des Plantes) in Paris, making it a center of research during the Enlightenment. His works include his monumental compendium on natural history, Histoire naturelle (44 vol., 1749-1804). On his reception into the French Academy in 1753, he delivered his famous Discours sur le style. On the mathematical side, Buffon's Needle is one of the oldest problems in the field of geometrical probability. It was first stated in 1777. It involves dropping a needle on a lined sheet of paper and determining the probability of the needle crossing one of the lines on the page. The remarkable result is that the probability is directly related to the value of pi (3.14159...).


Many of us use pocket calculators and probably you already have seen pocket calculators using RPN. RPN is the acronym for Reverse Polish Notation which was described in detail by the Polish mathematician Jan Lukasiewicz (Wu-ka-SHAVE-itch, the 'L' in Lukasiewicz has a short stroke through it to indicate the Polish character for "W"). Subsequently adopted by Hewlett-Packard in the early 1970's as the notation of choice for the world's first line of scientific calculators, the name was changed to RPN for "Reverse Polish Notation". Lukasiewicz was Polish Minister of Education in 1919 and professor at Warsaw University from 1920 to 1939. He worked on mathematical logic, developed a three value propositional calculus (1920) and worked on many valued logics. Lukasiewicz's last years from 1946 were spent in Dublin, Ireland, after terrible suffering during World War II.

Reverse Polish Notation is a way of expressing arithmetic expressions that avoids the use of brackets to define priorities for evaluation of operators. In ordinary notation, one might write

(3 + 5) * (7 - 2)

and the brackets tell us that we have to add 3 to 5, then subtract 2 from 7, and multiply the two results together. In RPN, the numbers and operators are listed one after another, and an operator always acts on the most recent numbers in the list. The numbers can be thought of as forming a stack, like a pile of plates. The most recent number goes on the top of the stack. An operator takes the appropriate number of arguments from the top of the stack and replaces them by the result of the operation. In this notation the above expression would be

3 5 + 7 2 - *

Reading from left to right, this is interpreted as follows: Push 3 onto the stack.
Push 5 onto the stack. The stack now contains (3, 5).
Apply the + operation: take the top two numbers off the stack, add them together, and put the result back on the stack. The stack now contains just the number 8.
Push 7 onto the stack.
Push 2 onto the stack. It now contains (8, 7, 2).
Apply the - operation: take the top two numbers off the stack, subtract the top one from the one below, and put the result back on the stack. The stack now contains (8, 5).
Apply the * operation: take the top two numbers off the stack, multiply them together, and put the result back on the stack. The stack now contains just the number 40.
Polish Notation was devised by Jan Lucasiewicz for use in symbolic logic. In his notation, the operators preceded their arguments, so that the expression above would be written as

* + 3 5 - 7 2

The 'reversed' form has however been found more convenient from a computational point of view.


Kids, here is a very important text to discuss with your parents or at school. We, as a family, sincerely believe that any person having Law competencies can help PRO DEO (for free) to better understand the content of this declaration. A lot is said about family and children.

Translations exist on United Nations High Commissioner for Human Rights site.

UNIVERSAL DECLARATION OF HUMAN RIGHTS• Preamble• Whereas recognition of the inherent dignity and of the equal and inalienable rights of all members of the human family is the foundation of freedom, justice and peace in the world,• Whereas disregard and contempt for human rights have resulted in barbarous acts which have outraged the conscience of mankind, and the advent of a world in which human beings shall enjoy freedom of speech and belief and freedom from fear and want has been proclaimed as the highest aspiration of the common people,• Whereas it is essential, if man is not to be compelled to have recourse, as a last resort, to rebellion against tyranny and oppression, that human rights should be protected by the rule of law,• Whereas it is essential to promote the development of friendly relations between nations, • Whereas the peoples of the United Nations have in the Charter reaffirmed their faith in fundamental human rights, in the dignity and worth of the human person and in the equal rights of men and women and have determined to promote social progress and better standards of life in larger freedom, • Whereas Member States have pledged themselves to achieve, in cooperation with the United Nations, the promotion of universal respect for and observance of human rights and fundamental freedoms, • Whereas a common understanding of these rights and freedoms is of the greatest importance for the full realization of this pledge, • Now, therefore, • The General Assembly, • Proclaims this Universal Declaration of Human Rights as a common standard of achievement for all peoples and all nations, to the end that every individual and every organ of society, keeping this Declaration constantly in mind, shall strive by teaching and education to promote respect for these rights and freedoms and by progressive measures, national and international, to secure their universal and effective recognition and observance, both among the peoples of Member States themselves and among the peoples of territories under their jurisdiction. • Article I • All human beings are born free and equal in dignity and rights. They are endowed with reason and conscience and should act towards one another in a spirit of brotherhood. • Article 2 • Everyone is entitled to all the rights and freedoms set forth in this Declaration, without distinction of any kind, such as race, colour, sex, language, religion, political or other opinion, national or social origin, property, birth or other status. • Furthermore, no distinction shall be made on the basis of the political, jurisdictional or international status of the country or territory to which a person belongs, whether it be independent, trust, non-self-governing or under any other limitation of sovereignty. • Article 3 • Everyone has the right to life, liberty and security of person. • Article 4 • No one shall be held in slavery or servitude; slavery and the slave trade shall be prohibited in all their forms. • Article 5 • No one shall be subjected to torture or to cruel, inhuman or degrading treatment or punishment. • Article 6 • Everyone has the right to recognition everywhere as a person before the law. • Article 7 • All are equal before the law and are entitled without any discrimination to equal protection of the law. All are entitled to equal protection against any discrimination in violation of this Declaration and against any incitement to such discrimination. • Article 8 • Everyone has the right to an effective remedy by the competent national tribunals for acts violating the fundamental rights granted him by the constitution or by law. • Article 9 • No one shall be subjected to arbitrary arrest, detention or exile. • Article 10 • Everyone is entitled in full equality to a fair and public hearing by an independent and impartial tribunal, in the determination of his rights and obligations and of any criminal charge against him. • Article 11 • Everyone charged with a penal offence has the right to be presumed innocent until proved guilty according to law in a public trial at which he has had all the guarantees necessary for his defence. No one shall be held guilty of any penal offence on account of any act or omission which did not constitute a penal offence, under national or international law, at the time when it was committed. Nor shall a heavier penalty be imposed than the one that was applicable at the time the penal offence was committed.• Article 12 • No one shall be subjected to arbitrary interference with his privacy, family, home or correspondence, nor to attacks upon his honour and reputation. Everyone has the right to the protection of the law against such interference or attacks. • Article 13 • Everyone has the right to freedom of movement and residence within the borders of each State. Everyone has the right to leave any country, including his own, and to return to his country. • Article 14 • Everyone has the right to seek and to enjoy in other countries asylum from persecution. This right may not be invoked in the case of prosecutions genuinely arising from non-political crimes or from acts contrary to the purposes and principles of the United Nations.• Article 15 • Everyone has the right to a nationality. No one shall be arbitrarily deprived of his nationality nor denied the right to change his nationality. • Article 16 • Men and women of full age, without any limitation due to race, nationality or religion, have the right to marry and to found a family. They are entitled to equal rights as to marriage, during marriage and at its dissolution. Marriage shall be entered into only with the free and full consent of the intending spouses. The family is the natural and fundamental group unit of society and is entitled to protection by society and the State. • Article 17 • Everyone has the right to own property alone as well as in association with others. No one shall be arbitrarily deprived of his property. • Article 18 • Everyone has the right to freedom of thought, conscience and religion; this right includes freedom to change his religion or belief, and freedom, either alone or in community with others and in public or private, to manifest his religion or belief in teaching, practice, worship and observance. • Article 19 • Everyone has the right to freedom of opinion and expression; this right includes freedom to hold opinions without interference and to seek, receive and impart information and ideas through any media and regardless of frontiers. • Article 20 • Everyone has the right to freedom of peaceful assembly and association. No one may be compelled to belong to an association. • Article 21 • Everyone has the right to take part in the government of his country, directly or through freely chosen representatives. Everyone has the right to equal access to public service in his country. The will of the people shall be the basis of the authority of government; this will shall be expressed in periodic and genuine elections which shall be by universal and equal suffrage and shall be held by secret vote or by equivalent free voting procedures. • Article 22 • Everyone, as a member of society, has the right to social security and is entitled to realization, through national effort and international co-operation and in accordance with the organization and resources of each State, of the economic, social and cultural rights indispensable for his dignity and the free development of his personality. • Article 23 • Everyone has the right to work, to free choice of employment, to just and favourable conditions of work and to protection against unemployment. Everyone, without any discrimination, has the right to equal pay for equal work. Everyone who works has the right to just and favourable remuneration ensuring for himself and his family an existence worthy of human dignity, and supplemented, if necessary, by other means of social protection. Everyone has the right to form and to join trade unions for the protection of his interests. • Article 24 • Everyone has the right to rest and leisure, including reasonable limitation of working hours and periodic holidays with pay. • Article 25 • Everyone has the right to a standard of living adequate for the health and well-being of himself and of his family, including food, clothing, housing and medical care and necessary social services, and the right to security in the event of unemployment, sickness, disability, widowhood, old age or other lack of livelihood in circumstances beyond his control. Motherhood and childhood are entitled to special care and assistance. All children, whether born in or out of wedlock, shall enjoy the same social protection. • Article 26 • Everyone has the right to education. Education shall be free, at least in the elementary and fundamental stages. Elementary education shall be compulsory. Technical and professional education shall be made generally available and higher education shall be equally accessible to all on the basis of merit. Education shall be directed to the full development of the human personality and to the strengthening of respect for human rights and fundamental freedoms. It shall promote understanding, tolerance and friendship among all nations, racial or religious groups, and shall further the activities of the United Nations for the maintenance of peace. Parents have a prior right to choose the kind of education that shall be given to their children. • Article 27 • Everyone has the right freely to participate in the cultural life of the community, to enjoy the arts and to share in scientific advancement and its benefits. Everyone has the right to the protection of the moral and material interests resulting from any scientific, literary or artistic production of which he is the author. • Article 28 • Everyone is entitled to a social and international order in which the rights and freedoms set forth in this Declaration can be fully realized. • Article 29 • Everyone has duties to the community in which alone the free and full development of his personality is possible. In the exercise of his rights and freedoms, everyone shall be subject only to such limitations as are determined by law solely for the purpose of securing due recognition and respect for the rights and freedoms of others and of meeting the just requirements of morality, public order and the general welfare in a democratic society. These rights and freedoms may in no case be exercised contrary to the purposes and principles of the United Nations. • Article 30 • Nothing in this Declaration may be interpreted as implying for any State, group or person any right to engage in any activity or to perform any act aimed at the destruction of any of the rights and freedoms set forth herein. •

Kids, now that the Brussels stock market is electronically integrated in the EuroNext system and could be located virtually anywhere in the world and even a few hundred meters from there in empty office building, the bourse palace could be dedicated to other purpose.

We suggest to dedicate it to a permanent exposition about children rights around the world with an historical perspective. With the sponsoring of the European Commission, this exposition could have an international recognition. It could be a great place to go for children visiting Brussels.

The “former” bourse palace could also be used as a permanent SPOC (Single Point Of Contact) for small entrepreneurs to start their business obtaining resources and material they need in one place. Putting some military organization in that could help. Financiers would have to find bullet proofed arguments for not taking the risk of funding a venture.

Several micro-credit desks could as well find a place in this old temple of the capitalism so for example brocanteurs from the place du Jeu de Balles could be able to get small funds to buy tents to protect from the rain what they are selling.

It would be justice as well if trade unions could have desks there to explain their role, action and responsibility in the economic life also in a historical perspective.

About 250,000 people in Brussels, Belgium participated in "The White March" on Saturday, October 20, 1996 to show solidarity to Mélissa and Julie and their families, also to force the government to investigate child abduction and molestation ring. This is the greatest march ever held in Belgium since the World War II.

No Belgian family will ever forget.

The Belgian royal family and specially King Albert II have shown great concern.

FANFARE
Par Annette Kolb

Il est des événements que rien n’a pu racheter, pour lesquels il n’est pas de prescription, après lesquels il est impossible de passer à l’ordre du jour. On dirait un écho niché au creux des roches ou dans la profondeur des bois, et qui ne se dissipe jamais.

L’enterrement de Mozart au cimetière des pauvres de Vienne est un de ces événements. C’est là qu’il aboutit trente-cinq ans après sa naissance – le 6 décembre 1791 – par une violente tempête de neige, sans l’escorte d’un seul ami. L’assistance, déjà très réduite, renonça, vu le mauvais temps, à faire jusqu’au bout ce chemin qui mesurait un kilomètre. Ainsi, personne ne se trouva là pour rendre un dernier hommage à ce cercueil au moment où il disparut dans la fosse. C’était d’ailleurs une fosse commune.

Peu de temps après, le 21 octobre 1793, son ancienne protectrice, la reine Marie-Antoinette, accomplissait, elle aussi – encore vivante – son dernier voyage. Elle avait les mains liées si serrées derrière son dos que les cordes lui entraient dans la chair. Elle passa ainsi, offerte en pâture aux regards de la foule, devant le Louvre et leva vers ses fenêtres des yeux dont l’expression était déjà défunte. Puis la charette roula le long de la rue Saint-Honoré vers le lieu du supplice. Une dignité mystique devait l’envelopper en cet instant. Mais un témoin oculaire, le peintre Louis David, nous a laissé certain dessin qu’on est en droit de considérer comme une flatterie dédiée aux puissants du jour. Car un trait hargneux, et dont la vulgarité même le trahit, marque ce profil où se reflète la bassesse du portraitiste ; on dirait qu’il goûte à l’avance l’instant où l’on jettera à ses pieds la tête tranchée de cette reine martyrisée jusqu’à son dernier souffle.

Enfant, à Schönbrunn, elle avait joué avec Mozart. Un jour qu’il était tombé sur le parquet glissant du château, la petite archiduchesse l’avait relevé avec cette grâce qu’elle devait conserver toute sa vie. De cet instant, l’enfant prodige lui demeura attaché.

Ils ne devaient plus se rencontrer. La vie ne les réunit pas. Seule, la mort, la désolation d’un abandon total au point de rendre leurs deux corps introuvables, rapprocha leurs destins – victimes tous deux de la barbarie de nos coeurs. Et n’était-il pas aussi royal, ce pauvre Mozart, inhumé si négligement qu’on ne marqua même pas d’une croix la place où il reposait ? Certes, aucune tombe ne lui conviendrait : là encore il se distingue de la plupart des hommes. Mais comme il est significatif, son départ de ce monde – qui est bien toujours le même ! Cependant, il nourrit l’illusion du progrès, il se vante d’avoir changé parce que les plus misérables orchestres massacrent l’ouverture des Noces de Figaro «redemandée», et que les débutantes les moins averties s’attaqent à ses airs les plus difficiles. Mozart fut toujours un méconnu : naguère on le dédaignait, aujourd’hui on le trahit. Certes, il convient d’estimer à leur valeur les travaux des sociétés et des instituts consacrés à son grand souvenir. Nous devons à leur pieux effort la découverte ou la conservation de maints trésors. À cet égard, «Les études mozartiennes» de Paris font de la bonne besogne ; mais à Naples, toute une bibliothèque d’anciens chefs-d’oeuvre italiens dort dans un musée comme dans un tombeau.

Toutefois, c’est une folie dangereuse que de vouloir rendre populaire une grande et noble musique. Nous savons ce que nous ont valu la vogue de Bach, la vogue de Beethoven et surtout la vogue torrentielle de Richard Wagner. Mozart ne peut avoir aujourd’hui qu’un cercle restreint d’authentiques admirateurs, comme il n’eut de son vivant qu’un tout petit nombres de partisans et d’amis. Encore ceux-ci ne lui demeurèrent-ils même pas fidèles. Comment se fait-il que la Loge prospère à laquelle il appartenait n’ait pas pris soin de lui ? Et ses protecteurs – comtes ou princes – qui le recherchaient tellement quelques années plus tôt, qu’avaient-ils à présent à lui reprocher ? Qui nous le dira ? Qui nous expliquera la défection de ces Estherazy, de cette comtesse Thun, de tant d’autres ?…

Peut-être les lignes suivantes, empruntées à la correspondance d’un certain M. Foster, de Berlin, nous fourniront-elles, dans leur platitude même quelque éclaircissement : «Vous ne sauriez croire, écrit-il à Vienne avec enthousiasme, combien ils sont affables et gentils. C’est à peine si l’on sent qu’on est parmi des gens de qualité, et l’on pourrait à chaque instant l’oublier et les traiter sur un pied d’égalité, comme des camarades, etc.» La dignité de Mozart répondait à sa grandeur. Que le ton de ses lettres soit caustique, malicieux ou même désespéré, il n’est jamais humble. Il possédait par avance – précurseur en cela aussi – la grande idée de liberté qui, venue de France, passa comme un ouragan sur l’Europe. Certes, cet homme unique était par essence à l’abri des illusions de partis et des idéologies sociales. On parle très peu de son intelligence parce que son intellectualité demeurait à l’arrière-plan. Mais il avait compris les lamentables rouages de notre existence, qui lui refusaient la possibilité de se réaliser pleinement. Le fait qu’il devait laisser le monde enrichi d’un si somptueux présent n’était pas de ceux qui entrent dans la comptabilité du destin. Dans la vie quotidienne, seules les questions immédiates importent : la modeste cuisine, le livre de comptes, les vertus ménagères. Contre tout cela l’instrument le plus précieux qui eût jamais existé pouvait bien venir se briser, rien ne le protégeait. Il voyait de plus en plus lucidement que l’aide efficace ne lui serait pas accordée ou lui serait accordée trop tard – ce qui revient au même – et qu’il était voué à la défaite, à la fin prématurée. Sa conscience de ces choses le précédait durant les dernières années de sa vie ainsi qu’une ombre noire.

Il se donna pourtant à ce monde auquel il ne croyait plus avec une telle ferveur qu’il semble qu’il ait voulu le soulever. Une force intérieure le poussait vers sa dernière solitude.

La parole immortelle : «Vous êtes des dieux…», ce n’est pas au saint qu’elle s’adresse, mais au profane dont l’âme est faite pour accomplir l’oeuvre des Anges.

POST SCRIPTUM de Jean Giraudoux

Rien ne sert de jouer Mozart là où est perdu ce qui est Mozart, c’est-à-dire la liberté, la franchise, et la joie.

Marivaux (1688-1763), the most celebrated French dramatist of the 18th Century, can be considered the Mozart of playwrights. With passion, verve and elegance, he explores the ways in which love can play surprising tricks on us, especially when we think we are smarter than our hearts. Like many of Marivaux's works, The Game of Love and Chance examines the vulnerability of young people as they face the daunting responsibilities of adulthood, love and the complications of life.

"Marivaux, out of fashion for most of the century, has suddenly become all the rage. Not really surprising. At a time when we seem to have lost all delicacy in the art of expressing love, the 18th Century French playwright's elegant probing of the workings of the human heart comes to us like drops of rain in the desert." [The Herald, London, U.K.]

- MARIVAUX ET LA CONTESTATION SOCIALE -

La contestation pourrait se définir comme un conflit, une opposition. Dans le cas étudié, la contestation sociale pourrait être un refus des structures sociales du 18ème siècle. Or, Marivaux, écrivain assez caractéristique de cette époque est un polygraphe : à la fois journaliste, romancier, homme de théâtre, la diversité de ses formes d’écriture pourrait nous amener à penser qu’une certaine critique de l’ordre établi, une contestation sociale serait sous-jacente à chacune de ces œuvres. La vie de l’écrivain étant entourée d’inconnu, il faudra s’appuyer sur d’autres éléments autres que biographiques pour tenter de mettre à jour cette critique. Nous étudierons tout d’abord les formes de cette contestation puis le contenu pour enfin aborder les limites de cette remise en cause de l’ordre établi.

I - Les procédés qui visent à la contestation

1) «Castigat ridendo mores»

Cette expression latine a pour référence la fonction que la comédie a de corriger le jeu social par le rire et le comique. Il est utile de savoir que ce terme était la devise des Comédiens Italiens auxquels Marivaux confiait la plupart de ses pièces.

Le principe est clairement énoncé dans l’Ile des Esclaves, l’intention étant explicitement affirmée par Trivelin, le maître de l’île, dés la deuxième scène :

«Nous ne nous vengeons plus de vous, nous vous corrigeons ; ce n’est plus votre vie que nous poursuivons, c’est la barbarie de vos cœurs que nous voulons détruire ; nous vous jetons dans l’esclavage pour vous rendre sensibles aux maux qu'on y éprouve ; nous vous humilions, afin que, nous trouvant superbes, vous vous reprochiez de l’avoir été […]».

Trivelin le rappellera d’ailleurs plus tard sous la forme d’une métaphore tout aussi évocatrice :

«Nous entreprenons de vous guérir ; vous êtes moins nos esclaves que nos malades, et nous ne prenons que trois ans pour vous rendre sains […] ».

On a pu également constater que Le Jeu de l’amour et du hasard mélange dans les mêmes scènes, forme comique et fond critique. Prenons l’exemple de l’acte II scène 4 pendant lequel Dorante intervient pour modifier le comportement d’Arlequin, qui, pris au jeu lui répond de façon triviale avec un comique de mots sous-jacent : «Maudite soit la valetaille qui ne saurait nous laisser en repos» ; c’est donc bien le miroir critique et contestataire des relations maîtres-valets.

Le même système est répété dans Les Fausses Confidences où durant l’acte II scène 10, Arlequin valet et Dubois sont pris dans un jeu burlesque de farce qui n’est autre qu’un prétexte pour dénoncer les abus de la hiérarchie sociale.

De plus, dans Le Jeu de l’amour et du hasard, le comique de situation est présent dans les scènes d’aveux embarrassants des valets (acte III, scène 6) dans lesquelles le quiproquo fait rire mais est, une fois de plus, le révélateur de l’aliénation sociale.

2) Masque et travestissement

Le travestissement sous forme ludique (la notion de jeu est très ancrée dans le théâtre de Marivaux) est sans conteste le prétexte à la contestation sociale. On le retrouve clairement les trois oeuvres étudiées :

- dans Le Jeu de l’amour et du hasard, valets et maîtres échangent délibérément leur rôle.

- dans l’Ile des Esclaves, le travestissement entre Iphicrate et Arlequin puis Euphrosine et Cléanthis est contraint.

- dans Les Fausses Confidences, le travestissement n’est pas aussi explicite mais existe en fait sur un mépris d’identité, l’identité de Dorante et celle de Dubois.

En fait, le travestissement découle d’une crise d’identité et de l’instauration d’un état de trouble qui va permettre à Marivaux de critiquer de façon apparemment innocente, le spectateur étant dans la confidence.

II - Domaines d’actions de cette contestation

1) L’aliénation sociale

Dans Le Jeu de l’amour et du hasard, ce thème est omniprésent et conditionne le fondement même du jeu. En effet, c’est la transgression qui en permettant aux valets de devenir maîtres va engendrer, chez ces mêmes domestiques (et ce, surtout pour Arlequin) une volonté de monter en grade : «J’espère que son amour me fera passer à table en dépit du sort qu’il ne m’a mit qu’au buffet». Le paraître qui conditionne les relations amoureuses est dénoncé ; Monsieur Orgon, en scène 4 de l’acte I lancera même : «Il faudra bien qu’ils se parlent souvent tous deux sous ce déguisement. Voyons si leur cœur ne les avertirait pas de ce qu’ils valent ».

L’esthétique du double avec les antithèse amour/raison, vrai/faux mais aussi le jeu sur la polysémie des mots et les ambiguïtés du langage fait ressortir la domination du paraître sur l’être, du mensonge sur la vérité et permet de constater que Marivaux a une vision complètement duelle du monde qui l’entoure.

Les Fausses Confidences se déroule dans un cadre fortement hiérarchisé. La scène se passe chez Madame Argante, c’est-à-dire le personnage le plus attaché aux convenances sociales. La trame de l’intrigue va donc être fondée sur la volonté des personnages de progresser dans la hiérarchie sociale de Dorante et sur les préjugés nobiliaires de Madame Argante qui déclamera en parlant de sa fille Araminte et de son manque d’ambition : « Elle s’endort malgré le bien qu’elle a […]». Marivaux dénoncera ici le poids de la disconvenance sociale.

2) La mésalliance contre le naturel de l’amour

Principale intrigue des maîtres dans Le Jeu de l’amour et du hasard, la mésalliance, c’est à dire le mariage avec une personne de condition ou de fortune considérée comme inférieure sera pour Silvia et Dorante un véritable dilemme. L’obstacle «dramatique» est encore une fois le préjugé qui interdit à un bourgeois de se marier avec un domestique. En contestant l’idéal mondain, Marivaux dénonce ici le conflit entre les sentiments et l’ordre social qui empêche le bonheur des hommes. Et, lorsqu’en scène 8 de l’acte III, Silvia demandera «Vous m’épouserez malgré ce que vous êtes, malgré la colère d’un père, malgré votre fortune ?» Marivaux, sous le couvert de Dorante répondra : «Mon père me pardonnera dès qu’il vous aura vue ; ma fortune nous suffit à tous deux, et le mérite vaut bien la naissance». A l’opposé, Arlequin et Lisette n’ont pas à s’embarrasser des considérations sociales et on dénote un naturel certain dans le jeu amoureux.

La prédominance de l’argent dans l’amour est également évoqué avec surtout dans Le Jeu de l’amour et du hasard et dans Les Fausses Confidences quelques tirades très franches : «Votre dot valait mieux que vous, maintenant, vous valez mieux que votre dot» (Arlequin, acte III - scène 9).

3) L’Ile des esclaves ou la réforme des esclaves

L’Ile des Esclaves a une portée beaucoup plus philosophique. La réforme des esclaves est explicitement énoncée par un Marivaux qui se fait peintre de la condition servile. Il rappelle ainsi à plusieurs reprises la violence des maîtres, les injures, le port de la livrée. Cette contestation est la base de la pièce, le sort des esclaves étant à l’origine de la création de l’île comme le rappelle Trivelin en scène 2 : «Quand nos pères, irrités de la cruauté de leurs maîtres quittèrent la Grèce et vinrent s’établir ici, dans le ressentiment des outrages qu’ils avaient reçu de leurs patrons […]».

On sent que Marivaux prends à parti ses contemporains (scène 10) : « Entendez-vous, Messieurs les honnêtes gens du monde ? Voilà avec quoi l’on donne les beaux exemples que vous demandez et qui vous passent». Marivaux affirme dans cette pièce l’égalité entre les êtres, la nécessité du partage tout en dénonçant la dureté sociale.

En fait, la contestation sociale, politique et même philosophique se fait à travers une fonction référentielle : le comportement irrespectueux et la mentalité écrasante des contemporains de Marivaux vis-à-vis de la condition servile.

III - Les limites de la contestation

1) Le dénouement des pièces

On pourrait penser que Le Jeu de l’amour et du hasard l’ordre social est bouleversé mais on constate bien vite qu’il n’en est rien puisque au final, les masques tombent et chacun reprend sa place. La transgression n’a été que ponctuelle.

Le dénouement de l’Ile des Esclaves est tout autant peu audacieux. Alors que l’auteur avait imaginé une situation complètement nouvelle et changeante pour ses contemporains, le spectateur se rend compte que ce n’était qu’un jeu gratuit de l’imagination. De plus la fin de la pièce est quelque peu expédiée par Arlequin : «Ah ! Vous ne voyez rien ; nous sommes admirables ; nous sommes des rois et des reines. En fin finale la paix est conclue, la vertu a arrangé tout cela».

2) La prudence de Marivaux

Principalement dans l’Ile des Esclaves qui est en fait la plus engagée de ses pièces sur le plan contestataire, on peut noter que Marivaux a tenté d’imposer un effet de distance entre le spectateur et les protagonistes. Tout d’abord, le lieu choisi pour décor de l’action est une île utopique. Ensuite le mélange des noms grecs et du mode de vie européen brouille les pistes. Enfin, le personnage même de Trivelin, est mystérieux, le spectateur ne sachant rien de lui. Cet effet de distance est cependant compréhensible, Marivaux souhait échapper à la censure de l’époque ce qui explique le caractère merveilleux de la pièce.

Toujours dans l’Ile des Esclaves, on remarque que l’auteur est prudent dans le discours de Trivelin, sur la fin de la pièce avec une tirade assez restrictive : «La différence des conditions n’est qu’une épreuve que les dieux font sur nous : je ne vous en dit pas davantage».

3) Le public

Lorsque Marivaux donne sa pièce aux comédiens Italiens, c’est à un public de maîtres qu’il s’adresse et les serviteurs ne sont pas admis à la Comédie. Il ne peut dons pas avoir de sa part incitation à la révolte : aucun esclave de son temps n’a pu lire ou entendre la pièce.

Contrairement à l’Ile des Esclaves, le Jeu de l’Amour et du hasard ainsi que Les Fausses Confidences trouvent leur destinataire parmi un public d’aristocrates et grands bourgeois, la primauté des sentiments sur la raison sociale et le règne du paraître à travers le préjugé nobiliaire les concernant particulièrement.

Pour conclure, on peut dire que la contestation sociale et la mise en œuvre de problématiques philosophiques sont bien présentes chez Marivaux ; sont objectif est moral et non politique. En outre, son but premier reste d’explorer le jeu de l’amour sous toutes ses formes. En fait, dire que le théâtre de Marivaux prépare une rébellion ou une révolution est un leurre.

Skateboarders are the modern Don Quixote trying to reach the sky for the beautiful eyes of their beloved Dulcinea! Jacques Brel would agree. "At one point Quixote says in English: 'I am a poet.' Brel translates this into French as 'Je suis presque un poète.' (I am almost a poet.) He does this for good reasons. One is that being a poet in the French literary and popular mind is the supreme accomplishment....it is for others to say: 'He is a poet.' The poet himself will sidestep and say, 'I am almost a poet, I try to be a poet, or I write poetry,' but not baldly, 'I am a poet.' It would be like a performer saying, 'I am a superstar.'

NE ME QUITTE PAS
Par Jacques Brel

Ne me quitte pas
Il faut oublier
Tout peut s'oublier
Qui s'enfuit déjà
Oublier le temps
Des malentendus
Et le temps perdu
A savoir comment
Oublier ces heures
Qui tuaient parfois
A coups de pourquoi
Le coeur du bonheur
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas


Moi je t'offrirai
Des perles de pluie
Venues de pays
Où il ne pleut pas
Je creuserai la terre
Jusqu'après ma mort
Pour couvrir ton corps
D'or et de lumière
Je ferai un domaine
Où l'amour sera roi
Où l'amour sera loi
Où tu seras reine
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas


Ne me quitte pas
Je t'inventerai
Des mots insensés
Que tu comprendras
Je te parlerai
De ces amants-là
Qui ont vue deux fois
Leurs coeurs s'embraser
Je te racontrai
L'histoire de ce roi
Mort de n'avoir pas
Pu te rencontrer
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas


On a vu souvent
Rejaillir le feu
De l'ancien volcan
Qu'on croyait trop vieux
Il est paraît-il
Des terres brûlées
Donnant plus de blé
Qu'un meilleur avril
Et quand vient le soir
Pour qu'un ciel flamboie
Le rouge et le noir
Ne s'épousent-ils pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas


Ne me quitte pas
Je ne vais plus pleurer
Je ne vais plus parler
Je me cacherai là
A te regarder
Danser et sourire
Et à t'écouter
Chanter et puis rire
Laisse-moi devenir
L'ombre de ton ombre
L'ombre de ta main
L'ombre de ton chien
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas

«Je l’aime votre Belgique, elle a pour moi cette beauté suprême : la liberté.» Victor HUGO.

CIVILISATION
Par Victor Hugo

VICTOR HUGO A SES CONCITOYENS

Mes Concitoyens,

Je réponds à l’appel des soixante mille Electeurs qui m’ont spontanément honoré de leurs suffrages aux élections de la Seine. Je me présente à votre libre choix.

Dans la situation politique telle qu’elle est, on me demande toute ma pensée. La voici :

Deux Républiques sont possibles.

L’une abattra le drapeau tricolore sous le drapeau rouge, fera des gros sous avec la colonne, jettera bas la statue de Napoléon et dressera la statue de Marat, détruira l’Institut, l’École polytechnique et la Légion-d’Honneur, ajoutera à l’auguste devise : Liberté, Égalité, Fraternité, l’option sinistre : ou la Mort ; fera banqueroute, ruinera les riches sans enrichir les pauvres, anéantira le crédit, qui est la fortune de tous, et le travail, qui est le pain de chacun, abolira la propriété et la famille, promènera des têtes sur des piques, remplira les prisons par le soupçon et les videra par le massacre, mettra l’Europe en feu et la civilisation en cendre, fera de la France la patrie des ténèbres, égorgera la liberté, étouffera les arts, décapitera la pensée, niera Dieu ; remettra en mouvement ces deux machines fatales qui ne vont pas l’une sans l’autre, la planche aux assignats et la bascule de la guillotine ; en un mot, fera froidement ce que les hommes de 93 ont fait ardemment, et, après l’horrible dans le grand que nos pères ont vu, nous montrera le monstrueux dans le petit.

L’autre sera la sainte communion de tous les Français dès à présent, et de tous les peuples un jour, dans le principe démocratique ; fondera une liberté sans usurpations et sans violences, une égalité qui admettra la croissance naturelle de chacun, une fraternité, non des moines dans un couvent, mais d’hommes libres ; donnera à tous l’enseignement comme le soleil donne la lumière, gratuitement ; introduira la clémence dans la loi pénale et la conciliation dans la loi civile ; multipliera les chemins de fer, reboisera une partie du territoire, en défrichera une autre, décuplera la valeur du sol ; partira de ce principe qu’il faut que tout homme commence par le travail et finisse par la propriété, assurera en conséquence la propriété comme la représentation du travail accompli et le travail comme l’élément de la propriété future ; respectera l’héritage, qui n’est autre chose que la main du père tendue aux enfants à travers le mur du tombeau ; combinera pacifiquement, pour les résoudre le glorieux problème du bien-être universel, les accroissements continus de l’industrie, de la science, de la l’art et de la pensée ; poursuivra, sans quitter terre pourtant, et sans sortir du possible et du vrai, la réalisation sereine de tous les grands rêves des sages ; bâtira le pouvoir sur la même base que la liberté, c’est-à-dire sur le droit ; subordonnera la force à l’intelligence ; dissoudra l’émeute et la guerre, c’est deux formes de barbarie ; fera de l’ordre la loi des citoyens et de la paix la loi des nations ; vivra et rayonnera, grandira la France, conquerra le monde, sera en un mot, le majestueux embrasement du genre humain sous le regard de Dieu satisfait.

De ces deux Républiques, celle-ci s’appelle la civilisation, celle-là s’appelle la terreur. Je suis prêt à dévouer ma vie à établir l’une et empêcher l’autre.

VICTOR HUGO.

FANTÔMES
Par Jean Baelen en 1959

Illuminer l'Acropole, transfigurer ses temples sur la nuit de l'Attique, cet hommage a été conçu et réalisé depuis bien des années. Les «fantômes du futur luxe nocturne» dont rêvait Arthur Rimbaud en l'autre siècle ont pris possession du Parthénon.

Qu'il nous soit permis de rappeler le temps où nous vîmes, pour la première fois, ce spectacle. C'était en l'automne de l'année 1944. Les Hellènes qui avaient combattu loin de leur patrie pouvaient, enfin, tendre la main à ceux qui avaient défendu, dans un drame quotidien, l'honneur de cette terre ravagée. La Grèce était épuisée, exsangue, tourmentée dans sa chair et dans son âme. Les spectres de la faim et du désespoir hantaient la ville. Mais, lorsque vint le soir et que la masse du rocher d'Athéna se fit plus dense, on vit soudain surgir sur le ciel, comme un signe de pérennité, un Parthénon de lumière.

Telle qu'elle se présentait, l'apparition était saisissante.

Le temps, néanmoins, et l'expérience révélèrent que l'éclairage nocturne, tel qu'il était pratiqué, offrait un double défaut : limité aux architectures, il les isolait de cette belle assise de pierre où tout avait commencé, l'œuvre des dieux et la peine des hommes ; trop peu nuancé, d'autre part, et trop statique, il schématisait durement les lignes.

A une lumière morte, on a substitué, de nos jours, une lumière vivante, un éclairage animé, dramatique, un dialogue d'ombres et de lueurs mouvantes soutenu par le rythme musical et par la parole qui commente.

Le conte de l'Acropole, le long drame de l'Acropole, évoquons-en brièvement les principaux chapitres, et les images diront le reste.

Au pied de la statue d'Athéna, la resplendissante statue d'or et d'ivoire que Phidias avait placée dans le Parthénon, un serpent se tenait, tête dressée. Ce serpent c'était pour les Athéniens le symbole de leur appartenance à la terre, aux profondeurs de la terre qu'ils habitaient, c'était le fier emblème de leur «autochtonie».

Leurs rois légendaires étaient représentés sortant de cette terre, mi-hommes, mi-serpents.

Aux temps historiques, un serpent sacré était vénéré sur l’Acropole, nourri de gâteaux rituels. C'est de ce serpent que Thémistocle annonça la disparition, lors de l'arrivée des Perses, en 480, afin de décider le peuple d'Athènes à se battre non plus sur sa terre, non plus à l'abri de ses remparts, mais sur mer, sur cette mer qui devait lui assurer une gloire éternelle -et une suprématie provisoire. Et, de fait, toute l'histoire des Grecs tient dans une double vocation: l'attachement passionné au rocher natal, balancé par l'appel de l'horizon infini. Rien n'a changé à cet égard. Sur l'Acropole même, les dieux avaient fixé ce destin lorsque la déesse de l'olivier conclut sa paix avec le maître des flots. Le fronton Ouest du Parthénon représentait précisément cette scène de la réconciliation d'Athéna et de Poséidon, scène chargée de signification pour les Athéniens et plus particulièrement pour les Athéniens du V. siècle, pour les contemporains du Parthénon. C'est, en effet, l'époque où s'affirme, à l'issue des guerres médiques, la vocation maritime d'Athènes.

Salamine, la grande bataille navale préparée et gagnée par Thémistocle, avait été le tournant de l'histoire. Au fond de leur Péloponnèse, les aristocrates -paysans de Sparte avaient fondé Ieur puissance sur l'emploi de l'infanterie lourde. L'aventure maritime les dépassait. Elle les dépassait, mais ils enviaient la gloire et la puissance qu'elle apportait aux Athéniens. Leur rancune, la rivalité qui s'ensuivit entre Athènes et Sparte devaient marquer toute l'histoire des Hellènes. Et aussi le destin de l'Acropole et de ses monuments. Un homme d'Etat novateur, Périclès, dont les vues allaient loin en toutes matières, proposa que la reconstruction des sanctuaires athéniens, saccagés et brûlés par les troupes de Xerxès, fût l'œuvre commune des Grecs. C'était demander une aide, mais c'était aussi marquer une solidarité qui pouvait s'étendre de la religion à la politique. Sparte fit échouer le projet. Athènes se mit donc à l'ouvrage avec ses propres moyens. Matériellement, ils étaient devenus immenses. Les cités associées à la Ligue de Délos payaient pour la paix que les trirèmes athéniennes leur assuraient. Le commerce maritime produisait des ressources considérables.

Cette prospérité et cette suprématie d'Athènes coïncidaient avec le mouvement de pensée le plus intense, avec la floraison artistique la plus ardente qu'ait jamais connus l'histoire des hommes. Dans la grande lutte de l'Occident et de l'Orient, les positions avancées des Hellènes en Asie Mineure avaient été détruites. Milet, patrie de Thalès et d'Aspasie, avait péri dans les flammes, mais il semblait qu'Athènes eût al1umé à cet incendie une torche capable d'éclairer le monde.

La science des premiers grands géomètres, la philosophie de l'Ionie et son art, Athènes reçut tout cela et le magnifia, au temps même où ses dieux protecteurs lui donnaient Cimon, Aristide, Eschyle, Sophocle... au temps, surtout, où tout son peuple, exalté par la victoire et la joie de la liberté, se sentait, avec l'aide des dieux, capable de toutes les entreprises, Plutarque et Thucydide nous ont transmis le souvenir et la vivante image de cette foule courant au travail - tous corps de métier mobilisés - pour rebâtir ses temples, dans un élan passionné. Foule créatrice, grâce au génie ordonnateur qui réglait et mettait en forme son enthousiasme : Périclès.

Figure complexe, tempérament réservé et ardent, politique idéaliste et très habile à la fois. Il faut vaincre la tendance qui nous pousse à ne voir que Périclès l'Olympien. N'oublions pas qu'un jour, accablé de soucis, il pleura sur l'Acropole, la tête entre les mains. Sa vie fut une lutte constante contre des menées obscures ou des attaques ouvertes, contre un destin le plus souvent hostile : guerre sur guerre, l'intrigue, la calomnie, la peste dans la ville, d'accablants malheurs au foyer. Le Parthénon s'est élevé dans la joie du travail, dans l'exaltation de la puissance d'Athènes. Certes. Et au milieu d'une exceptionnelle prospérité. Est-ce à dire, pour autant, que ce fut une période de calme, de repos des esprits, de confiance sereine, d'équilibre social ? Nullement. Cette auguste borne placée sur le chemin du temps nous parle, avant tout, de révolution : révolution politique et sociale, révolution dans les idées religieuses et philosophiques.

Mais, au-dessus de toutes ces agitations, l'architecte et le sculpteur imposaient leur ordre. D'un seul jet. Sans rature, sans atermoiements. Le première pierre du Parthénon fut scellée en 447 avant Jésus-Christ. Les guerres médiques venaient de recevoir une conclusion glorieuse, la rivalité d'Athènes et de Sparte connaissait un moment d'accalmie. En moins de dix ans le temple est debout. Et ce temple aussi fait révolution. Phidias, l'intendant général des Arts, et Ictinos, l'architecte, ont bien tiré de l'ordre dorique, vigoureux, strict, tout ce qu'il pouvait donner, mais en rompant, néanmoins, avec la tradition : les proportions admises sont bouleversées, le nombre des colonnes est augmenté, la rigueur de la droite est tempérée par toutes sortes de raffinements imperceptibles mais efficaces. Toute emphase est bannie ; l'outrance est exclue.

En quelques années, toute la décoration du temple est achevée. Décoration pan-hellène pour partie, car tous les Grecs feront ici pèlerinage aux Grandes Panathénées, fêtes de la foi, fêtes de l'esprit, fêtes de la commune patrie. Ils liront sur les «métopes», ces tableaux de pierre disposés sur le pourtour supérieur du temple, les combats contre les Centaures, contre les Amazones, contre les Géants, la lutte qui signifiait pour tous les Grecs le triomphe de la race élue sur les forces obscures. Mais, décoration plus proprement attique, d'autre part : pacte d'Athéna avec Poséidon, générateur de la double force d'Athènes ; exploits de Thésée, le grand rassembleur de la terre attique, aux confins de la légende et de l'histoire ; enfin, et surtout, la triomphale procession placée modestement, et comme intimement, sur la frise intérieure, la procession des Panathénées : tout le peuple d'Athènes rendant hommage à ses dieux, non par des prosternations et des attitudes de froide componction, mais en leur montrant sa joie fière, sa joie de vivre libre sur la terre que les dieux lui ont donnée.

Et ici encore il convient de saluer la hardiesse et l'innovation. Pour la première fois un temple grec s'orne d'une décoration sculpturale dont l'inspiration est puisée non plus dans le répertoire sacré des légendes ou de l'histoire fabuleuse, mais dans le spectacle actuel et vivant de la cité en liesse. Longue tapisserie de marbre de près de 160 mètres de longueur - aujourd'hui saccagée, dispersée - où se mouvait une foule : près de quatre cents figures humaines et divines, plus de deux cents animaux. Tout le cortège processionnel tel qu'il se déroulait depuis le faubourg du Céramique jusqu'au plateau de l'Acropole avec les jeunes cavaliers sur leurs chevaux fringants, les joueurs de lyre et les joueurs de flûte, les porteurs d'offrandes, les jeunes filles aux belles draperies, les simples citoyens et les sacrificateurs, tous associés dans une même pensée de reconnaissance envers les douze dieux de l'Attique qui accueillent leur hommage.

On a rapproché avec beaucoup de raison la frise de Phidias et le célèbre discours de Périclès célébrant la gloire d’Athènes. Chez le sculpteur comme chez l'orateur, même conscience de la grandeur nationale, même décence et même dignité dans son exaltation.

Pour préparer l'accès au «Grand Temple» -le mot Parthénon n'apparaîtra qu'au siècle suivant -pour introduire à ce Grand Temple, dont toute la Grèce, déjà, s'entretenait, il fallait un accès monumental digne de lui.

Les Propylées, confiées à Mnésiclès, furent commencées en 437. Rien ne fut épargné pour cette construction destinée à émerveiller le monde grec. Ce monument de la puissance d'Athènes, pourtant, est demeuré inachevé et les traces de cette interruption se lisent encore sur la pierre.

En 431 commence la lutte fratricide des Grecs. La puissance d'Athènes y sombrera, puis celle de Sparte, puis celle de Thèbes. Ni les sursauts d'énergie d'un héros ou d'une cité, ni le jeu des a11iances tardives et des ligues ne pourront sauver la vieille Hellade de l'ambition du Macédonien, puis de la convoitise de Rome.

Alexandre le Grand se fera gloire de dédier au temple d'Athéna des boucliers commémorant la bataille du Granique ; mais le fils d'un de ses généraux fera du Parthénon un mauvais lieu.

Les Empereurs romains, rivalisant avec les Princes de l'Asie, encombreront l'Acropole de lourdes architectures. Les Athéniens les remercieront par de plates dédicaces et par des statues dont on se contente parfois de remplacer les têtes, aux changements de règne.

L'Acropole, pourtant, demeure dans sa gloire, lieu de pèlerinage pour ses vainqueurs eux-mêmes. Elle domine, pendant des siècles, une ville vouée au culte de la philosophie et de l'éloquence. Saint Paul traverse cette métropole de la rhétorique et tente de l'émouvoir, mais il faut des siècles encore et la volonté des successeurs de Constantin pour que la Vierge Athéna, chassée de son temple, cède enfin la place à la Théotokos à la Mère de Dieu.

Jusqu'à la fin du XIIe siècle de notre ère, Sainte-Marie du Parthénon n'est que le siège d'un évêché byzantin, bien endormi.

Au début du siècle suivant le bruit des armes retentit. Les chevaliers de la IVe Croisade ont renversé le Basileus, pillé Constantinople, découpé l'Empire en principautés, duchés et baronnies franques. Un seigneur de Bourgogne vient planter sa bannière sur l'Acropole. Les chants de l'Eglise romaine retentissent dans le Parthénon. La chevalerie française déploie ses grâces sur ses terres d'Attique et de Béotie, jusqu'à ce qu'elle succombe, en bataille rangée, sous les coups d'autres conquérants : les rudes aventuriers de la Compagnie Catalane, écumeurs de l'Orient, qui campent à leur tour dans la «citadelle de Minerve» (1311).

Avant même que ce siècle finisse, Athènes tombe aux mains de nouveaux occupants, les Acciaiuoli, d'habiles Florentins qui font renaître quelque 'atticisme dans leur «Palazzo d'Acropoli». Fragile bastion de la culture occidentale que le Turc a tôt fait de réduire à merci (1456) au lendemain de la chute de Constantinople et de la conquête de la Morée. Le dernier duc florentin s'est rendu sans combattre. Les gros canons qui ont fait brèche dans les vieux murs de Byzance n'ont pas eu à jouer contre les remparts de Thémistocle et de, Cimon.

Pendant des siècles, l'appel du muezzin, du haut minaret qui désormais surmonte le Parthénon, célébrera la grandeur dl Allah. Des janissaires enturbannés fument philosophiquement leur pipe sur les remparts ou charment leurs loisirs en tirant au mousquet les figures des héros et des dieux. Le four à chaux engloutit mainte statue. Le temps de la grande pitié est venu pour les monuments de l'Acropole.

Vers le milieu du XVIie siècle, un gouverneur facétieux qui a fait des Propylées un harem et une poudrière veut se donner le divertissement de bombarder une pauvre église chrétienne, nichée au pied du rocher. Les éléments le préviennent : la foudre tombe sur sa poudre ; tout saute ; les Propylées de Mnésiclès ne sont plus qu'une ruine. Prodrome du désastre bientôt réservé au Parthénon.

1687. L'année fatale.

Jusqu'à cette date, la décoration du Grand Temple a pu souffrir, mais il est demeuré presque intact dans sa structure architecturale. Il va succomber comme une majestueuse victime de la grande lutte de l'Orient et de l'Occident. En 1683, la puissance turque a reçu un coup décisif, sous les murs de Vienne, de la main du roi polonais, Jean Sobieski. Venise s'est enhardie à monter une vaste expédition. Ses mercenaires, commandés par François Morosini, l'illustre vaincu du siège de Candie, et par le suédois Koenigsmark, campent sous les oliviers d'Athéna et pointent canons et mortiers vers l'Acropole. Les bombes pleuvent et rebondissent sur le Parthénon. Le 26 septembre 1687, l'une d'elles pénètre par un défaut de la toiture. Toute la poudre emmagasinée dans le sanctuaire explose, abattant vingt et une colonnes, dispersant les énormes architraves, ruinant une grande partie de la frise de Phidias. Un immense incendie ravage l'Acropole ; comme en 480 avant Jésus-Christ.

La violence de la déflagration se lit encore sur la colonnade sud, évidée dans son milieu. Le péristyle Nord a été relevé au XX' siècle, mais sans qu'on ait pu reconstituer le mur qui lui offrait un fond. Et il n'a pu être question de restaurer la toiture du temple, demeuré pour jamais béant.

Le coup de main de Morosini sur Athènes était une opération risquée, une opération de prestige, sans lendemain. Avant de faire retraite, le capitaine-général des armées de Venise voulut emporter un trophée digne de la République et capable de rivaliser avec les admirables chevaux de Saint-Marc ravis jadis à Constantinople. Son choix se porta sur le plus grand des motifs ornant encore le temple mutilé, le groupe d'Athéna et de Poséidon placé au centre du fronton occidental. Le génie compléta dignement l'œuvre de l'artillerie en précipitant tout le groupe sur le roc pendant les travaux de dépose.

Revenus sur l'Acropole, les Turcs se contentèrent de balayer très sommairement les décombres, de construire, de biais, entre les colonnes du Parthénon une petite mosquée de village, à coupoles de tuiles.

Telle se présentait l'Acropole au XVIIIe siècle, avec son enchevêtrement d'ouvrages militaires de toutes époques, son mélange de ruines imposantes et de bicoques turques, parsemé de blocs informes ou de sculptures brisées gisant dans l'herbe folle et les buissons. Cette confusion et l'indolence des Ottomans favorisaient les convoitises.

Aux voyageurs, les ruines de l'Acropole apparaissaient plus ou moins comme un bien sans maître. Certains, même, se faisaient un mérite de s'emparer des œuvres pour les sauver de la destruction. Avec le cynisme le plus naturel, un Choiseul-Gouffier, ambassadeur de Louis XVI et amateur fort éclairé, prescrivait à son agent de Grèce de «voler tout ce qui pouvait être volé en Attique». En fait, Choiseul-Gouffier vola assez peu et il laissa, en revanche, un très beau monument littéraire de son amour de la Grèce.

La triste gloire de dépouiller l'Acropole devait revenir à un autre ambassadeur, qui représenta l'Angleterre à Constantinople dans les trois premières années du XXe siècle : lord Elgin. L'affaire Elgin n'a pas cessé de passionner l'opinion, depuis l'anathème lancé par Byron contre l'Ecossais déprédateur et il s'élève encore des voix, en Angleterre même, pour réclamer le retour en Grèce des «Elgin marbles». Jamais pillage ne fut exercé avec une plus froide correction. L'ambassadeur britannique avait en mains toutes les autorisations nécessaires. Sa situation et de bons «bakchich» les avaient obtenues de la nonchalance turque. Et c'est ainsi que, le plus tranquillement du monde, des centaines d'ouvriers s'occupèrent pendant trois lustres à découper les monuments de l'Acropole, à les mettre en caisse et à les exporter pour le compte d'un lord écossais qui s'empressa de revendre le tout au gouvernement anglais (1817). Il n'en est pas moins vrai que ce forfait a déterminé en Occident une des révolutions les plus importantes de l'histoire de l'Art. Et par son énormité même. Jusqu'à Elgin, l'école de Phidias n'avait été révélée que par quelques spécialistes et par quelques échantillons trop disparates pour provoquer un mouvement d'idées. Après Elgin, des canons acceptés comme intangibles doivent céder le pas et, comme le distinguera très vite Stendhal, l'Apollon du Belvédère et l'emphatique Laocoon s'effacent devant l'art divinement naturel qui avait fleuri en Attique au milieu du V. siècle avant Jésus-Christ. Le rayon parti de l'Acropole, qui avait jadis illuminé le monde méditerranéen et l'Asie, perçait maintenant les brumes du Nord.

On peut se demander ce qui eût subsisté des monuments de l'Acropole si l'avidité des collectionneurs avait bénéficié longtemps encore de la complaisance intéressée des Turcs. Il est à présumer qu'ils eussent pris l'apparence lamentable de ces vieux livres dont on a coupé toutes les enluminures et les lettres ornées.

Mais un autre destin était réservé à la vieille «citadelle». Destin glorieux et chargé de nouveaux périls.

Cinq ans après l'entrée des marbres Elgin au British Museum, l'insurrection flambait dans toute la Grèce. L'Athènes paisible, pittoresque, avec ses minarets et ses nids de cigogne, l' Athènes un peu endormie que Chateaubriand avait célébrée dans les premières années du siècle allait à nouveau connaître les hasards et les misères de la guerre. L'état de relative tolérance qui avait fini par s'imposer entre Musulmans et Chrétiens était rompu. Du haut. de l'Acropole, la garnison turco-albanaise surveillait avec inquiétude les mouvements des bandes armées qui s'assemblaient dans la plaine et, bientôt, la ville basse fut aux mains des Grecs. Enfermés dans la citadelle, avec leurs familles et leurs biens, les anciens maîtres du pays décidaient de vendre chèrement leur vie. Tout autour, les patriotes grecs et les combattants philhellènes se rassemblaient, impatients de donner l'assaut. Et le monde avait le regard fixé sur cet enjeu symbolique.

Les moyens des attaquants étaient faibles et, à chaque instant, quelque armée du Grand Seigneur pouvait fondre sur eux. Les coups de fusil s'échangeaient, mêlés d'imprécations, et les vieux murs se teintèrent du sang des otages décapités par les Turcs sur le rempart.

Une première fois, le blocus fut rompu, dans l'été de 1821, par un corps turc venu d'Eubée. Dès le départ du pacha, la garde fut reprise et l'honneur exceptionnel de conduire le siège revint à un Philhellène français, Olivier Voutier. Le gouvernement provisoire de la Grèce lui confia la tâche de réduire la place tout en ménageant les monuments. Voutier s'acquitta au mieux de cette mission délicate. Des emplacements jadis occupés par les canons de Morosini, sa faible artillerie entretint un feu intermittent destiné à démoraliser les assiégés et à entretenir l'enthousiasme des assiégeants. Cette canonnade, de vigoureux assauts et le manque d'eau déterminèrent les Turcs à se rendre et, au mois de juin 1822, les Propylées, qui avait porté tant de bannières étrangères, purent arborer, enfin, les couleurs de la Grèce renaissante.

Le drame touche à sa conclusion. Pourtant, le cycle des épreuves n'est pas encore terminé. Dans l'été de 1826, au lendemain des heures sombres de Missolonghi, Athènes doit se rendre à Réchid-pacha qui reprend possession de la ville et foudroie sans pitié l'Acropole. Ses boulets marquent durement leurs impacts sur le marbre des Propylées et du Parthénon. Une bombe tombe sur le temple d'Erechtée. La défense est à bout de munition, mais le colonel Fabvier, vieux soldat de l'Empire que Victor Hugo célébrera, décide de ravitailler l'Acropole.

Il débarque au Phalère le 12 décembre 1826, traverse la plaine. L'Acropole se dresse devant lui, sous la lumière cendrée de la lune. Il ne reste plus qu'à traverser la ligne d'investissement des Turcs. Fabvier et chacun de ses hommes portent un sac de poudre sur l'épaule. Ces poudrières humaines avancent sans bruit. Une étincelle peut les volatiliser. La ligne turque est proche. Fabvier dira sobrement dans son rapport: «Découverts, nous prîmes le pas de charge, les armes non chargées. Les Philhellènes en tête, nous traversâmes la tranchée et l'espace qui la sépare du fort, sous un feu assez vif de mitraille et de fusil. Nous eûmes quatre hommes tués et douze blessés.»

L'action de Fabvier, qui lui vaudra l'honneur insigne d'une stèle au pied de l'Acropole, prolonge la résistance de six mois, mais Réchid-pacha accentue sa pression, intensifie son bombardement; l'armée de secours commandée par Cochrane et Church se fait battre malgré l'héroïsme et le sacrifice du grand Karaïs- kakis; la garnison, à bout de force, obtient une capitulation honorable et, le 6 juin 1827, le Turc reprend possession de l'Acropole.

Pour peu de temps. Le 20 octobre de la même année les forces turco-égyptiennes sombrent dans la bataille navale de Navarin et la diplomatie des Puissances, enfin converties à l'indépendance de la Grèce, vient couronner l'héroïsme des Grecs.

En avril 1833 les Ottomans quittent l'Acropole. Dans l'été de 1834 un sage décret du roi Othon déclasse la vieille forteresse.

Et c'est ainsi que le vénérable rocher d'Athéna qui avait été, pendant des millénaires, une place forte et un lieu de culte, devint l'un des plus célèbres hauts-lieux du monde, voué au travail archéologique et à la méditation esthétique.

Puissent ces rappels historiques faciliter, aux foules innombrables qui gravissent de nos jours la pente des Propylées, l'intelligence de ces ruines.

Reconstitution du fronton occidental.

Par un hasard providentiel, un ambassadeur de France auprès de la Porte, le marquis de Nointel, fit dessiner les principales sculptures du Parthénon, une quinzaine d'années avant la destruction du fronton.

Les dessins figurent à la Bibliothèque Nationale de Paris.

Le thème est la dispute d'Athéna et de Poséidon pour le patronage de l'Attique, au moment où la contestation va se résoudre.

Toute la partie centrale avec les deux divinités et les chevaux fut précipitée à terre en 1687 (après l'explosion) par les ouvriers de Morosini.

Le char d'Athéna était conduit par une Victoire, celui de Poséidon par une Néréide.

D'autres dieux ou figures symboliques rattachées à l'Attique contemplent et commentent la scène.

It is wrong to think that children have no taste for style. It is more a question for them to find good examples. Here is the excellent dedication of Miguel de Cervantes of the first part of his chef d'oeuvre "Don Quixote" to the duke of Bejar.

DON QUIXOTE
By Miguel de Cervantes

Dedication

To the Duke of Bejar, Marquis of Gibraleon, Count of Benalcazar and Banares, Vicecount of the Puebla de Alcocer, Master of the towns of Capilla, Curiel and Burguillos.

In belief of the good reception and honours that Your Excellency bestows on all sort of books, as prince so inclined to favor good arts, chiefly those who by their nobleness do not submit to the service and bribery of the vulgar, I have determined bringing to light The Ingenious Gentleman Don Quixote of la Mancha, in shelter of Your Excellency's glamorous name, to whom, with the obeisance I owe to such grandeur, I pray to receive it agreeably under his protection, so that in this shadow, though deprived of that precious ornament of elegance and erudition that clothe the works composed in the houses of those who know, it dares appear with assurance in the judgment of some who, trespassing the bounds of their own ignorance, use to condemn with more rigour and less justice the writings of others. It is my earnest hope that Your Excellency's good counsel in regard to my honourable purpose, will not disdain the littleness of so humble a service.

THE PRINCE
By Niccolo Machiavelli

Preface

It is customary for those who wish to gain the favor of a prince to endeavor to do so by offering him gifts of those things which they hold most precious, or in which they know him to take especial delight, in this way princes are often presented with horses, arms, cloth of gold, gems, and such-like ornaments worthy of their grandeur. In my desire, however, to offer to Your Highness some humble testimony of my devotion, I have been unable to find among my possessions anything which I hold so dear or esteem so highly as that knowledge of the deeds of great men which I have acquired through a long experience of modern events and a constant study of the past. With the utmost diligence I have long pondered and scrutinized the actions of the great, and now I offer the results to Your Highness within the compass of a small volume: and although I deem this work unworthy of Your Highness’s acceptance, yet my confidence in your humanity assures me that you will receive it with favor, knowing that it is not in my power to offer you a greater gift than that of enabling you to understand in a very short time all those things which I have learned at the cost of privation and danger in the course of many years. I have not sought to adorn my work with long phrases or high-sounding words or any of those superficial attractions and ornaments with which many writers seek to embellish their material, as I desire no honor for my work but such as the novelty and gravity of its subject may justly deserve. Nor will it, I trust, be deemed presumptuous on the part of a man of humble and obscure condition to attempt to discuss and direct the government of princes; for in the same way that landscape painters station themselves in the valleys in order to draw mountains or high ground, and ascend an eminence in order to get a good view of the plains, so it is necessary to be a prince to know thoroughly the nature of the people, and one of the populace to know the nature of princes. May I trust, therefore, that Your Highness will accept this little gift in the spirit in which it is offered; and if Your Highness will deign to peruse it, you will recognize in it my ardent desire that you may attain to that grandeur which fortune and your own merits presage for you. And should Your Highness gaze down from the summit of your lofty position towards this humble spot, you will recognize the great and unmerited sufferings inflicted on me by a cruel fate.

I HAVE A DREAM
By Martin Luther King, Jr., August 28, 1963

Five score years ago, a great American, in whose symbolic shadow we stand signed the Emancipation Proclamation. This momentous decree came as a great beacon light of hope to millions of Negro slaves who had been seared in the flames of withering injustice. It came as a joyous daybreak to end the long night of captivity. But one hundred years later, we must face the tragic fact that the Negro is still not free. One hundred years later, the life of the Negro is still sadly crippled by the manacles of segregation and the chains of discrimination. One hundred years later, the Negro lives on a lonely island of poverty in the midst of a vast ocean of material prosperity. One hundred years later, the Negro is still languishing in the corners of American society and finds himself an exile in his own land. So we have come here today to dramatize an appalling condition. In a sense we have come to our nation's capital to cash a check. When the architects of our republic wrote the magnificent words of the Constitution and the declaration of Independence, they were signing a promissory note to which every American was to fall heir. This note was a promise that all men would be guaranteed the inalienable rights of life, liberty, and the pursuit of happiness. It is obvious today that America has defaulted on this promissory note insofar as her citizens of color are concerned. Instead of honoring this sacred obligation, America has given the Negro people a bad check which has come back marked "insufficient funds." But we refuse to believe that the bank of justice is bankrupt. We refuse to believe that there are insufficient funds in the great vaults of opportunity of this nation. So we have come to cash this check -- a check that will give us upon demand the riches of freedom and the security of justice. We have also come to this hallowed spot to remind America of the fierce urgency of now. This is no time to engage in the luxury of cooling off or to take the tranquilizing drug of gradualism. Now is the time to rise from the dark and desolate valley of segregation to the sunlit path of racial justice. Now is the time to open the doors of opportunity to all of God's children. Now is the time to lift our nation from the quicksands of racial injustice to the solid rock of brotherhood. It would be fatal for the nation to overlook the urgency of the moment and to underestimate the determination of the Negro. This sweltering summer of the Negro's legitimate discontent will not pass until there is an invigorating autumn of freedom and equality. Nineteen sixty-three is not an end, but a beginning. Those who hope that the Negro needed to blow off steam and will now be content will have a rude awakening if the nation returns to business as usual. There will be neither rest nor tranquility in America until the Negro is granted his citizenship rights. The whirlwinds of revolt will continue to shake the foundations of our nation until the bright day of justice emerges. But there is something that I must say to my people who stand on the warm threshold which leads into the palace of justice. In the process of gaining our rightful place we must not be guilty of wrongful deeds. Let us not seek to satisfy our thirst for freedom by drinking from the cup of bitterness and hatred. We must forever conduct our struggle on the high plane of dignity and discipline. We must not allow our creative protest to degenerate into physical violence. Again and again we must rise to the majestic heights of meeting physical force with soul force. The marvelous new militancy which has engulfed the Negro community must not lead us to distrust of all white people, for many of our white brothers, as evidenced by their presence here today, have come to realize that their destiny is tied up with our destiny and their freedom is inextricably bound to our freedom. We cannot walk alone. And as we walk, we must make the pledge that we shall march ahead. We cannot turn back. There are those who are asking the devotees of civil rights, "When will you be satisfied?" We can never be satisfied as long as our bodies, heavy with the fatigue of travel, cannot gain lodging in the motels of the highways and the hotels of the cities. We cannot be satisfied as long as the Negro's basic mobility is from a smaller ghetto to a larger one. We can never be satisfied as long as a Negro in Mississippi cannot vote and a Negro in New York believes he has nothing for which to vote. No, no, we are not satisfied, and we will not be satisfied until justice rolls down like waters and righteousness like a mighty stream. I am not unmindful that some of you have come here out of great trials and tribulations. Some of you have come fresh from narrow cells. Some of you have come from areas where your quest for freedom left you battered by the storms of persecution and staggered by the winds of police brutality. You have been the veterans of creative suffering. Continue to work with the faith that unearned suffering is redemptive. Go back to Mississippi, go back to Alabama, go back to Georgia, go back to Louisiana, go back to the slums and ghettos of our northern cities, knowing that somehow this situation can and will be changed. Let us not wallow in the valley of despair. I say to you today, my friends, that in spite of the difficulties and frustrations of the moment, I still have a dream. It is a dream deeply rooted in the American dream. I have a dream that one day this nation will rise up and live out the true meaning of its creed: "We hold these truths to be self-evident: that all men are created equal." I have a dream that one day on the red hills of Georgia the sons of former slaves and the sons of former slaveowners will be able to sit down together at a table of brotherhood. I have a dream that one day even the state of Mississippi, a desert state, sweltering with the heat of injustice and oppression, will be transformed into an oasis of freedom and justice. I have a dream that my four children will one day live in a nation where they will not be judged by the color of their skin but by the content of their character. I have a dream today. I have a dream that one day the state of Alabama, whose governor's lips are presently dripping with the words of interposition and nullification, will be transformed into a situation where little black boys and black girls will be able to join hands with little white boys and white girls and walk together as sisters and brothers. I have a dream today. I have a dream that one day every valley shall be exalted, every hill and mountain shall be made low, the rough places will be made plain, and the crooked places will be made straight, and the glory of the Lord shall be revealed, and all flesh shall see it together. This is our hope. This is the faith with which I return to the South. With this faith we will be able to hew out of the mountain of despair a stone of hope. With this faith we will be able to transform the jangling discords of our nation into a beautiful symphony of brotherhood. With this faith we will be able to work together, to pray together, to struggle together, to go to jail together, to stand up for freedom together, knowing that we will be free one day. This will be the day when all of God's children will be able to sing with a new meaning, "My country, 'tis of thee, sweet land of liberty, of thee I sing. Land where my fathers died, land of the pilgrim's pride, from every mountainside, let freedom ring." And if America is to be a great nation this must become true. So let freedom ring from the prodigious hilltops of New Hampshire. Let freedom ring from the mighty mountains of New York. Let freedom ring from the heightening Alleghenies of Pennsylvania! Let freedom ring from the snowcapped Rockies of Colorado! Let freedom ring from the curvaceous peaks of California! But not only that; let freedom ring from Stone Mountain of Georgia! Let freedom ring from Lookout Mountain of Tennessee! Let freedom ring from every hill and every molehill of Mississippi. From every mountainside, let freedom ring. When we let freedom ring, when we let it ring from every village and every hamlet, from every state and every city, we will be able to speed up that day when all of God's children, black men and white men, Jews and Gentiles, Protestants and Catholics, will be able to join hands and sing in the words of the old Negro spiritual, "Free at last! free at last! thank God Almighty, we are free at last!"

The Japanese calligraphy was done by Shuken Motomiya, an old and much venerated Zen monk. He is currently building a temple at Fujinomiya, at the foot of Mt. Fuji. The character means "Dream".

Kids, let's try to draw this on a sheet of paper while telling us your dreams.

Dr Sigmund Freud spends the summer of 1899 in the farmhouse of Riemerlehen near Berchtesgaden, where he completes the final chapter of "The Interpretation of Dreams". This book and the method of interpretation it sets out are to remain for the rest of his life his "royal road to the unconscious". In the introduction to the second edition of "The Interpretation of Dreams" which appears in 1908 Freud describes its autobiographical component in addition to its scientific significance: "For me this book also has a further and subjective meaning which I was only able to understand after its completion. It proved itself to be a part of my self-analysis, my reaction to the death of my father, that is, to the most significant event, the deepest loss in a man's life. After I had recognized this, I felt myself unable to cover the traces of this influence."

Kids, the question is "Who are the Belgian Nobel prize winners?" With the help of the Internet, we found the following names and a short summary of the reason why they received a Nobel prize. These men are quite exceptional persons. We suggest to further search the Internet to find out more about their lives and achievements.

Chemistry 1977 PRIGOGINE, ILYA, Viscount, Belgium, Université Libre de Bruxelles, Brussels (University of Texas, U.S.A.), b. 1917 (in Moscow, Russia) d. 2003 (in Brussels): "for his contributions to non-equilibrium thermodynamics, particularly the theory of dissipative structures"

"La vérite ce n'est pas le certain et l'incertain ce n'est pas l'ignorance" (I. Prigogine)

Physiology or Medicine 1919 BORDET, JULES, Belgium, Brussels University, b. 1870, d. 1961: "for his discoveries relating to immunity"

Physiology or Medicine 1938 HEYMANS, CORNEILLE JEAN FRANÇOIS, Belgium, Ghent University, b. 1892, d. 1968: "for the discovery of the role played by the sinus and aortic mechanisms in the regulation of respiration"

Physiology or Medicine 1974 The prize was awarded jointly to:
CLAUDE, ALBERT, Belgium, Université Catholique de Louvain, Louvain, b. 1899, d. 1983;
DE DUVE, CHRISTIAN, Belgium, The Rockefeller University, New York, NY, U.S.A., b. 1917

"for their discoveries concerning the structural and functional organization of the cell"

Literature 1911 MAETERLINCK, Count, MAURICE (MOORIS) POLIDORE MARIE BERNHARD, Belgium, b. 1862, d. 1949: "in appreciation of his many-sided literary activities, and especially of his dramatic works, which are distinguished by a wealth of imagination and by a poetic fancy, which reveals, sometimes in the guise of a fairy tale, a deep inspiration, while in a mysterious way they appeal to the readers' own feelings and stimulate their imaginations"

Peace 1909 BEERNAERT, AUGUSTE MARIE FRANÇOIS, Belgium, ex-Prime Minister, Member Belgian Parliament, Member Cour internationale d'arbitrage at the Hague, b. 1829, d. 1912.

Peace 1913 LA FONTAINE, HENRI, Belgium, Member Belgian Parliament (Sénateur), President Permanent International Peace Bureau, Berne, b. 1854, d. 1943.

Lafontaine (Henri), homme politique et jurisconsulte belge, lauréat du prix Nobel pour la paix en 1912-1913, né à Bruxelles le 22 avril 1854. Peu d'hommes, en Europe, ont employé une activité plus efficace que la sienne à la propagation des idées pacifistes fondées sur le respect des droits des Etats. Ancien élève de l'école de droit de Bruxelles, il se fit d'abord, au barreau de cette ville, une solide réputation d'orateur d'affaires, professa à l'Université nouvelle des cours très suivis de droit international, et devint sénateur du royaume en 1895. Après le premier congrès de La Haye, réuni sur l'initiative de la Russie, il n'est guère de manifestation en faveur de l'arbitrage international à laquelle il n'ait participé. Il a été un des organisateurs les plus dévoués du groupe interparlementaire, de l'association internationale de la paix à Berne, et fait une persévérante campagne en faveur de la réunion, à La Haye, d'un parlement international permanent, destiné à prévenir et à juger les conflits entre les Etats. Il a, dans le même ordre d'idées, fondé à Bruxelles un Institut bibliographique, publié, pour centraliser les efforts des groupements pacifistes, une revue de grand intérêt, la Vie internationale, etc. Il était parfaitement désigné, à tous égards, pour la haute distinction dont il a été l'objet de la part de l'Académie de Stockholm.

Peace 1958 PIRE, GEORGES, Belgium, Father of the Dominican Order, Leader ofthe relief organization for refugees "l'Europe du Coeur au Service du Monde", b. 1910, d. 1969.

WASHINGTON, December 17, 1998 — Veteran prize-winning journalist Arnaud de Borchgrave was appointed today President and CEO of United Press International (UPI). He will assume his new duties on January 4, 1999, at UPI headquarters in Washington, D.C. Mr. de Borchgrave previously served as Editor-in-Chief of The Washington Times (1985-91) and as Newsweek's Chief Foreign Correspondent (1963-1980). He was a Senior Editor of Newsweek for 25 years (1955-1980), during which time he was also Managing Editor of the magazine's international editions (1962-63). He began his career with UPI, then known as UP, where he served as Brussels Bureau Chief before joining Newsweek. "Journalism," Mr. de Borchgrave said today, "is in a parlous state. Media in general have opted for the slippery slope of entertaining rather than informing. Consumers of news are turned off by an overdose of superficial coverage of a world increasingly hard to comprehend. I look forward to the challenge of repositioning a global news service for the 21st century at the forefront of the knowledge revolution."

Kids, a few years ago I gave a last visit to my grandmother on my father side, née Coupez. She was dying of general cancer in a Brussels hospital. During World War II, she lost her father, a Belgian army colonel and résistant, her mother and her sister in the bombardment of Limelette in 1944. She was the mother of six children,

five sons (Guy, Pierre, Roger, Christian, Baudouin) and one daughter (Colette) and the grandmother 23 grandchildren. My uncle Christian Le Clercq came in with a man. He was the archbishop of the favelas, Dom Helder Camara. I listened to his kind words to my grandmother and saw the smile on her exhausted face. I will remember this moment all my life. There was such a contrast between the physical aspect of the man and the immense courage of his ideas.

Archbishop Helder Camara, Brazilian liberation theologist, is well known for asking the right questions to the right people: "When you give food to the poor, they call you a saint. When you ask why the poor have no food, they call you a communist."

Progress is measured in part by the courageous people who put their careers and often their lives at risk by challenging the parameters of what is acceptable in society, even though these parameters may be damaging to the quality of life. Heroes are created from ordinary people who are willing to take risks to their personal security and safety for the benefit of the larger community.

REFLECTIONS OF A YOUNG MAN ON THE CHOICE OF A PROFESSION
By Karl Marx in 1835

History calls those men the greatest who have ennobled themselves by working for the common good; experience acclaims as happiest the man who has made the greatest number of people happy; religion itself teaches us that the ideal being whom all strive to copy sacrificed himself for the sake of mankind, and who would dare to set at nought such judgments? If we have chosen the position in life in which we can most of all work for mankind, no burdens can bow us down, because they are sacrifices for the benefit of all; then we shall experience no petty, limited, selfish joy, but our happiness will belong to millions, our deeds will live on quietly but perpetually at work, and over our ashes will be shed the hot tears of noble people.

In the French speaking part of Belgium, kids often watch RTL television which is part of Mr Frère financial empire. Who is Mr Frère? Forbes magazine gives a short biography of this very successful Belgian financier: "Baron Albert Frère, Belgium, $1.6 billion, Age: 73. The business: Former scrap iron worker, now one of Europe's most influential (yet low-profile) financiers. Through Geneva-listed company Pargesa, he's the largest shareholder in French utilities giant Suez Lyonnaise des Eaux, and partners with Germany's Bertelsmann in TV and radio empire CLT-UFA. What's new: Sold Belgian insurer Royale Belge stake to Axa-UAP, reaping a reported $465 million. Time off: Bought a Bordeaux vineyard with French pal Bernard Arnault." When you stop at a Fina or Total or ELF filling stations, you are also contemplating a part of his empire.

Another example of successful Belgian businessman is Mr Pierre Jungels, actually CEO at Enterprise Oil Ltd in England. His biography: A geological engineer with a PhD in geophysics and hydraulics, he was formerly Managing Director, Exploration and Production with British Gas p.l.c. having been previously Petrofina's Executive Director for Exploration and Production. Between 1980 and 1989 Pierre Jungels was Chief Executive and Managing Director of Petrofina UK. He served as President of the Institute of Petroleum in 1986-88. Chairman of the Centre for Marine and Petroleum Technology.

Enterprise Oil is one of the world's leading independent oil exploration and production companies and is listed on the London and New York stock exchanges. Enterprise Oil business is to provide shareholders with capital and income growth through the discovery, development and acquisition of oil and gas reserves. In all of its activities Enterprise Oil is committed to protecting the environment and promoting the health and safety of staff and contractors. Enterprise Oil objective is to be the most successful finder and producer of hydrocarbons by exploiting, with integrity, its differences and unique skills; encouraging creativity and nurturing an environment in which the best people want to work towards delivering a strong growth in values.

Tough job. Good luck, Sir!

Kids, look at the young boy in the picture. His name is Baron Didrik Snoy. He was there in 1930 at the wedding of my grandparents on my mother side. He later made a superb career at a well-known Belgian oil company. He paid a last homage to my grandmother being at her funerals in 2001.

I was lucky enough to meet him during my career. We had a chat about e-mail as a first e-mail was successfully exchanged with Singapore. He told me that we would soon be able to send e-mail to the moon. Why not! Belgians built railways in China. The moon is our next station. My grandfather who was always very interested by new technologies would certainly agree.

Sadly, he died on the 19th of December 2002. I went to his funerals on the 24th of December 2002. I was glad to see that Petrofina’s old guard is still alive and will never retire. There were enough Belgian brains there to build a new Big Belgian Company the next day. So, the baron Didrik Snoy left them as legacy some burning issues to address urgently: peace, unity, family and friendship.

Well done, Sir.

TREASURE ISLAND
By Antony Sampson in 1982

The billions of expatriate Eurodollars which slipped in and out of the world's financial centres created their own eccentric map of the world. They concentrated not only in London, Frankfurt or Zurich, but in exotic islands which could provide bankers with secrecy and security without tax or controls. Bankers have always favoured islands detached from the politics of the mainland, like Manhattan, Hong Kong, Singapore or Bahrain. But the most remote havens are the handful of Caribbean islands which began in the sixties to attract these refugee dollars. The impact of international banking on these tiny communities provides an odd sidelight on the relationship of money and politics.

A passing visitor to the island of Grand Cayman, coming ashore from a cruise ship from Miami, could easily take it for an old-fashioned colonial island making its living out of tourism. The boats from the liners come into the little harbour of George Town, facing a quayside of bright little gingerbread buildings which look almost too quaint and pretty to be true-churches with comic shaped towers and green corrugated gables, sea-captains’ houses with rough-hewn pillars holding up decorated balconies, warehouses picked out with bright colours and little fishing boats chugging in and out of the harbour. The shops along the waterfront -the English Shoppe Ltd., the antique store selling English silver, the Viking art gallery or the picturesque pub called the Cayman Arms -seem to play up to the description which used to be given to Grand Cayman, 'The island which time forgot.' The Caymanian people, whether dark or light-skinned, appear handsome, easy-going and welcoming, like an advertisement for the Caribbean in the fifties. It is bard to remember that this island is only two hundred miles away from the turmoil of Jamaica, to which it used to belong.

To the North of George Town, along the west coast, the island still appears preoccupied with tourists, of the more prosperous and sophisticated kind. A venues of royal palms and rows of Australian pille trees, swaying above the scrub, lead up to discreet little villas and clubs where visiting families stay along the seaside; and even the Holiday Inn foregoes its garish lettering and adopts a low profile, with palm-thatched sunshades leading down to the beach. The Seven Mile Beach itself, with its bright white sand and blue sea, has an atmosphere of timeless and placeless leisure, with few signs of transistors, or even newspapers: and the most purposeful tourists are the skindivers with masks, snorkels and fins, who disappear to explore the brilliant coral reefs and wrecks in the still more remote world under the sea. ln the slow pace of the beach life there is only an occasional disturbance, a sudden snatch of brisk dialogue about Eurodollars or flight-times, suggesting something more than pure escapism.

It is only the centre of George Town, behind the façade of the quayside, that reveals a more mysterious activity. Between the old British colonial relics -the government buildings, the post office, the 1919 peace memorial, with their rugged classical shapes -there is a cluster of big white slabs, four or five storeys high, with neat rectangles and glass fronts, which look as if they might have been dropped ready- made from the sky. They stare at each other, with their functional glass walls, across the two main streets of the town. Above their entrances are blazoned their names -the Bank of America, the Royal Bank of Canada, Barclays Bank, the Bank of Nova Scotia, side by side with more unfamiliar names like the Cayman National Bank and Trust Company. And inside their entrance halls are the names of far more banks on big brass plates on the walls -nearly three hundred of them including most of the famous New York and London banks. Also on the walls, displayed in small white plastic letters, are the names of hundreds of companies. Some of them are familiar multinational names, but most of them are names which seem to be vying with each other in vagueness or exoticism:

BARRACUDA
BETTER TIMES
CREATIVE MANAGEMENT
CONGO INVESTMENT
LILLIPUT INVESTMENTS
GAR
WHIRLWIND SECURITIES
GREAT EXPECTATIONS

There are, it turns out, more than 11,000 of these companies now registered in Grand Cayman. The island contains (excluding expatriates) only about 10,000 people, so that it has more companies than inhabitants. But the identity of the companies is wrapped in secrecy: 'We know who owns the banks,' the Governor explained to me in 1980, 'but not even the registrar knows who owns the companies.'

It is the shadowy presence of these companies and banks on the island, much more than its tourist charms, that accounts for the world's special interest in Grand Cayman in the last few years. It is an island of capitalism which stands out in abrupt contrast to its immediate Caribbean neighbours, Jamaica to the east and Cuba to the north. It insists on remaining a crown colony of Great Britain, apparently invulnerable to the political pressures all round it. And it has claimed to be the world's fastest-growing tax haven or, as it prefers to call itself, 'international financial centre'.

The idea of a tax-free and neutral island has an irresistible appeal to multinational bankers. Tom Clausen, of the Bank of America, looked forward to 'an international corporation that has shed aIl national identity'; Carl Gerstacker, the former head of Dow Chemicals, once explained: 'I have long dreamed of buying an island owned by no nation and of putting the World Headquarters of the Dow Company on the truly neutral ground of such an island, beholden to no nation or society.' Grand Cayman seems to promise just such an island paradise, without taxes, without political troubles, and with money flowing in and out without interruption or surveillance.

Grand Cayman has always been isolated, and some of the inhabitants like to suggest that it has a continuous tradition of buccaneering activity. There is even a legend -without much evidence -that it was the original of Robert Louis Stevenson's Treasure Island. Certainly its history was more insular than its Caribbean neighbours'. There are altogether three Cayman Islands -Grand Cayman, Little Cayman and Cayman Brac -of which Grand Cayman is much the biggest. They were discovered by Columbus on his fourth and last voyage in 1503, and they were noticed by many sixteenth-century voyagers. In 1586 Sir Francis Drake noted that he had 'passed by the islands of Caymanas, which are not inhabited. There are on the land great serpents called Caymanas like large lizards, which are edible.' But the Cayman Islands remained largely uninhabited, except by occasional castaways, pirates, deserters and turtles, and the first record of permanent settlement was in 1734, when three families were given grants to land.

The islands became British, together with Jamaica and other Caribbean islands, under the Treaty of Madrid in 1670. They were governed as part of Jamaica, but the British settlers evidently had a more easy- going attitude than those in Jamaica; the relations between slave-owners and slaves were much more relaxed, producing a large proportion of families with mixed blood. A report on the Caymans in 1887 said that they were 'a fairly well-to-do, self-reliant and loyal community', and that the tax-collectors 'took only what was brought to them'. Many of the Caymanians became seamen on American ships, and thus came to know more about America or Europe than about the rest of the Caribbean. Much of the island of Grand Cayman, which is thin and L-shaped, only twenty-two miles across, is still almost untouched by recent history. The flat of the interior still runs wild, with mangrove swamps covering a third of the territory: the highest point is a sixty-foot hill. Along the coastline are little Caymanian villages with tiny houses with green and red corrugated roofs and gimcrack shops with grand names like The Emporium or Godfrey's Enterprise; and the leisurely life of the villagers seems unaffected by the world of banking or tourism. The Caymanians do not show signs of the grinding poverty that can be seen in Jamaica: they talk a precise and articulate English, handed down from Scots missionary schools. There is not much indication of great financial ambition; there is a small business school on the island, but a student there, who turned out to be Nigerian, complained to me that the Caymanians were too lazy to seize their opportunities; and a sociology teacher discovered that all her students came from Jamaica.

In the years after the second world war, while the rest of the Caribean was caught up in anti-colonialist movements, the Caymanians were already moving towards being a kind of Caribbean Switzerland. They had no real political organisations, they followed individuals rather than parties, and they were overwhelmingly conservative. At the end of the fifties they faced their first decisive choice. When Jamaica was excitedly preparing for independence the Caymanians, led by Dr. Roy McTaggart, determined to break away from the Kingston government and to remain a British Crown Colony, with their own constitution, governor and executive council, leaving their defence and foreign policy to London. 'It wasn't that we moved away from the Caribbean,' one of the local politicians explained, 'the Caribbean moved away from us.' While other colonies went through all the high expectations and disappointments of independence, and while Cubans experienced the Castro revolution, the Cayman Islands continued to be loyal to Britain, surviving off seamen's remittances and some tourist revenues, as if nothing much was happening. George Town was still very cut off from the outside world. When William Walker, now a prominent lawyer, arrived there in 1963, as he recalls it, 'there were cows wandering through George Town, only one bank, only one paved road, and no telephones'.

By the mid-sixties a few businessmen on the island were looking with envy at the Bahamas to the north, also a British colony, which was attracting many big companies and banks by providing exemption from tax. The Caymanians sought the advice of a British tax expert called Milton Grundy, who was well known in the Bahamas, and he helped them to draft a new trust law which would make the Cayman Islands even more attractive than the Bahamas to foreign companies and individuals. One keen supporter of the scheme was the young Treasurer of the island, Vassel Johnson, a very able ex-Jamaican Indian with a long face and a wry smile, who is now Financial Secretary. He was pessimistic about the rest of the Caribbean, and saw the chance to branch out. 'We decided to create the right atmosphere,' he recalls, 'and 1966 was the take-off.'

In 1966 three things happened in quick succession. George Town airport was enlarged to take jet aircraft; the island was linked to the international telephone system; the new trust law was passed. Soon afterwards Lynden Findling became Prime Minister of the Bahamas, which were then moving towards independence, causing a wave of panic among businessmen in Nassau. Before long there was a rush of companies and banks wanting to register in Grand Cayman. 'We should have put up a golden statue to Findling,' said one lawyer in George Town. 'It wasn't that Findling said or did anything to damage the banks,' recalls Milton Grundy, 'it was just that he was black.'

The first rush of business was mainly from rich Englishmen, for whom the Cayman laws provided a way of exploiting a loophole in British tax law. The British Labour government soon closed the loophole, but the Caymans could still provide tax-free benefits to companies and individuals all round the world, particularly in the United States and Latin America. Grand Cayman was well placed, for it was on the same time zone as New York, and it was in easy reach of Miami, Panama, and other Latin-American centres -so that it became part of the classic escape route of money from South to North America. Before long most of the big North American banks were setting up offices in George Town, or putting up a brass plate and arranging for a representative to do business.

From the beginning -the Financial Secretary assured me -the Cayman government was determined to remain a 'clean spot'. They looked with disapproval at Nassau with its casinos which were often suspected of laundering 'dirty' money from Miami or Latin America. But there was a general agreement, as one Cayman banker put it, that 'you can't have a proper tax haven if you won't accept cash': and the government introduced secrecy laws more stringent than those of the Bahamas. 'There are really two things about tax havens,' explained Peter Leggatt, the manager of the Royal Bank of Canada, 'there is sophisticated management of tax avoidance, and there are people trying to evade taxes. Sometimes it's hard to tell the difference.'

The bank managers and lawyers I talked to insisted that they did not accept cash without rigorous questioning and references, but they each agreed that others were less conscientious, and each had stories of mysterious visitors arriving with a few million dollars in suitcases. Cash is an important part of their business, much of which is with relatively small customers. 'Most of my clients are individuals like American doctors and dentists,' one lawyer explained, 'who come here with fifty or a hundred thousand dollars in cash to invest: it's more secure than working for a few multinational corporations, who could suddenly leave you.'

The rush of money to Grand Cayman soon provided handsome opportunities for a handful of expatriate attorneys and accountants on the island. 'A lawyer gets 1,000 dollars for each registration,' one bank manager explained, 'and he should be able to earn 150,000 dollars -tax- free of course -for doing not very much.' William Walker is now the doyen of the attorneys and his firm holds the record -about 1,400-for the number of registered companies, whose names cover the passage outside his office. Walker has an old-fashioned gentlemanly style, with fair hair and blue eyes. His family lived in the Caribbean for three centuries: when he left Barbados after it became independent he settled with relief in Cayman. 'We are directors of about five hundred of them,' he explained, 'and most of them don't require too much work -just signing occasional documents and perhaps holding two meetings a year.' He is reticent about the nature of his clients, but he explains: 'We funnel a lot of money from Central and South America. ...Most of the money coming out of Latin America, of course, is in breach of their governments' exchange control regulations.'

The lawyers and bankers in George Town are accustomed to being criticised abroad for tax evasion, which they regard with amusement. Ten years ago the chairman of the London-based company Lonrho, Lord Duncan-Sandys, was revealed to be receiving an extra 100,000 dollars a year tax-free through the Cayman Islands, and the then British Prime Minister, Ted Heath, referred to it as the 'unpleasant and unacceptable face of capitalism'. 'We had some good jokes about it,' said one lawyer. 'It may have been unacceptable to Mr. Heath, but it certainly wasn't illegal.'

The new business also benefited the small Caymanian middle class, a tightly-knit group: a high proportion of them are called either Bodden or Ebank, and some of the Bodden family like to claim descent from a deserter from Cromwell's army who is said to have settled on the island in the mid-seventeenth century. Three out of the seven members of the Cayman Cabinet, or 'executive council', are Boddens; and of the eight other members of the legislature one is a Bodden and three are Ebanks. Some of them are only distantly related, but Caymanians often use 'the Boddens' to describe the interlocked business interests. The most prominent Caymanian lawyer is Truman Bodden, a slender and very courteous man with a shy smile, who inhabits a panelled office decorated with certificates and a portrait of the Queen. He sounds confident that the continuing conservatism of his people will allow his business to thrive. 'Most Caymanians are homeowners, sir,' he told me, 'and most of them have been to sea. They know how quickly a country can be wrecked, and that if they do anything stupid they'll lose. We mustn't kill the goose that lays the golden egg.'

But the really big business of the Cayman Islands goes on inside the banks: and here we are in the most nebulous and secretive regions of global finance, in the midst of Cloud Nine. A few of the banks like Barclays of London or the Royal Bank of Canada have a reassuring physical presence, with a real banking hall and tellers behind counters who will take deposits from ordinary people. But this is misleading; for the really important transactions go on in upstairs offices which have no truck with small customers. When I telephoned the manager of the Bank of America he told me he did not wish to discuss his bank's activities, 'We keep a very low profile here' (a description which seemed inaccurate, I pointed out, since Bank of America was proclaimed across the top of the building). Enquiries elsewhere soon suggested that the bank has a staff of about thirty people dealing extensively in Eurodollars: 'They've got a massive operation,' one lawyer told me: 'They move billions of Eurodollars, mostly out of Latin America.' Some of the banks are actually based on Grand Cayman, where the secrecy protects them from the oversight of supervisors; including the remarkable Bank of Credit and Commerce International, which is jointly based between here and Luxemburg.

Eurodollars lie behind much of the financial activity of Grand Cayman, but no one on the island, of course, has ever actually seen one. The Eurodollars which flow in and out are not controlled by any islander, but by bankers and dealers who keep their own 'Cayman book' in London or New York and telex instructions to the island. To obtain the tax advantages of Grand Cayman, a foreign bank only needs a minimal presence on the island -a brass plate, and the use of a secretary, a lawyer and a telex (the Caymans claim to have the highest proportion of telex machines per head -one to a hundred -of any country in the world). 'I doubt whether anyone in the Caymans,' said one London expert, 'knows what the Eurodollar market really is.' But so long as Eurodollars are 'booked' or 'parked' in the island (banks talk of them as if they were cars) they can accumulate interest or capital gains without paying tax to any government. And the attraction is so great that by 1980 there were about thirty billion Eurodollars booked in Grand Cayman - about three per cent of the total world's supply -with perhaps another thirty billion in the accounts of insurance and other companies in the island.

The specific whereabouts of these billions puzzles many people who deal with them. 'Some of my clients get very worried,' one lawyer told me: 'They insist on a special clause to compensate them if Castro invaded the island. I have to explain that Castro wouldn't find any Eurodollars in the safe: they're all really held in New York or London.' But their technical presence on the island is enough to ensure their freedom from tax or supervision. This is a matter of periodic concern to central banks, particularly the Federal Reserve; for they are beyond their controls, and they deprive the treasuries of large revenues. 'The United States tried to inspect the bank books here four years ago,' Vassel Johnson, the Financial Secretary, recalled in 1980, 'but we asked the British government to oppose their request. The Americans were furious that the/little Caymans were resisting them.' Soon after this incident the Cayman government passed a new 'Confidential Relationships (Preservation) Law' which stipulated that 'no information relating to a customer or client account with any institution within the local financial community can be disclosed to anyone'.

The Caymanians are very aware that they face constant competition in the tax-haven business. In 1980 they were reckoned to be roughly equal to Hong Kong and Bahrain in the numbers of Eurodollars, and way ahead of the British Virgin Islands. The Bahamas are still in a different league, with about three times as many Eurodollars; but the Caymanians have made rapid strides, and they put great faith in their political stability and compactness. Many of the international banks keep only a 'shell' in George Town; but the Caymanians seem confident that they regard this as their ultimate haven, to which banks and companies can retreat when things get too hot in the Bahamas or Panama. At the same time all these islands are worried that New York, the nicest island of all, will establish its own tax haven with the same advantages, depriving them of much of their raison d'être.

How far has this rarefied business affected the ordinary life of the island? Is it possible to benefit from the revenue without being spoilt by it? The actual banks employ a few hundred people and bring in a relatively small revenue; but the growth of the tax haven, it soon emerges, is closely linked to the expansion of employment, construction and tourism: 'A lot of men who arrive in brightly-coloured shirts with their wives,' one government official explained, 'turn out to have come over for an annual general meeting, having some fun at the same time.' The Cayman Islands have been attracting leisurely tourists, snorklers and escapists, for some years; but in October 1978 a new air-route was inaugurated between Houston and George Town, which soon quickened the pace of development. The chief promoter of this Texan connection was Jim Bodden, the Minister for Tourism and representative for Bodden Town, who is also the island's most prominent and controversial businessman. A big man with swept-back grey hair and sideboards, he lived for sixteen years in Texas and Florida, and his style is thoroughly Americanised. He runs the Cayman Development Corporation, from a long low building behind the Seven-Mile Beach which looks as if it might have been ordered from Texas. Inside there is fake panelling and a long green carpet leading up to Jim Bodden's open door: when I called the lobby was loud with American voices discussing deals: 'we're ready to close' -'get the lawyers' -'he'll be coming down the runway any moment' -'we can always split up the site'. Jim Bodden explained to me quietly the huge benefits that tourism and building will bring to the island, constantly interrupted by brisk telephone calls ('the [not a polite word] ...what happened? ...I'll look after him'). 'We're pretty important to the free world,' he insisted to me, 'we were solid behind the United States when Castro came in ...This is one haven of peace that remains in the world.'

The haven was clearly becoming less peaceful. Jim Bodden's lobby displayed plans for clusters of Florida-type condominiums, and along the Seven Mile Beach the concrete skeletons of long buildings were already sticking up above the palms. The Texan connection was already visible and audible: hotels and restaurants displayed a special yellow book in which Houstonians were invited to write their names, in order to be invited to a frolicking annual Houston-Cayman reunion. On the north shore more sedate houses have been developed for Americans who retire on the island (the Cayman government gives them a six- month trial period, after which, if approved, they can stay for ever). Rows of neat, well-gardened villas stretch along the coast, surrounded by oleanders and grape vines, each with the name and home state of their owner hanging outside on a rustic board. ('They're always hoping that someone from their own state will call on them,' explained a British expatriate, 'so that they can tell them just how much they enjoy being away from it all.') The life of the 'expats' may not be quite as idyllic as the setting: the residents look less relaxed and healthy than the tourists, and their conversation suggests a tendency towards feuds, circular gossip and other islanders' neuroses.

Grand Cayman cannot remain 'the island which time forgot' when it is also the island which bankers discovered. As the businessmen follow the tourists the wealth of the island begins to take on more visible forms: 'These Texans seem to buy condominiums,' the governor remarked, 'the way you and I could buy suits.' Since the Houston flights began, several Texan corporations have set up subsidiaries on the island, and there are rumours of large Texan holdings in one or two Cayman banks. Already there are some doubts about the social consequences of Jim Bodden's 'open door' policy towards foreign investment and tourism: 'It will make this island into a nation of maids,' one Caymanian complained. But the majority of islanders seem content to enjoy the immediate benefits -higher wages for construction workers and servants, more jobs with companies, and more lawyers' fees.

In the midst of all this thrusting commercial development the Cayman islanders insist more than ever on remaining a British Crown Colony, complete with the old colonial trappings, including policemen in white topees, an annual parade for the Queen's Birthday, and a governor who presides over the executive council and every year makes the 'Speech from the Throne'. The present governor, His Excellency Thomas Russell, is a quiet Scotsman who has spent much of his career on Pacific islands, where he contributed archaeological articles to the Journal of Polynesian Studies. He still has a hint of that aloof, slightly pained expression which used to be almost obligatory for colonial governors, but he clearly enjoys the role of supervising this commercial little community with its salesmanship and showmanship. He is quite prepared to open a beauty competition or to put on a Texan hat, but for formal occasions he still wears the extraordinary nineteenth-century uniform of his job -a white suit with gold epaulettes and a high white topee with feathers hanging from it.

'I'm the last pensionable governor from the old British colonial service,' he told me in his office in the elegant glass-and-aluminium government building in George Town, which is regarded as a symbol of the Caymans' go-ahead attitudes. 'It's a pleasantly compact government -all my cabinet are on the same floor. People here are very critical of independence; they think it causes troubles like Jamaica's. They're very conservative: they won't look at the welfare state -to them it means socialism, which means communism. It's true they're beginning to complain about some things, like access to beaches; but most of them are too busy getting rich to be very worried. When I came here six years ago in the midst of a world recession I was surprised to find the Caymans were doing very well: their offshore banking and tourism seemed unaffected. My job here is really a kind of combination of Ombudsman and business consultant. I don't need to interfere very much, and the British government leaves us very much alone -largely no doubt because we don't need any kind of grant.'

The Caymans' refusal to become independent caused concern at the UN, particularly within the Committee on Decolonisation, which paid a special visit to the islands in 1977 to look for evidence of oppression and imperialist domination; and later two representatives from the Cayman Islands went up to New York to give evidence. 'We told them we didn't want to be decolonised,' said Truman Bodden, who was one of them: 'It was the first case like that they'd had for a long time. But we take the approach, sir, that if there's something good, you mustn't change it. We notice that other Caribbean countries may have political independence, but don't have economic dependence. If they do what we do, they could have success too. So long as Britain is responsible for our foreign policy and defence, we can rest quite well. We must be thankful to the Lord, sir, for leading us in the right direction. If we keep people in the government who have a lot to lose, we should be all right.'

Not all the islanders are as confident as Truman Bodden about the future. 'This is really a very backward island,' another Caymanian lawyer, Steve McField, complained: 'All they can do is make money, and money is destroying the family life: I never thought to see an Old Folk's Home in Cayman -it used to be an honour to look after parents. There's no real intellectual life here: the only rebellion among young people is smoking Ganja. But we can't stay separate from the rest of the third world; we're not self-sufficient. What happens when resources get really scarce?' Yet is is hard to find signs of much radicalism or revolt on the island. The most outspoken opposition comes from a scandal sheet called The Voice, which revels in uncovering the business interests of the Boddens and other businessmen; but The Voice does not represent any organised group. There is little discussion about closer links with Jamaica or other Caribbean islands with all their political problems: 'I was regarded as seditious,' one journalist in George Town complained, 'just for saying that Cayman is part of the Caribbean.'

Can Grand Cayman remain a haven, both from taxes and political troubles? To many third world countries, including its immediate neighbours, its isolation and selfishness seem intolerable. The Jamaicans, with their mounting debts, unemployment and violent political conflicts, think it outrageous that the island which once belonged to them should turn its back, refuse to let in more Jamaican immigrants, and devote itself to helping rich men to evade their taxes. But the Cayman leaders see their island as part of a quite different world. 'The advantage of being an island,' one of them explained, 'is that you can choose your own neighbours. We've chosen Miami instead of Jamaica.'

The islanders see themselves as part of the global financial system on which all free nations, whether they like it or not, must depend. As the rest of the Caribbean becomes less stable -they anticipate -so their haven will become still more attractive as the safe, neutral island which bankers and businessmen need. Vassel Johnson, the Financial Secretary, insisted: 'Bad times always send more money down here.'You can't try to define the nationality of capital,' William Walker said: 'If you try to make laws all-embracing, you'll just shut down international trade.' But the Caymans' future remains very uncertain. For as New York has been allowed since 1981 to have its own International Banking Facilities (IBF), freed from domestic requirements for reserves and controls over interest rates, it will be able to offer many of the advantages of the Caribbean, in the same time-zone; and Manhattan will be able to become its own off-shore island.

The Caymans and other islands could still offer exceptional secrecy, as a refuge for international capital which did not wish to be examined too closely. But however much confidence the bankers put in these secretive and isolated islands they could not in the end escape from world politics; for both their loans and their deposits were dependent on countries, whether in the Middle East or elsewhere, which were politically explosive. And the idea that capital was neutral, and had no nationality, would receive some rude shocks.

We had the chance to spend a year in Epsom in 90-91. Our fourth child was not yet born. The three first do remember quite well this English period. An important event in Epsom's life is the Derby.

THE DERBY
By Lady Penelope in "Etiquette Today"

The sport of kings would not be what it is without the Derby. Here, if anywhere, all men are almost equal because they can all come away penniless. This great British sight of perhaps a million people spread over Epsom Downs plus hundreds of bookmakers has to be seen to be believed. Apart from the grandstand area everyone is dressed exactly how they like with open-necked shirts and, sadly often, with raincoats and umbrellas. The grandstand area has some sections only open to club members with special tickets and in these "aristocratic" areas some men wear top hats and tails and the ladies all their finery. Thirty years ago a third of the people wore morning dress, today percentage is less.

For those watching in the paddock area, apart from looking at the horses one of the attractions of Ascot or the Derby is the chance to see the sovereign and members of the royal family. It is one of the good old-world customs that as the Queen passes near or arrives to the paddock, men wearing hats take them off for a moment and if by chance [as happened to Lady Penelope] one walks straight up to the Queen, a slight curtsy or for man a bow is correct as one stands aside to allow her to pass.

CLOTHES
By Lady Thatcher

In my case, preparation for the election involved more than politics. I also had to be dressed for the occasion. I had already commissioned from Aquascutum suits, jackets and skirts – ‘working clothes’ for the campaign.

I took a close interest in clothes, as most women do: but it was also extremely important that the impression I gave was right for the political occasion. In Opposition I had worn clothes from various suppliers. And if I had had any doubts about the importance of getting these matters very carefully organized, they were dissipated by the arrival of an outfit ordered for the Opening of Parliament in 1979. It was a beautiful sapphire blue suit with a matching hat. I had no time for a fitting and as Ii put it on with just a few minutes in hand I found to my horror that it neither fitted nor suited me and had to rush away to change into something else. It was a lesson not to order from a sketch, which can disguise unwanted bulges that are too painfully obvious to the real customer.

From the time of my arrival in Downing Street, Crawfie helped me choose my wardrobe. Together we would discuss style, colour and cloth. Everything had to do duty on many occasions so tailored suits seemed right. (They also have the advantage of gently passing by the waist.) The most exciting outfits were perhaps those suits I had made – in black or dark blue – for the Lord Mayor’s Banquet. On foreign visits, it was of course, particularly important to be appropriately dressed. We always paid attention to the colours of the national flag when deciding on what I should wear. The biggest change, however, was the new style I adopted when I visited the Soviet Union in the spring of 1987, for which I wore a black coat with shoulder pads, that Crawfie had seen in the Aquascutum window, and a marvelous fox fur hat. (Aquascutum have provided me with most of my suits ever since.)

With the televising of the House of Commons after November 1989 new considerations arose. Stripes and checks looked attractive and cheerful in the flesh but they could dazzle the television viewer. One day when I just not had enough time to change before going to the House, I continued to wear a black and white check suit. Afterwards a parliamentary colleague who had seen me on television told me, ‘what you said was all right, but you looked awful.’ I learned my lesson. People watching television would also notice whether I had worn the same suit on successive occasions and even wrote in about it. So from now Crawfie always kept a note of what I wore each week for Prime Minister’s Questions. Out of these notes a diary emerged and each outfit received its own name, usually denoting the occasion it was first worn. The pages read something like a travel diary: Paris Opera, Washington Pink, Reagan Navy, Toronto Turquoise, Tokyo Blue, Kremlin Silver, Peking Black and last but not least English Garden. But now my mind was on the forthcoming campaign: it was time to lay out my navy and white check suit, to be known as ‘Election ‘87’.

[Margareth Thatcher, “The Downing Street Years”, ISBN 0 00 255049 0, HarperCollins Publishers, 77-85 Fulham Palace Road, Hammersmith, London W6 8JB, UK]

Dear Madam Thatcher,

During our expatriate period in England in 90-91 we had the chance to watch you many times on television. We may not share all your political ideas but we have to recognize your merit as a political leader and your talent to restore British pride. We are strong believers in democratic values and the British Parliament tradition of debate is an example for the European Parliament in Strasbourg and all parliaments around the world. Europe has a huge potential provided all members are going in the same direction. We were very happy to see recently Greece and Turkey speaking together and we would like to say that young British people are very European minded. Stephany, a young girl from Kent, joined our family for one year as an au pair. She left us speaking French fluently and having some Dutch knowledge and back in England learnt German. She was extremely willing to learn and communicated her enthusiasm to the children.

Yours sincerely

A Belgian Family

Henri Bergson's creative evolution

Creative evolution is a philosophical theory espoused early in the 20th century by Henri Bergson, a French process metaphysician (one who emphasizes becoming, change, and novelty), in his Évolution créatrice (1907; Creative Evolution). The theory presented an evolution in which a free emergence of the individual intelligence could be recognized. It was thus wholly distinct from previous deterministic hypotheses that were either mechanistic or theological and represented evolution as conditioned either by existing forces or by future aims. Bergson based his theory on the distinction between matter and the élan vital, or life force, the progress of which he saw as a line continually bifurcating or diverging from its course. The evolution of matter is orderly and geometric; disorder, however, with free and unpredictable creativity, is the effect of the life force on its material surroundings. The argument is largely conducted by means of striking metaphor and analogy: life, for instance, is compared to a wave spreading outward toward a circumference that is broken down at one point only and to an artillery shell from which new shells scatter when it bursts.

Kids, you have already seen persons using wheelchairs. Last summer I (the father) had to use a wheelchair due to an injury to both legs. Spanish doctors put me back on tracks after ten days and a few weeks of good Belgian physical therapy allow me to run 15km as before. But I learned from these "holidays" the daily problems experienced by people living every single day of their life in a wheelchair. Public and home doors, steps, WC, lights switches, etc not adapted. It was often a question of centimeters or even a few millimeters transforming any simple life action in an acrobatic performance. There is a lot of room for progress. It is a challenge for this new 21st century! A world wide wheelchair (WWW) design contest.

Our family experienced also two major car crashes. The lesson is that even if you drive slowly and carefully you can still be victim of an accident. The only immediate advise we can give you is to fasten your seat bells all of you, parents and children. It save us major injuries in both accidents. Doctors confirm that airbags reduces the level of injuries.

Luc Van Lierde of Belgium captured the Ironman Titles in 1999. We wish him good luck for 2001. Our third child, following his example, participated to the first Waterloo Children Triathlon "Iron Kids".

Kids, as said above, there are triathlons for kids with distance adapted for example: 100m swim / 5km bike / 1km run. Ready to try? Then read the following tips and performance of kids of your age:

Cross training is one of the best ways to get in shape and stay that way. When you cross train, you combine several different sports. Cross training results in a better overall workout by using different sets of muscles and it also keeps exercise fun.

Getting in shape through Cross Training: To begin cross training, take it slowly at first. Just concentrate on one sport until you feel stronger. Get into shape by performing one exercise three times a week for 30 minutes each time. When you can do this comfortably, start alternating with your second activity and then your third. Before long, you'll be in excellent shape.

Your Endurance: To improve your endurance, exercise hard and keep increasing your workload to challenge your muscles. Gradually, you will find that you are able to exercise or work much longer than you could before.

Exercise and Safety: Running, walking and cycling are great exercises, but make sure that others can see you. Here are a few ways to stay safe when you exercise: Wear reflective patches on your back, chest, arms, feet and head. Carry a flashlight or equip your bicycle with a headlight and taillight. Run or walk against traffic. Ride a bicycle with the flow of traffic. Always wear a bike helmet and make sure your bike is in proper working order.

Protecting Your Skin from the Sun: All people who spend time in the sun should use a sunscreen that has an SPF, or Sun Protection Factor, of 15 or greater. This allows you to stay in the sun 15 times longer than normal without burning.

Essex Road Kids Of Steel - Sunday, August 29, 1999 Kenora, Ontario, Canada - Weather: warm and sunny - Participants: 40

Girls - 9 years old and under - 100m swim / 5km bike / 1km run -Serena Bredin 27:09
Boys - 9 years old and under - 100m swim / 5km bike / 1km run - Ryan Fitzgerald 30:41
Girls - 10 & 11 years old - 100m swim / 5km bike / 1km run - Sara Budowski 24:40
Boys - 10 & 11 years old - 100m swim / 5km bike / 1km run - Colin McKinley 23:46
Girls - 12 & 13 years old - 200m swim / 10km bike / 2km run - Amy Briscoe 37:00
Girls - 14 - 16 years old - 200m swim / 10km bike / 2km run - Christine McKinley 40:29
Boys - 12 & 13 years old - 200m swim / 10km bike / 2km run - Josh Markham 35:08
Mixed Relay 10-11 - 100m swim / 5km bike / 1km run - Christian Boulley 26:20
Mixed Relay 14 -16 - 200m swim / 10km bike / 2km run - Beth Pernsky 42:13

Hi Red Devils,

Here is a picture taken recently in a street of Brussels before one of your matches!

You have been great fair players all of you. You have been glorious. Do not forget to build your Red Devils Monument in Japan and write your names on it in black, yellow and red. You have entered in the legend of Red Devils.

It would be nice to see you at Winbledon supporting our tennis women and men!

Gentlemen, please do not forget your black yellow red hats!

Well done Ladies!

Le triomphe de l'amour. Tout simplement superbe.

Mrs Justine Henin-Hardenne will have a lot to tell to children in hospital on how to recover from a desperate situation and win...the 2003 US OPEN Women's Singles Final. A star is born.

CHEERS!

French proverb: "Jamais deux sans trois." [Never two without three.]. What's next? Something starting with "Grand"?

CHEERS!

Nice gold comeback.

LUMUMBA'S LAST MESSAGE TO HIS WIFE
In 1961

My Dear,

I am writing this without knowing whether you will ever get it, or when, or whether I shall be still alive when you read it. Throughout my struggle for the independence of my country I have never for one instant doubted that the sacred cause to which my friends and I have given our lives would triumph in the end. But what we have wanted for our country, the right to honourable life, to untarnished dignity, to unrestricted freedom -these things have never been desired on our behalf by those important officials in the UN in whom we put our trust, and upon whom we called for help, because, whether they knew it or not, they were directly or indirectly supporting the colonialism of Belgium and her friends in the West.

They have corrupted the minds of some of our compatriots, others they have simply bought, and they have played their part in distorting truth and shackling our independence. What else can I say? Dead or alive, free or imprisoned by the colonialists, it is not I who matter. It is the Congo, it is our poor people whose independence has been turned into a cage in which we can be watched by those outside, either with positive pleasure, or with benevolent compassion. But my faith remains unshaken. I know, and I feel in my heart, that sooner or later my people will shake off all their enemies, inside and outside our land, and that they will rise as one man to say' no' to the shame and degradation of colonialism, and to assume once again their dignity under clear skies.

We are not alone. Africa, Asia and the free and freed peoples all over the world will always stand beside those millions of Congolese who will not give up the struggle until the day when no colonizers and no mercenaries are left on our soil. I would like my children, whom I am leaving and may perhaps never see again, to be told that the Congo has a great future, and that it is up to them, as to every other Congolese, to carry out the sacred task of rebuilding our independence and our sovereignty; for where there is no dignity there is no freedom, and where there is no justice there is no dignity, and where there is no independence there are no free men.

No brutality, no agony, no torture has ever driven me to beg for mercy, for I would rather die with my head high, my faith unshaken, and a profound trust in the destiny of my country, than live in subjection, seeing principles that are sacred to me laughed to scorn. History will have its say one day -not the history they teach in Brussels, Paris, Washington or the United Nations, but the history taught in the countries set free from colonialism and its puppet rulers. Africa will write her own history, and both north and south of the Sahara it will be a history of glory and dignity.

Do not weep, my love; I know that my country, which has suffered so much, will be able to defend its independence and liberty.

Long live the Congo! Long live Africa!

Patrice

Hi, little chef. Here is a double challenge. Firstly, to translate this "recette de cuisine" in your language. Secondly, to prepare it. Bon appétit! Smakelijk!

MOUSSE D'AVOCAT: monder la tomate et l'épépiner. Ciseler l'oignon. Récupérer la chair des avocats, la citronner. Dans un mixer, mettre la tomate et les oignon, Mixer. Ajouter ensuite les avocats et un filet d'huile d'olive. Mixer finement et passer au tamis. Assaisonner de haut goût. Ajouter la gélatine fondue au micro onde dans un peu d'eau. Monter la crème fouettée et l'incorporer délicatement à la chair collée.

Hi little genius, here is a surprising extract from "The Unknown Guest" written by Maurice Maeterlinck:

THE UNKNOWN GUEST
By Maurice Maeterlinck

[...] In these cases, the gift is manifested prior to any education and from the earliest years of childhood. If we refer to the list of arithmetical prodigies given by Dr. Scripure, (in American Journal of Psychology, 1 April 1891) we see that the faculty made its appearance in Ampere at the age of three, in Colburn at six, in Gauss at three, in Mangiamele at ten, in Safford at six, in Whateley at three, and so on. Generally, it lasts for only a few years, becoming rapidly enfeebled with age and usually vanishing suddenly at the moment when its possessor begins to go to school. When you ask those children and even most of the lightning calculators who have come to man's estate how they go to work to solve the huge and complicated problems set them, they reply that they know nothing about it. Bidder, for instance, declares that it is impossible for him to say how he can instinctively tell the logarithm of a number consisting of seven or eight figures. It is the same with Safford, who, at the age of ten, used to do in his head, without ever making a mistake, multiplication-sums the result of which ran into thirty-six figures. The solution presents itself authoritatively and spontaneously; it is a vision, an impression, an inspiration, an intuition coming one knows not whence, suddenly and indubitably. As a role, they do not even try to calculate. Contrary to the general belief, they have no peculiar methods; or, if method there be, it is more a practical way of subdividing the intuition. One would think that the solution springs suddenly from the very enunciation of the problem, in the same way as a veridical hallucination. It appears to rise, infallible and ready-done, from a sort of eternal and cosmic reservoir wherein the answers to every question lie dormant. It must, therefore, be admitted that we have here a phenomenon that occurs above or below the brain, by the side of the consciousness and the mind, outside all the intellectual methods and habits; and it is precisely for phenomena of this kind that Myers invented the word "subliminal." (beneath (sub) the threshold (limen) of consciousness. Let us add, as M. de Vesme very rightly remarks, that the subliminal is not exactly what classical psychology calls the subconsciousness, which latter records only notions that are normally perceived and possesses only normal faculties, that is to say, faculties recognized to-day by orthodox science) ...I am not sure if it is really necessary, before closing this chapter, to follow in the wake of many others and broach the problem of the preexistence of the future, which includes those of fatality, of free will, of time and of space, that is to say, all the points that touch the essential sources of the great mystery of the universe...

It was a fantastic experience for my wife to organize a charity concert to help clown artists performing in the paediatric (children) service of Pr Malvaux at University Catholic of Louvain hospital in Brussels. Pr Malvaux and his team found that children are recovering faster when they laugh. Thanks clowns!

Kids, from time to time the von Karman Institute based in Sint-Genesius-Rode, Belgium, organizes open doors. It is probably the best opportunity for you to get a first introduction to fluids dynamics by highly qualified persons. To give you an example of field of application, let us mention aeronautics and aerospace but also less obvious one, biology and environment:

Cystic fibrosis (mucoviscidose) is a genetic disease characterised by an excessive production of mucus in the lungs and frequent infections. Both generate a modification of the mucous membrane and a destruction of activity of lashes. In addition to drug treatments, including antibiotics and fluidifier, patients are submitted to physiotherapy sessions to clear the mucus of their lung. Several techniques have been conceived to facilitate the clearance of excess bronchial secretions to improve lung function and oxygenation. Most of them are based on a modification of pressure and frequency within the lung; their effect on the rheological properties and displacement mechanism of the mucus is not clear and often debated. In order to better understand the phenomenology of the physical mechanisms, simple manipulations of mucus or a substitution fluid will be elaborated using the physiotherapist device in order to understand their mechanism. This work is undertaken in collaboration with a team of paediatricians and physiotherapists at the AZ-VUB childrens hospital. Researchers related to this topic are Patricia Corieri, Agnes Ramuzat, Michel Riethmuller, and Jeroen van Beeck.

The dispersion of pollutants in the atmosphere in complex terrain configurations is a problem of primary importance from the safety and environmental aspects. To compute it, and to predict its development, the simple Gaussian model is available and provides in a short time a fairly good solution to the problem of computing mean concentration values at intermediate distances from the source over fairly simple terrain configurations. On the other hand, complex computational models requiring the solution of the Navier-Stokes and concentration transport equations are still difficult to implement and require computation times that are often too long to give a satisfactory answer, which is still in terms of statistical averaged quantities. However, in practice, the discrete localisation and the intermittent nature of concentration peaks has to be considered not only with reference to hazard level assessment, but also for its influence on the estimation of time-averaged quantities. In this context, it is considered, for example, that in the lower levels of the atmosphere the large turbulent structures (gusts) are responsible for plume meandering, while the small-scale turbulence is responsible for diffusion around the instantaneous plume centroids. The presence of natural or man-made obstacles such as hills, valleys or buildings modifies the wind structure making the evaluation of the effects mentioned above even more difficult. For a number of years, the VKI has been involved in fundamental and applied research concerning these problems. Researchers related to this topic are Jean-Marie Buchlin, Patricia Corieri, Jeanne Malet, Michel Riethmuller, Jeroen van Beeck and Laurent Zimmer .

VINYL ESTER CHOSEN FOR SPACE AGE BOAT

A special blend of Dow Chemicals’ Derakane epoxy vinyl ester resin is being used to build a futuristic 100 king boat. The Yontech 105 is a high speed 31 m ocean going motor yacht which has recently been completed in Turkey.

When Ekber Onuk, managing director of the Yonca Teknik shipyard set out to build the boat he recruited the best team available. Underwater design is being done by Hydro Engineering Systems of Switzerland and Nissan Design International of the USA is responsible for the above water appearance.

The hull is being designed to operate at speeds up to 80 knots so strength was major criteria for the materials chosen. The Derakane resin will be reinforced with Kevlar fibre and have a polyvinyl chloride (PVC) foam core. This gives the best possible weight to physical properties ratio, says Dow. The resistance to osmotic blistering offered by the vinyl ester is also important. A gel-coat backed with a Derakane layer prevents osmosis.

The high-tech marine market is a relatively new area for Derakane resins, but Hans Wendt, director of marketing for thermoset resins for Dow, has high hopes for the material in this area. It offers increases resistance to osmosis coupled with improved mechanical properties when compared with a polyester, he says.

Angela Broder, Dow Europe,
tel: + 41-1-728-2150
fax: + 41-1-728-2075

Using a small helicopter, I went with a friend on top of the Monte Rosa (4634 m) in Italy, avoiding crevaces we skied to Zermatt in Switzerland and back to Gressoney La Trinité in Italy. A day of ski to remember!

AN IMPERIAL MESSAGE
By Franz Kafka

The Emperor, so it runs, has sent a message to you, the humble subject, the insignificant shadow cowering in the remotest distance before the imperial sun; the Emperor from his deathbed has sent a message to you alone. He has commanded the messenger to kneel down by the bed, and has whispered the message to him; so much store did he lay on it that he ordered the messenger to whisper it back into his ear again. Then by a nod of the head he has confirmed that it is right. Yes, before the assembled spectators of his death----all the obstructing walls have been broken down, and on the spacious and lofty-mounting open staircases stand in a ring the great princes of the Empire--before all these he has delivered his message. The messenger immediately sets out on his journey; a powerful, an indefagitable man; now pushing with his right arm, now with his left, he cleaves a way for himself through the throng; if he encounters resistance he points to his breast, where the symbol of the sun glitters; the way, too is made easier for him than it would be for any other man. But the multitudes are so vast; their numbers have no end. If he could reach the open fields how fast he would fly, and soon doubtless you would hear the welcome hammering of his fists on your door. But instead how vainly does he wear out his strength; still he is only making his way through the chambers of the innermost palace; never will he get to the end of them; and if he succeeded in that nothing would be gained; he must fight his way next down the stair; and if he succeeded in that nothing would be gained; the courts would still have to be crossed; and after the courts the second outer palace; and once more stairs and courts; and once more another palace; and so on for thousands of years; and if at last he should burst through the outermost gate--but never, never can that happen--the imperial capital would lie before him, the center of the world, crammed to bursting with its own refuse. Nobody could fight his way through here, least of all one with a message from a dead man.--But you sit at your window when evening falls and dream it to yourself.

A DIEU MARQUISE, AU PARADIS!
Par Henri de Potter d'Indoye, Melle 1984,
dédicacé à une petite fille héroïque.

LES YEUX DE MARBRE. L'aspect des cieux par les nuits claires, est à la fois une interrogation et un appel de l'infini. Les sciences exactes, s'appuyant sur des moyens toujours plus grands, nous donneront-elles réponse à cette interrogation et expliqueront-elles jamais cette attirance? Rien que la possibilité de l'existence, sur d'autres planètes, d'êtres semblables à nous, en ce sens qu'ils seraient doués d'intelligence et de libre arbitre, sera-t’elle jamais résolue? Déjà en 1686, Fontenelle, qui professait que la plupart des planètes étaient habitée, écrivit ses six célèbres «Entretiens sur la pluralité des mondes». Pour ce faire, il imagina se trouver dans un parc, par une nuit d'été, en la compagnie d'une belle Marquise. Par la suite, beaucoup de gens crurent à cette pluralité. De nos jours, après tant de recherches vaines, ceux qui croient toujours à d'autres mondes, arguent de l'immensité de l'univers pour en déduire qu'il y a toute chance qu'il existe quelque part des êtres semblables à nous. Cette assertion semble aussi téméraire que de prétendre que parmi les milliards d'hommes ayant vécu, vivants, ou à naître, il doit s'en trouver deux exactement semblables. D'autres imaginent l'existence d'êtres doués des facultés humaines mais physiquement totalement différents de nous. Semblable fiction, tout comme un météore libre de toute attraction, voguera probablement dans l’espace jusqu’à la fin des temps. Depuis Fontenelle, l’humanité a parcouru un chemin allant de la calèche au vaisseau spatial, tandis que l’astronomie, de par la découverte de l’électronique, a dépassé encore cette prodigieuse accélération. Aujourd’hui, on analyse le spectre des astres et l’on enregistre des émissions radiophoniques provenant du visible comme de l’invisible. Cependant, en un frappant contraste, le pluralité des mondes est demeurée aussi hypothétique qu’elle l’était en 1686. Ne convient-il pas de repenser cette hypothèse dans son cadre d’origine, et me serait-il permis de le faire sous la forme d’un nouvel et court entretien ? Par une nuit splendide, je me suis donc transporté en esprit dans ce parc du XVIIème siècle, imaginé par Fontenelle. Sa belle interlocutrice y résidait encore. De décade en décade, brillante, réceptive, elle s’était adaptée au mode et au progrès. Sa fortune intacte, malgré tant de bouleversements, venait de lui permettre une éclatante fantaisie : sur une butte, près du château, elle s’était fait construire un petit observatoire du dernier cri. Je l’y trouvai vêtue d’une jaquette et de pantalon de soie grège, ses cheveux coupés courts et l’œil rivé à un télescope flambant neuf. Autour d’elle, tout était nickel, chrome ou blanc mat. La seule note chaude sous la coupole était un portrait de Fontenelle en costume de velours marron signé Rigaud. Ce peintre, dont les grands de son époque devaient mériter qu’il daignât faire leur portrait et qui, déjà avant son anoblissement par Louis XV, octroyait à ceux qu’il choisissait de peindre une sorte de promotion sociale ! Il était parvenu à donner au visage de Fontenelle ce dur rayonnement, cette sorte de brillance, qui caractérise les esprits clairs. Comme si elle attendait ma visite, en entendant mes pas, sans se détourner, la Marquise laissa tomber : «Voilà bientôt trois cents ans, qu’à une vitesse toujours plus grande, mes yeux pénètrent plus avant dans l’univers. Tout y est glacé, brûlant ou rèche ; tandis que de l’infini noir et or où le génie s’égare, ne nous parviennent que messages incohérents et sons strident» Sa voix était lasse et triste. Elle paraissait absente et comme coiffée d’écouteurs branchés sur l’utopie. Elle se tourna vers moi, son visage ne portait ni mouche ni aucun fard. La seule note qui rappela un somptueux passé, était un jabot ainsi que des poignets en dentelle de Valenciennes et les boucles de ses souliers. Qui n’aurait voulu prendre avantage de cette tristesse et de cette lassitude pour distraire cette jeune femme de son obsession ? Un telle fidélité excluait que, d’emblée, je critique les thèses de Fontenelle. Je lui dis, qu’à mon avis, quelque progrès que puissent faire les sciences exactes, elles ne répondraient jamais à notre attente. Car depuis que les disciples d’Einstein en sont arrivés à professer que l’univers ressemble à une immense pensée, les notions de matière, de poids, de distance et de temps deviennent inadéquates pour le définir. J’arguai qu’une immense pensée ne relève pas des sciences exactes et que seul le cœur peut la comprendre. Je lui demandai si elle avait connaissance des œuvres de Flammarion qui, lui aussi, croyait en la pluralité des mondes. –Non, elle n’avait vu que son portrait dans des livres – Mais à l’instant même de poser cette question, je compris sa sottise. De quel poids pouvait bien être pour elle la photographie en noir et blanc du savant barbu et appliqué des manuels classiques, comparée à la formidable présence du chef-d’œuvre de Rigaud ? Une femme peut-elle être jamais totalement objective ? Je m’obstinai pourtant, lui disant que l’idée maîtresse de Flammarion était que l’univers et l’homme sont indissociable et, qu’à mon avis, l’homme devait être compris non seulement avec son intelligence mais aussi avec son cœur. Mais quel argument sentimental peut bien toucher le moins du monde le cœur d’une femme amoureuse d’un homme qui n’en a pas ? Fontenelle en effet en manquait à ce point que Madame de Tencin, en son célèbre salon littéraire, pointa un jour son doigt vers le cœur de l’écrivain et lui décocha : «C’est de la cervelle que vous avez là !» La Marquise avait de nouveau l’œil au télescope. Toute communication même tacite étant coupée, je sortis dans le parc sans aucun bruit, la porte étant demeurée ouverte. D’énormes wellingtonias rayaient les pelouses de leurs ombres lunaires. Des oiseaux migrateurs se répondaient, navigant aux étoiles. Quelques vers luisants balisaient les chemins. J’arrivai à une place en demi-lune. Un banc y faisait face à un socle, portant un buste en marbre de Carrare, la tête rejetée en arrière, les yeux grands ouverts et regardant les cieux, en ce geste qui depuis Phidias, élève tout un paysage. C’était là, probablement, que la Marquise avait interdit à Fontenelle de dessiner des constellations sur le sable fin, par crainte que soit donné en son parc «un aspect savant». Aimait-elle encore ce parc avec un tel amour ? Malgré tous les aspects de la jeunesse (une femme imaginaire ne change jamais), il semblait que son impulsion vitale et la flamme de son regard s’étaient altérées. Le carcan des sciences exactes l’avait-il meurtrie? Probablement, dans sa longue lutte avec les astres, avait-elle oublié la légende d’Antée : Ses pieds ne touchant plus le sol, ses yeux grands ouverts, comme ceux du marbre antique, ne voyaient plus les cieux. Une luciole passa, mimant l’étoile filante. Des parfums inconnus exprimaient l’ineffable. Il régnait une divergence totale entre cette splendeur de l’univers que tout homme devrait avoir pour maîtresse, et l’aspect clinique de l’observatoire où je rentrai sans faire de bruit. La Marquise, qui semblait avoir ignoré mon absence, me répondait enfin : «Comprendre l’univers avec son cœur, me disiez-vous. Je pensais ainsi avant de rencontrer Fontenelle mais il m’a appris à préférer la certitude scientifique à tout sentiment. Il disait que le cœur manque d’objectivité et veut toujours tout s’approprier. Il ne pouvait souffrir un semblable accaparement, qu’il comparait à la folie de cet Athénien qui s’était «mis dans la fantaisie» que tous les vaisseaux qui abordaient au port du Pirée lui appartenaient !». Cette flèche, tirée de si loin, semblait avoir été affûtée à mon attention par un jaloux de génie. N’étais-je pas, en un sens, ce genre de fantasque ? Ne venais-je pas de m’approprier le parc de la Marquise jusqu’au fond des percées donnant sur les campagnes, là où les blés se dressent serrés pour mieux voir les étoiles ? Au cours de mes voyages, n’avais-je pas l’habitude de m’annexer tout monument harmonieux, ou tout paysage que j’aimais, jusqu’aux montagnes lointaines sans avoir pour cela à gérer quoi que ce soit, ni à payer les taxes ? J’objectai à la Marquise qu’il lui fallait reconnaître la divination que peuvent avoir les sentiments humains. La mer, de tout temps, a attiré et fasciné l’humanité. La découverte des lois de l’évolution, établissant que l’homme est sorti peu à peu des océans, fait la preuve de la science de notre cœur. L’attirance plus grande encore qu’exercent sur nous les cieux profonds, ne seraient-elle pas la divination d’un prodigieux destin ? Qu’elle distance vous prenez là à l’égard des sciences exactes! m’interrompit-elle. Les savants modernes nous y invitent, lui répartis-je. Le concept «une immense pensée» est de la pure philosophie et le désaveu du scientisme. Ne sommes-nous donc pas cette larve de libellule, au sortir de la vase de l’étang, agrippée à un jonc, se séchant et se déchirant au soleil, pour déployer des ailes comme s’ouvre une ombrelle, et devenir, en un déclic, l’être le plus transcendant de l’air? Selon la divination de notre cœur, ne devenons-nous pas des esprits souverains dans un infini ni glacé, ni brûlant, ni rèche ? L’univers entier ne serait-il pas le support d’une bulle bleuâtre, d’un globe enceint de vie et dont jaillit l’esprit? Pourrait-il exister une plus immense pensée ? En ce cas, la relativité, les quanta, la science la plus géniale, ne seront jamais que la géométrie, de l’alvéole et non le miel. Celui qui saisit la tendresse et la gloire de l’univers participe à sa secrète essence. M’écoutait-elle ? J’entendis tout à coup : «Il est possible, cher Monsieur, que vous ayez raison. Comprenez que, malgré mon engouement pour le progrès et tout ce matériel neuf qui m’entoure, je me sens plus proche encore du scepticisme des beaux esprits de la Cour de Versailles que des disciples d’Einstein à Princeton. Pendant sept cent ans, pour en faire mille, je veux continuer à fouiller les cieux; alors, de guerre lasse, probablement, je penserai comme vous. Là, sur ce secrétaire, sous le portrait, voyez ce livre de signatures. Ayez la gentillesse d’y écrire quelque chose de ce que vous m’avez dit». Je marchai vers la présence de Fontenelle, et défiant sa superbe, j’écrivis : «Tout est fait pour mes yeux, toute beauté m’appartient, univers, mon héritage ! A Dieu Marquise, au Paradis !»

“This individualistic, anti-authoritarian attitude is perhaps best exemplified by the famous literary figure of Thyl Ulenspiegel, who mocked the Spanish authorities during the 16th century occupation.”

“The charm of the little whitewashed houses, flat polder or high embankments stirs every romantic soul. Jacob van Maerlant and the legend of Thyl Ulenspiegel (Thyl Owlglass) have turned Damme into a place of considerable literary fame.”

Kids, the two following texts (the Alhambra Decree and Revocation of the Edict of Nantes) are terrible errors. You can exercise your critical thinking by checking these texts against the UNIVERSAL DECLARATION OF HUMAN RIGHTS present on this web page.

ERROR 1

Alhambra Decree

This is the decree of expulsion promulgated by Queen Isabella and King Ferdinand of Spain in 1492, which forced the Spanish Jews, the Sephardim, to leave Spain forever.

King Ferdinand and Queen Isabella, by the grace of God, King and Queen of Castile, Leon, Aragon and other dominions of the crown - to the prince Juan, to dukes, marquees, counts, the holy orders, priors, knight commanders, lords of the castles, cavaliers, and to all Jews, men and women of whatever age, and to anyone else this letter may concern - health and grace unto you. • You well know that in our dominion, there are certain bad Christians that judases and committed apostasy against our Holy Catholic faith, much of it the cause of communications between Jews and Christians. Therefore, in the year 1480, we ordered that the Jews be separated from the cities and towns of our domains and that they be given separate quarters, hoping that by such separation the situation would be remedied. And we ordered that and an Inquisition be established in such domains; and in twelve years it has functioned, the Inquisition has found many guilty persons. • Furthermore, we are informed by the Inquisition and others that the great harm done to the Christians persists, and it continues because of the conversations and communications that they have with the Jews, such Jews trying by whatever manner to subvert our holy Catholic faith and trying to draw faithful Christians away from their beliefs. • These Jews instruct these Christians in the ceremonies and observances of their Law, circumcising their children, and giving them books with which to pray, and declaring unto them the days of fasting, and meeting with them to teach them the histories of their Law, notifying them when to expect Passover and how to observe it, giving them the unleavened bread and ceremonially prepared meats, and instructing them in things from which they should abstain, both with regard to food items and other things requiring observances of their Law of Moses, making them understand that there is no other law or truth besides it. All of which then is clear that, on the basis of confessions from such Jews as well as those perverted by them, that it has resulted in great damage and detriment of our holy Catholic faith. • And because we knew that the true remedy of such damages and difficulties lay in the severing of all communications between the said Jews with the Christians and in sending them forth from all our reigns, we sought to content ourselves with ordering the said Jews from all the cities and villages and places of Andalusia where it appeared that they had done major damage, believing that this would suffice so that those from other cities and villages and places in our reigns and holdings would cease to commit the aforesaid. And because we have been informed that neither this, nor the justices done for some of the said Jews found very culpable in the said crimes and transgressions against our holy Catholic faith, has been a complete remedy to obviate and to correct such opprobrium and offence to the Christian faith and religion; because every day it appears that the said Jews increase in continuing their evil and harmful purposes wherever they reside and converse; and because there is no place left whereby to more offend our holy faith, as much as those which God has protected to this day as in those already affected, it is left for this Holy Mother Church to mend and reduce the matter to its previous state inasmuch as, because of our frailty of humanity, it could occur that we could succumb to the diabolical temptation that continually wars against us so easily if its principal cause were not removed, which would be to expel the said Jews from the kingdom. Because whenever a grave and detestable crime is committed by some members of a given group, it is reasonable that the group be dissolved or annihilated, the minors for the majors being punished one for the other; and that those who pervert the good and honest living on the cities and villages and who by their contagion could harm others, be expelled from the midst the people, still yet for other minor causes, that would be of harm to the Republic, and all the more so for the major of these crimes, dangerous and contagious as it is. • Therefore, with the council and advice of the eminent men and cavaliers of our reign, and of other persons of knowledge and conscience of our Supreme Council, after much deliberation, it is agreed and resolved that all Jews and Jewesses be ordered to leave our kingdoms, and that they never be allowed to return. And we further order in this edict that all Jews and Jewesses of whatever age that reside in our domain and territories that they leave with their sons and daughters. Their servants and relatives, large and small, of whatever age, by the end of July of this year, and that they dare not return to our lands, not so much as to take a step on them not trespass upon them in any other manner whatsoever. Any Jew who does not comply with this edict and is to be found in our kingdom and domains, or who returns to the kingdom in any manner, will incur punishment by death and confiscation of all their belongings. • We further order that no person in our kingdom of whatever station or noble status hide or keep or defend any Jew or Jewess, either publicly or secretly, from the end of July onwards, in their homes or elsewhere in our reign, upon punishment of loss of their belongings, vassals, fortresses, and hereditary privileges. • So that the said Jews may dispose of their household and belongings in the given time period, for the present we provide our assurance of royal protection and security so that, until the end of the month of July, they may sell and exchange their belongings and furniture and other items, and to dispose of them freely as they wish; and that during said time, no one is to do them harm or injury or injustice to their persons or to their goods, which is contrary to justice, and which shall incur the punishment that befalls those who violate our royal security. Thus we grant permission to the said Jews and Jewesses to take out their goods and belongings out of our reigns, either by sea or by land, with the condition that they not take out either gold or silver or minted money or any other items prohibited by the laws of the kingdom. • Therefore, we order all councillors, justices, magistrates, cavaliers, shield-bearers, officials, good men of the city of Burgos and of other cities and villages of our reigns and dominions, and all our vassals and subjects, that they observe and comply with this letter and all that is contained in it, and that they give all the help and favour that is necessary for its execution, subject to punishment by our sovereign grace and by confiscation of all their goods and offices for our royal state house. • And so that this may come to the notice of all, and so that no one may pretend ignorance, we order that this edict be proclaimed in all the plazas and usual meeting places of any given city; and that in the major cities and villages of the diocese, that it be done by the town crier in the presence of the public scribe. And that neither one nor the other should do the contrary of what was desired, subject to the punishment by our sovereign grace and deprivation of their offices and by confiscation of their goods to whosoever does the contrary. And we further order that evidence be provided to the court, in the manner of signed testimony, regarding the manner in which the edict is being carried out. • Given in this city of Granada on the thirty-first day of March in the year of our Lord Jesus Christ -1492. Signed, I, the King, I the Queen, Juan de Coloma, Secretary of the King and Queen, which I have written by order of our Majesties.

ERROR 2

Revocation of the Edict of Nantes (October 22, 1685)

Louis, by the grace of God king of France and Navarre, to all present and to come, greeting: • King Henry the Great, our grandfather of glorious memory, being desirous that the peace which he had procured for his subjects after the grievous losses they had sustained in the course of domestic and foreign wars, should not be troubled on account of the R.P.R., as had happened in the reigns of the kings, his predecessors, by his edict, granted at Nantes in the month of April, 1598, regulated the procedure to be adopted with regard to those of the said religion, and the places in which they might meet for public worship, established extraordinary judges to administer justice to them, and, in fine, provided in particular articles for whatever could be thought necessary for maintaining the tranquillity of his kingdom and for diminishing mutual aversion between the members of the two religions, so as to put himself in a better position to labour, as he had resolved to do, for the reunion to the Church of those who had so lightly withdrawn from it. • As the intention of the king, our grandfather, was frustrated by his sudden death, and as the execution of the said edict was interrupted during the minority of the late king, our most honoured lord and father of glorious memory, by new encroachments on the part of the adherents of the said R.P.R., which gave occasion for their being deprived of divers advantages accorded to them by the said edict; nevertheless the king, our late lord and father, in the exercise of his usual clemency, granted them yet another edict at Nimes, in July, 1629, by means of which, tranquillity being established anew, the said late king, animated by the same spirit and the same zeal for religion as the king, our said grandfather, had resolved to take advantage of this repose to attempt to put his said pious design into execution. But foreign wars having supervened soon after, so that the kingdom was seldom tranquil from 1635 to the truce concluded in 1684 with the powers of Europe, nothing more could be done for the advantage of religion beyond diminishing the number of places for the public exercise of the R.P.R., interdicting such places as were found established to the prejudice of the dispositions made by the edicts, and suppressing of the bi-partisan courts, these having been appointed provisionally only. • God having at last permitted that our people should enjoy perfect peace, we, no longer absorbed in protecting them from our enemies, are able to profit by this truce (which we have ourselves facilitated), and devote our whole attention to the means of accomplishing the designs of our said grandfather and father, which we have consistently kept before us since our succession to the crown. • And now we perceive, with thankful acknowledgment of God's aid, that our endeavours have attained their proposed end, inasmuch as the better and the greater part of our subjects of the said R.P.R. have embraced the Catholic faith. And since by this fact the execution of the Edict of Nantes and of all that has ever been ordained in favour of the said R.P.R. has been rendered nugatory, we have determined that we can do nothing better, in order wholly to obliterate the memory of the troubles, the confusion, and the evils which the progress of this false religion has caused in this kingdom, and which furnished occasion for the said edict and for so many previous and subsequent edicts and declarations, than entirely to revoke the said Edict of Nantes, with the special articles granted as a sequel to it, as well as all that has since been done in favour of the said religion. • I. Be it known that for these causes and others us hereunto moving, and of our certain knowledge, full power, and royal authority, we have, by this present perpetual and irrevocable edict, suppressed and revoked, and do suppress and revoke, the edict of our said grandfather, given at Nantes in April, 1598, in its whole extent, together with the particular articles agreed upon in the month of May following, and the letters patent issued upon the same date; and also the edict given at Nimes in July, 1629; we declare them null and void, together with all concessions, of whatever nature they may be, made by them as well as by other edicts, declarations, and orders, in favour of the said persons of the R.P.R., the which shall remain in like manner as if they had never been granted; and in consequence we desire, and it is our pleasure, that all the temples of those of the said R.P.R. situate in our kingdom, countries, territories, and the lordships under our crown, shall be demolished without delay. • II. We forbid our subjects of the R.P.R. to meet any more for the exercise of the said religion in any place or private house, under any pretext whatever, . . . • III. We likewise forbid all noblemen, of what condition so ever, to hold such religious exercises in their houses or fiefs, under penalty to be inflicted upon all our said subjects who shall engage in the said exercises, of imprisonment and confiscation. • lV. We enjoin all ministers of the said R.P.R., who do not choose to become converts and to embrace the Catholic, apostolic, and Roman religion, to leave our kingdom and the territories subject to us within a fortnight of the publication of our present edict, without leave to reside therein beyond that period, or, during the said fortnight, to engage in any preaching, exhortation, or any other function, on pain of being sent to the galleys. ... • VII. We forbid private schools for the instruction of children of the said R.P.R., and in general all things, whatever which can be regarded as a concession of any kind in favour of the said religion. • VIII. As for children who may be born of persons of the said R.P.R., we desire that from henceforth they be baptized by the parish priests. We enjoin parents to send them to the churches for that purpose, under penalty of five hundred livres fine, to be increased as circumstances may demand; and thereafter the children shall be brought up in the Catholic, apostolic, and Roman religion, which we expressly enjoin the local magistrates to see done. • IX. And in the exercise of our clemency towards our subjects of the said R.P.R. who have emigrated from our kingdom, lands, and territories subject to us, previous to the publication of our present edict, it is our will and pleasure that in case of their returning within the period of four months from the day of the said publication, they may, and it shall be lawful for them to, again take possession of their property, and to enjoy the same as if they had all along remained there: on the contrary, the property abandoned by those who, during the specified period of four months, shall not have returned into our kingdom, lands, and territories subject to us, shall remain and be confiscated in consequence of our declaration of the 20th of August last. • X. We repeat our most express prohibition to all our subjects of the said R.P.R., together with their wives and children, against leaving our kingdom, lands, and territories subject to us, or transporting their goods and effects there from under penalty, as respects the men, of being sent to the galleys, and as respects the women, of imprisonment and confiscation. • XI. It is our will and intention that the declarations rendered against the relapsed shall be executed according to their form and tenor. • XII. As for the rest, liberty is granted to the said persons of the R.P.R., pending the time when it shall please God to enlighten them as well as others, to remain in the cities and places of our kingdom, lands, and territories subject to us, and there to continue their commerce, and to enjoy their possessions, without being subjected to molestation or hindrance on account of the said R.P.R., on condition of not engaging in the exercise of the said religion, or of meeting under pretext of prayers or religious services, of whatever nature these may be, under the penalties above mentioned of imprisonment and confiscation.1 This do we give in charge to our trusty and well-beloved counsellors, etc. • Given at Fontainebleau in the month of October, in the year of grace 1685, and of our reign the forty-third.

As millions of readers throughout the world, Queen Victoria wept reading Harriet Beecher Stowe "Uncle Tom's cabin, or Life among the lowly". Our first daughter just finished reading the French translation of the book: "La case de l'oncle Tom". She found the book excellent and told the story to her two younger sisters. The last chapter of the book contains the concluding remarks of the author.

UNCLE TOM'S CABIN, OR LIFE AMONG THE LOWLY
By Harriet Beecher Stowe

CHAPTER XLV

Concluding Remarks

The writer has often been inquired of, by correspondents from different parts of the country, whether this narrative is a true one; and to these inquiries she will give one general answer.

The separate incidents that compose the narrative are, to a very great extent, authentic, occurring, many of them, either under her own observation, or that of her personal friends. She or her friends have observed characters the counterpart of almost all that are here introduced; and many of the sayings are word for word as heard herself, or reported to her.

The personal appearance of Eliza, the character ascribed to her, are sketches drawn from life. The incorruptible fidelity, piety and honesty, of Uncle Tom, had more than one development, to her personal knowledge. Some of the most deeply tragic and romantic, some of the most terrible incidents, have also their parallel in reality. The incident of the mother's crossing the Ohio river on the ice is a well-known fact. The story of "old Prue," in the second volume, was an incident that fell under the personal observation of a brother of the writer, then collecting-clerk to a large mercantile house, in New Orleans. From the same source was derived the character of the planter Legree. Of him her brother thus wrote, speaking of visiting his plantation, on a collecting tour; "He actually made me feel of his fist, which was like a blacksmith's hammer, or a nodule of iron, telling me that it was `calloused with knocking down niggers.' When I left the plantation, I drew a long breath, and felt as if I had escaped from an ogre's den."

That the tragical fate of Tom, also, has too many times had its parallel, there are living witnesses, all over our land, to testify. Let it be remembered that in all southern states it is a principle of jurisprudence that no person of colored lineage can testify in a suit against a white, and it will be easy to see that such a case may occur, wherever there is a man whose passions outweigh his interests, and a slave who has manhood or principle enough to resist his will. There is, actually, nothing to protect the slave's life, but the character of the master. Facts too shocking to be contemplated occasionally force their way to the public ear, and the comment that one often hears made on them is more shocking than the thing itself. It is said, "Very likely such cases may now and then occur, but they are no sample of general practice." If the laws of New England were so arranged that a master could now and then torture an apprentice to death, would it be received with equal composure? Would it be said, "These cases are rare, and no samples of general practice"? This injustice is an inherent one in the slave system,--it cannot exist without it.

The public and shameless sale of beautiful mulatto and quadroon girls has acquired a notoriety, from the incidents following the capture of the Pearl. We extract the following from the speech of Hon. Horace Mann, one of the legal counsel for the defendants in that case. He says: "In that company of seventy-six persons, who attempted, in 1848, to escape from the District of Columbia in the schooner Pearl, and whose officers I assisted in defending, there were several young and healthy girls, who had those peculiar attractions of form and feature which connoisseurs prize so highly. Elizabeth Russel was one of them. She immediately fell into the slave-trader's fangs, and was doomed for the New Orleans market. The hearts of those that saw her were touched with pity for her fate. They offered eighteen hundred dollars to redeem her; and some there were who offered to give, that would not have much left after the gift; but the fiend of a slave-trader was inexorable. She was despatched to New Orleans; but, when about half way there, God had mercy on her, and smote her with death. There were two girls named Edmundson in the same company. When about to be sent to the same market, an older sister went to the shambles, to plead with the wretch who owned them, for the love of God, to spare his victims. He bantered her, telling what fine dresses and fine furniture they would have. `Yes,' she said, `that may do very well in this life, but what will become of them in the next?' They too were sent to New Orleans; but were afterwards redeemed, at an enormous ransom, and brought back." Is it not plain, from this, that the histories of Emmeline and Cassy may have many counterparts?

Justice, too, obliges the author to state that the fairness of mind and generosity attributed to St. Clare are not without a parallel, as the following anecdote will show. A few years since, a young southern gentleman was in Cincinnati, with a favorite servant, who had been his personal attendant from a boy. The young man took advantage of this opportunity to secure his own freedom, and fled to the protection of a Quaker, who was quite noted in affairs of this kind. The owner was exceedingly indignant. He had always treated the slave with such indulgence, and his confidence in his affection was such, that he believed he must have been practised upon to induce him to revolt from him. He visited the Quaker, in high anger; but, being possessed of uncommon candor and fairness, was soon quieted by his arguments and representations. It was a side of the subject which he never had heard,--never had thought on; and he immediately told the Quaker that, if his slave would, to his own face, say that it was his desire to be free, he would liberate him. An interview was forthwith procured, and Nathan was asked by his young master whether he had ever had any reason to complain of his treatment, in any respect.

"No, Mas'r," said Nathan; "you've always been good to me."

"Well, then, why do you want to leave me?"

"Mas'r may die, and then who get me?--I'd rather be a free man."

After some deliberation, the young master replied, "Nathan, in your place, I think I should feel very much so, myself. You are free."

He immediately made him out free papers; deposited a sum of money in the hands of the Quaker, to be judiciously used in assisting him to start in life, and left a very sensible and kind letter of advice to the young man. That letter was for some time in the writer's hands.

The author hopes she has done justice to that nobility, generosity, and humanity, which in many cases characterize individuals at the, South. Such instances save us from utter despair of our kind. But, she asks any person, who knows the world, are such characters common , anywhere?

For many years of her life, the author avoided all reading upon or allusion to the subject of slavery, considering it as too painful to be inquired into, and one which advancing light and civlization would certainly live down. But, since the legislative act of 1850, when she heard, with perfect surprise and consternation, Christian and humane people actually recommending the remanding escaped fugitives into slavery, as a duty binding on good citizens,--when she heard, on all hands, from kind, compassionate and estimable people, in the free states of the North, deliberations and discussions as to what Christian duty could be on this head,--she could only think, These men and Christians cannot know what slavery is; if they did, such a question could never be open for discussion. And from this arose a desire to exhibit it in a living dramatic reality . She has endeavored to show it fairly, in its best and its worst phases. In its best aspect, she has, perhaps, been successful; but, oh! who shall say what yet remains untold in that valley and shadow of death, that lies the other side?

To you, generous, noble-minded men and women, of the South,--you, whose virtue, and magnanimity and purity of character, are the greater for the severer trial it has encountered,--to you is her appeal. Have you not, in your own secret souls, in your own private conversings, felt that there are woes and evils, in this accursed system, far beyond what are here shadowed, or can be shadowed? Can it be otherwise? Is man ever a creature to be trusted with wholly irresponsible power? And does not the slave system, by denying the slave all legal right of testimony, make every individual owner an irresponsible despot? Can anybody fall to make the inference what the practical result will be? If there is, as we admit, a public sentiment among you, men of honor, justice and humanity, is there not also another kind of public sentiment among the ruffian, the brutal and debased? And cannot the ruffian, the brutal, the debased, by slave law, own just as many slaves as the best and purest? Are the honorable, the just, the high-minded and compassionate, the majority anywhere in this world?

The slave-trade is now, by American law, considered as piracy. But a slave-trade, as systematic as ever was carried on on the coast of Africa, is an inevitable attendant and result of American slavery. And its heart-break and its horrors, can they be told?

The writer has given only a faint shadow, a dim picture, of the anguish and despair that are, at this very moment, riving thousands of hearts, shattering thousands of families, and driving a helpless and sensitive race to frenzy and despair. There are those living who know the mothers whom this accursed traffic has driven to the murder of their children; and themselves seeking in death a shelter from woes more dreaded than death. Nothing of tragedy can be written, can be spoken, can be conceived, that equals the frightful reality of scenes daily and hourly acting on our shores, beneath the shadow of American law, and the shadow of the cross of Christ.

And now, men and women of America, is this a thing to be trifled with, apologized for, and passed over in silence? Farmers of Massachusetts, of New Hampshire, of Vermont, of Connecticut, who read this book by the blaze of your winter-evening fire,--strong-hearted, generous sailors and ship-owners of Maine,--is this a thing for you to countenance and encourage? Brave and generous men of New York, farmers of rich and joyous Ohio, and ye of the wide prairie states,--answer, is this a thing for you to protect and countenance? And you, mothers of America,--you who have learned, by the cradles of your own children, to love and feel for all mankind,--by the sacred love you bear your child; by your joy in his beautiful, spotless infancy; by the motherly pity and tenderness with which you guide his growing years; by the anxieties of his education; by the prayers you breathe for his soul's eternal good;--I beseech you, pity the mother who has all your affections, and not one legal right to protect, guide, or educate, the child of her bosom! By the sick hour of your child; by those dying eyes, which you can never forget; by those last cries, that wrung your heart when you could neither help nor save; by the desolation of that empty cradle, that silent nursery,--I beseech you, pity those mothers that are constantly made childless by the American slave-trade! And say, mothers of America, is this a thing to be defended, sympathized with, passed over in silence?

Do you say that the people of the free state have nothing to do with it, and can do nothing? Would to God this were true! But it is not true. The people of the free states have defended, encouraged, and participated; and are more guilty for it, before God, than the South, in that they have not the apology of education or custom.

If the mothers of the free states had all felt as they should, in times past, the sons of the free states would not have been the holders, and, proverbially, the hardest masters of slaves; the sons of the free states would not have connived at the extension of slavery, in our national body; the sons of the free states would not, as they do, trade the souls and bodies of men as an equivalent to money, in their mercantile dealings. There are multitudes of slaves temporarily owned, and sold again, by merchants in northern cities; and shall the whole guilt or obloquy of slavery fall only on the South?

Northern men, northern mothers, northern Christians, have something more to do than denounce their brethren at the South; they have to look to the evil among themselves.

But, what can any individual do? Of that, every individual can judge. There is one thing that every individual can do,--they can see to it that they feel right . An atmosphere of sympathetic influence encircles every human being; and the man or woman who feels strongly, healthily and justly, on the great interests of humanity, is a constant benefactor to the human race. See, then, to your sympathies in this matter! Are they in harmony with the sympathies of Christ? or are they swayed and perverted by the sophistries of worldly policy?

Christian men and women of the North! still further,--you have another power; you can pray! Do you believe in prayer? or has it become an indistinct apostolic tradition? You pray for the heathen abroad; pray also for the heathen at home. And pray for those distressed Christians whose whole chance of religious improvement is an accident of trade and sale; from whom any adherence to the morals of Christianity is, in many cases, an impossibility, unless they have given them, from above, the courage and grace of martyrdom.

But, still more. On the shores of our free states are emerging the poor, shattered, broken remnants of families,--men and women, escaped, by miraculous providences from the surges of slavery,--feeble in knowledge, and, in many cases, infirm in moral constitution, from a system which confounds and confuses every principle of Christianity and morality. They come to seek a refuge among you; they come to seek education, knowledge, Christianity.

What do you owe to these poor unfortunates, oh Christians? Does not every American Christian owe to the African race some effort at reparation for the wrongs that the American nation has brought upon them? Shall the doors of churches and school-houses be shut upon them? Shall states arise and shake them out? Shall the church of Christ hear in silence the taunt that is thrown at them, and shrink away from the helpless hand that they stretch out; and, by her silence, encourage the cruelty that would chase them from our borders? If it must be so, it will be a mournful spectacle. If it must be so, the country will have reason to tremble, when it remembers that the fate of nations is in the hands of One who is very pitiful, and of tender compassion.

Do you say, "We don't want them here; let them go to Africa"?

That the providence of God has provided a refuge in Africa, is, indeed, a great and noticeable fact; but that is no reason why the church of Christ should throw off that responsibility to this outcast race which her profession demands of her.

To fill up Liberia with an ignorant, inexperienced, half-barbarized race, just escaped from the chains of slavery, would be only to prolong, for ages, the period of struggle and conflict which attends the inception of new enterprises. Let the church of the north receive these poor sufferers in the spirit of Christ; receive them to the educating advantages of Christian republican society and schools, until they have attained to somewhat of a moral and intellectual maturity, and then assist them in their passage to those shores, where they may put in practice the lessons they have learned in America.

There is a body of men at the north, comparatively small, who have been doing this; and, as the result, this country has already seen examples of men, formerly slaves, who have rapidly acquired property, reputation, and education. Talent has been developed, which, considering the circumstances, is certainly remarkable; and, for moral traits of honesty, kindness, tenderness of feeling,--for heroic efforts and self-denials, endured for the ransom of brethren and friends yet in slavery,--they have been remarkable to a degree that, considering the influence under which they were born, is surprising.

The writer has lived, for many years, on the frontier-line of slave states, and has had great opportunities of observation among those who formerly were slaves. They have been in her family as servants; and, in default of any other school to receive them, she has, in many cases, had them instructed in a family school, with her own children. She has also the testimony of missionaries, among the fugitives in Canada, in coincidence with her own experience; and her deductions, with regard to the capabilities of the race, are encouraging in the highest degree.

The first desire of the emancipated slave, generally, is for education . There is nothing that they are not willing to give or do to have their children instructed, and, so far as the writer has observed herself, or taken the testimony of teachers among them, they are remarkably intelligent and quick to learn. The results of schools, founded for them by benevolent individuals in Cincinnati, fully establish this.

The author gives the following statement of facts, on the authority of Professor C. E. Stowe, then of Lane Seminary, Ohio, with regard to emancipated slaves, now resident in Cincinnati; given to show the capability of the race, even without any very particular assistance or encouragement.

The initial letters alone are given. They are all residents of Cincinnati.

"B----. Furniture maker; twenty years in the city; worth ten thousand dollars, all his own earnings; a Baptist.

"C----. Full black; stolen from Africa; sold in New Orleans; been free fifteen years; paid for himself six hundred dollars; a farmer; owns several farms in Indiana; Presbyterian; probably worth fifteen or twenty thousand dollars, all earned by himself.

"K----. Full black; dealer in real estate; worth thirty thousand dollars; about forty years old; free six years; paid eighteen hundred dollars for his family; member of the Baptist church; received a legacy from his master, which he has taken good care of, and increased.

"G----. Full black; coal dealer; about thirty years old; worth eighteen thousand dollars; paid for himself twice, being once defrauded to the amount of sixteen hundred dollars; made all his money by his own efforts--much of it while a slave, hiring his time of his master, and doing business for himself; a fine, gentlemanly fellow.

"W----. Three-fourths black; barber and waiter; from Kentucky; nineteen years free; paid for self and family over three thousand dollars; deacon in the Baptist church.

"G. D----. Three-fourths black; white-washer; from Kentucky; nine years free; paid fifteen hundred dollars for self and family; recently died, aged sixty; worth six thousand dollars."

Professor Stowe says, "With all these, except G----, I have been, for some years, personally acquainted, and make my statements from my own knowledge."

The writer well remembers an aged colored woman, who was employed as a washerwoman in her father's family. The daughter of this woman married a slave. She was a remarkably active and capable young woman, and, by her industry and thrift, and the most persevering self-denial, raised nine hundred dollars for her husband's freedom, which she paid, as she raised it, into the hands of his master. She yet wanted a hundred dollars of the price, when he died. She never recovered any of the money.

These are but few facts, among multitudes which might be adduced, to show the self-denial, energy, patience, and honesty, which the slave has exhibited in a state of freedom.

And let it be remembered that these individuals have thus bravely succeeded in conquering for themselves comparative wealth and social position, in the face of every disadvantage and discouragement. The colored man, by the law of Ohio, cannot be a voter, and, till within a few years, was even denied the right of testimony in legal suits with the white. Nor are these instances confined to the State of Ohio. In all states of the Union we see men, but yesterday burst from the shackles of slavery, who, by a self-educating force, which cannot be too much admired, have risen to highly respectable stations in society. Pennington, among clergymen, Douglas and Ward, among editors, are well known instances.

If this persecuted race, with every discouragement and disadvantage, have done thus much, how much more they might do if the Christian church would act towards them in the spirit of her Lord!

This is an age of the world when nations are trembling and convulsed. A mighty influence is abroad, surging and heaving the world, as with an earthquake. And is America safe? Every nation that carries in its bosom great and unredressed injustice has in it the elements of this last convulsion.

For what is this mighty influence thus rousing in all nations and languages those groanings that cannot be uttered, for man's freedom and equality?

O, Church of Christ, read the signs of the times! Is not this power the spirit of Him whose kingdom is yet to come, and whose will to be done on earth as it is in heaven?

But who may abide the day of his appearing? "for that day shall burn as an oven: and he shall appear as a swift witness against those that oppress the hireling in his wages, the widow and the fatherless, and that turn aside the stranger in his right : and he shall break in pieces the oppressor."

Are not these dread words for a nation bearing in her bosom so mighty an injustice? Christians! every time that you pray that the kingdom of Christ may come, can you forget that prophecy associates, in dread fellowship, the day of vengeance with the year of his redeemed?

A day of grace is yet held out to us. Both North and South have been guilty before God; and the Christian church has a heavy account to answer. Not by combining together, to protect injustice and cruelty, and making a common capital of sin, is this Union to be saved,--but by repentance, justice and mercy; for, not surer is the eternal law by which the millstone sinks in the ocean, than that stronger law, by which injustice and cruelty shall bring on nations the wrath of Almighty God!


ALBUMS POUR LA JEUNESSE

LE CAPITAINE FRACASSE, par THÉOPHILE GAUTIER.
LA CASE DE L'ONCLE TOM, par MME BEECHER-STOWE.
CONTES D'ANDERSEN.
CONTES DE GRIMM.
CONTES DES MILLE ET UNE NUITS.
CONTES DE PERRAULT.
DAVID COPPERFIELD, par CHARLES DICKENS.
FABLES DE LA FONTAINE.
GULLIVER A LILLIPUT, par SWIFT.
HISTOIRE DE DON QUICHOTTE DE LA MANCHE, par MICHEL CERVANTÈS.
M. PICKWICK, par CHARLES DICKENS.
ROBINSON CRUSOÉ, par DANIEL DE FOË.
LE ROBINSON SUISSE, par RODOLPHE WYSS.

Masaniello. Name usually given in Britain to Auber's opera in 5 acts "La Muette de Portici" (The Dumb Girl of Portici) to lib. by Scribe and Delavigne. Prod. Paris 1828, London 1829, NY 1831. Perf. in Brussels in 1830 led to Belgian revolt (plot being based on Neapolitan uprising against Spanish oppressors, 1647). [Source: The Concise Oxford Dictionary of Music, Michael Kennedy, Oxford University Press 1980]

LÉOPOLD Ier
Par André Van Hasselt en 1849

Parmi les familles souveraines qui, dans ces dernières années, ont le plus occupé l’attention de l’Europe, il n’y en a peut-être aucune dont les destinées aient été tour à tour plus brillantes et plus douloureuses que ne le furent celles de la maison de Saxe. A coup sûr, il n’en est point qui soit plus ancienne et plus illustre. Elle est issue de cette race énergique et indomptables des Saxons qui, sortie de la Cheronèse Cimbrique, prit, dès le cinquième siècle, une partie de l’Angleterre aux Pictes, qui occupa pendant trente ans l’épée des Francs, qui donna au trône de Clovis le chef de la ligne capétienne, qui fit placer sur la tête du duc Henri l’Oiseleur la couronne d’Allemagne, devenue trop lourde pour la tête des descendants dégénérés de l’illustre fondateur de l’empire carlovingien, et qui vit passer le sceptre impérial dans les mains de ses trois Othon. Elle porte à la fois dans ses veines le sang de Witekind, qui résista depuis 773 jusqu’en 803 aux armes de Charlemagne, de Henri l’Oiseleur, auquel l’histoire attribue la fondation des premières villes municipales de l’Allemagne, d’Othon Ier, qui étendit sa puissance sur la Lombardie et refit en partie l’empire d’Occident fondé par le fils de Pépin le Bref, enfin ces princes célèbres auxquels l’Allemagne doit l’établissement de la constitution germanique, qui dura pendant une grande partie du moyen âge et qui ne put être brisée que par l’épée de Napoléon.

Cette famille produisit au quinzième siècle plusieurs ducs-électeurs dont les surnoms valent à eux seuls toute une histoire : Frédéric le Batailleur, qui fut, après la maison impériale de Luxembourg, le plus puissant des princes d’Allemagne ; Frédéric le Sage, qui refusa par humilité la couronne impériale et la fit placer sur la tête de Charles-Quint ; Jean l’Opiniâtre et Jean-Frédéric le Magnanime, qui se firent contre cet empereur les champions des libertés et des privilèges des princes germaniques. Plus tard, un de leurs parents s’appellera Bernard de Saxe-Weimar et luttera contre Wallenstein dans la guerre de trente ans, tandis qu’un de leurs descendants, Jean George Ier, sera, avec Gustave-Adolphe, l’un des deux héros de la fameuse journée de Leipzig. Puis vinrent les deux Frédéric-Auguste qui occupèrent, pendant soixante et dix ans, le trône de Pologne, et dont le premier eut à défendre sa couronne contre Charles XII de Suède, le second sa royauté contre Frédéric II de Prusse.

Mais si cette lignée, féconde en hommes célèbres, produisit ainsi une longue liste de princes distingués par leur mérite politique et militaire, elle compte aussi parmi les siens les plus illustres promoteurs des arts et des lettres en Allemagne. C’est à eux que la plupart des grands établissements intellectuels qui, depuis la célèbre université de Wittemberg jusqu’à cette cour poétique de Weimar, où Goethe, Schiller, Herder et Wieland produisirent leurs chefs-d’œuvre, et qui, toute rayonnante de la gloire de ces génies illustres, a mérité et garde toujours le surnom d’Athènes de l’Allemagne.

La maison de Saxe fut divisée en deux lignes par l’acte de partage que les ducs Ernest et Albert dressèrent à Wittemberg le 26 août 1485. L’une prit le nom de «branche Albertine» et devint plus tard la souche royale qui règne encore aujourd’hui; l’autre, qui fut appelée la «branche Ernestine», se compose des ducs de Saxe-Cobourg-Gotha, de Saxe-Meiningen, de Saxe-Altenbourg et de Saxe-Weimar-Eisenach. C’est de cette dernière que sortit Frédéric le Sage et qu’est issu le prince dont nous allons esquisser la biographie.

Léopold-Georges-Chrétien-Frédéric de Saxe Cobourg-Gotha, sixième enfant du duc Frédéric-Antoine, naquit en 1790. Par un singulier jeu de la destinée, il vit le jour, lui qui fut plus tard appelé à fermer deux révolutions, celle de la Grèce et celle de la Belgique, au moment même où se préparait un des bouleversements les plus terribles qui aient remué l’Europe. Enfant, il fut bercé avec la poésie de Goethe si pleine de pensées, et avec la poésie de Schiller si pleine de rêverie, tandis qu’à l’occident grondait déjà le bruit formidable de la révolution française. Cette rumeur lointaine ne fut d’abord pour sa jeune imagination qu’un simple objet de curiosité, bientôt elle devint pour lui un sujet assidu de réflexion. En effet, ne renfermait-elle pas l’avenir du monde, la ruine de tout ce qui existait, le renversement de tout ce que les siècles avaient si laborieusement échafaudé, la destruction de cette chose si belle et si chère, l’unité germanique que ses ancêtres, à lui, avaient si puissamment aidé à établir, à consolider, à défendre ? Il comprit tout cela, vaguement il est vrai, mais il pressentait qu’une grande tâche pourrait lui être imposée un jour. Aussi voilà l’enfant qui songe à se hâter de devenir homme, afin d’être prêt au moment où il faudra des hommes qui soient à la hauteur des circonstances. Les événements marchent ; il ne veut pas se laisser devancer par eux. Destiné par l’empereur Léopold, qui était son parrain, à occuper un poste dans les armées impériales, il se prépare à la carrière qui l’attend, par des études sérieuses et solides. Les sciences exactes ont toujours eu un charme puissant pour les caractères fortement trempés : il les aborde avec l’ardeur énergique et réfléchie d’un esprit qui se sent appelé à une haute mission. Il entre au collège de Cobourg, où il apprend les mathématiques et la théorie de la guerre. Les vieux officiers de son père lui ouvrent une autre école, la pratique de l’art militaire. Pendant longtemps rien ne peut le distraire de ces études, si ce n’est l’étude des langues : le latin, le grec, l’anglais, l’italien, le français ; car il sait que les langues sont des pics au moyen desquels on moyen desquels on creuse la mine des idées. Il ne néglige pas l’histoire ; elle est pour lui une grande algèbre des faits, où les siècles et les événements sont les termes des problèmes sociaux, et où l’inconnu se déduit toujours du connu comme une logique en action. L’économie politique l’initie à la connaissance des forces matérielles des peuples, dont les mœurs et la civilisation lui sont révélées par les législations diverses, et les intérêts par l’étude des arts mécaniques, de l’industrie et du commerce. Tel fut le cercle des choses savantes dans lequel s’enferma cet enfant prédestiné ; car une voix intérieure lui disait que l’humble résidence de Cobourg n’était pas un théâtre assez vaste pour lui. Son unique délassement, il le cherchait dans les arts, la musique, le dessin et la botanique ; car la botanique est une harmonie aussi, une musique visible.

Pendant que le jeune duc grandissait ainsi dans ses occupations graves et sévères, que son intelligence se développait par la science, que son cœur se formait, grâce aux soins assidus et pieux de sa mère, noble et sainte femme, qui faisait comme la mère des Gracques, sa plus belle parure de ses enfants, et que son âme s’exaltait au souvenir des grandes choses que ses ancêtres avaient accomplies, un nouvel ordre politique s’était établi en Europe. Bonaparte était devenu Napoléon. Les forces de l’Autriche et de la Russie avaient été détruites le 2 décembre 1805, à la mémorable journée d’Austerlitz. L’épée de la France avait brisé le corps immense et séculaire de l’empire germanique, auquel le vainqueur avait substitué la Confédération des États du Rhin par le traité de Paris du 12 juillet 1806. Mais, à la suite de cet acte, une quatrième coalition contre la France avait été ébauchée par la Prusse. Les armées françaises passèrent brusquement le Rhin le 1er octobre. Elles se concentrèrent dans la Franconie, et bientôt le calme domaine de Cobourg se vit en proie à toutes les horreurs de la guerre. Le jeune Léopold était près d’atteindre sa seizième année. Il eut la douleur d’assister à la dévastation des États de son père, qui ne pouvant survivre à un si grand malheur, mourut le 9 décembre dans les bras de son fils. Après avoir été ravagé de fond en comble, le duché fut déclaré saisi par Napoléon le 11 janvier 1807, parce qu’Ernest, héritier de François-Frédéric-Antoine, avait fait partie du quartier général de l’armée prusse.

Maintenant que sa famille n’a plus d’asile dans cette grande Allemagne, que fera Léopold ? Il se tourne du côté de la Russie, où sa sœur, Julienne-Henriette-Ulrique, a épousé en 1796 le grand-duc Constantin Paulowitz. Le cœur navré de douleur, il quitta cette terre qui avait été son berceau, il dit adieu à ce sol aimé où il avait grandi sous l’aile de sa mère et à l’ombre des beaux noms que ses aïeux avaient illustrés. Mais à peine fut-il arrivé à Saint-Pétersbourg, que le traité de Tilsitt remit le duc de Saxe-Cobourg dans la pleine et paisible jouissance de ses États. Alors le jeune prince se hâta de rentrer dans les possessions de son frère, où il concourut avec tout le dévouement d’une âme généreuse et éprouvée, à cicatriser les blessures profondes que les désastres de la guerre y avaient faites.

Bientôt après nous le retrouvons en Russie, où il fut élevé au grade de général, bien qu’il eut à peine atteint sa dix-septième année. Il paraît en 1808 avec ce titre, à la suite de l’empereur Alexandre, au célèbre congrès d’Erfurt, et se fait distinguer, au milieu des princes et des rois qui s’y trouvent réunis par son esprit fin et délié, par son tact supérieur, par son intelligence que l’étude a développée et que les événements ont mûrie. Cependant des épreuves nouvelles lui étaient réservées. Napoléon voulut que le duc Ernest de Saxe-Cobourg et son frère Ferdinand rompissent avec l’Autriche, sous les drapeaux de laquelle ils avaient servi la cause de l’Allemagne ; ils furent forcés de plier devant cette volonté de fer à laquelle rien n’était capable de résister alors. L’année suivante l’empereur parla de nouveau : il exigea que Léopold quittât le service de la Russie. Mais la dignité du prince se révolta contre un ordre aussi arbitraire. Il refusa de sortir d’une carrière dans laquelle il croyait pouvoir utilement servir la cause de sa patrie opprimée. Ce refus seul fut un grand acte de courage, à cette époque où les têtes les plus hautes et les plus puissances les plus anciennes se courbaient devant l’homme que l’Allemagne, dans son langage poétique, avait surnommé, l’homme des destinées. Cependant les sages trouvèrent des motifs pour convaincre Léopold de la nécessité de céder à la volonté impériale. Alors il résolut de ne se démettre du commandement supérieur dont il était investi, qu’après en avoir reçu l’injonction de Napoléon lui-même. Le voilà donc qui prend le chemin de Paris pour aller disputer son épée à celui auquel ni empereurs, ni rois n’avaient pu disputer leurs couronnes. Mais l’ordre de sortir du camp russe lui est formellement répété. Cet ordre est même appuyé d’une menace dont l’exécution ne peut être mise en doute, car elle est proférée par une bouche qui parle du haut d’un trône bâti sur vingt victoires. Si le prince continue à résister à l’injonction qui lui est faite, son frère, le duc régnant de Saxe-Cobourg, sera de nouveau dépouillé de ses États. Dès ce moment il ne résiste plus. L’amour fraternel a triomphé de l’indignation que lui fait éprouver l’atteinte portée à sa dignité et à sa liberté personnelles.

Léopold se sépare alors avec douleur de l’empereur Alexandre. Il retourne à Cobourg, attendant les jours meilleurs que l’avenir réserve à sa patrie. Rentré dans la solitude, il se reprend avec ardeur aux études sévères qui ont occupé les premières années de sa vie, et se prépare ainsi aux événements que l’œil le moins prévoyant prévoit déjà dans les destinées de l’empire de Napoléon.

Dans ces entrefaites 1812 arrive. La guerre contre la Russie est résolue, et la grande armée française s’est mise en route pour Moscou. Léopold court aussitôt offrir son épée à Alexandre, qui la refuse, dans la crainte que Napoléon ne fasse derechef tomber sa colère sur la famille de Cobourg. Le prince, affligé de se voir forcé de nouveau à rester inactif au milieu de la lutte décisive dont le Nord va devenir le théâtre, songe dès lors à occuper ailleurs son activité. Il visite successivement l’Autriche, la Suisse et l’Italie, étudiant partout les ressources des lieux et la disposition des esprits, levant des plans, examinant avec soins les positions que présentent ces pays, enfin recueillant les lumières les plus utiles et les plus compètes sur les choses et sur les hommes. Pendant ce temps, le grand désastre de Napoléon s’est accompli. L’empire de 1804 s’est brisé contre la Russie. Maintenant Léopold peut prendre enfin le rôle auquel il aspire depuis si longtemps. Il accourt en Pologne rendre compte à l’empereur Alexandre des dispositions du peuple allemand à l’égard de la domination étrangère. Rentré dans l’armée russe, sur les cadres de laquelle son nom avait été maintenu, il prit, à la tête d’un corps de cavalerie, une part active aux mémorables journées de Lutzen et de Bautze, où il donna à la fois des preuve de son intelligence, d’une fermeté et d’un courage qui étonnèrent les hommes vieillis sur les champs de bataille.

Après avoir paru un moment, à côté de l’empereur Alexandre, au congrès de Prague, où les princes alliés se concertèrent sur leurs opérations futures, à la suite de l’armistice conclu après la bataille de Bautzen, il revient se placer à la tête de sa cavalerie aussitôt que les hostilités reprennent leurs cours. Dresde est devenu le pivot des opérations de l’armée française, tandis que celle des confédérés se concentre derrière l’Erz- et le Mittegebirge. En avant de la citadelle de Königstein, se trouvait posté un corps, commandé par le prince de Wurtemberg et chargé à la fois de couvrir les mouvements des coalisés et de garder les avenues de la Bohême. Mais à peine Léopold a-t-il rejoint ce corps, qu’il s’aperçoit que les troupes russes sont débordées sur leur deux ailes par le général français Vandamme. Le moment est critique. Aussi le prince se hâte de prendre position avec sa cavalerie au centre du détachement, prêt à se porter vers le côté sur lequel l’ennemi pourrait essayer de tomber. Son attitude ferme et résolue, et la résistance énergique qu’il oppose à toutes les attaques, contiennent les Français et sauvent d’une destruction presque certaine la division du prince de Wurtemberg.

La prise de la place de Pirna, dont les Français s’emparent le jour suivant, leur permit de se déployer dans les plaines qui s’étendent sur la rive droite de l’Elbe. Ce mouvement fournit au jeune général une nouvelle occasion de se signaler. Il refoula vigoureusement l’ennemi vers Pirna et le força à s’y tenir enfermé. Jusqu’à ce moment les alliés avaient prudemment suivi un système d’escarmouches, et évité d’engager une action décisive qui eût pu compromettre le sort de la campagne. Léopold se montra l’un des plus actifs dans cette guerre de manœuvres. Partout où une action s’engageait, partout où il y avait une position importante à défendre, on était sûr de le trouver à la tête de ses intrépides cuirassiers. Un des chocs qui le distingua le plus fut celui auquel donna lieu la défense de la gorge Peterwald. Une troupe de cavalerie française avait réussi à forcer ce passage et allait écraser l’infanterie alliée qui était chargée de le garder. Le prince de Saxe-Cobourg accourut au même instant, culbuta les assaillants dans le défilé, et, grâce à ce mouvement aussi prompt qu’énergique, les Austro-Russes purent reformer leurs lignes déjà rompues. Mais, pendant qu’il tenait encore l’ennemi en échec, une division française s’avança et chercha à le rompre à son tour. Il soutint cette attaque avec une résolution opiniâtre, disputa le terrain pied à pied, et, par cette manœuvre intelligente et hardie, échappa à ces forces supérieures, sans que son régiment eût été entamé et que l’infanterie qu’il était venu dégager fût compromise d’avantage.

Avant que cette célèbre campagne de 1813 se terminât par la bataille décisive de Leipzig, le prince n’avait pas passé un jour sans se trouver en face de l’ennemi. Il assista à cette lutte acharnée, décoré des insignes de l’Aigle Noire, de Saint-George, de Saint-André et de Marie-Thérèse, et s’y trouva constamment aux postes les plus périlleux : car il était commis à la défense des batteries russes qui, élevées entre les villages de Gossa et de Magdeborn, avaient attiré sur elles l'attaque principale de l’ennemi.

Dès lors la retraite de l’armée française devint une déroute. L’Allemagne, profitant de ce désastre saisit le moment favorable de secouer le joug de l’étranger. Réveillée au cri magique de liberté qui retentissait dans tous les cœurs depuis l’Elbe jusqu’au Danube, elle reprit les armes et convoqua tous ses enfants au grand combat qui allait s’engager. Léopold ne put rester sourd à cet appel de sa patrie. Les sanglantes batailles de Lutzen et de Bautzen vinrent, il est vrai, compromettre de nouveau pour un instant les destinées de l’Allemagne. Mais, aux terribles journées de Leipzig, elle conquit enfin son indépendance, et se dirigea à son tour vers le Rhin, disposée à envahir le sol de la France.

Bientôt la campagne de 1814 s’ouvrit. Léopold faisait partie de l’avant-garde des princes alliés. Il assista, le 1er février, au combat de Brienne. Mais le génie et l’activité de Napoléon, qui se multipliaient partout dans cette lutte suprême, parvinrent à séparer, par des manœuvres aussi rapides que savantes, l’armée des Prussiens, commandés par Blücher, et celle des Autrichiens, commandés par Schwarzenberg, tandis qu’ils tenaient en échec les forces russes, placées sous les ordres de Wittgenstein. Les Prussiens furent battus à Montmirail, à Vauchamp, à Châteu-Thierry, à Craonne, les Autrichiens et les Russes à Mormant, à Champaubert, à Montereau. Les alliés découragés par ces défaites successives, quittèrent aussitôt les lignes de la Seine et de la Marne, pour se reformer derrière l’Aube, où elles opérèrent leur jonction. Ce système nouveau que l’empereur Alexandre fit prévaloir alors, et qui tendait à agir en commun, leur ouvrit enfin les portes de Paris, après le sanglant combat d’Arcis-sur-Aube, qui fut livré le 20 mars. Le prince Léopold se distingua, dans cette journée, par sa valeur personnelle autant que par l’habilité de ses mouvements. Il y commandait l’aile droite et se trouva plus d’une fois exposé aux plus grands périls. Cinq jours après, toujours placé à l’avant-garde, il se signala de nouveau à la bataille de Fère Champenoise, où il attaqua avec sa cavalerie la droite du duc de Raguse, lui enleva cinq bouches à feu et le délogea de l’importante position qu’elle occupait. Il se jeta ensuite sur la division commandée par le général Pacthod, qui fut fait prisonnier dans les marais de Saint-Gond, après avoir perdu cinq mille hommes. Mais bientôt, le duc de Raguse ayant été rejoint par le duc de Trévise, toute la cavalerie des Français tomba sous l’artillerie des gardes russes que le prince Léopold était chargé de protéger. Il parvint heureusement à la sauver en soutenant le choc des ennemis et en les refoulant avec énergie sans qu’ils eussent réussi à l’entamer. Ce fut le dernier effort de l’armée française. Le 30 mars les destinées de Napoléon étaient accomplies. Les alliés entrèrent dans la capitale de son empire, et son empire était perdu.

Léopold avait rendu dans cette guerre les services les plus éminents par son intelligence militaire et par la bravoure dont il fit preuve dans toutes les circonstances où la bravoure avait été nécessaire pour le succès des armées de l’Europe. Aussi fut-il un des princes qu’on distingua le plus dans les fêtes dont Paris fut le théâtre après les événements qui venaient de s’accomplir. Peu de temps après il suivit les souverains alliés à Londres, où des fêtes nouvelles furent instaurées. Là, ce furent autant de nouveaux triomphes pour le jeune prince. Son nom était cité parmi les noms les plus braves qui avaient figuré dans cette laborieuse et terrible campagne. À cette auréole du soldat il joignait les qualités brillantes du cavalier accompli, un esprit fin et cultivé, une grande affabilité qui n’excluait ni la dignité ni la noblesse, et puis (pourquoi ne pas le dire ?) un extérieur séduisant dès le premier abord et que Napoléon caractérisa par ces paroles consignées dans le Mémorial de Sainte-Hélène : «C’est le plus beau jeune homme que j’aie vu aux Tuileries.»

Une ravissante et gracieuse jeune fille, toute radieuse de ses dix-huit ans, était l’âme et la reine de ces fêtes : c’était la princesse Charlotte-Auguste, fille du Prince de Galles et héritière de la couronne d’Angleterre. Douée par la nature de toutes les qualités qui font aimer la femme, quand même elle n’est point entouré de l’éclat de la royauté ni du prestige de la puissance, elle était d’une beauté digne d’être peinte par Lawrence, auquel elle fit faire un chef-d’œuvre, et d’un esprit digne d’être chanté par les poëtes les plus célèbres des trois royaumes. Elle aimait les arts et les cultivait avec succès. Elle était musicienne et produisait même plusieurs poésies empreintes d’un sentiment délicat et profond. Telle était cette princesse, appelée, disait-on, à renouveler la splendeur des règnes qu’illustrèrent les noms d’Elisabeth et d’Anne. Aussi un grand nombre de prétendants aspiraient à plaire à Charlotte-Auguste. Parmi ceux qui furent les plus remarqués se trouvaient le prince Guillaume d’Orange et le prince Paul de Wurtemberg. Les intrigues se croisèrent en tout sens pour faire prévaloir l’un ou l’autre. Mais la princesse refusa de faire de son cœur l’objet d’un marché politique, et se fixa sur Léopold de Saxe-Cobourg par le seul effet de son propre choix. Il avait suffi à ce noble jeune homme et à cette noble jeune femme de se voir pour se comprendre et s’aimer. Le prince ne quitta Londres qu’un mois après que les souverains alliés eurent pris la route de Vienne, où devait s’ouvrir, le 1er octobre 1814, le grand congrès destiné à régler les affaires de l’Europe et à reconstruire les États sur de nouvelles bases. Il avait à défendre, dans cette assemblée, les intérêts particuliers de sa maison, et il eut le bonheur de concourir, avec son frère le duc Ernest-Antoine, à empêcher que l’infortuné roi de Saxe ne fût entièrement dépouillé de son royaume et puni de cette manière de la fidélité qu’il avait gardée à Napoléon dans la dernière lutte de l’Allemagne contre la domination française.

Les travaux du congrès duraient encore, quand la nouvelle du retour de Napoléon en France se répandit à Vienne. Aussitôt les armées alliées se dirigèrent de nouveau vers le Rhin. Mais la guerre marcha si rapidement que Léopold ne les rejoignit qu’après la journée décisive de Waterloo. Il entra avec elle à Paris, d’où il partit bientôt après pour Berlin, car les négociations relatives aux intérêts de sa maison n’étaient point encore terminées avec la Prusse. C’est dans cette capitale qu’il reçut, vers le milieu de l’hiver suivant, un message du prince de Galles, qui lui accordait la main de la princesse Charlotte. Cette union fut solennellement annoncée, dès le 16 mars, au parlement britannique. Le lendemain cette assemblée conféra au prince Léopold les droits de citoyen anglais et le titre de duc de Kendal, et l’assimila, sous le rapport des honneurs, aux princes de la famille royale. Une pension de cinquante mille livres sterling lui fut assurée en même temps, et la cité de Londres lui accorda le titre de bourgeois.

Le mariage fut célébré à Carlton-House le 2 mai 1816. Il causa en Angleterre une joie universelle, et il promettait à ceux qu’il venait d’unir des jours d’autant plus heureux que les divisions domestiques du prince et de la princesse de Galles avaient cruellement affligé la vie de leur fille. L’élégant palais de Camelford-House s’ouvrit aux deux jeunes époux. Mais ce fut surtout au calme et poétique séjour de Claremont qu’ils se complurent ; Claremont, palais de fleurs et de frais bocages, comme un poëte le rêverait pour y passer sa vie au côté d’une femme aimée, et où l’écorce de plus d’un chêne révèle encore au voyageur de ravissantes et mystérieuses devises. Tous les yeux étaient fixés sur cette délicieuse retraite, qui recélait l’espoir et l’avenir d’un grand peuple. Mais un jour tout cet espoir fut détruit. Une nouvelle aussi terrible qu’inattendue sortit de Claremont. On apprit avec consternation que la princesse Charlotte avait succombé le 5 novembre 1817, après avoir mis au monde un enfant mort. L’Angleterre ne put croire à la réalité de cet événement. Mais bientôt personne n’en douta plus. Le deuil fut général. Il retenait jusqu’aux extrémités de ce vaste empire britannique, dont les îles et les continents embrassent le monde. On ne vit d’abord dans cette perte que la fin douloureuse d’un femme jeune, belle, adorée, ornée de tous les dons du cœur et de l’esprit. Cependant, on ne tarda pas à comprendre qu’on avait à déplorer dans cette catastrophe une véritable calamité publique. En effet, elle posait une question politique d’une gravité extrême : celle de la vacance du trône de la Grande-Bretagne ; car la lignée royale s’était éteinte dans la princesse Charlotte, et L’Europe vit plus de trois cents héritiers aspirer au trône des trois royaumes.

Au milieu de cette douleur générale, au milieu des craintes que l’avenir inspirait à toute l’Angleterre, la sympathie publique se manifesta d’une manière éclatante, et elle eût consolé le prince Léopold, si quelque chose avait pu le consoler dans ces moments d’angoisse. Mais rien ne put le distraire de sa douleur, ni les honneurs dont le prince régent s’empressa de l’entourer, ni les moyens qui furent mis en œuvre pour l’arracher à Claremont, ce lieu si plein de déchirants souvenirs. Il voulut rester à Claremont ; il s’attacha plus que jamais à la cette charmante solitude, qui avait été le monde pour lui.

Les esprits supérieurs et les cœurs fortement trempés ne se sauvent des grandes crises morales que par leur propre énergie.

Nous avons déjà dit quelle prédilection le prince avait eue, dès son enfance, pour les sciences et les arts. Aussi, il se réfugia plus que jamais dans ces chères études, dans la contemplation des choses et des hommes, des faits et des idées, comme s’il eût pressenti que la Providence avait d’autres vues sur lui. Ce fut au milieu de ces occupations consolatrices que les événements de Grèce le trouvèrent. La lutte héroïque que ce pays soutenait depuis huit ans contre la puissance ottomane avait enfin ému les cours d’Europe. La patrie d’Homère, de Périclès et de Léonidas, après avoir été arrosée du sang de ses enfants, était appelée à reprendre sa place parmi les nations indépendantes. Le prince Léopold fut jugé le plus digne de gouverner le nouveau royaume, et, le 3 février 1830, il fut appelé par les grandes puissances à cette haute mission. Déjà toute l’Europe voyait en lui le roi des Grecs. Mais une étude approfondie de la situation du pays le fit hésiter d’abord et reculer enfin devant une tâche impossible à remplir selon son cœur. En effet, que pouvait-il faire dans un État que ses frontières mal tracées laissaient ouvert aux agressions, comme si on eût voulu le priver de tout élément de durée ? Que pouvait-il faire au milieu d’un peuple auquel on refusait les moyens d’établir un système financier qui eût pu l’aider à se suffire à lui-même, et d’organiser une force intérieure capable de le protéger, non-seulement contre les hostilités du dehors, mais aussi contre les factions qui le déchiraient au dedans ? Puis d’ailleurs, il ne voulait être roi que par le libre vœu de la nation grecque, et il lui répugnait de commencer son règne en forçant les habitants de l’Arcananie et d’une partie de L’Étolie, abandonnés aux Turcs par la conférence de Londres, à rentrer sous le joug qu’ils avaient le plus contribué à briser. Il se fût généreusement consacré à diriger un peuple ruiné par une oppression séculaire et décimé par dix ans de guerres furieuses. Mais quel résultat ce dévouement pouvait-il avoir pour le bonheur et pour l’indépendance de la Grèce, sous l’empire des conditions auxquelles l’Europe consentait à reconnaître l’existence de ce pays ? Aussi Léopold s’empressa-t-il d’abdiquer le titre éminent dont il venait d’être investi. L’acte de ce refus, daté du 21 mai 1930, restera comme un précieux document d’histoire et comme une preuve d’abnégation et de dignité.

Deux mois s’écoulèrent, et la France montra le chemin de l’exil à la dynastie que l’Europe lui avait imposée en 1815. Bientôt après, la Belgique s’émut à son tour et s’affranchit d’une dynastie que 1815 lui avait imposée aussi. Cette révolution, qui se développait depuis seize ans, devait inévitablement s’accomplir tôt ou tard, parce qu’elle avait son germe dans la nature même de l’union des deux pays dont l’Europe composa le royaume des Pays-Bas. Le mouvement de Paris ne servit qu’à déterminer l’explosion de celui dont Bruxelles fut le théâtre. Mais aussitôt que la Belgique se trouva en possession de son indépendance, trois partis se formèrent : l’un demandait à grand cris la réunion à la France ; le deuxième voulait organiser nos provinces en république ; le troisième, enfin, réclamait la forme d’un gouvernement monarchique constitutionnel. Ce dernier l’emporta, dès que le premier moment d’effervescence populaire eut eu le temps de se calmer. Le jour approchait où le congrès national, voulant à la fois poser acte de souveraineté absolue et sortir des incertitudes où flottait le pays, résolut de donner un roi à la Belgique. Tous les esprits étaient dans l’attente. Et on le conçoit sans peine ; car il est rarement arrivé à un peuple de se trouver dans des circonstances aussi critiques et aussi graves que celles où nos provinces étaient placées. Au dehors la menace d’une restauration ou d’un démembrement. Au dedans les factions ameutées et entretenues par l’or étranger ; enfin, les mille dangers d’une crise qui devenait à chaque instant plus alarmante. Il fallait en sortir au plus vite. Aussi le congrès décida-t-il, dans sa séance du 19 janvier 1831, qu’il procéderait, le 28 du même mois, à l’élection du chef de l’État. L’opinion publique, mal éclairée, se partagea entre deux princes, dont l’un, le duc de Nemours, devait amener inévitablement une rupture avec l’Europe, et dont l’autre, le duc de Leuchtenberg, devenait au moins une cause de rupture avec la France. Ces deux noms mettaient le pays dans une alternative également dangereuse. Celui du duc de Nemours sortit de l’urne nationale. Heureusement la sagesse du roi Louis-Philippe lui inspira de refuser la couronne offerte à son fils, et ce refus sauva peut-être la Belgique en rassurant l’Europe sur les intentions de la France. Mais cet échec eut pour résultat de rejeter la nation belge dans le provisoire où elle se débattait depuis cinq mois, et de relever l’espoir du parti de la restauration. Alors le congrès se hâta de confier la régence du royaume au baron Surlet de Chokier, président de cette assemblée, et de promulguer la constitution adoptée depuis le 7 février, en se réservant toutefois le choix définitif du souverain. Bientôt la diplomatie du cabinet belge, qui jusqu’alors avait suivi les tendances trop exclusivement françaises, songea qu’il n’y avait de salut à espérer qu’en prenant une position en quelque sorte neutre et en s’appuyant sur les intérêts généraux de l’Europe. Cette nouvelle direction donnée aux affaires fit naturellement se tourner tous les yeux vers la solitude de Claremont. On se souvint de l’acte célèbre du 21 mai 1830, dont nous venons de parler ; on repassa toute la vie sans tache de celui qui l’avait signé, et l’on comprit que personne n’était aussi capable que le prince Léopold d’assurer l’indépendance de la jeune nationalité belge, par sa sagesse, sa fermeté, par les hautes lumières qu’il avait puisées dans l’étude, et par l’expérience des choses politiques qu’il avait acquise dans ce grand foyer de la politique du monde, qui s’appelle l’Angleterre. Cette pensée fut notre salut. Dès les premiers jours du mois d’avril, le cabinet annonça dans des termes sur lesquels personne ne put se méprendre, que ses efforts tendaient vers le but désiré par l’opinion publique et réclamé par la position de plus en plus précaire du pays, où le commissaire de la conférence de Londres, lord Ponsonby, travaillait ouvertement à une restauration. Le 18 avril quatre commissaires furent désignés pour se rendre à Londres et manifester directement au prince le vœu du peuple belge. La première entrevue eut lieu le 22, et cette conférence mit entièrement à nu le noble cœur de celui auquel la Belgique se disposait à confier ses destinées. Nous extrayons du magnifique travail de M. Nothomb sur la révolution belge, les paroles mémorables que le prince Léopold adressa aux commissaires venus pour le pressentir. «Toute mon ambition, dit-il, est de faire le bonheur de mes semblables ; jeune encore, je me suis trouvé dans tant de positions singulières et difficiles, que j’ai appris à ne considérer le pouvoir que sous un point de vue philosophique ; je ne l’ai jamais désiré que pour faire le bien, et un bien qui reste. Si certaines difficultés politiques, qui semblaient s’opposer à l’indépendance de la Grèce, n’avaient surgi, je me trouverais maintenant dans ce pays ; et cependant je ne dissimulais pas quels auraient été les embarras de ma position. Je sens combien il est désirable pour la Belgique qu’elle ait un chef le plus tôt possible ; la paix de l’Europe y est même intéressée.» D’autres conférences eurent lieu, dans lesquelles le prince mis au jour une rare habileté, une profonde intelligence politique, et une étude sérieuse de la question belge. Enfin, le 20 mai le congrès national entendit en comité secret le rapport des commissaires qu’il avait envoyé à Londres, et, cinq jours après, quatre-vingt-seize députés proposèrent formellement l’élection de Léopold. Le 4 juin le nouveau roi des Belges fut proclamé, et le même jour une députation, composée de dix membres de cette assemblée, fut chargée de porter au chef de l’État la décision qui venait d’être prise. Cependant toutes les incertitudes n’avaient pas cessé. En effet, le prince ne pouvait accepter la couronne avant que la Belgique eût accédé aux bases de séparation posées par la conférence de Londres dans le traité préliminaire du 20 et du 27 janvier, modifié en quelques points et appelé depuis le traité des 18 articles. Il ne le pouvait pas sans se mettre directement en hostilité avec l’Europe ; car cet acte était le seul qui stipulât les conditions de l’indépendance de la nation belge et il avait pris le caractère d’un constat synallagmatique par l’accession que la Hollande y avait donnée dès le 18 février. Il fallut donc préalablement se soumettre à ce traité. La Belgique le signa le 9 juillet, sauf à négocier sur les quelques points qu’il laissait indécis. Dès lors l’acceptation de la couronne par le prince Léopold put être regardée comme certaine. En effet, le décret d’adhésion au traité lui ayant été présenté à Londres le 11 juillet, il fixa au 16 du même mois son départ pour Bruxelles.

Maintenant toutes les incertitudes allaient finir. La patrie avait définitivement pris sa place parmi les peuples européens. Elle sortait enfin de la longue servitude qu’elle subissait depuis que de fatales alliances l’avaient courbée sous la domination de la maison de Bourgogne. Elle oubliait combien le joug de l’Espagne, de l’Autriche, de la France et de la Hollande avait été lourd pour elle. Elle redevenait libre, indépendante. Elle se trouvait rendue à elle-même, et pouvait désormais porter un regard tranquille sur son passé plein de gloire, et sur son avenir plein d’espérance.

Le 17 juillet le prince Léopold fit son entrée en Belgique, n’ayant autour de lui que des Belges. Toutes les communes l’accueillirent comme le sauveur de la nationalité et comme s’il eût été le descendant d’une de ces antiques lignées nationales auxquelles le peuple est attaché par des liens séculaires d’amour, de respect et de confiance. Son voyage à travers les deux Flandres fut une véritable marche triomphale. Les populations se pressaient au-devant de lui et le suivaient d’une ville à l’autre, pour pouvoir plus longtemps contempler les traits du souverain par qui la patrie allait revivre dans son unité et dans son indépendance. Le 19 il descendit au château de Laeken. Le surlendemain avait été fixé pour la cérémonie d’inauguration. Elle eut lieu sur la Place Royale de Bruxelles, où une splendide estrade avait été dressée pour cette imposante solennité. Le moment si longtemps et si ardemment désiré de clore la révolution, était enfin arrivé. Après que le régent eut déposé ses pouvoirs entre les mains du congrès, un des secrétaires de cette assemblée donna, au milieu d’un profond silence, lecture de la constitution. Ensuite le prince se leva et jura le maintien de la charte nationale, des lois du peuple belge, de l’indépendance et de l’intégrité du territoire. Aussitôt le cri de vive le roi ! sortit de toutes les bouches et de tous les cœurs. Jamais on n’avait vu un enthousiasme aussi unanime chez une nation. Et il ne fut pas moins sincère qu’unanime, car il n’y eut personne qui n’appréciât toute la portée du sacrifice que le roi venait de faire au maintien de la paix de l’Europe et à l’existence du peuple qui l’avait appelé, en venant s’exposer aux hasards d’une souveraineté mal assise et en se séparant d’un pays auquel il tenait par les liens les plus sacrés et les souvenirs les plus chers, et qui n’avait cessé, depuis onze ans, de lui prodiguer des témoignages de sympathie. Certes, un trône peut être convoité lorsqu’il est solidement affermi, lorsqu’il est consacré par le temps et par les traditions, lorsqu’un jour serein y brille, lorsqu’il s’élève au milieu de calme et du repos. Mais, quand il chancelle encore, quand il n’a pour horizon qu’un ciel plein de tempêtes, quand rien n’est sûr, ni au dedans à cause de mille passions déchaînées par des intérêts mis en péril, ni au dehors où s’agitent des haines d’autant plus acharnées qu’elles se croient légitimement appuyées sur des droits,- il faut, pour s’y asseoir, plus qu’une grande ambition,- il faut un grand dévouement. Léopold montra ce dévouement en se plaçant à la tête des Belges, et en échangeant sa vie heureuse et tranquille, splendide et honorée, contre les soucis d’une royauté environnée de périls et pour les inquiétudes d’un pouvoir qu’un coup de vent pouvait renverser. Aussi la Belgique en comprit l’étendue, et lui voua, dès le principe, une reconnaissance qui fut le fondement de la popularité le plus justement acquise.

Mais bientôt l’heure des épreuves sonna pour le nouveau roi. Pendant que tout n’était que fêtes autour de lui, qu’il allait se faire connaître à l’armée, qu’il visitait les villes du royaume, la Hollande sortit tout à coup de ses frontières. La Belgique s’était aveuglément endormie sur la foi des traités. Elle se trouvait, depuis le mois de novembre 1830, sous l’empire d’une suspension d’armes indéfinie, que le roi des Pays-Bas avait souscrite de son côté et que les cinq puissances avaient garantie. Pleine de sécurité, et comptant peut-être encore sur l’effet moral produit par le soulèvement populaire de 1830, elle avait négligé de donner les soins nécessaires à une bonne organisation militaire, tandis que la Hollande avait mis activement le temps à profit et formé en silence une armée de plus de cent mille hommes. Le jour même où le nouveau souverain avait été inauguré à Bruxelles, le roi Guillaume avait protesté à Londres contre le traité des 18 articles et déclaré que, si le prince Léopold prenait possession du trône, il ne pourrait le considérer que comme placé dans une attitude hostile et comme son ennemi. Il attendit que le nouveau souverain se trouvât à vingt lieues de sa capitale, pour ordonné à son armée de franchir la frontière et d’envahir la Belgique, sans avoir préalablement dénoncé la suspension d’armes ni au gouvernement belge ni à la conférence de Londres. Cet acte flagrant de déloyauté, cette infraction faite aux principes qui régissent les peuples civilisés, porte la date du 2 août. La surprise fut extrême quand on apprit de tous côtés que le territoire était violé par l’ennemi sur trois points à la fois, en Flandre, dans le Limbourg et dans la province d’Anvers. Le roi reprit aussitôt le chemin de Bruxelles, et adressa au peuple une proclamation dans laquelle il écrivit ces paroles qu’il fut le premier à réaliser : «Chacun de nous fera son devoir.» Dès ce moment il se multiplia partout. Il appela du fond du Luxembourg et du Hainaut les garnisons qui occupaient les places de ces provinces. Puis il se dirigea vers Anvers pour rassurer par sa présence cette ville que les Hollandais, toujours maîtres de la citadelle, menaçaient de changer en monceau de ruines. Cependant les chances de la lutte qui s’engageait étaient singulièrement inégales. À peine si la Belgique avait à mettre en ligne vingt-cinq mille hommes disséminés dans le royaume, tandis que la Hollande s’avançait avec plus de soixante mille combattants. Aussi la campagne eut une issue désastreuse. Le nombre et plus encore l’effet de surprise l’emportèrent sur le courage. En moins de dix jours l’ennemi pénétra jusqu’à Louvain, où il s’arrêta enfin le 12 août devant l’armée française, qui, accourue pour faire respecter les traités, le força à rentrer dans ses frontières.

Mais, au milieu de ce malheur, le roi avait singulièrement grandi dans l’opinion de chacun. «Chacun fera son devoir,» avit-il dit, et certes personne ne fit son devoir mieux qu’il ne fit le sien. Les paroles duu général Belliard, qui assita à tout ce drame, ne peuvent être un témoignage suspect en fait de courage ni en fait d’habileté militaire. Voici comment le représentant du cabinet français à Bruxelles s’exprime dans une dépêche adressée le 14 août à son gouvernement : «Le roi des Belges s’est montré d’une bravoure et d’un sang-froid extraordinaire. Souvent il a fait le sous-lieutenant. Avant-hier, il a été plusieurs fois exposé à être tué. On le voyait aux tirailleurs donner les directions aux colonnes, placer l’artillerie et diriger tous les mouvements. Sans lui, sans les soins qu’il a pris, l’armée belge était anéantie, et l’autorité des Nassau de nouveau imposée à la Belgique.» Si quelque chose peut consoler le pays dans le désastre qui l’affligeait, ce fut le dévouement que le souverain venait de témoigner à sa nouvelle patrie. Sans avoir rien perdu de son prestige, sa popularité sortit intacte de ce revers, où sa jeune royauté trouva une consécration nouvelle et des droits nouveaux à la reconnaissance nationale. Aussi, lorsque, le 15 août, il rentra à Bruxelles, le cœur navré, il put s’assurer que l’enthousiasme de la population n’avait rien perdu de sa chaleur et que, par les douloureux événements dont le pays avait été frappé, l’affection de tous les cœurs lui était assurée plus que jamais.

Maintenant il fallait songer à réorganiser les forces vives de la nation. Dans ce travail le roi déploya de nouveau la prodigieuse activité qu’il avait montrée en résistant à l’invasion hollandaise. Il obtint des chambres législatives l’autorisation de prendre au service de l’État un certain nombre d’officiers étrangers, avec le secours desquels il refit l’armée, qui en moins d’un an fut portée à cent mille hommes prêts à être mis en campagne. L’industrie et le commerce, toujours souffrants de la crise que la Belgique subissait depuis un an, attirèrent son attention. Il visita les villes manufacturières, s’enquit partout des besoins, recueillit partout des lumières. Il conçut l’idée, si largement développée depuis, du réseau de chemin de fer qui sillonne le royaume. Il envoya des agents commerciaux dans les différentes parties du monde. Et, tandis qu’il prenait ainsi à cœur tout ce qui pouvait concourir à développer la prospérité du pays, il n’oublia pas les arts, qui, depuis le XVe siècle, avaient donné à la Belgique ses plus beaux titres de gloire. De cette façon il prit un à un tous les intérêts, tous les souvenirs, tous les légitimes orgueils de la nation, pour les rattacher à cette grande unité qui est la patrie.

Pendant que tout ce travail occupait le roi à l'intérieur, la question extérieure faisait aussi quelques pas. La conférence de Londres avait résolu, le 15 octobre 1831 de trancher définitivement les difficultés qui empèchaient toujours la Hollande et la Belgique de conclure la paix. Elle rédigea un traité qu'elle déclara irrévocable. Cet acte consacrait l'abandon d'une partie des provinces de Luxembourg et de Limbourg. Si dur que fût ce sacrifice, la Belgique reconnut l'impossibilité de s'y soustraire. Elle signa donc le traité, auquel le roi Guillaume refusa son adhésion, mais qui fit , bientôt après, reconnaitre le royaume belge par les grandes puissances de l'Europe. Ce résultat était important, mais le pays n'en restait pas moins, à l'égard de la Hollande, dans une position qui pouvait à chaque moment ramener la guerre et qui ne cessait de tenir la crainte d'un bombardement suspendue sur la ville d'Anvers dont les Hollandais occupaient toujours la citadelle. Aussi, lorsque les cinq puissances eurent ratifiés l'acte du 15 octobre, le roi Léopold s'empressa-t-il d'en réclamer l'exécution immédiate et de les mettre en demeure de procurer l'évacuation de la partie du territoire belge où l'ennemi était encore établi. Liées par un acte solennel, elles ne pouvaient plus reculer. Le 1er octobre 1832, elles reconnurent deboir recourir à des mesures coercitives pour forcer la Hollande à exécuter le traité. L’Autriche, la Prusse et la Russie déclarèrent qu’elles ne s’associeraient qu’à des mesures pécuniaires. L’Angleterre et la France annoncèrent qu’elles en voulaient de plus efficaces. Ces deux puissances conclurent, le 22 octobre, une convention, en vertu de laquelle elles signifièrent à la Belgique et la Hollande qu’elles eussent à évacuer chacune de son côté les territoires auxquels le traité ne leur laissait plus de droits. Le roi Guillaume ayant répondu par un refus à cette sommation, une flotte anglo-française cingla, le 5 novembre vers les côtes de la Hollande et s’empara de tous les navires de cette nation qu’elle rencontra sur la mer, tandis que l’embargo fut jeté sur tous ceux qui se trouvaient dans les ports de France et d’Angleterre. Dix jours après, une armée française de cinquante mille hommes entra en Belgique et alla planter le siège devant la citadelle d’Anvers, qu’elle aborda avec une vigueur digne des beaux jours de l’empire et qu’elle força à capituler le 23 décembre.

Pendant ce siège mémorable, auquel l’armée belge ne put être admise, dans l’intérêt même de la neutralité de la ville d’Anvers que la garnison de la citadelle ne devait avoir aucun prétexte d’écraser sous ses bombes, le Roi Léopold prit toutes les mesures nécessaires pour assurer le pays contre une nouvelle invasion que faisait craindre une concentration des forces hollandaises sur la frontière. Il forma son armée en quatre divisions, établit son quartier général à Lierre et se tint prêt à tout événement. Mais la Hollande ne bougea point. Elle se borna à écouter de loin le bruit des canons français, dont la voix proclamait à l’Europe la puissance et le triomphe du principe nouveau que 1830 avait inauguré.

La joie fut grande dans toute la Belgique lorsque le port d’Anvers se vit enfin délivré de la menace sous laquelle il était resté depuis 1830. Elle fut d’autant plus vive que ce moment touchait de près un autre événement, dans lequel tous les esprits virent un nouveau gage de confiance et de sécurité pour le pays. Le 9 août 1832, l’union du Roi Léopold et de la princesse Louise-Marie-Thérèse-Charlotte-Isabelle d’Orléans, fille ainée du Roi des Français, avait été célébrée à Compiègne. La Belgique et la France, déjà unies par une communauté de principes politiques, se trouvaient maintenant attachées l’une à l’autre par un lien de plus, par un intérêt commun de dynastie. Aussi l’enthousiasme qui avait partout accueilli le souverain depuis le moment où il mit le pied sur le sol national, s’était porté avec la même ardeur au-devant de la jeune Reine. Elle fut saluée comme l’aurore d’un avenir plus serein. Non-seulement on vit en elle une princesse ornée de toutes les vertus domestiques, et douée de toutes les qualités d’une intelligence supérieure ; mais encore on se souvint qu’elle était l’arrière-petite-fille de l’impératrice Marie-Thérèse qui avait laissé dans nos provinces tant de chers et beaux souvenirs. Aussi, dès le premier jour, la Reine obtint une popularité qui grandit d’année en année, et cétait comme si elle n’eût fait que recueillir l’héritage de son illustre aïeule.

Dès lors tout parut vouloir propérer à la nation. Le 21 mai 1833, l’habile politique du Roi réussit à faire consentir la Hollande à une armistice indéfini, à obtenir la liberté de l’Escaut, le status quo de la possession territoriale ; en un mot, tous les avantages d’une paix définitive, sans les charges de la dette que le traité du 15 novembre 1931 avait attribuée à la Belgique.

Deux mois s’étaient écoulés depuis ce nouveau succès obtenu par la sagesse royale, lorsque la Reine donna un héritier au trône. Ce fut le 24 juillet. Ainsi, tandis que l’indépendance nationale prenait des racines plus profondes, grâce à cette Providence que la Belgique, depuis des siècles, accusait d’être si peu clémente pour elle, la dynastie s’affermissait aussi et prenait des racines dans le sol comme elle en avait déjà dans l’affection et dans la reconnaissance de tous.

Mais le pays n’était pas arrivé au bout de ses épreuves. Quelque abnégations personnele, quelques soins inoïs que Léopold eût mis à calmer l’effervescence que les intrigues étrangères entretenaient sourdement dans les provinces belges, les partisans de la maison d’Orange s’enhardissaient en raison même de cette modération et des efforts que le souverain ne cessait de faire pour les rallier à la cause commune de la patrie. Les tentatives à main armée n’avaient pas eu de succès. Les conspirations avaient échoué. Ils attendirent l’occasion de faire une nouvelle démonstration politique. Ils la firent au commencement du mois d’avril 1834, et la capitale fut, pendant tout un jour, en proie à des scènes de désordre que rien ne justifie, mais qui s’expliquent par l’indignation populaire si imprudemment excitée.

Bientôt une nouvelle affliction fut donnée au Roi. Le Prince royal mourut. Cette jeune tête sur laquelle, lui, comme père, et la Belgique, comme nation, avaient placé tant d’espérances, fut brusquement enlevée le 9 mai. Le deuil que causa la perte de cet enfant fut aussi grand que l’avait été l’enthousiasme qui salua sa naissance. Si quelque chose avait pu diminuer la douleur que cet événement fit éprouver au Roi, c’eût été la touchante sollicitude avec laquelle la nation toute entière se pressa dans ce moment autour du trône, en oubliant presque l’énormité du malheur qui venait de frapper la patrie, pour ne songer qu’à l’angoisse que ressentait le coeur du père ; car l’incertitude de l’avenir se présentait de nouveau menaçante à tous les yeux. Heureusement ces espérances sitôt détruites purent bientôt se reporter sur un nouvel héritier que la couronne obtint le 9 avril 1835. La venue de ce jeune Prince, qui reçut les noms de Léopold-Louis-Philippe-Marie-Victor et plus tard le titre de duc de Brabant, imposa silence à de profonds et légitimes regrets, s’il est possible qu’un berceau console d’une tombe. Deux années après, le 24 mars 1837, la famille royale s’accrut d’un nouveau Prince qui fut appelé Philippe-Eugène-Ferdinand-Marie-Clément-Baudoin-Léopold-George. Et, comme le premier avait été investi du titre historique de duc de Brabant, le second obtint celui de comte de Flandre. Enfin, le 7 juin 1840, la Princesse Marie-Charlotte-Amélie-Auguste-Victoire-Clémentine-Léopoldine vit le jour.

Tandis qu’ainsi la royauté que la Belgique s’est donnée s’affermit par chacune de ces naissances, voilà qu’un autre événement s’accomplit et que la question extérieure approche enfin de sa solution. Le vieux monarque de Pays-Bas, fatigué de vivre d’illusions toujours détruitres et d’espérances toujours trompées, finit par reconnaître l’inutilité d’une plus longue résistance. Il avait attendu huit ans que l’Europe s’armât pour lui rendre les provinces belges. Il avait passé huit ans à regarder à l’horizon si rien ne venait l’aider à reconquérir cette riche fraction de son royaume. Rien n’était venu. Pas un drapeau ne s’était levé. Il se résigna donc, vers la fin de 1838, à accepter le traité des 24 artiles auquel la Belgique avait souscrit dès le 15 novembre 1931. Ce fut le dernier acte du grand drame de la révolution. Il fut aussi le plus dur, car il allait rendre nécessaire l’évacuation de la portion du Limbourg et du Luxembourg qui était restée jusqu’à lors dans la possession de la Belgique. Il fut signé le 19 avril 1839 et ratifié bientôt après par les cinq puissances. D’honorables et généreuses résistances s’organisèrent pour en empêcher l’exécution. Le sentiment national se révolta à l’idée de livrer au joug dont le pays n’était parvenu à s’affranchir que par de longs et pénibles sacrifices, deux provinces auxquelles nous attachaient le lien des souvenirs et des traditions, la communauté des périls et de la gloire dans l’une et l’autre fortune, tout un passé dedix siècles, toutes les espérances d’un avenir de liberté et d’indépendance. Mais l’implacable politique avait prononcé. Il fallut s’y soumettre, et la séparation s’accomplit. Ce jour-là fut un jour de seuil pour le Roi et pour tout les Belges. Mais la nécessité est d’airain, et tous les regrets se brisent contre elle.

Dès ce moment toute l’activité de la nation se concentra sur l’administration intérieure du pays. Mais dès lors aussi se formula un fait qui devait inévitablement se poser. Aussi longtemps que la question extérieure était demeurée sans solution complète, les deux opinions dont l’alliance avait rendu possible un soulèvement contre la Hollande, c’est-à-dire l’opinion catholique et l’opinion libérale, avaient été forcées de rester unies. Leur but commun, l’indépendance de la patrie, se trouvant atteint, leur alliance n’avait plus d’objet. Aussi elles se partagèrent en deux camps, et la division s’établit au sujet de la pratique des grands et des larges principes que le congrès a consacrés dans la constitution. La lutte ne fut pas sans acharnement. Ce fut la houle de cette tempête profonde qui avait commencé en 1830.

Certes au milieu de cette scission, qui aurait été pleine de périls si le bon sens national n’eût concourru à chaque moment à en neutraliser les effets, la tâche du Roi eût été d’une difficulté extrême sans la prudence et l’esprit conciliateur qui l’animent. C’est ici surtout qu’il faut rendre hommage à la haute sagesse dont il fit preuve dans plus d’une circonstance, qui est du passé aujourd’hui et que l’histoire jugera quelque jour lorsque les passions seront mortes avec les hommes. Les yeux fixés sur l’avenir, il ne cessa d’en appeler à la modération et à la loyauté de tous. Planant au-dessus de ces graves débats, il ne cessa de montrer à la nation cette loi des lois, qui est la constitution. Aussi, grâce à cet esprit droit, juste et ferme, la lutte, où, Dieu soit loué ! la patrie n’est pas mise en question, doit entrer dans une phase moins violente. À mesure que se vident les points d’organisation intérieure qui ont été forcément laissés intacts à cause des préoccupations du dehors ; à mesure que se déblaye le terrain des questions irritantes qu’il reste à résoudre, l’âpreté des opinions perdra de sa force. Les nations ne s’improvisent pas. Elles dooivent avoir leur période de jeunesse et d’activité exagérée. Il leur faut plus d’une lutte , plus d’une épreuve pour parvenir à la connaissance de la science sociale. Un peuple organisé depuis hier seulement ne saurait avoir l’allure disciplinée et sereine d’un peuple qui a derrière lui cent cinquante ans d’expérience politique. La somme énorme des libertés dont la Belgique fut tout à coup dotée par sa charte, sans aucune transition, a dû nécessairement lui donner une exubérance vitale à laquelle elle n’était point préparée. Laissons donc au temps le soin de régler en elle les fonctions de la vie, le soin d’user les aspérités trop rudes encore des convictions absolues et exclusives. L’avenir ne manque jamais à un pays qui ne se manque pas à lui-même, cet avenir dont le Roi Léopold nous a appris à ne point douter, qu’il a fondé par son dévouement et consolidé par son intelligence.

A coup sûr, peu de princes contemporains eurent une existence aussi remplie d’événements que celle du Roi Léopold. Enfant, il grandit sur les champs de bataille ; homme, il est appelé à introduire un peuple dans le cercle des anciennes familles européennes et à le diriger dans la culture des arts de la paix.

Aussi,- en s’arrêtant, à quelques pas de Bruxelles, au pied de la colline couronnée de ce gracieux château de Laeken qui fut bâti d’après les dessins d’un autre Prince de la maison de Saxe, Albert de Saxe-Teschen, et où Napoléon devait signer plus tard la déclaration de guerre qu’il lança contre la Russie,- le passant se dit avec respect que cet homme qu’il voit se promener là, grave et pensif, entre ces arbres verts, fut destiné un jour à partager avec l’héritière de la Grande-Bretagne le sceptre du plus vaste empire du monde, et qu’après avoir noblement sacrifié son ambition personnelle en refusant la souveraineté absolue de la Grèce, il consentit avec une nouvelle abnégation à sortir de sa vie calme et sereine pour venir entreprendre en Belgique un pouvoir entouré de périls, et clore une révolution au fond de laquelle grondait la guerre générale. Cette gracieuse jeune femme qu’il voit là sourire au printemps et aux trois enfants qui l’entourent, frais et charmants comme les fleurs au milieu desquelles ils s’épanouissent, il la bénit dans son coeur.

Cet homme est le Roi. Cette femme est la Reine. Ces trois enfants sont les Princes, gages de notre avenir.

Ce passant est la nation toute entière.

COUR D'APPEL DE BRUXELLES (Ire Chambre)
Présidence de M. FAIDER, Premier Président
Succession de S. M. Léopold II
Plaidoirie en Réplique
de Me Alphonse LE CLERCQ
POUR
L'État Belge, intimé
CONTRE
1° S. A. R. la Princesse Stéphanie de Belgique,
2° S. A. R. la Princesse Louise de Belgique
Toutes deux appelantes
du jugement rendu par la Deuxième Chambre
du Tribunal de Première Instance de Bruxelles
le 14 Novembre 1911
Audiences des 30 et 31 Décembre 1912

Les Droits de la Belgique vis-à-vis des Princesses Louise & Stéphanie de Belgique sur 1° Les titres et valeurs détenus par MM. POCHEZ et consorts, administrateurs de "Niederfullbach" (environ 45 millions [de francs belges de 1912]) 2° Les immeubles et les actions de la Société des Sites, dont le Baron Auguste GOFFINET est détenteur (environ 9 millions [de francs belges de 1912])

CONCLUSION
de Me Alphonse LE CLERCQ

Voici quelques "fils" conducteurs, à travers les faits et les incidents de ce grand procès:
I. Le Congo et la Belgique sont séparés depuis 1885, constitutionellement et volontairement.
II. Les biens litigieux sont des biens congolais.
III. Refus constant par Léopold II de prendre ou de "détacher" pour lui des biens congolais.
Ce refus s'est manifesté notamment:
1° Dans tous ses écrits et dans toutes ses paroles, depuis le 2 août 1889;
2° Dans son testament du 20 novembre 1907, c'est-à-dire huit jours avant la signature par lui du traité de cession;
3° Dans la réponse qu'il fit faire par le Cabinet de Trooz en décembre 1907, à la 7e question de M. Schollaert :
"l'intention du fondateur est d'user de cette faculté d'attribuer les biens de la Fondation sous les charges qui les grèvent à une institution, une individualité juridique ou à un établissement publique." Celui qui refuse de profiter de ce qu'il a, n'aurait garde de s'approprier de ce qu'il n'a pas;
4° Dans l'acte additionnel du 5 mars 1908: "le fonds de 50 millions sera affecté par le Roi...à des destinations relatives au Congo, à des oeuvres diverses en faveur du Congo..."; celui qui affecte ainsi à autrui 50 millions qu'une loi lui offre, n'aurait garde de prendre pour lui 50 millions que la même loi lui enlève;
5° Dans ses deux écrits décisifs, du 18 octobre 1908, venant s'unifier aux deux lois approbatives du traité et de l'acte additionnel, qu'il signe ce jour là;
6° Dans sa lettre à M. Pochez, du 21 août 1909, précisant à la fois un programme exclusif de tout intérêt privé pour l'emploi des fonds litigieux, en même temps que la pensée intime et désintéssée de verser annuellement à ce Ministère spécial des travaux publics, un million.
Ce refus est d'ailleurs conforme à une double pensée intime, bien connue, d'abord celle de ne pas vouloir enrichir ses filles au delà des exigences de la loi belge et ensuite celle de réaliser tant par lui-même que par ses successeurs politiques un vaste programme de travaux publics, condamné d'avance à la stérilité s'il consentait à transformer ces biens congolais en biens privés.
IV. Emploi par Léopold II des biens litigieux, depuis le 18 octobre 1908, d'une manière, d'abord non probante nécessairement d'une acquisition privée par lui et en outre avec une destination politique, avec une administration autocratique.
V. Ne confondons jamais les trois périodes qui existent naturellement dans notre histoire, depuis l'ordre du jour de la Chambre du 14 décembre 1906 jusqu'au 4 mars 1910:
La première est celle de la cession du "grand cercle" congolais, c'est-à-dire de l'État Indépendant avec exception pour le "petit cercle", c'est-à-dire la Fondation de la Couronne et on se demande de que sera celle-ci, ainsi soustraite hypothétiquement à la cession. La cession est universelle, sauf cette seule restriction.
La deuxième est celle de la suppression de cete exception, tout en laissant subsister encore une exception, strictement limitative de 20,000 hectares au Mayumbe et de quatre immeubles en Belgique. L'universalité du grand cercle englobe ainsi le "petit cercle".
L'"attribution" devient ainsi totale et le Gouvernement et le Parlement pensent que la "tradition" est conforme.
La troisième est en mars 1910: l'ancien Ministre de la Justice, M. Renkin, rétracte sa déclaration solennelle, du 15 avril 1908, et reconnaît que la "tradition" ne fut pas conforme à l'"attribution". La Chambre unanime rappelle le principe de l'attribution intégrale et exige une "tradition" conforme.
VI. Deux personnes seulement ont conclu entre elles le traité du 28 novembre 1907 et l'acte additionnel du 5 mars 1908: c'est faire erreur que d'essayer d'y interposer une troisième personne, la personne privée de Léopold II, qui, dans ces actes ou à l'occasion de ces actes tirerait profit; il y a deux personnes et pas trois, dans chacun de ces deux actes et il n'y a qu'une personne, celle du Souverain, et non pas deux personnes, dans le décret de suppression de la Fondation de la Couronne.
VII. L'objet du traité avec son acte additionnel , c'est une universalité générale avec accroissement ultérieur d'une universalité spéciale; c'est faire erreur, et c'est d'ailleurs modifier le Droit commun que d'amoindrir cet objet universel dans la limite de leur nature ceux-ci ne sont pas limitatifs; l'incident à la Chambre, du 12 décembre 1912, a d'ailleurs prouvé que l'État belge a reçu délivrance de 580 actions de dividende de la Société Forestière er Minière non renseignées à l'acte additionnel.
VIII. La cause juridique du traité d'acte additionnel, c'est la cession par le Souverain; c'est faire erreur et c'est dénaturer cette "cause" que d'affirmer qu'il y eut là, au contraire, acquisition privée par Léopold II.
IX. L'hypothèse de l'acquisition privée étant ainsi sans fondement, d'abord, quant à la volonté libre de Léopold II, et ensuite, quant à une cause légale dans le traité et dans l'acte additionnel, il reste à voir si elle peut résulter de la nécessité du Code civil; mais le Code civil, s'il connaît la débition forcée, ne connait pas l'acquisition forcée; en Belgique, nul n'acquiert malgré lui, pas même le Roi; on prétend donc ajouter au Code civil.
X. La question de la réduction est sans pertinence au procès: elle n'est concevable que sur les biens privés. Or, l'État belge, s'il exige la délivrance de tous les biens congolais, c'est-à-dire publics, refuse l'appréhension d'un bien privé quelconque; on n'a parlé que d'un seul article du Code civil, de l'article 920: on aurait pu s'en dispenser! Le litige est tout entier dans une question de propriété, et il n'est nulle part question de quotité.
XI. L'État belge a quatre titres successifs, tous universels: Le testament du 2 août 1889 et le codicille du 3 juin 1906; Le contrat d'option de 1890 avec la prorogation de 1901; Le traité de cession et l'acte additionnel, approuvés par les deux lois du 18 octobre 1908; L'interprétation du Parlement en mars 1910.
XII. Les princesses appelantes sont sans titre et sans dossier et elles invoquent des présomptions apparentes, mais nullement sérieuses et essentiellement équivoques; ces présomptions se divisent en deux groupes: les unes se réclament de la volonté du Roi et les autres de l'interprétation de certains parlementaires.
Ce ne sont pas des preuves et pourtant les princesses, privées de la possession, sont acculées à la nécessité de la preuve.
XIII. Le contrat judiciaire de la princesse Stéphanie est inexistant et ses conclusions d'appel irrecevables à tous égards; en outre, dans le système successif des deux princesses, depuis la mort du Roi, il y a des contradictions comme on n'en voit dans aucun procès.
XIV. La princesse Stéphanie est en outre liée par un contrat extra-judiciaire, qui lui interdit l'accès du prétoire, comme l'a d'ailleurs déclaré à la Cour la princesse Clémentine, co-signataire, avec elle, le Ier février 1910; avisée le 21 septembre 1910 et connaissant au surplus le détail des 6 millions de valeurs renseignées à forfait, depuis novembre 1910, la princesse Stéphanie a confirmé son accord les 18 et 24 mars 1911.

Il appert de ces considérations au fond:
Que loin d'avoir la notion lucide tant dans leur propre système d'attaque que du système de défense de l'État belge ainsi que de la pensée désintéressée et politique du Roi, leur père, les princesses n'ont cessé de confondre les systèmes et les choses; qu'elles ont mal perçu la structure du procès qu'elles reprennent devant la Cour; que, revendiquantes, sans le savoir, ni le vouloir, ni le pouvoir, et postulantes du bénéfice illégal de présomptions inéquitables, elle solicitent de la Cour un solution, fâcheuse à tous égards et condamnée d'avance par le Roi leur père.
Qu'à la base du procès se place, qu'elles le veuillent ou non, cette question de fait:
Oui ou non, les bien litigieux sont-ils, par origine et par nature, des biens congolais, dont la désaffection publique par le Roi, avec une appropriation privée, n'est pas établie, n'est pas vraissemblable, est même controuvée?
Que cette question de fait reçoit nécessairement une réponse affirmative, sous la puissance des preuves écrites et des présomptions légalement admissibles.
Que sur cette base de fait, domine, au centre du procès, cette question de droit public:
Oui ou non, les biens, congolais d'origine et de nature et non désaffectés par le Roi-Souverain au 18 octobre 1908, font-ils partie, qu'ils soient ou non inventoriés, de cette "universitas", attribuée par le Roi-Souverain à la Belgique, tant par son testament et par ses codicilles, qu'en vertu des lois de ce jour-là; et sont-ils ainsi devenus légalement des biens nationaux?
Que cette question de droit reçoit nécessairement, elle aussi, une réponse affirmative, sous la puissance des textes, d'une pensée persistante pendant vingt ans et de l'interprétation quasi unanime des hommes de loi (parlementaires et magistrats).
Qu'à tort, les princesses, perdant de vue à la fois cette double question et la double solution nécessairement affirmative, prétend découvrir, dans le Droit civil, des principes nouveaux, susceptibles d'attribuer à son auteur, en tant qu'homme privé, une propriété, dont le caractère civil ou privé est précisément le fait juridique, discuté, contesté et à établir par elles.
Qu'elles se heurtent au contraire à cette règle, élémentaire et légale, que le possesseur, ou même le détenteur précaire, n'importe qu'il pense détenir pour lui-même ou pour autrui (fût-ce pour une personne civile valide, incapable ou même inexistante) ne pourra être évincé que par un demandeur armé et à même d'établir, "a priori", et selon les preuves qu'exige le Droit civil, qu'il est actuellement, par lui-même et par son auteur, certainement propriétaire, à titre privé, du bien litigieux.
Tandis que les princesses impuissantes à apporter cette preuve sont en outre et surabondamment écartées par la preuve contraire!...
Voici nos trois point forts:
Il y a une parole du Roi: rien au patrimoine privé; tout appartient au patrimoine de "mes fonctions". Absence d'auto-attribution: l'attaque est ruinée en sa base.
Il y a silence du Code civil: il ne connaît point de "cause" d'aquêt civil, résultant de l'omission d'un bien dans un inventaire public; et le Code civil ignore toute partie qui est demanderesse sans "cause" et sans "preuve".
Il y a dévolution par notre Code colonial; il y a une "saisine étatique" à la Belgique, avec:
a) Exclusion précisément de la personne privée de Léopold II;
b) Un mode de tradition, audacieusement et généreusement bienfaisant, mais pas légal, ce que tous ont compris.
Et contre ces trois points forts viennent se heurter trois points faibles:
1° Les princesses disent: le Souverain avait le pouvoir de désaffecter les biens congolais.
- C'est vrai!
Mais elles ajoutent: Sa volonté libre a usé de ce pouvoir.
- C'est faux et voici leur premier "poiiint faible".
Elles plaident contre le Roi, leur père et auteur et Roi-Souverain;
2° Les princesses disent encore: le Code civil parle et le Droit commun nous enrichit. - C'est faux, la loi civile est "muetteee". Elle ne les entend pas, ne leur parle pas, ne les comprend pas. Elles prétendent ajouter à la loi civile et c'est leur deuxième "point faibles";
3° Se transportant ensuite dans un troisième domaine d'idées et de principes, elles disent enfin: Le traité n'est que la cession de "species" inventoriées et pas d'un "genus'.
- C'est faux: la loi publique parle et son texte et sa pensée attribuent au pays la "masse congolaise", dont l'inventaire est nécessairement énonciatif, selon l'usage d'ailleurs. - Et ceci est leur troisième point faible : elles tentent de dénaturer une loi impérative et attributive de propriété publique! Et elles plaident contre l'unanimité du Parlement.
De ces faits et de ces principes, se dégage cette inéluctable conclusion:
Le fonds spécial d'environ cinquante-quatre millions, découvert en janvier 1910, n'est pas un fonds privé ou paternel, mais un fonds politique et étatique et par destination, par la volonté du Roi et par la force de la loi.
- La "volonté" du Souverain l'a tenu ettt maintenu en dehors de sa fortune privée et a continué à l'affecter à l'embellissement de la Belgique; loin d'avoir pris quoi que ce fût, le Souverain a tout organisé pour nous.
- La "force de la loi" confirme et sanccctionne cette volont bienfaisante, ingénieuse et "audacieuse" dans les manifestations de son désinteressement continu et tenace. Comme le Souverain, la loi du 18 octobre a édicté l'attribution politique de ce fonds spécial: à la différence du Souverain, elle exige l'attribution parlementaire et ne peut s'accomoder d'une tentative d'attribution, dans la forme césarienne ou seigneuriale.
- Et ces deux forces, force de voloté eeet force d'une loi, en harmonie sur le principe et en désaccord jadis uniquement sur une modalité d'application, se sont fusionnées et scellées, ensemble et définitivement par l'arrangement du 28 janvier 1911.
- A ces forces, soit séparées, soit réuuunies, les appelantes sont impuissantes à résister:
- Ayant-cause du Roi, leur père, commeeent pourraient-elles profiter d'une désaffection qu'il leur a déclaré, n'avoir pas faite en qualité de Souverain, et contre laquelle, pendant vingt-trois ans et demi, chaque jour que Dieu lui donna, le Roi n'a cessé de protester, même d'avance et à toute époque?
- Sujettes du Code civil belge, commenttt pourraient-elles attribuer à leur père, aux fins d'en tirer bénéfice, une acquisition privée que lui-même a répudiée et que le Code civil belge ne prévoit pas? aucune des "causes" d'acquisition de propriété privée, résultant de celui-ci, n'est même alléguées par elles.
Si parfois les biens privés sans maître sont échus à l'État, dans quel article du Code lit-on que les biens "omis" dans un "inventaire public entre deux pouvoirs publics", sont, "en vertu de cette omission" et " a contrario", dévolus à un particulier?...dévolus au "fonctionnaire" à titre privé?...et que le fonctionnaire serait l'héritier forcé de la fonction!!! même malgré lui!!!
- Étrangères au Congo et à sa fortune, comment pourraient-elles, le jour de leur attribution au Pays, venir s'insinuer entre l'Auguste cédant et et cette loi du Domaine colonial, pour appréhender quelque chose à leur profit et au préjudice du Pays!
- J'ai fini, Messieurs, et la conclusiooon de ces longs débats reste ainsi vraiment "auréolée" de la simplicité de la vérité!
Comme les princesses, j'ai l'honneur de dire à la Cour:
Oui, laissez intacte la grande figure d'un grand Belge! Mais alors et de nécessité, j'ajoute: Pour cela, confirmez le jugement du 14 novembre! C'est le Roi lui-même, au nom duquel vous rendîtes tant de sages arrêts, qui vous y presse et vous y invite! C'est le Roi qui parle et c'est la loi qui ordonne!

In 1914, our grand uncle Henri Le Clercq, a volunteer with his brother Jean, lost his left hand at the battle of the Yser. He wrote in French his "Mémoires de Guerre 1914" with a lawyer precision for the facts. Here is an Ordre du Jour they received on Wednesday, September 30, 1914 at around 8 AM: "Vous devez résister dans vos tranchées jusqu'à la mort et attendre de pied ferme l'assaut à la baïonnette de l'ennemi ! Celui qui quittera ses tranchées sera puni de mort !" and concerning King Albert I: "Complètement indifférent au danger. Conduisant son cheval au pas sur une route repérée par l'ennemi, sans se soucier des obus qui pleuvaient à 50 mètres de lui." and "J'arrête sur la digue Monsieur Cooreman. Il a une serviette sous le bras et va tranquillement présider la commission des atrocités allemandes. Il nous dit avoir reçu des rapports intéressants de Mr Davignon en Angleterre qui a les pouvoirs de juge d'instruction. Quid situation? Trop tard en résumé nous dit-il. Des blessés dans tous les hôtels de la digue..."

Henri Le Clercq was later made Officier de l'Ordre de Léopold. I remember him at a shooting party with his gun adapted for shooting with only one arm. Good shot!

IN FLANDERS FIELDS
By John McCrae

In Flanders fields the poppies blow
Between the crosses, row on row,
That mark our place; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.
We are the Dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved and were loved, and now we lie
In Flanders fields.
Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.

TRAVERSÉE [1914]
Par Henri Davignon
Extrait de «Souvenirs d’un écrivain belge (1879-1945)» publié en 1954

Jusqu'au moment de l'entrée de l'armée allemande, Bruxelles avait gardé un air de fête qui n'avait pas manqué d'étonner les Français venant d'un Paris plongé dans une sorte de deuil préventif. Anvers déploya à son tour la joie des fêtes carillonnées. L'armée chargée de défendre la place - près de soixante mille hommes - y ajouta l'animation d'un passage continuel de troupes, de convois, d'estafettes et d'officiers en mission. Aussi longtemps qu'un zeppelin ne s'avisa point de survoler la ville et d'y jeter des bombes dans le voisinage du Palais, l'éclairage nocturne demeura intensif. L'inconscience avait sa part dans cette ivresse de la cité. Elle soutenait le moral d'un peuple convaincu que la forteresse était inexpugnable.

- J'en suis à souhaiter d'être attaqué!

Ainsi fanfaronnait Charles de Broqueville. J'entendis la phrase de mes oreilles. Sincérité ou bluff? L'un et l'autre. Dès la première minute de l'invasion le chef du gouvernement avait envisagé le pire. Mais décidé à tenir le coup, il se persuadait lui-même (et il en fut ainsi jusqu'à la fin), servi par les ressources d'une patriotique hâblerie. Les autres ministres, rencontrés dans la salle à manger du Grand Hôtel, allaient de la résignation au plus amer scepticisme. Le plus clairvoyant Alois van de Vyvere, ministre des finances, m'en donna la mesure en feuilletant devant moi la liasse des dépêches émanant des agents du grand quartier.

- Les canons autrichiens sont en route pour Anvers. Ils viennent de traverser Bruxelles, en direction de Malines. C'est la fin.

Une figure inquiète rôdait autour du gouvernement. Louis Franck s'était trouvé en Allemagne au moment de la déclaration de guerre. Il venait de rentrer par la Hollande. Broqueville le jugeait.

- Je sens ce qu'il cherche. Il croit qu'on pourrait encore « causer». Je ne le laisserais même pas dire un mot.

On accusa faussement, plus tard, Franck d'avoir rendu la ville. Sachant, comme bien d'autres, que la chute de l'enceinte était inévitable le jour où les assaillants en prendraient les moyens, il songeait simplement à épargner à la population le risque d'un bombardement prolongé. On ne pouvait rien dans cet ordre avant d'avoir assuré l'évasion de la garnison par l'étroit couloir entre la frontière et la mer. Quand il n'y aurait vraiment plus que des civils, Franck pourrait prendre contact avec un occupant, dépité de trouver la place vidée de ses défenseurs. Jusque-là il fallait le laisser dans l'ignorance.

Au Grand Hôtel parut aussi Charles Woeste, amené de Bruxelles par le conseiller de la légation des États-Unis Hughes Gibson. On le disait chargé d'une mission par l'ennemi! Rien n'était plus faux. Quelqu'un en relations d'affaires avec le directeur de la Deutsche Bank lui avait fait part de certains renseignements quant à la puissance de l'artillerie qui allait entrer en action contre Anvers et lui avait dit que ces informations seraient utiles au gouvernement; Woeste avait consenti à les porter à Anvers, profitant d'une auto diplomatique. Broqueville écouta le ministre d'Etat et ne lui donna aucune réponse. Il n'en demandait pas et manifesta le désir de repartir aussitôt. Mais il avait compté sans son hôte. Gibson, agréablement surpris par l'atmosphère very exciting de la vie à Anvers, voulait prolonger son séjour. Woeste n'avait emporté aucun bagage. Il fallut lui réquisitionner une chemise de nuit.

La plupart des diplomates étrangers avaient suivi le gouvernement. L'Espagnol et l'Américain s'étaient décidés à demeurer dans la capitale afin de protéger la population contre des abus de pouvoir. Le cas du ministre d'Autriche-Hongrie était singulier. Le gouvernement de la Double Monarchie le laissait sans instruction. Il n'arrivait pas à se rendre compte par lui-même si son pays était ou n'était pas en guerre avec la Belgique. La triplice, devenue la duplice par la défection de l'Italie, jouait-elle en cette matière? Le pauvre comte Clary et Aldringen, dont la charmante fille avait épousé un Belge, le comte Henry de Baillet-Latour, et qui s'était acclimaté depuis des années à un poste de tout repos, ne savait que faire ni que dire. Il ne comprenait rien à la résistance belge. Il ne l'avait pas prévue. Entre la mobilisation et l'ultimatum, me promenant avec mes parents dans le parc de Bruxelles, j'avais croisé le couple autrichien. On s'était arrêté pour échanger des amitiés et l'on avait fait ensuite quelques pas de concert. Prenant les devants avec la comtesse, née Kinsky, j'entendis brusquement celle-ci me dire:

- S'ils voulaient passer, laissez-les faire...

Je la regardai sans comprendre et me mettant à rire:

- Mais il n'en est pas question, je l'espère...

Elle n'ajouta pas un mot. Après j'ai pensé qu'elle savait, elle, ou qu'elle avait deviné.

L'état de désarroi du pauvre Clary était tel qu'il demandait au département belge des Affaires étrangères, ce qu'il avait à faire. On lui riait au nez. L'Autriche, par son ultimatum à la Serbie, avait fourni le prétexte à l'horrible déclenchement de la catastrophe. Malgré elle, elle serait associée jusqu'au bout au déroulement d'événements dont elle finirait par être la principale victime.

Tandis que le diplomate tournait en rond, les artilleurs en uniformes autrichiens broyaient sous les roues pesantes des mortiers fabuleux le pavé des routes belges. À la fin, réfugié en Hollande, il, eut une note à envoyer à Anvers. Oui, l'Autriche nous déclarait la guerre. Le motif' allégué était dérisoire, des sujets austro-hongrois auraient été maltraités par nous!

Mais les horreurs de la guerre étaient partout.

Louvain en flammes, Aerschot, le théâtre d'une affreuse tuerie de civils. On ne savait pas encore le pire qui allait éclater à Dinant, Andenne, Tamines, Ethe, Latour. Certaines allusions des communiqués allemands aux «francs-tireurs», à la sauvagerie des femmes belges, à l'action du clergé justifiaient les «représailles» qui n'étaient que du terrorisme préventif. Car il n'y avait pas de francs-tireurs et les femmes et les enfants, les prêtres et les laïcs massacrés devaient servir à assurer par un procédé de terreur systématique les arrières de l'armée en marche. La légende des francs-tireurs, celle des yeux crevés aux blessés, celle du clergé sanguinaire avaient été répandues à l'avance dans l'esprit des soldats pour empêcher toute fraternisation.

La commission d'enquête à laquelle je me trouvais attaché était présidée par M. Gérard Cooreman, ancien président de la Chambre des représentants. Dès les premiers témoignages entendus l'évidence s'imposa. Les cas particuliers d'atrocités individuelles étaient rares. Il s'agissait bien d'un procédé collectif. On pouvait dresser le procès-verbal d'une violation voulue, régulière, des lois de la guerre. Dès lors au crime de violation initiale s'ajoutait un long martyre. Il fallait que le monde le sût. Mais où porter la protestation? Le vainqueur comptait sur une campagne rapide dont le succès le laverait des reproches secondaires. L'arrêt sur la Marne ouvrait l'espérance à la révolte de l'univers. Pourquoi la lointaine Amérique n'accepterait-elle pas de l'incarner?

Le gouvernement d'Anvers décida d'envoyer à Washington une mission d'importance. Carton de Wiart, ministre de la Justice; Vandervelde et Hymans, ministres d'État. Louis de Lichtervelde, secrétaire de Broqueville, l'accompagnerait. Elle emportait les premiers rapports de la commission d'enquête. Il devenait urgent d'étendre l'activité de celle-ci et de recueillir le témoignage des populations de la région torturée, dont on commençait l'évacuation vers l'Angleterre.

C'est ainsi, que je fus chargé de me rendre à Londres, où étaient déjà ma femme et mes enfants, afin d’envisager avec notre légation le moyen de poursuivre dans les formes légales l'investigation commencée. Si Anvers tenait, je reviendrais porter au gouvernement le résultat de l'enquête. Mon père semblait se remettre. Je venais d'avoir trente-cinq ans. La garde civique était officiellement démobilisée. Les cadres de l'armée combattante décourageaient toute utilisation efficace. Je partis.

Le service régulier avec l'Angleterre ne se faisait plus par Harwich, mais par Tilbury. Il fallait se trouver à bord avant la nuit. On levait l'ancre à l'aube. Dans la partie du fleuve contrôlée par la Hollande, aucun élément de la force armée n'était admis. La neutralité des Pays-Bas s'est avérée, dans la suite, avantageuse à tous les belligérants. Malgré des alertes continuelles le gouvernement de la Reine Wilhelmine a fini par se considérer comme investi d'une immunité qu'il mettra à profit lors de la conférence de la paix. Au moment de l'attaque sur Anvers, les eaux du fleuve n'auraient pu servir d'exutoire à aucune unité militaire. Sur notre modeste bateau de passagers, encombré de réfugiés, un officier néerlandais monté devant Flessingue, passa une inspection à vrai dire sommaire. Le spectacle du pont, je l'ai décrit plus tard dans mon roman, «Jan Swalue ». On y trouvera aussi, pris sur le vif, le croquis de l'accueil extraordinaire réservé à Tilbury par une population insulaire surexcitée.

L'attitude de l'opinion en Grande-Bretagne envers la Belgique martyre dépassa, durant les trois premiers mois de la guerre, tout ce qu'on pouvait imaginer. Il y entrait plusieurs facteurs d'enthousiasme. Aucun pays n'était moins préparé à faire la guerre que le Royaume-Uni. La petite armée de métier débarquée au Havre, à Boulogne, à Ostende, n'avait pour ainsi dire rien pu pour défendre les Belges contre l'agression. À Mons, combattant en marge de l'armée française en retraite, elle avait magnifiquement tenu. Une légende courait déjà propagée par les blessés ramenés en Angleterre: des anges avaient été vus soutenant les fils de Saint Georges. Le saillant d'Ypres allait être gardé au prix de sacrifices énormes, mais sans l'Yser, rien ne serait resté de la Belgique libre. Le sentiment d'une confuse responsabilité mettait dans l'accueil fait aux réfugiés la volonté d'une compensation. Chaque fuyard allait être traité en héros!

The Belgian refugees, l'expression dominerait notre exil. Elle appliquerait le bénéfice d'un préjugé favorable à la horde disparate des évacués du triangle Anvers, Louvain, Malines, aux gens de toute classe accumulés dans les stations balnéaires de la côte fla- mande. Leur présence pendant quatre années allait promouvoir dans la communauté britannique un engagement de gratitude mêlée de remords, celui de faire triompher la cause du droit au nom de laquelle l'Empire entier était convié à mobiliser ses ressources et ses forces. L'histoire de l'exil belge en Angleterre est inséparable de la formation de cet esprit guerrier dont la longue endurance aurait raison de l'obstination germanique.

Dès le moment où, mêlé à ce convoi, un des premiers qui déversa sur le sol insulaire le tout-venant de notre malheureux peuple, je devins spectateur puis acteur, j'eus l'impression de participer à un phénomène social nouveau.

Deux ou trois fois auparavant, je m'étais rendu à Londres et dans le sud-ouest de l'Angleterre. Je parlais couramment l'anglais. Par mon rôle auprès de mon père j'étais préparé à connaître l'importance de l'intérêt britannique dans la sauvegarde de notre indépendance. Ce que je ne pouvais que pressentir, c'est l'action primordiale, intime, quotidienne du fait belge, dans l'évolution de l'esprit insulaire.

Mon frère Jacques et ma femme m'attendaient à la station de Charing-Cross. Le premier revenu à Bruxelles de Berlin, par la Hollande, avec son chef Beyens, ses collègues Peltzer et Nieuwenhuys, avait rejoint Anvers, et, de là, le département des Affaires étrangères, l'avait envoyé grossir le personnel débordé de la légation de Londres. Le comte de Lalaing la dirigeait, à demi anglicisé et très early victorian. Sa correction aristocratique, son impassibilité de gentleman faisaient un vivant contraste avec l'imprévu des événements qui allaient l'assiéger. Petitement logé, mais dans le quartier le plus élégant, West Halkin street, à l'entrée de Belgravia, il fermait ponctuellement la chancellerie à l heure de relevée. Ensuite ce n'était plus qu'un homme de la gentry. Le flot des quémandeurs, des sympathisants, des exaltés, qui se mit à. battre à. toute heure du jour et de la nuit la petite porte de son hôtel particulier, défendu par un grillage donnant sur le trottoir, le choqua, le désorienta. Sans son collègue de Pékin, Émile de Cartier de Marchienne, en congé à Londres, c'eût été l'affolement, le désordre. Avec l'aide des Belges d'affaires résidant dans la cité, Cartier ouvrit non loin de la Banque un comptoir où se débrouillerait tout ce qui n'était pas du ressort de la diplomatie proprement dite. Ainsi fut fondé le Belgian relief Committee dont le siège fut d'abord 10 Finsbury Square. Cartier s'en nomma lui-même le président et, un an après, quand il regagna son poste en Extrême-Orient, je lui succédai dans ce titre qui couvrit alors de multiples fonctions.

La première à. inaugurer était celle de la «Commission d'enquête sur les violations des lois de la guerre». Elle fut le point de départ d'un véritable service d'information et de propagande auquel les autorités britanniques et belges allaient attacher une consécration particulièrement féconde.

Pour présider notre enquête le gouvernement anglais, par le truchement du Home Office détacha sir Mackenzie Chalmers K. G. ancien juge aux Indes, magistrat d'appel en retraite. Nous choisîmes le sénateur socialiste belge Lafontaine, pacifiste notoire, futur Prix Nobel pour composer avec Cartier et moi-même notre commission rogatoire. Elle se mit aussitôt à. l'œuvre.

Il avait été entendu que je me tiendrais en contact avec Anvers où je comptais bien retourner pour faire rapport. Mais un télégramme de mon père, suivi d'un autre daté d'Ostende, m'enleva toute illusion. Sur les affiches, renouvelées trois fois par jour, par lesquelles les journaux londoniens attiraient l'attention des acheteurs sur la nouvelle la plus sensationnelle de la dernière édition, s'étalait en grandes lettres: The Fall of Antwerp. La catastrophe m'atteignait en pleine joie d'avoir rejoint ma femme et mes jeunes enfants. Ils avaient trouvé asile dans un modeste petit couvent de religieuses françaises, connu de notre nurse, à Muswell Hill, faubourg Nord de Londres. Ce n'était pas loin d'un centre d'hébergement provisoire et de distribution où campait la masse de nos réfugiés, lieu d'exhibition sans emploi appelé Alexandra Palace. Je ne sais si la «fuite en Egypte» de septembre 1914 a laissé des traces dans l'imagination naissante de ces quatre petits dont l'aîné avait à peine quatre ans. Claire et Mimi (qu'on n'appelait pas encore Marie-Colette) prétendent se souvenir de certains détails. Les jumeaux Pierre et Anne n'avaient pas dix-huit mois. Ils apprenaient à courir sur la pelouse veloutée du jardin monastique. Pour eux tout était émerveillement. Devant eux nous refoulions notre angoisse et nous gagnait l'intense animation d'un monde presque inconnu.

Kafka saw humor not only as a defense against the pain and anguish he felt inflicted upon him by the outside world, but also against the pain he rained upon himself. This was a man who chose words carefully and used humor sparingly. But when Kafka used humor, he used it to further emphasize the horror of what was going on in his worlds.

LIGHT BULBS
By Cheryl Ann Jackson

Two guys are sweeping in a warehouse and suddenly one guy starts climbing up the side of the wall and when he gets to the top starts shouting: "I'm a light bulb". The manager comes in and sees this and tells him to get down and get back to work. After 20 minutes the same guy does the same act. The manager this time warns him that if he does it again he will be fired and to stop it. 20 minutes later he is up there again, the manager says "that’s it, you are fired, get out of here" the man climbs down from the ceiling and starts to walk out and the other man starts out after him. The manager asks the second man where he thinks he is going and the man say "I'm not working in the dark."

METEOROLOGICAL SALUT

Napoléon smiled in his grave at the Invalides when the wind threw away my cap, bought in England, while contemplating Paris from the top of the Arc de Triomphe.

Henri Davignon, the grand grand father of our father, had a son. His name was Pierre Davignon. He was a priest. He died in a concentration camp (Dora) during World War II.

Queen Elisabeth of Belgium was one of the Righteous among the nations. On August 1, 1942 she openly received three Jewish personalities wearing their yellow stars. On August 4, 1942, she informed the A.J.B. by means of the Red Cross that Belgian Jews would not be deported. However, one year later, the SS organized a special raid targeting Belgian Jews and deported them all to the Dossin barracks. Queen Elisabeth's intercessions with the German Military Government were, nevertheless, very effective and resulted in several hundreds of Jews being saved, including many children and old people.

Kids, you have to know that Belgium has been liberated in 1945 by the Allied soldiers. Many of them died. Remember the battle of the Ardennes. Colonel David H. Hackworth, the United States' military's most decorated living veteran, wrote about Dachau concentration camp in his best-selling auto- biography, About Face: "On one cold winter's day, I took Patty [his wife] to Dachau. The horror of Hitler's vision was alive and well in this grim death camp: the barracks, the ovens, the electrified barbed-wire fences, remained intact. A mound here held the bones of ten thousand Jews: the one over there,twelve thousand more. The place was a monument to the darkest side of man, and yet - despite the smoke and ash that rained down on their homes from camp incinerators, despite the sickly smell of burning flesh and hair, which surely carried with the slightest breeze as far, probably, as Munich - the villagers claimed they hadn't know. I couldn't square it, anymore than I could square the fact that not one of the laughing, backslapping, congenial comrades I met (in their beer-belly filled lederhosen and their jolly Bavarian green caps) had fought the Americans in the West. All assured me they'd been on the Eastern Front, fighting "the real enemy," the Russians. It was a story I heard in the cities, too. In fifteen years the Germans had come a long way in their rewrite of history. But at least there's Dachau, I thought to myself, to remind them of the truth." (Hackworth, 343,344)

Work Cited: Hackworth, Colonel (U.S. Army, Ret.) David H., and Julie Sherman. About Face: The Odyssey of an American Warrior. New York: Simon & Schuster, 1989. ISBN 0-671-52692-8

"TO RUSSIA" was painted on "Matilda" tanks made in England for the soviet army during World War II.

When I was a little boy, I went several times with my grand-parents to visit the castle of Wynendaele near Torhout. On the 25th of May 1940, a dramatic moment of Belgium's history happened there:

COMPTE-RENDU

établi par M. Pierlot, Premier Ministre, de l'entrevue du Roi avec les ministres
au château de Wynendaele le 25 mai 1940

Avant la fin de la nuit, M. Pierlot demanda de nouveau la communication téléphonique avec le Roi. Le major Van den Heuvel répondit que le Souverain était parti dans la direction du sud, sans donner d'indications concernant l'heure de son retour mais en emportant quelques vivres, ce qui faisait présumer que son absence serait d'assez longue durée.

A son retour, le Roi irait vraisemblablement au grand quartier général, à moins qu'il ne rentrât à sa nouvelle résidence. Au sujet de l'emplacement de celle-ci, le major van den Heuvel répondit à M. Pierlot en termes évasifs, déclarant qu'il ne savait pas s'il était autorisé à faire connaître l'endroit où logeait le Roi.

Les recherches dans l'indicateur téléphonique permirent toutefois, grâce au numéro de poste, d'identifier cette résidence comme devant, suivant toute vraisemblance, être le château de Wynendaele, au nord-ouest de Thourout.

En présence de cette situation, les ministres quittèrent Bruges, avec leurs collaborateurs et le personnel qui les accompagnait, dans l'intention d'avoir une dernière entrevue avec le Roi et d'arrêter ensuite une décision au sujet de leur départ.

Il était alors 4 heures du matin. Dans la direction du front un silence complet régnait. Entre Bruges et Thourout, le corps de cavalerie, pourtant déjà si éprouvé. se formait en ordre de marche, dans une tenue et dans un ordre admirables.

Arrivés à Wynendaele, laissant sur la route la petite colonne de leurs voitures, les ministres pénétrèrent seuls dans l'enceinte du château, où ils furent reçus par le major Van den Heuvel.

Le Roi venait de rentrer et se reposait de sa nuit de fatigue. Les ministres annoncèrent l'intention d'attendre son réveil, mais après quelques hésitations, le major Van den Heuvel prévint le Souverain, qui parut aussitôt.

Le Premier Ministre déclara:

"Nous avons fait connaître au Roi, à plusieurs reprises déjà, notre conviction suivant laquelle, si l'armée belge était en entier, ou en partie, exposée à la nécessité imminente de mettre bas les armes, le Roi devrait tout faire pour se soustraire à la capture par l'ennemi. Nous en avons dit au Roi les raisons. La capitulation, qui, si grave que soit l'événement, n'est pourtant qu'un acte militaire, prendrait nécessairement un caractère politique, si le Roi la signait ou s'il était à la tête de l'armée au moment où elle aurait lieu. D'autre part, si l'armée devait se rendre, le rôle du Roi serait terminé auprès d'elle, tandis que sa fonction de Chef d'Etat pourrait continuer à s'exercer aux côtés des gouvernements alliés, tant sur le plan politique que sur le plan militaire, en utilisant tout le potentiel de guerre belge qui se trouve rassemblé en France. C'est là qu'est le devoir du Roi. Le gouvernement unanime en a la ferme conviction. Enfin, on ne pourrait envisager, sans les plus graves appréhensions, le retour du Roi en Belgique sous l'autorité de l'occupant, surtout pour continuer à y exercer sous son contrôle, certaines des attributions de la fonction royale, ce que l'on ne manquerait pas de soutenir, si même le Roi décidait de s'en abstenir.

"Quant aux ministres, leur présence auprès du Roi, au moment d'une capitulation éventuelle, ne pourrait que contribuer davantage à donner à l'événement l'aspect politique que nous voulons éviter à tout prix. Si l'armée belge est amenée à se rendre, la place des quatre ministres restés jusqu'à présent en Belgique n'est plus sur le théâtre des opérations, mais là où leur fonction pourra continuer à s'exercer: auprès de leurs collègues et des gouvernements alliés.

"Tout cela étant une dernière fois considéré et vu le tour décisif pris par les événements, il est indispensable, continua M. Pierlot, d'organiser immédiatement le départ de mes collègues et de leurs collaborateurs, au total un groupe d'une vingtaine de personnes, dont le voyage jusqu'au littoral et l'embarquement pourraient devenir rapidement impossibles. C'est pourquoi, sauf objection formelle du Roi, trois ministres et leur personnel partiront aujourd'hui pour Dunkerque, où des embarcations les attendent.

"Quant au chef du gouvernement, suivant la suggestion qu'a déjà faite le Roi au cours d'un précédent entretien, il restera jusqu'au moment que le Roi fixera pour son propre départ. Ce moment, le Roi le choisira de manière à concilier les devoirs qu'il estimera encore avoir à remplir auprès des troupes avec ses obligations de Chef de l'Etat. Si le Roi en décide ainsi, son départ n'aura lieu que lorsque toute résistance aura cessé. Mais le Premier Ministre se permet de demander que le Roi déclare avoir la ferme intention de partir plutôt que de se laisser faire prisonnier. Faute de cette assurance, conclut M. Pierlot, je partirais avec mes collègues, pour les raisons que je viens de rappeler".

Après un moment de silence, le Roi répondit avec un visible effort:

"Je suis décidé de rester. Au-dessus des considérations les plus solides au point de vue logique ou politique, il y a des raisons de sentiment sur lesquelles on ne peut passer. Quitter mon armée serait une désertion. Je dois, quel qu'il soit, partager le sort de mes troupes. Au surplus, pour préciser davantage ma pensée et indiquer dans quelles dispositions d'esprit j'ai arrêté cette ligne de conduite, je vais vous lire ce que j'ai l'intention d'écrire au Roi d'Angleterre."

Le Roi donna lecture d'une lettre dans laquelle il exposait au souverain britannique les motifs de sa conduite et dans laquelle il ajoutait que, quoi qu'il advînt, il ne consentirait jamais à rien faire qui fût contraire aux intérêts de la cause des Alliés.

Commentant ce dernier passage de la lettre, le Roi ajouta que, dans sa pensée, il y visait spécialement le cas où le pouvoir occupant prétendrait faire servir l'activité industrielle belge à des fabrications de guerre. "Si j'étais -dit-il encore -acculé par contrainte à semblable nécessité, je déciderais plutôt de me retirer". Et sur une question des ministres, le Roi précisa que ce terme signifiait bien, dans sa pensée, une abdication.

Cet entretien, comme celui de la veille, avait eu lieu debout. Sur les derniers mots qui viennent d'être résumés, le Roi annonça, par son attitude, l'intention de ne pas le poursuivre plus longtemps.

Mais M. Spaak, intervenant: "Sire, dit-il, "il est impossible que le Roi se sépare ainsi du gouvernement. Nous demandons à causer une dernière fois avec le Roi, à lui dire toute notre pensée; après, le Roi fera ce qu'il voudra. Mais il ne peut nous refuser ce dernier entretien. Ne pourrions-nous nous asseoir et poursuivre cet échange de vues dans des conditions qui nous permettent de nous expliquer complètement".

Ces paroles furent prononcées avec un mélange de respect et, si l'on peut dire, de cordialité attristée. On y sentait le désir passionné de ne pas rompre les fils, si ténus qu'ils fussent devenus, qui rattachaient encore les ministres au Chef de l'Etat.

Le Roi s'assit avec quelque hésitation, et, d'un signe, autorisa les ministres à en faire autant.

M. Spaak reprit alors l'entretien.

"Le Roi, déclara-t-il, va, de l'avis unanime du gouvernement, faire une erreur capitale. En tombant au pouvoir de l'ennemi, il sépare sa cause de celle des Alliés. Il renonce à poursuivre la lutte auprès d'eux, contrairement aux obligations morales qu'il a contractées en appelant les Alliés à son secours. Si grave que soit l'éventualité d'une capitulation de l'armée, il serait plus grave encore que, le Roi tombé aux mains de l'ennemi, le fait politique de l'existence nationale s'en trouve compromis. En France, le Roi trouvera des troupes qu'il pourra réorganiser. Il continuera la lutte, non seulement avec les moyens militaires, mais avec les moyens tirés de l'activité économiques du pays qui est encore grande à l'étranger, avec les ressources de la colonie. Il fera ce qu'ont fait le roi de Norvège et la reine de Hollande. Il restera solidaire d'une cause à laquelle le sort de notre pays est lié.

"Si le Roi reste, que veut-il faire! Le Roi, contrairement à l'expression dont il s'est servi, ne partagera pas, quoi qu'il arrive, le sort, de ses troupes. Il aura pour résidence non une forteresse en Allemagne, mais son palais. Tout ce qu'il tentera de faire le compromettra et compromettra la cause de notre indépendance, parce que le Roi agira sous le contrôle de l'ennemi. Il en résultera un trouble profond dans les consciences. Je voudrais que le Roi nous dise quelle idée il se fait du rôle auquel il a déjà fait allusion à plusieurs reprises et qu'il continuera à jouer en Belgique".

A cette dernière question, le Roi répondit:

"Je ne sais pas. J'ignore ce qu'il me sera possible de faire. Mais j'espère pouvoir continuer à entretenir dans le pays un minimum de vie économique, faciliter ainsi son ravitaillement, épargner à mes compatriotes les pires souffrances, telles que les déportations.

"Si je ne reste pas en Belgique, j'ai la conviction que je n'y rentrerai jamais. La cause des Alliés est perdue, A bref délai, dans quelques jours peut-être, la France devra à son tour renoncer à la lutte, car la disproportion des forces ne lui permet pas d'espoir de succès. Sans doute, l'Angleterre continuera-t-elle la guerre, non sur le continent, mais sur les mers et dans les colonies. Cette guerre pourra être longue. Elle sera étrangère aux possibilités d'intervention de la Belgique et, par conséquent, le rôle de celle-ci est terminé. Pendant une période qui pourra durer de longues années, la Belgique jouira peut-être d'une indépendance réduite, mais qui permettra encore une certaine vie nationale, en attendant, s'il arrive, le jour où, par suite de vicissitudes imprévisibles, les circonstances redeviendront plus favorables pour notre pays.

Il n'y a plus place, dans tout cela, pour un essai de continuation de la guerre auprès des Alliés,

"La décision que je prends m'est affreusement pénible. J'aurais la vie, certes, plus facile si je me retirais en France, si j'allais y vivre avec mes enfants, en attendant la fin de la tourmente; mais je crois que lorsque deux routes s'ouvrent devant nous, celle du devoir est toujours la plus dure. C'est celle-là que j'ai choisie".

A toute évidence, le parti du Roi était pris. Rien ne pouvait plus le détourner de sa détermination.

Les ministres lui demandèrent alors: "Dans la pensée du Roi, que devons-nous faire?" La réponse fut: "D'homme à homme, je vous le dis nettement, suivez votre inspiration, et si vous estimez que vous devez partir, je ne m'y oppose pas,"

M. Spaak reprit: "Nous ne pouvons nous contenter de cette réponse du Roi, Nous demandons des instructions, mais auparavant, nous devons en savoir davantage sur la conception que le Roi se fait sur le rôle qu'il sera appelé à jouer encore en Belgique. Le Roi aura-t-il auprès de lui, à Bruxelles, un gouvernement?".

Avant de répondre, le Souverain réfléchit et son attitude donna l'impression qu'il ne s'était jamais posé cette question, Il répondit pourtant: "Evidemment, car je ne veux être un dictateur",

"Ce gouvernement", reprit M. Spaak, "ne peut, dans la pensée du Roi, être le gouvernement actuel?"

Réponse: "Non, sans doute, il paraît certain que l'occupant n'y consentirait pas".

M, Pierlot ajouta: "Le Roi sait que nous non plus nous n'y consentirions pas, Certes, nous sommes troublés à la pensée de quitter le Roi dans des circonstances aussi tragiques. Pour ma part, si j'étais célibataire, peut-être me laisserais-je dominer par ce sentiment et consentirais-je à rester, par attachement à la personne du Roi. Mais je ne veux pas laisser à mes enfants un nom auquel certains souvenirs resteraient fixés.

"Mais -reprit M. Pierlot -si le Roi constitue à Bruxelles un gouvernement, quelle sera la position du gouvernement actuel, non seulement des ministres ici présents, mais de ceux qui sont en France? Dans la pensée du Roi, doivent-ils démissionner?'

Le Roi répondit: "Cela me semble, en effet, dans la logique de la situation".

Poursuivant la série de ces questions, M. Spaak dit encore:

"II faut prévoir la réaction qui se" produira parmi les Belges se trouvant en pays libre et l'éventualité où, soit le gouvernement actuel, soit un autre qui viendrait à se constituer à sa place, déciderait de poursuivre la guerre aux côtés des Alliés; tandis que, si je comprends bien, le Roi aurait fait la paix ou considérerait en tout cas que les hostilités ont cessé entre la Belgique et l'Allemagne, je suis persuadé, -ajouta M. Spaak -, que cette éventualité est à prévoir et que c'est là, effectivement, ce qui arrivera",

Si c'est le gouvernement actuel qui prend l'attitude indiquée par M. Spaak et qui poursuit la guerre en France, ce gouvernement", demanda encore M. Pierlot, "sera-t-il toujours le gouvernement du Roi.

Le Roi répondit: "Non, ce gouvernement sera nécessairement contre moi". Ces réponses furent données avec netteté, mais chaque fois après un moment de réflexion qui semblait indiquer que les diverses éventualités soulevées par les ministres n'avaient pas encore été envisagées par le Roi ou, du moins, n'avaient pas fait l'objet d'un examen complet de Sa part.

Au cours du même entretien, les ministres, péniblement impressionnés par la perspective de quitter le Roi dans de pareilles circonstances, se demandèrent à certain moment s'ils ne resteraient pas auprès du Souverain, quitte à se dépouiller de toute qualité officielle en donnant leur démission.

Le Roi parut appuyer cette manière de voir: "II y aurait, dit-il, intérêt à avoir en Belgique le plus de personnes possible ayant une autorité morale qu'elles pourraient employer à maintenir la cohésion et l'unité dans le pays. D'autre part, même si les ministres sont démissionnaires et ne peuvent, par conséquent, participer au gouvernement, ils pourront continuer à m'apporter un concours sous forme d'avis ou de conseils que je serais amené à leur demander".

Mais les ministres ne furent pas longs à constater l'impossibilité morale de cette situation hybride. .

"Notre place, déclarèrent-ils, ne sera plus auprès du Roi, car même démissionnaires, notre présence contribuerait, comme nous l'avons déjà souligné, à donner aux événements le caractère politique que nous voulons éviter ou que, du moins, nous ne voulons pas qu'ils aient par notre fait. Notre place est auprès de nos collègues, avec qui nous aurons à nous concerter, une fois le gouvernement constitué au complet."

Les ministres revinrent sur une considération qu'ils avaient déjà fait valoir au cours d'une précédente entrevue.

"Quelles que soient, dirent-ils, les intentions du Roi, la conduite qu'il compte adopter sera interprétée, en Belgique et à l'étranger, spécialement dans les pays alliés, comme une trahison de la cause à laquelle le Roi et la Belgique se trouvent moralement liés depuis qu'ils ont fait appel à la garantie de la France et de la Grande-Bretagne. Loin d'être un point de ralliement, le Roi sera parmi ses compatriotes un signe de contradiction. L'institution monarchique qui a été le symbole et le moyen le plus efficace de notre unité nationale s'en trouvera compromise, sans doute irrémédiablement.

"Enfin, lorsque ces nouvelles seront connues en France, où il y a deux millions de Belges réfugiés, quelles vont être les réactions de la population à l'égard de nos compatriotes?"

Quant à ce dernier point, le Roi répondit: "Il y a en Belgique six millions d'autres Belges; ce ne sont pas ceux qui sont partis qui sont les plus intéressants, mais bien ceux qui sont restés."

Les quatre ministres présents prirent personnellement part à ces échanges de vues, de telle sorte qu'il s'en dégageait une impression d'unanimité complète entre eux.

Mais toutes ces instances devaient rester vaines.

Avant que l'audience prît fin, M. Pierlot aborda un dernier sujet de préoccupation,

"Aux termes et d'après l'esprit de la Constitution, dit-il, les ministres répondent de tous les actes du Roi, soit qu'ils en aient formellement assumé la responsabilité par un contre-seing, soit qu'il s'agisse d'actes publics faits par le Chef de l'Etat dans l'exercice de sa fonction. Depuis la fondation de l'Etat belge dans sa forme actuelle, tous les gouvernements ont considéré que leur devoir essentiel était de couvrir la Couronne. Nous n'avons jamais failli à cette obligation. Dans le cas présent, nous sommes forcés de dire que notre attitude devra être différente. Le Roi a adopté une ligne de conduite contraire à l'avis unanime du gouvernement; celui-ci n'a cessé de faire les plus expresses réserves; il serait trop injuste de faire peser sur nous une responsabilité dont nous ne devons porter aucune part. Il s'agit d'un problème d'une gravité extrême, dont dépend l'existence de nos institutions et celle du pays. Nous estimons que la manière d'agir du Roi compromet tout. Nous l'avons dit, nous ne voulons pas aux yeux de l'histoire, passer pour être la cause de la catastrophe qui s'annonce. Nous serons donc forcés, si le Roi persiste dans ses intentions, non seulement de renoncer à le couvrir, mais de nous désolidariser publiquement d'avec lui. Nous savons que pareil fait est le contraire d'une pratique constitutionnelle normale. Il est sans précédent et rompt les traditions de notre droit public. Mais nous ne, prévoyons pas comme possible d'autre attitude que celle que je viens d'annoncer."

Le Roi répondit:

"Je comprends votre situation. Vous avez une conviction. Je sais qu'elle est sincère. Vous ferez ce qu'elle vous dictera."

La fin de l'audience approchait. Le Roi se leva. Avant de le quitter, le Premier Ministre lui posa encore une question. Faisant allusion à un mot dit par le Roi au cours de l'entretien et dont le sens n'avait pas paru clair aux ministres, M. Pierlot demanda ce que le Roi avait voulu dire en annonçant quelques instants auparavant, qu'il pro- longerait la résistance tant qu'elle serait possible et qu'il y aurait le moindre espoir qu'elle fût encore utile.

"Le Roi", précisa M. Pierlot, "considère-t-il qu'en dehors d'un événement complètement imprévisible qui viendrait modifier la situation, la capitulation de l'armée peut encore être évitée ou, au contraire, est-elle certaine?"

La réponse fut: "Elle n'est pas certaine, elle est inévitable". "Combien de temps", reprit le Premier Ministre, "pourrait-elle encore être retardée ?"

Réponse: "Tout au plus vingt-quatre heures".

Le Roi sortit, après avoir pris congé de ses ministres en leur serrant la main comme d'habitude, mais avec une nuance marquée de trouble et de froideur.

L'inévitable était accompli. Les ministres quittèrent le château de Wynendaele à 6 heures, sous l'impression profonde que leur avait laissée cette scène dramatique.

LE 28 MAI 1940
Par Paul Le Clercq
Belge réfugié en mai 1940 à Langon en France avec sa femme et ses six enfants

Le 28 mai, journée tragique. Dès le matin, Roger [20 ans, fils d’Abel le métayer qui les hébergeait], très agité, vient nous déclarer que Paul Reynaud a annoncé la capitulation de l'armée belge. Quelques-unes sont allées faire des courses à Langon et sont revenues très sombres: le bruit est confirmé partout et dans certains magasins, des paroles désobligeantes sont prononcées à l'adresse du Roi des Belges.

Nous restons sceptiques: c'est un cauchemar, un malentendu, un nouveau bobard de propagande.

Les paroles dures et amères que transmettent les ondes nous font apparaître la réalité de la catastrophe: déclaration de Paul Reynaud et de Pierlot. Discours prononcé à Limoges par le Président de la Chambre Monsieur van Cauwelaert et le Président du Sénat, Monsieur Gillon.

Nous sommes écrasés, atterrés, mais la position très nette prise par le gouvernement pour la continuation de la lutte aux côtés des alliés, dissipe les équivoques et permettra aux réfugiés belges de continuer à jouir sans froissements de l'hospitalité de la France.

Pendant les jours suivants, les journaux sont bien pénibles à lire: désarroi, dégoût, révolte, espoir de comprendre un jour, s'entrechoquent en nous.

Où est le gros de l'armée?

Où sont les nôtres?

Ignorant la rupture rapide des communications et les embouteillages tragiques, nous voulons croire que la plupart ont pu passer en France ou en Angleterre. Les dures journées de Dunkerque tendent alors les esprits. Le demi-cercle d'auditeurs s'allonge: un vieux voisin à l'aspect minable vient s'appuyer à la porte. Une matrone des environs, avec ses deux filles, s'assied à nos côtés.

Les tragiques nouvelles continuent: vains appels de Weygand à la résistance, succès sans lendemain à Navik, décision de ne pas défendre Paris.

Pour mieux suivre les évènements, nous venons maintenant plusieurs fois par jour écouter la radio en empruntant la clef que les métayers cachent sous un sac devant la porte.

Rien n'arrête le cataclysme: l'armée d'invasion franchit la Seine, déferle sur la Normandie, la Bretagne, la Touraine, d'autres colonnes lancées vers le sud à travers la Champagne contournent la ligne Maginot et foncent sur Châlons sur Marne puis sur Lyon.

La ligne de la Loire tiendra-t-elle? Vains espoirs! Bordeaux, nouvelle capitale de la France subit ses premiers raids aériens. Est-il possible que l'invasion vienne jusqu'à nous?

Appels poignants de Paul Reynaud à l'Amérique. Révélation d'une situation désespérée. Entrée en guerre du chacal fasciste. Charles voit à Langon des colonnes polonaises, en bon ordre, partant vers le sud pour s'embarquer à Bayonne. Pendant cinq jours, sans arrêt, des avions français de tous modèles passent au-dessus de nous vers le sud. C'est sans doute le regroupement des forces en Afrique.

Des aérostiers français en uniformes bleu-foncé cantonnent au village. En allant à la messe un matin, nous traversons leur groupe. Nous entendons l'un des officiers dire à haute voix aux autres: "Eh bien, tant pis! Nous continuerons la guerre avec l'Allemagne contre l'Angleterre!" Plaisanterie? Cynisme ? Nous sommes choqués!

L'effondrement est bientôt total. Paul Reynaud cède la place, suivi par le Président de la République.

La T.S.F. nous transmet la voix du vieux maréchal: "La France demande un armistice entre soldats, DANS L'HONNEUR!" Le second Rethondes! [1]

Un dimanche matin, en rentrant de la messe, nous trouvons devant notre maison, trois jeunes officiers d'artillerie. Ils nous demandent de l'eau pour leurs hommes cantonnés dans les bois voisins. Ils nous racontent visiblement émus, qu'ils combattaient quelques jours au paravent sur la Seine où leurs 75 faisaient du si bon travail en tir direct sur les chars ennemis, lorsque, tout-à-coup, ils reçurent l'ordre de faire sauter leurs pièces et de tout abandonner!... Ils ont emmené leurs hommes, mais n’ont plus rien…

Les clauses de l'armistice sont bientôt révélées: L'occupation de la France se fera le long de l'océan jusqu'à l'Espagne.

Le premier appel lancé par le Général de Gaulle depuis Londres, nous apprend cependant qu'au milieu de cette débâcle, quelques Français se dressent pour continuer la lutte!

[1] Rethondes - A proximité de Compiègne dans l'Oise est le lieu où l'armistice, marquant la fin de la 1ère guerre mondiale, fut signé entre la France et l'Allemagne. C'est au même endroit, dans le "wagon-musée de l'armistice de 14-18", que Pétain signe la capitulation de 1940.

Traduction du "compte-rendu", fait par le Dr. Schmidt, de l'entretien entre le Führer et le Roi Léopold III, le 19 novembre 1940 au Berghof à Berchtesgaden.

Le Führer salua le Roi Léopold et exprima son regret sur les circonstances dans lesquelles avait lieu sa visite au Berghof.

Il lui posa tout d'abord la question de savoir s'il avait un désir pour lui personnellement. Le Roi remercia le Führer pour ses paroles d'accueil et souligna sa satisfaction de cette entrevue personnelle. En même temps il remercia le Führer pour tout ce qu'il ait fait jusqu'à présent pour la Belgique, spécialement parce qu'il avait autorisé le retour à leur patrie des réfugiés belges se trouvant en France. Il exprima aussi sa gratitude pour les nombreuses attentions personnelles qui lui avaient été témoignées personnellement, particulièrement pour le retour de ses enfants d'Espagne. Il n'avait pas de désir personnel à formuler.

Le Führer répliqua que la situation existante était dominée par le fait que l'Allemagne était engagée dans une guerre qui lui avait été imposée contrairement à son propre désir et qu'une partie du territoire d'où la guerre avait été entamée était territoire belge. Il en résultait non seulement l'impossibilité d'établir pour le moment l'état de paix avec la Belgique, mais aussi beaucoup de charges douloureuses pour la population et de nombreuses attaques sur le territoire belge. Sur tout cela, il ne pouvait y avoir de discussion, étant donné que la solution de ces questions ne dépendait pas de l'Allemagne, mais était conditionnée généralement par la question de la fin de la guerre. Néanmoins, le Führer voulait évidemment éviter toutes les charges douloureuses qui seraient évitables sans entraver la conduite de la guerre. Il devait cependant souligner dès le début que la mesure des allégements concevables ne pouvait être que minime.

Ce qui le préoccupait toutefois le plus était le problème des relations futures entre la Belgique et l'Allemagne. Il demanda en conséquence au Roi Léopold s'il avait déjà réfléchi aux relations futures entre la Belgique et le Reich et s'il voulait formuler à ce sujet certains désirs concernant le sort de son pays. Le Roi répliqua qu'il désirait surtout apprendre quelles étaient les intentions de l'Allemagne au sujet de la Belgique et si le Führer garantirait l'indépendance belge lorsque viendrait l'ère de la paix.

Le Führer répliqua que l'Allemagne était décidée à continuer la guerre aussi longtemps que l'influence anglaise ne serait pas éliminée du continent européen. La durée de la guerre et les sacrifices ne changeraient rien à ce but, quelles que soient les circonstances. L'Allemagne est en outre décidée d'entreprendre une réorganisation générale du continent européen. Celle-ci englobera les pays appartenant politiquement et économiquement à la sphère d'intérêt de l'Allemagne. Dans cet espace européen, le Reich érigera un système économique et politique qui permettra une plus grande concentration des forces européennes que par le passé. En outre, l'Allemagne veillera à ce que dans le domaine politique et concernant la sécurité militaire, toute immixtion dans les relations du continent soit rendue à tout jamais impossible aux états non continentaux. Dans le cadre de ces grandes directives générales, l'Allemagne essaiera d'organiser la vie politique et économique et dans ce cadre se dessinera également l'avenir de la Belgique.

A la demande du Roi Léopold de définir avec plus de précision les possibilités de l'indépendance belge en mettant l'accent surtout sur l'indépendance au point de vue de la politique intérieure, le Führer répondit que l'indépendance de la Belgique au point de vue de la politique intérieure serait d'autant plus claire et nette qu'elle s'orienterait vers l'Allemagne au point de vue militaire et au point de vue de la politique internationale.

Il est clair, dit-il, que cette guerre n'aurait pas éclaté si l'Europe occidentale n'avait pas considéré la Belgique et la Hollande comme leur glacis. A raison de leur situation géographique, tout conflit européen est fatal à ces deux pays. Il ne leur est pas possible de se soustraire aux événements.

Les milieux gouvernementaux belges ont toutefois été de mèche avec l'Angleterre et la France, ainsi qu'il résulte des documents découverts. En aucun cas l'Allemagne ne permettra que la Belgique soit utilisée à nouveau comme un tremplin pour une agression contre le Reich ou le continent européen. La lutte préparée pendant des années par les démocraties occidentales a été imposée à l'Allemagne. Dans ces conditions, l'Allemagne doit rendre tous les pays des démocraties occidentales responsables pour ce qui s'est passé, c'est-à-dire que les peuples de ces pays doivent supporter les conséquences de la politique suivie par leurs gouvernements.

A l'objection que la Belgique n'est pas responsable, il répond d'avance que l'on fait en Allemagne une distinction entre la volonté du Roi et les actes du gouvernement belge. Le gouvernement belge n'a pas été réellement neutre. Il a volontiers assumé le rôle que l'Angleterre et la France lui avaient préparé. Il a été disposé à simuler la neutralité, jusqu'au moment où les armées anglo-françaises auraient achevé leur montée en ligne, et à se défendre au moment de l'attaque de ces armées contre l'Allemagne jusqu'au moment où les unités alliées seraient arrivées sur place.

Soulignant à nouveau ses nombreux efforts en faveur de la paix, le Führer déclara que l'ordre nouveau qu'établira l'Allemagne éviterait pour une période de 20 ans le déclenchement d'une nouvelle guerre et qu'il rendrait service de cette manière à l'Europe et particulièrement à de petits états comme la Belgique et la Hollande, en éliminant une fois pour toutes les tensions, menaces ou intrigues.

Le Roi Léopold demanda au Führer s'il pouvait lui garantir que la Belgique serait rétablie dans son indépendance politique. Il comprend que la Belgique devrait en compensation conclure certains accords en matière militaire et de politique internationale.

Les Belges chérissent la liberté par-dessus tout et tiennent particulièrement à choisir eux-mêmes leurs propres chefs. Il (Léopold) avait envisagé cette entrevue avec le Führer en pleine confiance parce qu'il savait apprécier l'oeuvre grandiose que le Führer avait entreprise et parce qu'il connaissait son désir de donner à l'Europe une paix durable sur la base de la justice, de la collaboration et de la solidarité entre les peuples. A un pareil dessein les Belges coopéreront certes. Mais il faut éviter tout ce qui peut les mécontenter. Le Führer personnellement connaît bien les pénibles souvenirs que la Belgique ai conservés de la guerre de 1914-1918. La réaction de la population belge à l'égard de l'invasion allemande en 1940 a été tout autre qu'en 1914. On a eu l'impression en Belgique que le moral de la nouvelle armée était tout autre que celui de l'armée de la guerre mondiale. Depuis le 28 mai un retournement s'est cependant produit dans l'opinion publique. N'étant pas diplomate, il entend nommer les choses en toute franchise de leurs noms véritables. Le retournement de l'opinion a été provoqué tout d'abord par le fait que du côté allemand des doutes avaient été formulés au sujet du maintien de l'indépendance belge. Les Belges ont eu le sentiment très net de cet état d'esprit. D'autre part, certains éléments extrémistes ont été favorisés par l'Allemagne, qui visaient uniquement des buts personnels, mais ne représentaient en aucune manière les Belges. Ils ne jouissaient même pas de la confiance des Flamands. En outre, malgré la situation alimentaire difficile, des vivres avaient été exportés de Belgique. Des contributions de guerre importantes ont dû être payées. Enfin, l'influence des réfugiés belges en France, tous partisans de l'ancien régime, a été très défavorable. La situation qui en résulte l'inquiète beaucoup; si l'on pouvait donner aux Belges une promesse quelconque concernant leur indépendance, l'opinion publique changerait aussitôt. Le désir d'une collaboration avec l'Allemagne sur une base spontanée pourrait alors se manifester. En garantissant l'indépendance, on pourra obtenir cela d'emblée des Belges.

Il souligna en outre que la propagande anglaise dans le pays exploite beaucoup cette incertitude au sujet de l'Indépendance. Il est d'ailleurs naturel que le peuple belge suive plus volontiers celui qui lui promet l'indépendance dans l'éventualité de sa victoire, que celui qui garde le silence sur ce point.

Le Führer répondit qu'il voyait dans les faits suivants la raison essentielle de l'évolution de l'opinion publique belge. Tout d'abord la propagande mensongère faite pendant des années au sujet de l'Allemagne et des soldats allemands, en Belgique comme dans les autres démocraties occidentales. Ces mensonges se sont accrus particulièrement depuis 1933. Le soldat allemand a été représenté comme une brute sauvage, qui détruit tout sans nécessité dans son ivresse sanguinaire. Lorsque les troupes allemandes pénétrèrent en Belgique, elles se conduisirent avec une discipline absolue et les habitants en furent très surpris. Dans la suite on a interprété en Belgique cette réserve comme de la faiblesse et on a témoigné aux,autorités allemandes une certaine insubordination. Les autorités d'occupation n'ordonnent que ce qui est absolument indispensable et lorsque l'on compare leur attitude avec la conduite des autorités d'occupation alliées en Rhénanie, dans la Sarre et dans le Palatinat après la fin de la guerre (tandis que maintenant la guerre perdure) le traitement de la population par les autorités allemandes est infiniment meilleur que celui de la population allemande naguère par les autorités alliées en territoire occupé et par les missions alliées en Allemagne non occupée. En Rhénanie seulement 17.000 cas de viol se sont produits; en Belgique il n'y en eut sans doute pas un seul. En tous cas, l'auteur serait immédiatement fusillé. Certes la guerre s'accompagne d'épreuves, mais l'Allemagne n'a pas voulu cette guerre. Elle l'a faite uniquement pour éliminer à l'avenir toute influence anglaise sur le continent européen. Au lieu de subir la propagande anglaise, les Belges devraient avoir compris que la responsabilité principale de leurs difficultés incombe à l'Angleterre.

Le Roi Léopold répondit qu'évidemment l'opinion publique ne résultait jamais de mûres réflexions. Il reconnaît qu'en Belgique comme dans bien d'autres pays l'opinion publique est souvent sujette aux influences les plus ridicules. Mais c'est un fait que lorsque quelqu'un entend à la radio anglaise l'affirmation que l'indépendance de la Belgique sera assurée après une victoire anglaise, cela a une influence incontestable sur l'intéressé et sur tous ceux qui écoutent en même temps que lui. C'est pourquoi des éclaircissements sur la question de l'indépendance sont d'une extraordinaire importance pour l'attitude de l'opinion publique.

En ce qui concerne la situation alimentaire, le peuple belge est tout-à-fait à même, - il l'a d'ailleurs démontré dans le passé - de supporter des privations, mais il se rebiffe contre l'injustice. Les difficultés proviennent de ce que les rations des Belges sont sensiblement plus petites que celles distribuées en Allemagne et tout le rationnement a un caractère en grande partie fictif, parce que fréquemment les cartes ne sont pas honorées. En outre des vivres et des matières premières sont continuellement exportées; malgré la pénurie régnant dans le pays.

Le Führer répliqua que dans les territoires occupés par l'Allemagne du Cap Nord jusqu'à la frontière espagnole, personne certes ne mourrait de faim. Mais l'organisation d'un système de rationnement est avant tout une question de discipline nationale parmi les acheteurs et les vendeurs. Les sanctions seules sont inefficaces. C'est la discipline générale qui est le facteur décisif. Récemment on s'est trouvé aux prises avec des difficultés semblables concernant l'Espagne, et dans ce pays également l'absence d'une discipline générale s'est révélée comme un obstacle à peu près insurmontable au rationnement. L'exportation de Belgique ne porte que sur des matières premières indispensables à la conduite de la guerre et dont la livraison est également exigée du public allemand. Le Führer signale qu'il avait lui-même livré ses ustensiles de ménage en cuivre et autres métaux nécessaires à la guerre.

De plus, pendant la guerre de mouvement rapide la troupe a dû se ravitailler sur place alors que les routes étaient encore assez détruites et utilisées pour des transports urgents de munitions. Les soldats allemands avaient d'ailleurs acquis un certain droit au ravitaillement dans le pays même en sauvant la majeure partie du bétail belge qui errait sans maître dans la campagne.

Par ailleurs une certaine compensation entre les divers pays doit avoir lieu; ainsi la Hollande a un excédent de matières grasses, tandis que la Belgique est favorisée au point de vue légumes et des végétaux alimentaires.

Le Führer recommença à parler de ses tentatives de paix. Il énuméra ses différentes propositions de paix et souligna que l'Allemagne n'avait formulé aucune revendication à l'égard des puissances occidentales. Lorsque le sous-secrétaire d'Etat américain, M. Sumner Welles l'interrogea au cours de sa visite en Allemagne sur les buts de guerre allemands, il répondit qu'ils consistaient dans le rétablissement de la paix.

Le Roi Léopold en vint à parler, dans le cours ultérieur de l'entretien, d'un projet d'organisation économique. Au point de vue administratif, la situation actuelle n'est pas satisfaisante. L'administration est dirigée par les secrétaires-généraux, qui n'ont cependant pas d'autorité supérieure, mais travaillent l'un à côté de l'autre sur pied d'égalité, d'où résulte un manque d'unité et de direction dans l'ensemble de l'administration, dont l'effet est encore accru par le fait que parmi les secrétaires-généraux ne se trouvent point de spécialistes en matière économique. C'est pourquoi, il (Léopold) propose de créer en Belgique un Conseil économique composé de compétences belges représentant les différentes branches de l'économie du pays, par exemple, l'agriculture, les industries, le travail, le commerce et les banques. Ce Conseil économique serait à même d'agir dans le sens de l'unification en matière économique. Il aurait essentiellement trois attributions:

1) de développer l'économie belge dans le cadre des possibilités;

2) de s'occuper du ravitaillement;

3) de fonctionner comme une sorte de trait d'union entre la Belgique et la puissance occupante. Un semblable conseil économique nommé et choisi par les Belges pourrait avoir une influence très favorable sur l'évolution de la situation générale.

Sur une Interruption du Führer demandant de quelle manière les membres de ce conseil économique seraient choisis, le Roi Léopold répondit que les propositions seraient formulées par les secrétaires-généraux. Le Führer promit l'examen de la question.

Le Roi Léopold souleva ensuite la question des prisonniers de guerre et demanda si leur libération ne pouvait pas être envisagée en rappelant que lors de la visite de sa soeur, la princesse héritière d'Italie, le Führer s'était réservé expressément cette question en vue d'un entretien avec le Roi Léopold.

Le Führer répondit que l'Allemagne avait un besoin urgent de la main-d'oeuvre des prisonniers de guerre. Une grande pénurie de main-d'oeuvre existe en Allemagne contrairement à la Belgique où le chômage commence à devenir un problème sérieux. Les prisonniers de guerre sont indispensables pour rentrer la récolte ancienne et pour la préparation des champs pour l'année suivante. Comme la Belgique dépend aussi de la production de l'agriculture allemande pour son ravitaillement, les prisonniers de guerre travaillent de cette manière indirectement aussi dans l'intérêt de leur pays. Il serait peut-être aussi indésirable au point de vue de la politique intérieure de libérer les prisonniers en une fois. En France, la libération des prisonniers de guerre français créerait de grosses difficultés politiques au gouvernement Pétain. En Belgique leur retour se traduirait pour le moins par un effectif accru de chômeurs avec tous les désavantages qui en résultent. On a cependant envisagé de libérer quelques prisonniers de guerre belges notamment ceux dont on sait qu'ils avaient auparavant pris à l'égard de l'Allemagne une attitude bienveillante. Il s'agit ici avant tout de Flamands.

A la question du Roi Léopold si l'on pouvait faire quelque chose pour les officiers belges prisonniers, le Führer répondit qu'ils devraient rester prisonniers jusqu'à la conclusion de la paix.

Le Roi Léopold exprima ensuite l'idée de constituer en Belgique, pour la garantie de la tranquillité et de l'ordre intérieur, une petite armée de 10 à 15.000 hommes, armés seulement de fusils, afin qu'à ta conclusion de la paix elle puisse être à la disposition du gouvernement belge comme un outil prêt à servir.

Le Führer répliqua qu'on ne pouvait examiner ceci tant que la guerre durerait.

En conclusion, le Roi Léopold résuma à nouveau les trois points formulés par lui c'est-à-dire, la déclaration relative à l'indépendance, le ravitaillement et le retour des prisonniers de guerre. Au sujet du premier point il répéta l'opinion qu'il avait déjà formulée qu'il serait bon que l'on fasse une déclaration quelconque qui tranquilliserait la population belge et qui contrecarrerait ainsi la propagande anglaise. Il signala à ce sujet que les Hollandais avaient reçu de Seyss-Inquart pareille déclaration, et que son absence augmentait naturellement les inquiétudes en Belgique.

Le Führer souligna qu'il s'agissait sans doute d'un malentendu, car, pour autant qu'il sache aucune déclaration semblable n'avait été donnée aux Hollandais. Il ne pouvait que signaler la possibilité que la Belgique occuperait une certaine place dans le cadre d'une coopération économique et politique avec le Reich allemand. Une semblable déclaration ne pouvait cependant pas être donnée au grand public car elle serait incontestablement interprétée comme un signe de faiblesse. Dans la réorganisation de l'Europe, l'Allemagne n'a pas l'intention d'unifier tout ce qui peut être unifié, mais elle veut seulement faire apport de ce qui est nécessaire pour la coopération strictement indispensable dans un système unitaire. En tous cas, il n'est pas question de réglementer tout ce qui est possible.

A la fin le Führer souligna encore combien il avait été heureux de la décision du Roi des Belges de mettre fin à la lutte et d'éviter ainsi l'anéantissement de l'armée belge. Il était aussi bon que le Roi soit resté auprès de son armée dans son pays. Le Roi de Norvège et la Reine des Pays-Bas ne remonteraient certainement plus sur le trône, tandis que lui (le Führer) pouvait garantir au Roi Léopold que l'Allemagne n'entreprendrait rien contre le maintien de la dynastie belge.

A l'issue de l'entretien, le thé fut servi en présence du ministre d'Etat Meissner et de l'ambassadeur Davignon et de la suite du Roi.

Berlin, le 21 novembre 1940.

ORGUES DE BARBARIE
Par ? en 1961

« CHARLES, tiens-toi droit sur ton cheval! »

Le roi Albert a lancé la phrase d'une voix sèche et coupante, assez haute pour qu'on l'entende clairement à la ronde, au beau milieu de la Joyeuse Entrée de la famille royale à Bruxelles, en novembre 1918.

Obéissant, mais renfrogné, humilié peut-être, Charles obtempère et se redresse. Il a l'habitude, depuis un mois ou deux qu'il est rentré d'Angleterre, qu'on le morigène. Il le mérite souvent au demeurant, mais ce n'en est pas plus drôle. Certes, ce n'est pas un mauvais garçon, mais en comparaison avec son frère...

Et voilà l'un des premiers éléments du drame:

- Prends exemple sur Léopold!

Combien de fois a-t-il entendu cela? Suffisamment, sans aucun doute, pour développer un complexe d'une force singulière.

- Charles m'inquiète, confie le roi Albbbbeertt à quelques intimes. J'avoue que je ne le comprends pas...

Chose curieuse, c'est ce père qui ne cesse de le tancer, ce père qui, en effet, ne le comprend pas, ne partage aucune de ses idées, aucun de ses goûts, que Charles préférera. En secret, car ce garçon est taiseux. La profondeur de son affection pour son père, on n'en aura la démonstration éclatante, en fait, qu'un soir de 1934. Charles était sur la côte. On avait oublié à Bruxelles de le prévenir de l'accident mortel de Marche-les-Dames et le prince n'apprend la nouvelle qu'en fin de journée. Aussitôt, il fonce dans sa voiture grand sport vers le château de Laeken - et quand Charles fonce en voiture, cela signifie quelque chose. Arrivé en trombe au Palais, il éclate brusquement. C'est un torrent d'injures - et un torrent de larmes.

- Pourquoi ne m'a-t-on pas prévenu?

Sa Mère, son frère - le Roi -, sa soeur, tentent de le calmer, d'endiguer au moins l'extraordinaire scandale qu'il déclenche dans cette maison où la bienséance exigerait que l'on chuchotât. Il a, pour leur répondre, des paroles qui, d'emblée, engagent l'avenir dans une voie affreusement pénible.

Il lâche même, à un moment donné:

- Moi, je l'aimais!

Parole atroce, injuste assurément, parole sincère cependant...

Les jours passent. Personne ne morigène plus le prince Charles. Il rentre dans sa coquille. Il fait, enfin, ce qu'il veut. C'est-à-dire? Fréquenter le moins possible les milieux officiels, filer à la mer, dans sa petite villa de Raversijde, s'y claquemurer des journées entières avec pour seule compagnie son piano. Plus tard, il achètera des orgues qu'il touche avec un talent réellement remarquable.

On sait aussi qu'il aime, mieux qu'il apprécie la peinture. Mais il n'achète pas de tableaux, ou presque pas...

Il est d'usage, presque de protocole, dans une famille royale, que l'on ne parle guère du cadet, toute l'attention étant, par définition dynastique, centrée sur l'hoir, l'aîné, l'héritier. Voilà qui semble arranger Charles. D'autant que, ce n'est un secret pour personne, en Belgique, des whiskies ne lui font pas peur, ni une jolie fille. Ces fringues, dont chacun parle avec un sourire indulgent - sauf au Palais - seront pourtant toujours l'aboutissement de longues périodes de solitude : de bouderies disent les uns, de spleen, disent les autres.

Qui voit-il? Peu de gens. Et là aussi, il y a un mystère. Ceux qu'il fréquente ne semblent pas le mériter, à quelque égard que ce soit. Exactement comme s'il cherchait, par une sorte d'orgueil bizarre, à rester seul avec lui-même jusque dans l'amitié.

Aussi bien en a-t-il déçu plus d'un - sinon tous. Pendant des semaines, pendant des mois, il ne quitte pratiquement pas tel poète raté, tel officier de marine, tel agent d'assurances et tout se passe comme si le prince avait enfin rencontré l'âme soeur. Puis, sans le moindre motif, et de manière absolument inattendue, c'est la dispute. Pas même: c'est le silence. Du jour au lendemain, Charles leur condamne sa porte, et c'est définitif.

Ce caractère, cette manière de vivre qui recèlent peut-être un immense mépris, mais également une immense pudeur de ses sentiments réels, d'où viennent-ils? Est-ce inné? Est-ce acquis?

Certes, il y eut le perpétuel: «Charles, prends exemple sur ton frère!», mais il n'est pas certain que cela explique tout. En 1914, lorsqu'il avait onze ans, le prince Charles est parti en Angleterre. Il ne devait revoir ses parents qu'en 1918. On l'inscrivit, en février 1915 à Wixenford, l'école préparatoire aux études supérieures anglaises. Wixenford n'est pas une plaisanterie. Pas du tout... Qui nous dira si ce gosse de douze ans, le soir, seul dans son lit, ne pleurait pas - et jusqu'à quel point son «coeur gros» l'a marqué ?

Après Wixenford, c'est le Royal College d'Osborne, puis celui de Dartmouth. On s'y pique d'y traiter les princes, de Belgique ou d'ailleurs, comme n'importe quel futur marin - et même un peu plus sévèrement peut-être. Charles se révèle un élève moyen - moins indiscipliné au demeurant que Léopold qui, «pour manque de respect à l'égard de ses supérieurs» fait connaissance avec des sanctions typiquement anglaises.

1918: Léopold et Charles rentrent en Belgique.

- Charles, tiens-toi droit sur ton chevvvvaal!! Charles, prends exemple sur ton frère!

1921: il s'embarque à bord du navire-école anglais le «Téméraire». Ce n'est pas lui qui l'a demandé: le pauvre souffre terriblement du mal de mer. Il devra bien pourtant, pendant des années, mordre sur sa chique. Après le «Téméraire», ce sera le «Thunderer», puis le «Renown». Trois ans de navigation au terme desquels on le fait entrer au Royal Naval College de Portsmouth, l'école d'application pour le tir d'artillerie de marine et, enfin, au Royal College de Greenwich. En mars 1926, à vingt-trois ans, il est nommé enseigne dans la marine de Sa Gracieuse Majesté britannique.

On le ramène alors en Belgique où il fait, au Régiment des Guides, une carrière fulgurante - une carrière typiquement princière. En l'espace d'une dizaine d'années, il est promu colonel...

Nous sommes en 1939. On parle peu du prince Charles. On croit savoir qu'il ne déteste pas «faire la noce», et le bon peuple trouve cela plutôt sympathique. Pour le reste, on ne sait pas grand-chose de lui.

Les officiers qu'il fréquente, par la force des choses, en parlent parfois avec un sourire vaguement complice. En réalité, aucun ne le connaît, même si quelques-uns sont ses copains. Il y a de «grands souvenirs», des soirées au cercle où la note de champagne fut vraiment royale, des histoires de corps de garde, des virées. Mais aucune confidence, aucune conversation véritable.

- C'est un taiseux. Peut-être parce qu''''iil nn'a rien à dire?

En de rares occasions cependant, une remarque, un silence, un haussement d'épaule dénoncent chez ce garçon un peu braque et apparemment médiocre, l'être de qualité. A l'issue d'une soirée «mouvementée», terriblement éloignée de la moindre élévation d'esprit, le prince s'assied devant ses orgues. Médusés, ses compagnons se demandent si c'est le même homme qui, l'instant d'avant faisait le pitre et qui, maintenant...

Le prince se sent-il pris en flagrant délit? Pris d'une colère subite, inexplicable, il flanque tout le monde dehors, sans le moindre ménagement.

- Curieux garçon!

C'est le moins qu'on puisse dire. Pas d'amis et, par sa faute, pratiquement plus de famille. A l'endroit de sa mère - qui, elle aussi pourtant aime la musique et la peinture (mais pas la même) - il montre la plus grande froideur depuis la mort d'Albert. Lorsqu'il rencontre son frère, ce sont des disputes et il a l'art de faire sortir Marie-José de ses gonds en racontant interminablement des histoires qui feraient rougir un caporal de carrière...

Une sorte de modus vivendi s'installe pourtant: on se voit le moins possible. Nous en sommes là en mai 1940.

En même temps que le roi Léopold prend le commandement des forces armées belges, Charles revêt son uniforme de colonel du premier Régiment des Guides et participe à la campagne des dix-huit jours. Là-dessus, pendant quatre ans, personne n'entend plus parler de lui. On saura, plus tard, qu'il ne quitta pratiquement pas son domicile privé, à Bruxelles et qu'il tentera, dans toute la mesure du possible, de venir en aide à des familles de prisonniers. A la fin de la guerre, des amis le préviennent que la Gestapo songerait à l'arrêter. Il file chez des amis, à Waremme d'abord, à Esneux ensuite. Il contacte des mouvements de Résistance et participe lui-même à quelques missions.

Les armées alliées entrent à Bruxelles. Les Chambres sont réunies - y compris quelques députés ex-rexistes. L'impossibilité de régner du roi Léopold est constatée: il faut élire un Régent. La procédure existe depuis 1831, lorsque M. Surlet de Chokier assuma ces hautes fonctions: on la reprend.

Au premier tour, Charles n'obtient pas la majorité requise de 185 voix. Seuls socialistes, MM. Spaak et Balthazar - tous deux membres du gouvernement - ont voté pour lui. Les frères Van Belle de Liège - tous deux socialistes, ont voté sentimentalement pour Louis de Brouckère. Au second tour, assez de socialistes se joignent aux catholiques et aux libéraux pour que la majorité soit largement atteinte. Une délégation se rend au Palais:

- Je ferai tout pour être digne de conffffiianncce que le pays met en moi, déclare le régent.

Devant les Chambres réunies, avant de prêter serment, il déclare d'une voix ferme :

- Au moment d'assurer cette mission, maaaa peennsée se porte vers le Roi.

Paroles sincères? Dès ce moment, une partie de l'opinion en doute. L'affaire royale couve déjà, et on ne cessera de l'alimenter. Les avis sont cependant unanimes. Le prince Charles assume sa mission avec beaucoup de conscience. Trop peut-être au goût de certains. Il accepte un voyage officiel en France. Aussitôt, ce sont des rugissements. Le Régent usurpe des prérogatives royales! Il s'installe à une place qui, par définition, n'est que provisoire! Charles renonce à son voyage en France. Mais il va aux Etats-Unis, où M. Truman le qualifie à plusieurs reprises de «chef d'Etat» et il entreprend une tournée triomphale au Congo - tournée au cours de laquelle, d'ailleurs, il ne cessera d'être malade, ne supportant pas le climat.

De plus en plus, pourtant, l'opinion belge est partagée entre léopoldistes et antiléopoldistes. Les premiers épient le prince Charles et ne lui passent rien.

On remarque avec indignation que, sur son képi, figure la lettre «A» et non la lettre «L» comme le règlement militaire le prescrit. Qu'est-ce à dire? La lettre «A» qu'il porte signifierait-elle que, pour le Régent, Léopold III n'est plus roi des Belges et qu'il reconnaît seulement comme prédécesseur son père Albert Ier?

On n'ose cependant accuser directement le Régent. On se contente de le mettre en garde contre son entourage qui lui dispenserait de mauvais conseils. On vise ainsi tout particulièrement son secrétaire, M. André De Staercke. Celui-ci ne laisse point, en effet, de jouer un certain jeu en l'occurrence. Curieux homme au demeurant qu'André De Staercke : l'un de ceux qui, à coup sûr, en savent le plus long sur les secrets de la Belgique. Cultivé, très cultivé, célibataire endurci mais goûtant fort les plaisirs de la vie, raffiné, ambitieux, il est probable qu'à travers la Régence, il voit loin: la place de conseiller d'un Roi.

Jusqu'à quel point Charles entre-t-il dans ce jeu? La simple objectivité pousse à dire que rien ne permet d'imaginer que le prince Charles envisageait, ou souhaitait quoi que ce fût. C'est par son ordre que, pendant toute la régence, le drapeau tricolore ne flotta point au milieu du palais royal, mais seulement à une aile. Aucune de ses paroles publiques ne pourrait se retourner contre lui, aucun de ses actes.

Reste pourtant que son antipathie pour son frère Léopold s'accentue. A qui la faute? Il n'est pas facile de le dire. L'entrevue de Berne, en 1949, entre le Régent et le Roi se déroula en tout cas dans une atmosphère extrêmement tendue. Afin de bien lui démontrer qu'il restait le Souverain, Léopold III a fait attendre Charles plus d'une heure - et Charles a mal pris la chose. D'autant plus mal qu'avec un sens dynastique qui passe par-dessus toute sympathie spéciale qu'elle pourrait avoir, malgré les disputes, pour son fils cadet, la reine Elisabeth a pris, d'emblée, parti pour Léopold.

- Régent ou pas Régent, c'est Léopold qqqquui rreste le Roi, et tu dois t'incliner devant lui!

Le prince Charles qui n'avait sans doute aucune ambition dynastique s'irrite de cet ukase. Il trouve - et il peut revendiquer sa popularité - qu'il accomplit bien sa tâche et qu'il mérite un «merci» plutôt que des remontrances.

Son «fichu» caractère joue à nouveau son rôle. A plusieurs reprises, ses paroles dépassent sans doute sa pensée. Rapidement et inéluctablement, le fossé se creuse entre lui et son frère, entre lui et sa mère.

Lorsque Léopold III rentrera en Belgique, les choses en seront arrivées au pire. Ici se situent quelques incidents que le Palais ne pardonnera jamais à Charles. Il enlève toute l'écurie de voitures grand sport et, surtout, il emmène la collection de porcelaines et de laques chinoises léguées à la dynastie par l'ambassadeur Cartier de Marchienne. Collection unique au monde, d'une valeur inestimable...

De ce moment, c'est fini: Charles ne verra plus jamais ni sa mère, ni son frère, ni sa soeur. Il réagit en leur jouant tous les tours possibles. Il fait imprimer, et il distribue des cartes de visite au nom de Charles-Théodore de Saxe-Cobourg-Gotha; il revendique le nom de «Réthy». Bref, il fait tant et si bien qu'on prononce encore moins son nom au Palais qu'on ne parle de corde dans la maison d'un pendu.

Le bon peuple de Belgique, cependant, continue de trouver qu'il a bien fait son travail de Régent et qu'au demeurant c'est une figure sympathique. On s'attriste de son éloignement et M. Van Acker, Premier ministre, traduisit bien le sentiment général de la Nation en déclarant lors du quatre-vingtième anniversaire de la reine Elisabeth qu'il «déplorait l'absence du prince Charles».

C'est la dernière fois qu'on prononça son nom publiquement.

Aujourd'hui, que devient-il? Que fait-il?

Rien. Il vit en Belgique, partie du temps dans une île, située au milieu d'un étang, du côté de Kasterlee, partie du temps à Bruxelles dans son appartement de l'avenue Louise, partie enfin dans la propriété qu'il hérita à Réthy (et dont Léopold a vendu sa part).

On a dit qu'il s'était marié: c'est faux.

On lui a prêté diverses aventures. : on ne prête qu'aux riches.

A quoi passe-t-il ses journées? A jouer de l'orgue - de mieux en mieux. A gérer sa fortune, qui est considérable - en homme d'affaires avisé. A voyager parfois. A se soigner enfin, car on sait sa santé fort ébranlée.

Il reste, enfin, le prince secret, mystérieux, impénétrable qu'on vient d'essayer de décrire. Celui dont on peut dire, facilement, beaucoup de mal - celui aussi, qui, à diverses reprises, et comme fugitivement, a su prouver qu'il y avait en lui quelque chose qui le haussait très au-dessus de la moyenne.

Une vie qui, pour toujours sans doute, gardera son secret...

DISCOURS D’ABDICATION
Prononcé par le Roi Léopold III, le 16 juillet 1951.

Mesdames, Messieurs,

Le 31 juillet 1950, afin de ramener la concorde dans le Pays, j'ai accepté que l'exercice des pouvoirs royaux fût confié à mon fils; ma volonté était de renoncer définitivement au Trône si le ralliement de tous les Belges se réalisait autour du prince Baudouin.

Je considère que ce ralliement est acquis.

C'est pourquoi, j'ai pris la décision d'abdiquer en ce jour.

Je m'y suis résolu avec l'unique souci de sauvegarder l'unité du Pays et de servir l'institution monarchique que le Congrès national, en 1831, a mise à la base de notre Constitution.

Je vous ai réunis parce que l'intérêt national comme la stabilité de la Dynastie exigent que ma décision de mettre fin à mon règne s'accompagne d’une manifestation solennelle de concorde.

Je ne parlerai pas du passé.

Mais mon devoir de Souverain m'impose, en ce dernier moment de mon règne, de rendre un vibrant hommage aux vertus militaires et civiques dont le peuple belge a fait preuve au cours des heures dramatiques et cruelles qu'il a traversées.

Justice ne lui a pas toujours été rendue.

J'affirme qu'en 1940, l'armée a vaillamment combattu jusqu'à l'extrême limite de la résistance et que la population, sous l'occupation ennemie, a témoigné dignement de ses vertus traditionnelles d'endurance, de courage et de patriotisme.

Je salue la mémoire de ceux qui ont fait au Pays le sacrifice de leur vie.

Mon cher Baudouin, c'est avec fierté que je te transmets la noble et lourde mission de porter désormais la Couronne d'une Belgique demeurée, malgré la plus terrible des guerres et les bouleversements qui l'ont suivie, territorialement et moralement intacte, libre, et fidèle à ses traditions.

Cette mission, tu l'exerceras avec la volonté de servir ton Pays et de continuer l'œuvre de la Dynastie, en te conformant ainsi aux principes que je t'ai inculqués. Ces principes, je les ai, reçus moi-même de mon Père, le roi Albert; ils ont toujours inspiré mon attitude au cours des dures années d'un règne que je laisse à l'Histoire le soin de juger.

La sympathie et la confiance avec lesquelles la population, tout entière t'a accueilli, me permettent de déposer définitivement les pouvoirs royaux sans appréhension pour l'avenir et avec la conscience du devoir accompli.

Mesdames, Messieurs,

Je suis convaincu que vous soutiendrez mon fils avec abnégation et loyauté dans l'accomplissement de sa tâche constitutionnelle.

N'oublions jamais qu'elle comporte le maintien de l'indépendance nationale et de l'intégrité territoriale de la Belgique et du Congo belge.

Mes chers compatriotes,

Au moment où je dépose ma charge, mes pensées ne peuvent se détacher des années que j'ai vécues au milieu de vous.

Le souvenir me restera toujours présent de l'émotion qui m'a étreint lorsque, l'an dernier, après une si longue séparation, j’ai remis le pied sur le sol de ma Patrie.

Comme vous, j'aime mon pays.

J'ai partagé vos joies comme j'ai partagé vos peines, en me tournant avec une particulière sollicitude vers les plus humbles d'entre vous.

A tous ceux qui, si nombreux, n'ont cessé de me rester fidèlement attachés, j'exprime toute ma gratitude. Je conserverai précieusement dans mon cœur le souvenir de leur affection.

Les dernières paroles que je prononce comme Roi des Belges sont pour vous rappeler avec force, mes chers compatriotes, que l'avenir de la Patrie dépend de votre solidarité nationale, et pour vous demander de vous grouper avec ferveur autour de mon fils, le roi Baudouin.

Je vous en conjure, soyez unis.

Que Dieu protège la Belgique et notre Congo!

Welcome EURO! It is a big success and a fantastic opportunity for the European people. It is our future, out of the mud of centuries of wars.

L'ESPRIT DE TOLÉRANCE
Par Paul-Henri SPAAK
en 1956 en hommage à S. M. la Reine Elisabeth
à l'occasion de son jubilé (1876-1956)

Le christianisme est notre patrimoine et, tous, nous avons le droit de le revendiquer comme un héritage. Cette divine figure du Christ qui n'a point cessé d'agir n'appartient à aucun impérialisme religieux. Les temps sont révolus où l'on se faisait les plus fratricides des guerres au nom d'un Dieu de paix et d'amour. Il nous reste le plus grand des messages qui a donné à tout un monde une physionomie et une structure. Au-delà des divergences de la foi, croyants et incroyants peuvent se partager le legs d'une communauté de convictions intellectuelles, morales et sociales. Un climat de pensée né de la Grèce, merveilleusement épanoui à la chaleur des principes chrétiens, nous a donné une civilisation à laquelle nous ne pourrions pas renoncer sans renoncer à vivre. Au centre, nous y voyons une conception de la personne humaine, libre, responsable, douée d'une éminente dignité, ayant le droit à la justice individuelle et sociale, vivant dans une société dont le but est le bien commun. A cette civilisation, le socialisme est venu apporter une contribution fondamentale en la ramenant à ses principes. Ce fut un immense cri de souffrance qui rappela à un monde oublieux, qu'il devait être chrétien. Je crois sincèrement que l'Europe, non comme territoire, mais comme civilisation, ne peut être sauvée que par une union de bonne foi entre le christianisme et le socialisme. Si notre but terrestre est vraiment le même, organiser le bonheur humain dans une justice sociale toujours plus grande, nous devons parvenir à nous mettre d'accord sur les moyens et il faut mettre fin à une division meurtrière. Il doit être possible de dépasser des oppositions historiques qui risquent de se scléroser dans un cléricalisme ou un anticléricalisme vieillis.

La croyance ou l'incroyance ne devraient plus faire l'objet d'un monopole politique. L'esprit souffle où il veut. Il est peut-être temps pour les hommes de bonne volonté de comprendre qu'il souffle dans cette direction-là. Si, de part et d'autre, nous parvenons non seulement à le comprendre mais à opérer cette synthèse que postule une communauté de principes, il y a encore pour la civilisation de l'Europe un grand avenir d'épanouissement. C'est un noble but et ce serait une belle étape vers la fraternité humaine. De toutes parts, d'ailleurs, on sent cet effort pour unir ceux qui pensent de même, bien qu'ils croient différemment.

Mais rien de cela n'est possible sans une disposition de l'âme qui en est comme la condition préalable. Je veux parler de l'esprit de tolérance. C'est, certes, une des plus belles, une des plus difficiles conquêtes de l'humanité, une des plus dures à conserver, une de celles qui sont le plus constamment remises en question. La tolérance n'a rien à voir avec le scepticisme ni avec l'éclectisme. La tolérance ne fait renoncer à aucune conviction, elle ne renie pas l'espérance de convaincre, elle ne fait pas pactiser avec le mal, mais elle accepte que d'autres pensent et croient autrement que moi sans que je les aime ou que je les estime moins. La tolérance est l'absence d'un sens de supériorité à cause des doctrines ou des idées que je professe, elle est la mesure du respect que j'ai pour l'homme, la pierre de touche de la valeur que j'attache au principe de la dignité humaine. Elle est une suprême vertu de l'individu civilisé, le legs sacré pour lequel il y eut et il y aura toujours des martyrs. Elle est la fermeté de Socrate devant ses juges et son respect devant les lois. Elle réclame autant qu'elle accorde et elle est aussi déterminée pour se défendre que pour protéger. On n'en fera jamais assez l'éloge. C'est elle qui écarte la violence et la contrainte des moyens de persuader. C'est elle qui peut rendre l'homme maître de lui comme de l'univers. Elle oppose à l'inquiète certitude de tous les fanatismes, la douceur conquérante des convictions fortes. Oui, c'est à cette douceur qu'appartient le monde. « Bienheureux les doux, car ils posséderont la terre.» La tolérance est la voie royale de la fraternité. C'est elle, bien comprise dans sa difficulté, qu'il faut pratiquer et encourager. C'est elle enfin qui peut nous conduire à une entente salutaire.

Kids, if you wonder what totalitarism could mean for families, here is a description by George Orwell in his book "1984" published in 1949:

1984
By George Orwell

[...] With those children, he thought, that wretched woman must lead a life of terror. Another year, two years, and they would be watching her night and day for symptoms of unorthodoxy. Nearly all children nowadays were horrible. What was worst of all was that by means of such organizations as the Spies they were systematically turned into ungovernable little savages, and yet this produced in them no tendency whatever to rebel against the discipline of the Party. On the contrary, they adored the Party and everything connected with it. The songs, the processions, the banners, the hiking, the drilling with dummy rifles, the yelling of slogans, the worship of Big Brother -- it was all a sort of glorious game to them. All their ferocity was turned outwards, against the enemies of the State, against foreigners, traitors, saboteurs, thought-criminals. It was almost normal for people over thirty to be frightened of their own children. And with good reason, for hardly a week passed in which The Times did not carry a paragraph describing how some eavesdropping little sneak -- 'child hero' was the phrase generally used -- had overheard some compromising remark and denounced its parents to the Thought Police. [...]

Tax on family is high in Belgium. Of course, government gives some money back through family allowances and relatively inexpensive education. But the net percentage left to the working people is really low to raise their family with the kind of freedom that can be expected in a democratic country.

AU TRIBUNAL de première instance séant à Bruxelles.

Ont l’honneur de vous exposer :

1. Monsieur Paul LE CLERCQ (*), Avocat près de la Cour d’Appel, domicilié à Bruxelles 5, rue Forestière n° 39

2. Monsieur Guy LE CLERCQ, ingénieur technicien, domicilié à Bruxelles 5, Square du Val de la Cambre n° 24, agissant tant en nom personnel qu’en sa qualité de père et administrateur légal de ses enfants mineurs :
Agnès LE CLERCQ, née à Uccle le 15 octobre 1959
Thierry LE CLERCQ, né à Uccle le 2 novembre 1960
Ivan LE CLERCQ, né à Uccle le 28 octobre 1963

3. Monsieur Pierre LE CLERCQ, ingénieur civil, domicilié à Chavannes des Bois, Canton de Vaud, Suisse, agissant tant en nom personnel qu’en sa qualité de père et administrateur légal de ses enfants mineurs :
Cécile LE CLERCQ, née à Uccle le 27 juin 1960
Pierre Paul LE CLERCQ, né à Uccle le 21 décembre 1961
Gaétan LE CLERCQ, né à Uccle le 21 juillet 1963

4. Monsieur Roger LE CLERCQ, Avocat à la Cour d’Appel, domicilié 187, Avenue de la Forêt de Soignes à Rhode-Saint-Genèse, agissant tant en nom personnel qu’en sa qualité de père et administrateur légal de ses enfants mineurs :
Patrick LE CLERCQ, né à Uccle le 3 avril 1957
Sabine LE CLERCQ, née à Uccle le 1er mars 1958
Juan LE CLERCQ, né à Uccle le 27 mars 1960
Christine LE CLERCQ, née à Uccle le 23 mai 1964

5. Monsieur Christian LE CLERCQ, employé, domicilié 82, avenue des Aubépines, à Uccle, agissant tant en nom personnel et qu’en sa qualité de père et administrateur légal de ses enfants mineurs :
Fabienne LE CLERCQ, née à Uccle le 1er juillet 1961
Isabelle LE CLERCQ, née à Uccle le 23 janvier 1963

6. Monsieur Baudouin LE CLERCQ, Avocat près de la Cour d’Appel, domicilié 210, avenue Armand Huymans à Bruxelles 5, agissant tant en nom personnel et qu’en sa qualité de père et administrateur légal de ses enfants mineurs :
Hervé LE CLERCQ, né à Uccle le 11 juin 1962
Diane LE CLERCQ, née à Uccle le 26 juin 1963
Véronique LE CLERCQ, née à Uccle le 21 août 1964,

poursuites et diligences de l’avoué soussigné.

Que les actes de l’état civil les concernant dressés par les Officiers de l’Etat Civil des communes de Limal, de Limelette, de Torhout, d’Ixelles et d’Uccle contiennent une erreur quant à leur nom patronymique ; qu’ils portent LE CLERCQ en un mot (LECLERCQ) alors que de tout temps ce nom s’est écrit en deux mots, soit LE CLERCQ.

Que cette dernière orthographe du nom est en tout cas antérieure à la loi du 6 fructidor de l’an II, ce qui correspond au 25 août 1794 comme l’atteste le passeport de la sœur de leur ancêtre, Louise LE CLERCQ, de nationalité française, daté du 16 ventôse de l’an II, soit le 7 mars 1794.

Que l’orthographe du nom en deux mots s’est maintenue depuis lors comme le prouvent des annonces de mariage familial en date du 12 septembre 1857 et une généalogie éditée par Desclée, de Bouwer et Cie en 1888.

Que bien plus l’orthographe exacte du nom est demeurée inchangée dans la branche cadette de la famille comme l’atteste l’extrait de l’acte de naissance de Monsieur François LE CLERCQ, établis par la ville de Bruxelles le 17 octobre 1868.

Que de même l’acte de décès de Monsieur Idesbalde, Victor, Joseph LE CLERCQ, grand-père et arrière-grand-père des exposants, établis par la ville de Bruxelles, le 29 octobre 1900 porte la même orthographe du nom patronymique.

Qu’il s’avère donc qu’une erreur d’orthographe s’est produite exclusivement dans les actes de l’état civil concernant les descendants de feu Alphonse LE CLERCQ, fils d’Idesbalde LE CLERCQ.

Que les exposants requièrent dès lors la rectification de leur nom dans les actes qui les concernent.

POUR CES CAUSES :

Les exposants vous prient, Messieurs, de bien vouloir ordonner la rectification de leur nom patronymique dans les actes d’état civil ci-après mentionnés, de manière à ce que ce nom figure à nouveau dans sa forme originale soit LE CLERCQ (en deux mots).

Les dits actes étant :

En ce qui concerne le premier exposant Paul LE CLERCQ :

Acte de naissance dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune de Limal le 26 juillet 1905

Acte de mariage avec Léonie COUPEZ dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune de Limelette le 2 août 1927

En ce qui concerne le second exposant Guy LE CLERCQ :

Acte de naissance dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, étant né le 15 décembre 1928

Acte de mariage avec Claire DIERXSENS dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, le 19 novembre 1958

Acte de naissance de sa fille Agnès, née le 15 octobre 1959, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de son fils Thierry, né le 2 novembre 1960, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de son fils Ivan, né le 28 octobre 1963, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

En ce qui concerne le troisième exposant Pierre LE CLERCQ :

Acte de naissance dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, étant né le 3 mai 1930

Acte de mariage avec Monique LARDINOIS dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, le 29 août 1959

Acte de naissance de sa fille Cécile, née le 27 juin 1960, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de son fils Pierre Paul, né le 21 décembre 1961, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de son fils Gaétan, né le 21 juillet 1963, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

En ce qui concerne le quatrième exposant Roger LE CLERCQ :

Acte de naissance dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, étant né le 29 juin 1931

Acte de mariage avec Janine de POTTER d’INDOYE, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la ville de Torhout, le 25 août 1956

Acte de naissance de son fils Patrick, né le 3 avril 1957, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de sa fille Sabine, née le 1er mars 1958, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de son fils Juan, né le 27 mars 1960, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de sa fille Christine, née le 23 mai 1964, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

En ce qui concerne le cinquième exposant Christian LE CLERCQ :

Acte de naissance dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, étant né le 24 mars 1933

Acte de mariage avec Françoise OVYN, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, le 9 avril 1960

Acte de naissance de sa fille Fabienne, née le 1er juillet 1961, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de sa fille Isabelle, née le 23 janvier 1963, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

En ce qui concerne le sixième exposant Baudouin LE CLERCQ :

Acte de naissance dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, étant né le 20 janvier 1935

Acte de mariage avec Francine de WANDELEER, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Ixelles, le 31 août 1960

Acte de naissance de son fils Hervé, né le 11 juin 1962, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de sa fille Diane, née le 26 juin 1963, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle

Acte de naissance de sa fille Véronique, née le 21 août 1964, dressé par l’Officier de l’Etat Civil de la commune d’Uccle.

Dire que sur production de l’expédition du jugement à venir ou d’une copie certifiée conforme de celui-ci, Monsieur l’Officier de l’Etat Civil sera tenu de procéder à la rectification et d’en faire mention en marge des actes à rectifier du jugement à intervenir.

Faire défense à tous officiers d’état civil ou tous dépositaires des registres ou de leurs tables de délivrer copie ou expédition des dits actes sans faire mention de la rectification, sous peine de tels dommages-intérêts que de droit.

Il y a lieu.
Bruxelles, le 11 janvier 1965.
(s) Le Procureur du Roi.

LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE SEANT A BRUXELLES.

Vu la requête annexée ci-avant et l’avis de Monsieur le procureur du Roi près de ce Tribunal ;

Vu les articles 4 et 9 de la loi du 15 juin 1935, 99 et suivants du Code Civil, 855 et suivants du Code de Procédure civile, la loi du 21 mai 1951 et 37ter de la loi du 25 mars 1876 ;

Attendu que la demande est justifiée ;

Dit que les actes d’état civil ci-après seront rectifiés en ce sens que le nom patronymique y orthographié LECLERCQ le sera dorénavant comme étant «LE CLERCQ» :

1) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Paul Alfred Marie Louis, dressé par l’officier de l’état civil de la commune de Limal, enfant y né le 26 juillet 1905 ;

2) l’acte de mariage dressé par l’officier de l’état civil de la commune de Limelette le 2 août 1927, mariage contracté avec COUPEZ, Léonie Marie Marguerite Henriette ;

3) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Guy Alphonse Marie Ghislain, né à Ixelles le 15 décembre 1928 (acte n° 1366) ;

4) l’acte de mariage dressé par l’Officier de l’état civil de la commune d’Ixelles le 19 novembre 1958, mariage contracté avec DIERCXSENS, Claire Elisabeth Edit Marie (acte n° 620) ;

5) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Agnès Claire Colette Marie Ghislaine, né à Uccle le 15 octobre 1959 (acte n° 2586) ;

6) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Thierry Pierre Marie Ghislain, né à Uccle le 2 novembre 1960 (acte n° 2744) ;

7) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Ivan Guy Marie Ghislain, né à Uccle le 28 octobre 1963 (acte n° 2783) ;

8) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Pierre Alphonse Léon Marie Ghislain, né à Ixelles le 3 mai 1930 (acte n° 535) ;

9) l’acte de mariage dressé par l’officier de l’état civil de la commune d’Uccle le 29 août 1959, mariage contracté avec LARDINOIS Monique Marie Louise Andrée Ghislaine (acte n° 278) ;

10) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Cécile Léonie Simone Marie Ghislaine, né à Uccle le 27 juin 1960 (acte n° 1589) ;

11) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Pierre Paul Lucien Guy Marie Ghislain, né à Uccle le 20 décembre 1961 (acte n° 3031) ;

12) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Gaétan Didier Jean Marie Ghislain, né à Uccle le 21 juillet 1963 (acte n° 1849) ;

13) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Roger Paul Charles Marie Ghislain, né à Ixelles le 29 juin 1931 (acte n° 740) ;

14) l’acte de mariage dressé par l’Officier de l’état civil de la ville de Torhout le 25 août 1955, mariage contracté avec de Potter d’Indoye, Jeanine Pauline Henriette Marie Josephe (acte n° 63) ;

15) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Patrick Paul Claire Marie Ghislain, né à Uccle le 3 avril 1957 (acte n° 699) ;

16) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Sabine Pauline Léonie Aymar Marie Ghislaine, née à Uccle le 1er mars 1958 (acte n° 471) ;

17) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Juan Baudouin Anne Marie Ghislain, né à Uccle le 27 mars 1960 (acte n° 770) ;

18) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Christine Henriette Françoise Marie Ghislaine, né à Uccle le 23 mai 1964 (acte dressé le 25 mai 1964) ;

19) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Christian Henri Marie Ghislain, né à Ixelles le 24 mars 1933 (acte n° 305) ;

20) l’acte de mariage dressé par l’Officier de l’état civil de la commune d’Ixelles le 9 avril 1960, mariage contracté avec OVYN, Françoise Marguerite Alice Jeanne Charlotte (acte n°129) ;

21) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Fabienne Jeanne Marie Ghislaine, né à Uccle le 1er juillet 1961 (acte n° 1577) ;

22) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Isabelle Léonie Marie Ghislaine, né à Uccle le 23 janvier 1963 (acte n° 190) ;

23) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Baudouin Henri Marie Ghislain, né à Ixelles le 20 janvier 1935 (acte n° 84) ;

24) l’acte de mariage dressé par l’Officier de l’état civil de la commune d’Ixelles le 31 août 1930, mariage contracté avec De Wandeleer, Francine Maire Henriette Alphonsine (acte n° 449) ;

25) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Hervé Paul Marie Ghislain, né à Uccle le 11 juin 1962 (acte n° 1468) ;

26) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Diane Catherine Christine Marie Ghislaine, né à Uccle le 26 juin 1963 (acte n° 1636) ;

27) l’acte de naissance de l’enfant aux prénoms de Véronique Marceline Monique Marie Ghislain, né à Uccle le 21 août 1964 (acte n° 2154) ;

Ordonne que le dispositif du présent jugement sera transcrit dans les registres aux actes de l’état civil pour l’année courante des communes d’Uccle, d’Ixelles, de Limal, de Limelette et de la ville de Torhout, chacune pour ce qui la concerne, aussitôt que l’expédition ou un extrait en aura été transmis ou signifié à Messieurs les Officiers de l’état civil compétents et que mention en sera faite dans chacun des doubles des dits registres, en marge des actes rectifiés ainsi qu’aux tables ;

Fait défense aux dépositaires des registres de l’état civil, sous peine de dommages et intérêts, de délivrer désormais expédition, extrait ou copie des dits actes sans qu’il soit fait mention de la rectification intervenue ;

Dépens liquidés à 290,- francs.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique de la 9ème chambre du Tribunal de première Instance séant à Bruxelles le 22 janvier 1965, où étaient présents et siégeaient Messieurs :

Manillon, Juge unique, Janssens de Bisthoven, Substitut du Procureur du Roi et Lorrain, D., Greffier.

(*) Paul LE CLERCQ (1905-1971), my grand-father on my father side and godfather, was a lawyer. He lost one leg due to bad bone cancer treatment but still carried on pleading the cause of his clients in the huge Palais de Justice of Brussels. I learnt swimming with him and remember him playing tennis with an artificial leg.

Le vandalisme nazi s'est attaqué au Palais de Justice de Bruxelles. Avant de quitter la capitale, souhaitant détruire documents et archives, l'occupant les fit empiler dans l'immense salle des Pas Perdus et y bouta le feu. Bientôt, les flammes envahirent tout l'édifice, elles gagnèrent la coupole, elles la dépassèrent de plusieurs mètres. Le feu fut pourtant assez tôt maîtrisé et la population, en faisant la chaîne, aida au sauvetage d'un grand nombre de dossiers.

In Erasmus of Rotterdam time (1466-1536), traveling was very time consuming. If you are stuck in an airport due to bad weather conditions or in a train strike or in a huge traffic jam or simply at home on a rainy day, think of Erasmus and try to write your Praise of Folly and send it to your best friend as Erasmus did to his best friend Thomas More. Kids take your time to become adult, Erasmus wrote: "I do not like a child that is a man too soon.". He wrote as well many many other things in Latin later translated in other languages. The text of his Praise of Folly (in Latin: Moriae Encomium, in French: Éloge de la Folie) is available on the Internet. Try to find it and imagine the superb old book with engravings. Guess what Erasmus would have said about Internet. He was probably the greatest intellectual traveller of his time. He was tolerant when intolerance was prime time broadcasted because of his knowledge and understanding of many different cultures.

Erasmus of Rotterdam
to his friend
Thomas More, health:

As I was coming awhile since out of Italy for England, that I might not waste all that time I was to sit on horseback in foolish and illiterate fables, I chose rather one while to revolve with myself something of our common studies, and other while to enjoy the remembrance of my friends, of whom I left here some no less learned than pleasant. Among these you, my More, came first in my mind, whose memory, though absent yourself, gives me such delight in my absence, as when present with you I ever found in your company; than which, let me perish if in all my life I ever met with anything more delectable. And therefore, being satisfied that something was to be done, and that that time was no wise proper for any serious matter, I resolved to make some sport with the praise of folly. But who the devil put that in your head? you'll say. The first thing was your surname of More, which comes so near the word Moriae (folly) as you are far from the thing. And that you are so, all the world will cleat you. In the next place, I conceived this exercise of wit would not be least approved by you; inasmuch as you are wont to be delighted with such kind of mirth, that is to say, neither unlearned, if I am not mistaken, not altogether insipid, and in the whole course of your life have played the part of a Democtitus. And though such is the excellence of your judgment that it was even contrary to that of the people's, yet such is your incredible ability and sweetness of temper that you both can and delight to carry yourself to all men a man of all hours. Wherefore you will not only with good will accept this small declamation, but take upon you the defense of it, for as much as being dedicated to you, it is now no longer mine but yours. But perhaps there will not be wanting some wranglers that may cavil and charge me, partly that these toys are lighter than may become a divine, and partly more biting than may beseem the modesty of a Christian, and consequently exclaim that I resemble the ancient comedy, or another Lucian, and snarl at everything. But I would have them whom the lightness or foolery of the argument may offend to consider that mine is not the first of this kind, but the same thing that has been often practiced even by great authors: when Homer, so many ages since, did the like with the battle of frogs and mice; Virgil, with the gnat and puddings; Ovid, with the nut; when Polycrates and his corrector Isocrates extolled tyranny; Glauco, injustice; Favorinus, deformity and the quartan ague; Synescius, baldness; Lucian, the fly and flattery; when Seneca made such sport with Claudius' canonizations; Plutarch, with his dialogue between Ulysses and Gryllus; Lucian and Apuleius, with the ass; and some other, I know not who, with the hog that made his last will and testament, of which also even St. Jerome makes mention. And therefore if they please, let them suppose I played at tables for my diversion, or if they had rather have it so, that I rode on a hobbyhorse. For what injustice is it that when we allow every course of life its recreation, that study only should have none? Especially when such toys are not without their serious matter, and foolery is so handled that the reader that is not altogether thick-skulled may reap more benefit from it than from some men's crabbish and specious arguments. As when one, with long study and great pains, patches many pieces together on the praise of rhetoric or philosophy; another makes a panegyric to a prince; another encourages him to a war against the Turks; another tells you what will become of the world after himself is dead; and another finds out some new device for the better ordering of goat's wool: for as nothing is more trifling than to treat of serious matters triflingly, so nothing carries a better grace than so to discourse of trifles as a man may seem to have intended them least. For my own part, let other men judge of what I have written; though yet, unless an overweening opinion of myself may have made me blind in my own cause, I have praised folly, but not altogether foolishly. And now to say somewhat to that other cavil, of biting. This liberty was ever permitted to all men's wits, to make their smart, witty reflections on the common errors of mankind, and that too without offense, as long as this liberty does not run into licentiousness; which makes me the more admire the tender ears of the men of this age, that can away with solemn titles. No, you'll meet with some so preposterously religious that they will Sooner endure the broadest scoffs even against Christ himself than hear the Pope or a prince be touched in the least, especially if it be anything that concerns their profit; whereas he that so taxes the lives of men, without naming anyone in particular, whither, I pray, may he be said to bite, or rather to teach and admonish? Or otherwise, I beseech you, under how many notions do I tax myself? Besides, he that spares no sort of men cannot be said to be angry with anyone in particular, but the vices of all. And therefore, if there shall happen to be anyone that shall say he is hit, he will but discover either his guilt or fear. Saint Jerome sported in this kind with more freedom and greater sharpness, not sparing sometimes men's very name. But I, besides that I have wholly avoided it, I have so moderated my style that the understanding reader will easily perceive my endeavors herein were rather to make mirth than bite. Nor have I, after the example of Juvenal, raked up that forgotten sink of filth and ribaldry, but laid before you things rather ridiculous than dishonest. And now, if there be anyone that is yet dissatisfied, let him at least remember that it is no dishonor to be discommended by Folly; and having brought her in speaking, it was but fit that I kept up the character of the person. But why do I run over these things to you, a person so excellent an advocate that no man better defends his client, though the cause many times be none of the best? Farewell, my best disputant More, and stoutly defend your Moriae.
From the country,
the 5th of the Ides of June.

Erasmus' reputation began to improve in the late 17th century, when the last of Europe's religious wars was fading into memory and scholars like Richard Simon and Jean Le Clercq (the editor of Erasmus' works) were once again taking a more critical approach to biblical texts. Erasmus last words were in Dutch: "Lieve God" ("dear God"). [Source: Encyclopedia Britannica]

Friendship sometimes means not doing things your best friend asked. For example before dying, Franz Kafka asked his friend Max Brod to burn everything he had written, even published material. Fortunately Brod did not comply with his friend's wish.

Letter from Karl Marx to Frederick Engels
"16 August 1867 2 a.m.
"Dear Fred,
"Have just finished correcting the last sheet (49th) of the book. [Das Kapital. Kritik der politischen Oekonomie.] ... So, this volume is finished. I owe it to you alone that it was possible! Without your self-sacrifice for me I could not possibly have managed the immense labour demanded by the 3 volumes. I embrace you, full of thanks! ...
"Salut, my dear, valued friend.

"K. Marx."

We would like to finish this paragraph with a sentence in Flemish: "Een vriend is iemand die alles van je weet en toch van je houdt." A friend is somebody who knows everything of you and still likes you.

TOLERANCE
Par Voltaire au XVIIIe siècle.

ÉLOGE HISTORIQUE DE LA RAISON
Prononcé dans une académie de province
Par M…

Messieurs,

Érasme fit au XVIe siècle, l’éloge de la Folie. Vous m’ordonnez de vous faire l’éloge de la Raison. Cette raison n’est fêtée en effet tout au plus que deux cents ans après son ennemie, souvent beaucoup plus tard ; et il y a des nations chez lesquelles on ne l’a point encore vue.

Elle était si inconnue chez nous du temps de nos druides qu’elle n’avait pas même de nom dans notre langue. César ne l’apporta ni en Suisse, ni à Autun, ni à Paris, qui n’était alors qu’un hameau de pêcheurs, et lui-même ne la connut guère.

Il avait tant de grandes qualités que la Raison ne put trouver de place dans la foule. Ce magnanime insensé sortit de notre pays dévasté pour aller dévaster le sien, et pour se faire donner vingt-trois coups de poignard par vingt-trois autres illustres enragés qui ne le valaient pas à beaucoup près.

Le Sicambre Clodvich ou Clovis vint environ cinq cents années après exterminer une partie de notre nation, et subjuguer l’autre. On l’entendit parler de raison ni dans son armée ni dans nos malheureux petits villages, si ce n’est de la raison du plus fort.

Nous croupîmes longtemps dans cette horrible et avilissante barbarie. Les croisades ne nous en tirèrent pas. Ce fut à la fois la folie la plus universelle, la plus atroce, la plus ridicule et la plus malheureuse. L’abominable folie de la guerre civile et sacrée qui extermina tant de gens de la langue d’oc et de la langue d’œil succéda à ces croisades lointaines. La Raison n’avait garde de se trouver là. Alors la Politique régnait à Rome ; elle avait pour ministres ses deux sœurs, la Fourberie et l’Avarice. On voyait l’Ignorance, le Fanatisme, la Fureur, courir sous ses ordres dans l’Europe ; la Pauvreté les suivait partout ; la Raison se cachait dans un puits avec la Vérité sa fille. Personne ne savait où était ce puits ; et, si on s’en était douté, on y serait descendu pour égorger la fille et la mère.

Après que les Turcs eurent pris Constantinople et redoublé les malheurs épouvantables de l’Europe, deux ou trois Grecs, en s’enfuyant, tombèrent dans ce puits, ou plutôt dans cette caverne, demi-morts de fatigue, de faim et de peur.

La Raison les reçut avec humanité, leur donna à manger sans distinction des viandes (chose qu’ils n’avaient jamais connue à Constantinople). Ils reçurent d’elle quelques instructions en petit nombre : car la Raison n’est pas prolixe. Elle leur fit jurer qu’ils ne découvriraient pas le lieu de sa retraite. Ils partirent, et arrivèrent, après bien des courses, à la cour de Charles-Quint et de François premier.

On les reçut comme des jongleurs qui venaient faire des tours de souplesse pour amuser l’oisiveté des courtisans et des dames dans les intervalles de leurs rendez-vous. Les ministres daignèrent les regarder dans les moments de relâche qu’ils pouvaient donner aux torrents des affaires. Ils furent même accueillis par l’empereur et par le roi de France, qui jetèrent sur eux un coup d’œil en passant, lorsqu’ils allaient chez une de leurs maîtresses. Mais ils firent plus de fruit dans de petites villes où ils trouvèrent de bons bourgeois, qui avaient encore, je ne sais comment, quelque lueur de sens commun.

Ces faibles lueurs s’éteignirent dans toute l’Europe parmi les guerres civiles qui la désolèrent. Deux ou trois étincelles de raison ne pouvaient pas éclairer le monde au milieu des torches ardentes et des bûchers que le fanatisme alluma pendant tant d’années. La Raison et sa fille se cachèrent plus que jamais.

Les disciples de leurs premiers apôtres se turent, excepté quelques-uns qui furent assez inconsidérés pour prêcher la raison déraisonnablement et à contre-temps : il leur en coûta la vie comme à Socrate ; mais personne ni fit attention. Rien n’est plus désagréable que d’être pendu obscurément. On fut occupé si longtemps des Saint-Barthélémy, des massacres d’Irlande, des échafauds de Hongrie, des assassinats de rois, qu’on n’avait ni assez de temps ni assez de liberté d’esprit pour penser aux menus crimes et aux calamités secrètes qui inondaient le monde d’un bout à l’autre.

La raison, informée de ce qui se passait par quelques exilés qui se réfugièrent dans sa retraite, fut touchée de pitié quoiqu’elle ne passe pas pour être fort tendre. Sa fille, qui est plus hardie qu’elle, l’encouragea à voir le monde, et à tâcher de la guérir. Elles parurent, elles parlèrent ; mais elles trouvèrent tant de méchants intéressés à les contredire, tant d’imbéciles aux gages de ces méchants, tant d’indifférents uniquement occupés d’eux-mêmes et du moment présent, qui ne s’embarrassaient ni d’elles ni de leurs ennemis, qu’elles regagnèrent sagement leur asile.

Cependant quelques semences des fruits qu’elles portent toujours avec elles, et qu’elles avaient répandues, germèrent sur la terre, et même sans pourrir.

Enfin il y a quelques temps qu’il leur prit envie d’aller à Rome en pèlerinage, déguisés et cachant leur nom, de peur de l’Inquisition. Dès qu’elles furent arrivées, elles s’adressèrent au cuisinier du pape Ganganelli, Clément XIV. Elles savaient que s’était le cuisinier de Rome le moins occupé. On peut dire même qu’il était, après vos confesseurs, messieurs, l’homme le plus désœuvré de sa profession.

Ce bonhomme, après avoir donné aux deux pèlerines un dîner presque aussi frugal que celui du pape, les introduisit chez Sa Sainteté, qu’elles trouvèrent lisant les Pensées de Marc-Aurèle. Le pape reconnut les masques, les embrassa cordialement, malgré l’étiquette. «Mesdames, leur dit-il, si j’avais imaginé que vous fussiez sur la terre, je vous aurais fait la première visite.»

Après les compliments, on parla d’affaires. Dès le lendemain, Ganganelli abolit la bulle In coena Domini, l’un des plus grands monuments de la folie humaine, qui avait si longtemps outragé tous les potentats. Le surlendemain, il prit la résolution de détruire la compagnie de Garasse, de Guignard, de Garnet, de Busembaum, de Malagrida, de Paulian, de Patouillet, de Nonotte ; et l’Europe battit des mains. Le surlendemain, il diminua les impôts, dont le peuple se plaignait. Il encouragea l’agriculture et tous les arts ; il se fit aimer de tous ceux qui passaient pour les ennemis de sa place. On eût dit alors dans Rome qu’il n’y avait qu’une nation et qu’une loi dans le monde.

Les deux pèlerines, très étonnées et très satisfaites, prirent congé du pape, qui leur fit présent non d’agnus et de reliques, mais d’une bonne chaise de poste pour continuer leur voyage. La Raison et la Vérité n’avaient pas été jusque-là dans l’habitude d’avoir leurs aises.

Elles visitèrent toute l’Italie, et furent surprises d’y trouver, au lieu du machiavélisme, une émulation entre les princes et les républiques, depuis Parme jusqu’à Turin, à qui rendrait ses sujets plus gens de bien, plus riches et plus heureux.

«Ma fille, disait la Raison à la Vérité, voici, je crois, notre règne qui pourrait bien commencer à advenir après notre longue prison. Il faut que quelques-uns des prophètes qui sont venus nous visiter dans notre puits aient été bien puissants en paroles et en œuvres, pour changer ainsi la face de la terre. Vous voyez que tout vient tard ; il fallait passer par les ténèbres de l’ignorance et du mensonge avant de rentrer dans votre palais de lumières, dont vous avez été chassée avec moi durant des siècles. Il nous arrivera ce qui est arrivé à la Nature : elle a été couverte d’un méchant voile, et toute défigurée pendant des siècles innombrables. A la fin il est venu un Galilée, un Copernic, un Newton, qui l’ont montrée presque nue, et qui en ont rendu les hommes amoureux.»

En conversant ainsi, elles arrivèrent à Venise. Ce qu’elles y considérèrent avec plus d’attention, ce fut un procurateur de St. Marc, qui tenait une grande paire de ciseaux devant une table toute couverte de griffes, de becs, et de plumes noires. «Ah ! s’écria la Raison, Dieu me pardonne, lustrissimo signor, je crois que voilà une de mes paires de ciseaux que j’avais apportés dans mon puits, lorsque je me réfugiai avec ma fille ! Comment Votre Excellence les a-t-elle eus, et qu’en faites-vous ? – Lustrissima signora, lui répondit le procurateur, il se peut que les ciseaux aient appartenu autrefois à Votre Excellence ; mais ce fut un nommé Fra-Paolo qui nous les apporta il y a longtemps, et nous en servons pur couper les griffes de l’Inquisition, que vous voyez étalées sur cette table.

«Ces plumes noires appartenaient à des harpies qui venaient manger le dîner de la république ; nous leur rognons tous les jours les ongles et le bout du bec. Sans cette précaution elles auraient fini par tout avaler : il ne serait rien resté pour les sages grands, ni pour les pregadi, ni pour les citadins.

«Si vous passez par la France, vous trouverez peut-être à Paris votre autre paire de ciseaux chez le ministre espagnol qui s’en servait au même usage que nous dans son pays, et qui sera un jour béni du genre humain.»

Les voyageuses, après avoir assisté à l’opéra vénitien, partirent pour l’Allemagne. Elles virent avec satisfaction ce pays, qui du temps de Charlemagne n’était qu’une forêt entrecoupée de marais, maintenant couverte de villes florissantes et tranquilles ; ce pays, peuplé de souverains autrefois barbares et pauvres, devenus tout polis et magnifiques ; ce pays, qui n’avait eu dans les temps antiques que des sorcières pour prêtres, immolant alors des hommes sur des pierres grossièrement creusées ; ce pays, qui ensuite avait été inondé de son sang pour savoir au juste si la chose était in, cum, sub, ou non ; ce pays, qui enfin recevait dans son sein trois religions ennemies, étonnées de vivre paisiblement ensemble. «Dieu soit béni ! dit la Raison ; ces gens-ci sont venus enfin à moi, à force de démence.»

On les introduisit chez une impératrice qui était bien plus que raisonnable, car elle était bienfaisante. Les pèlerines furent si contentes d’elle qu’elles ne prirent pas garde à quelques usages qui les choquèrent ; mais elles furent toutes deux amoureuses de l’empereur son fils.

Leur étonnement redoubla quand elles furent en Suède. «Quoi ! disaient-elles, une révolution si difficile, et cependant si prompte ! si périlleuses, et pourtant si paisible ! et depuis ce grand jour pas un seul jour perdu sans faire du bien, et tout cela dans l’âge qui est rarement celui de la raison ! Que nous avons bien fait de sortir de notre cache quand ce grand événement saisissait d’admiration l’Europe entière !»

De la elles passèrent vite par la Pologne. «Ah ! ma mère quelle contraste ! s’écria la Vérité. Il me prend envie de regagner mon puits. Voilà ce que c’est que d’avoir écrasé toujours la portion du genre humain la plus utile, et d’avoir traité les cultivateurs plus mal qu’ils ne traitent leurs animaux de labourage. Ce chaos de l’anarchie ne pouvait se débrouiller autrement que par une ruine : on l’avait assez clairement prédite. Je plains un monarque vertueux, sage et humain ; et j’ose espérer qu’il sera heureux, puisque les autres rois commencent à l’être, et que vos lumières se communiquent de proche en proche.

«Allons voir, continua-t-elle, un changement plus favorable et plus surprenant. Allons dans cette immense région hyperborée qui était si barbare il y a quatre-vingts ans, et qui est aujourd’hui si éclairée et si invincible. Allons contempler celle qui a achevé le miracle d’une création nouvelle…» Elles y coururent, et avouèrent qu’on ne leur avait pas assez dit.

Elles ne cessaient d’admirer combien le monde était changé depuis quelques années. Elles en concluaient que peut-être le Chili et les Terres Australes seraient le centre de la politesse et du bon goût, et qu’il faudrait aller au pôle antarctique pour apprendre à vivre.

Quand elles furent en Angleterre, la Vérité dit à sa mère : «Il me semble que le bonheur de cette nation n’est point fait comme celui des autres ; elle a été plus folle, plus fanatique, plus cruelle, et plus malheureuse qu’aucune de celles que je connais ; et la voilà qui s’est fait un gouvernement unique, dans lequel on a conservé tout ce que la monarchie a d’utile, et tout ce qu’une république à de nécessaire. Elle est supérieure dans la guerre, dans les lois, dans les arts, dans le commerce. Je la vois seulement embarrassée de l’Amérique septentrionale, qu’elle a conquise à un bout de l’univers, et des plus belles provinces de l’Inde, subjuguées à l’autre bout. Comment portera-t-elle ces deux fardeaux de sa félicité ? –Le poids est lourd, dit la Raison ; mais, pour peu qu’elle m’écoute, elle trouvera des leviers qui le rendront léger.»

Enfin la Raison et la Vérité passèrent par la France : elles y avaient déjà fait quelques apparitions, et en avaient été chassées. «Vous souvient-il, disait la Vérité à sa mère, de l’extrême envie que nous eûmes de nous établir chez les Français dans les beaux jours de Louis XIV ? Mais les querelles impertinentes des jésuites et des jansénistes nous firent enfuir bientôt. Les plaintes continuelles des peuples ne nous rappelèrent pas. J’entends à présent les acclamations de vingt millions d’hommes qui bénissent le ciel. Les uns disent : «Cet événement est d’autant plus joyeux que nous n’en payons pas la joie.» Les autres crient : «Le luxe n’est que vanité. Les doubles emplois, les dépenses superflues, les profits excessifs, vont être retranchés» ; et ils ont raison. «Tout impôt nouveau va être aboli» ; et ils ont tort, car il faut que chaque particulier paye pour le bonheur général.

«Les lois vont être uniformes.» Rien n’est plus à désirer ; mais rien n’est plus difficile. «On va répartir aux indigents qui travaillent, et surtout aux pauvres officiers, les bien immenses de certains oisifs qui ont fait vœu de pauvreté. Ces gens de main-morte n’auront plus eux-mêmes des esclaves de main-morte. On ne verra plus des huissiers de moines chasser de la maison paternelle des orphelins réduits à la mendicité, pour enrichir de leurs dépouilles un couvent jouissant de droits seigneuriaux, qui sont les droits des anciens conquérants. On ne verra plus des familles entières demandant vainement l’aumône à la porte de ce couvent qui les dépouille. «Plût à Dieu ! rien n’est plus digne d’un roi. Le roi de Sardaigne a détruit chez lui cet abus abominable. Fasse le ciel que cet abus soit exterminé en France !

«N’entendez-vous pas, ma mère, toutes ces voix qui disent : «Les mariages de cent mille familles utiles à l’Etat ne seront plus réputés concubinages ; et les enfants ne seront plus réputés bâtards par la loi» ? La nature, la justice, et vous, ma mère, tout demande sur ce grand objet un règlement sage qui soit compatible avec le repos de l’Etat et avec les droits de tous les hommes.

«On rendra la profession de soldat si honorable que l’on ne sera pas tenté de déserter.» La chose est possible, mais délicate.

«Les petites fautes ne seront point punies comme de grands crimes, parce qu’il faut de la proportion à tout. Une loi barbare, obscurément énoncée, mal interprétée, ne fera plus périr sous les barres de fer et dans les flammes des enfants indiscrets et imprudents, comme s’ils avaient assassiné leurs pères et leurs mères.» Ce devrait être le premier axiome de la justice criminelle.

«Les biens d’un père de famille ne seront plus confisqués, parce que les enfants ne doivent point mourir de faim pour les fautes de leur père, et que le roi n’a nul besoin de cette misérable confiscation.» A merveille ! et cela est digne de la magnanimité du souverain.

«La torture, inventée autrefois par les voleurs de grands chemins pour forcer les volés à découvrir leurs trésors, et employée aujourd’hui chez un petit nombre de nations pour sauver le coupable robuste, et pour perdre l’innocent faible de corps et d’esprit, ne sera plus en usage que dans les crimes de lèse-société au premier chef, et seulement pour avoir révélation des complices. Mais ces crimes ne se commettront jamais.» On ne peut mieux. Voilà les vœux que j’entends faire partout ; et j’écrirai tous ces grands changements dans mes annales, moi qui suis la Vérité.

«J’entends encore proférer autour de moi, dans tous les tribunaux, ces paroles remarquables : «Nous ne citerons plus jamais les deux puissances, parce qu’il ne peut en exister qu’une : celle du roi ou de la loi dans une monarchie ; celle de la nation dans une république. La puissance divine est d’une nature si différente et si supérieure qu’elle ne doit pas être compromise par un mélange profane avec les lois humaines. L’infini ne peut se joindre au fini. Grégoire VII fut le premier qui osa appeler l’infini à son secours dans ses guerres jusqu’à lors inouïe contre Henri IV, empereur trop fini ; j’entends trop borné. Ces guerres ont ensanglanté l’Europe bien longtemps ; mais enfin on a séparé ces deux êtres vénérables qui n’ont rien en commun, et c’est le seul moyen d’être en paix.»

Ces discours, que tiennent tous les ministres des lois, me paraissent bien forts. Je sais qu’on ne reconnaît deux puissances ni à la Chine, ni dans l’Inde, ni en Perse, ni à Constantinople, ni à Moscou, ni à Londres, etc… Mais je m’en rapporte à vous, ma mère. Je n’écrirai rien que ce que vous m’aurez dicté.»

La Raison lui répondit : «Ma fille, vous sentez bien que que je désire à peu près les mêmes choses et bien d’autres. Tout cela demande du temps et de la réflexion. J’ai toujours été contente, quand dans mes chagrins, j’ai obtenu une partie des soulagements que je voulais. Je suis aujourd’hui trop heureuse.

«Vous souvenez-vous du temps ou presque tous les rois de la terre, étant dans une profonde paix, s’amusaient à jouer aux énigmes ; et où la belle reine de Saba venait proposer des logogriphes à Salomon ? –Oui, ma mère, ; c’était un bon temps, mais il n’a pas duré. –Eh bien ! reprit la mère, celui-ci est infiniment meilleur. On ne songeait alors qu’à montrer un peu d’esprit ; et je vois que depuis dix à douze ans on s’est appliqué en Europe, aux arts et aux vertus nécessaires, qui adoucissent l’amertume de la vie. Il semble en général qu’on se soit donné le mot pour penser plus solidement qu’on n’avait fait pendant des milliers de siècles. Vous, qui n’avez jamais pu mentir, dites-moi quel temps vous auriez choisi ou préféré au temps où nous sommes pour vous habituer en France.

-J’ai la réputation, répondit la fille, d’aimer à dire des choses assez dures aux gens chez qui je me trouve, et vous savez bien que j’y ai toujours été forcé ; mais j’avoue que je n’aie que du bien à dire de temps présent, en dépit de tant d’auteurs qui ne louent que le passé.

«Je dois instruire la postérité que c’est dans cet âge que les hommes ont appris à se garantir d’une maladie affreuse et mortelle, en se la donnant moins funeste, à rendre la vie à ceux qui la perdent dans les eaux, à gouverner et braver le tonnerre ; à suppléer au point fixe qu’on désire en vain d’occident en orient. On a fait plus en morale : on a osé demander justice aux lois contre des lois qui avaient condamné la vertu au supplice ; et cette justice a été quelquefois obtenue. Enfin on a osé prononcer le mot de tolérance.

-Eh bien ! ma chère fille, jouissons de ces beaux jours ; restons ici, s’ils durent ; et, si les orages surviennent, retournons dans nos puits.»

Kids, on the 18th of May 2003 at around 10:15 AM, my dear wife and I went to vote for the Belgian federal election to designate the new members of the Chamber and Senate of the Kingdom of Belgium.

Sint-Genesius-Rode/Rhode-Saint-Genèse is quite an interesting place because both communities of Belgium coexist there in a peaceful manner. The queue to the bureau de vote 96 was quite long but people old, young, women, men, little children going accompanying their parents even mothers with babies in couffin were calmly waiting discussing gently in Flemish and in French while the queue slowly progressed. People looked happy coming out after voting with smiles saying hello to friends still waiting in the queue. Our turn came, we gave our convocation and identity card to a kind woman being there as “assesseur”. Two "assesseurs" double checked our names on two different voting lists then we received each two “bulletins de vote” one for the Chamber another for the Senate. Then each of us went to a separate “isoloir” where a little curtain was hiding us from the rest of the world. There alone face to face with the names on the two “bulletins de vote” armed with the red pencil attached to a little chain, I exercised this democratic right and select the person(s) I estimate (is)are the best to represent me when it will be asked from them to vote for new laws. So in no hurry but without unnecessary delay (others have still to vote) I voted. Kids, the vote is secret and this secret should be respected. Asking friends if they have voted is the good question, asking friends for whom they voted is the wrong question. I went out of the “isoloir” and put the biggest “bulletin de vote” in the “urne” for “Chambre” – I do not remember the color of the bulletin I am colorblind – and the small one in the “urne” for “Senat”. In a good entente Flemish and French speaking “assesseurs” were doing a good job there. They should mention it in their curriculum vitae and employers should consider it as a positive point. A woman “assesseur” asked me “Monsieur Le Clercq?”, I replied “Oui.” And she gently gave me back my identity card and the “convocation” with the stamp on it “Halle 18 V 2003”. “V” for May, of course, Roman digits. The vote was completed. I went out of the bureau waiting outside for my wife. She took a bit longer to vote, but finally came out. I was happy seeing her smiling. We went back home and told our children that we had voted. At the next elections, our son will be 18 and will vote. Our daughters will follow at later elections. With time we will be six to vote!

Now, Ladies and Gentlemen politicians – majority and opposition - with respect for your role and responsibilities, as father and mother of four children, we ask you to make the best use of this little piece of power we detained just before voting for our children sake and future. You have challenges facing you in Belgium, in Europe and around the world. We are thinking of a few: peace, family, unity, friendship,… We are not a big country but if you read this page carefully you understand why Belgium has a word to say. But this word must be said with the highest intellectual honesty and with a deep sense of responsibility.

Sincerely

A Belgian Family
BlackYellowRed

AVANT-PROPOS DU RÉSUMÉ DE L’HISTOIRE DE FRANCE JUSQU’AU RÈGNE DE LOUIS XVI
Par F. Bodin
Publié à Bruxelles en 1845 par la Société Typographique Belge Adolphe Wahlen et Compagnie.

Autrefois, on écrivait l’histoire à l’usage du dauphin ; aujourd’hui, c’est à l’usage du peuple qu’il faut l’écrire, et les fils des rois s’instruiront à leur tour dans les livres faits pour le peuple.

L’histoire de notre pays est celle qu’il nous importe le plus de connaître. C’est l’histoire de France qu’on doit, avant tout, enseigner aux Français, afin qu’ils sachent quelles fautes leurs ancêtres ont commises et qu’ils puissent les éviter s’il est possible. Ils apprendront ce qu’il faut penser des quatorze siècles de bonheur et de prospérité qu’on vante parfois ; ils connaîtront les bienfaiteurs de la patrie et ceux qui ont causé ses malheurs ; ils compareront l’ancien régime avec leur situation actuelle, et ils jugeront. Enfin, après avoir vu ce qu’ont produit l’ambition des forts, la crédulité et le fanatisme des faibles, quelles affreuses calamités entraînent les divisions intestines ou les interventions étrangères, quels crimes ont été la suite du déchaînement des passions ou du combat des opinions ; ils se convaincront qu’il n’y a pas de salut pour les peuples hors de l’obéissance à des lois justes, c’est-à-dire faites pour tous.

L’histoire de France, écrite tant de fois et de tant de manières, semble avoir été exploitée en monopole par les généalogistes. La plupart de nos historiens, si l’on peut leur donner ce nom, ont plutôt songé à flatter les rois qu’à éclairer la nation. Une véritable histoire du peuple français restait à faire : on l’a fait. Mais on désire un autre ouvrage, peut-être plus utile puisqu’il serait destiné à plus de lecteurs. C’est un sommaire de tout les événements importants de cette histoire, enchaînés rapidement et présentés sous leur véritable aspect ; rédigés avec brièveté et sans sécheresse ; appuyé sur les autorités les plus irrécusables ; écrit sans partialité ; exempt de toute autre passion que celle de la vérité et du bien public ; ne ménageant ni le pouvoir ni les factions, mais sincères pour les rois et pour le peuple. Un pareil livre conviendrait beaucoup, par sa concision, à la classe nombreuse de ceux qui lisent peu ; il serait pas moins utile à ceux qui lisent et savent beaucoup, car il présenterait dans cet espace resserré, la substance d’ouvrage volumineux, et il aiderait la mémoire sans fatiguer l’esprit. Il instruirait la jeunesse et serait consulté par l’âge mûr ; il donnerait aux classes laborieuses le moyen de satisfaire promptement leur besoin d’instruction, et deviendrait bientôt l’un des manuels du citoyen. L’auteur de cette petite Histoire de France s’est dit : Voilà ce que j’ai voulu faire ; il voudrait pouvoir dire : Voilà ce que j’ai fait.

On sent bien qu’un si court espace ne laisse place à aucune discussion. L’historien est forcé de prendre sans cesse le ton affirmatif ; il est quelquefois tranchant, parce qu’il doit être bref. Mais il aimerait mieux être trivial que de n’être pas clair. Cependant, il s’est abstenu également d’employer le langage populaire et de prendre le ton oratoire. Il sait que le peuple comprend bien aujourd’hui le style de la classe éclairée ; il croit que l’histoire, qui est la vérité unie à la raison, n’a pas besoin de déclamer. Il ne pourra qu’indiquer les progrès de la civilisation, ainsi les variations successives qu’ont éprouvées les mœurs et les lois. Sa tâche serait moins difficile s’il n’entreprenait que d’abréger l’Histoire des rois de France, en commençant par l’inévitable Pharamond. Mais il voudrait pouvoir suivre les migrations et les fusions des différents peuples barbares ou civilisés qui se sont établis dans les Gaules, et dont la postérité, unie à celle des Gaulois, forme le grand peuple auquel l’usage a donné le nom de Français. Il voudrait pouvoir décrire les rapports qui ont existé pendant longtemps entre les conquérants et les indigènes, jusqu’à l’époque où ces deux races furent entièrement confondues ; et, sans omettre aucun des faits principaux de l’histoire privée des princes, surtout lorsque ces faits ont influé sur le sort des sujets, il voudrait aussi retracer ceux qui appartiennent particulièrement à l’histoire du peuple. Malheureusement, il sent beaucoup plus les difficultés de ce plan que la possibilité de le remplir.

AVANT-PROPOS DE L’HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE
Par A. Thiers
Publié à Bruxelles en 1845 par la Société Typographique Belge Adolphe Wahlen et Compagnie.

Je me propose d’écrire l’histoire d’une révolution mémorable, qui a profondément agité les hommes et qui les divise encore aujourd’hui. Je ne me dissimule pas les difficultés de l’entreprise, car des passions que l’on croyait étouffées sous l’influence du despotisme militaire viennent de se réveiller. Tout à coup, les hommes accablés d’ans et de travaux ont senti renaître en eux des ressentiments qui paraissent apaisés, et nous les ont communiqués, à nous, leurs fils et leurs héritiers. Mais si nous avons à soutenir la même cause, nous n’avons pas à défendre leur conduite, et nous pouvons séparer la liberté de ceux qui l’ont bien ou mal servie ; tandis que nous avons l’avantage d’avoir entendu et observé ces vieillards, qui, tout pleins encore de leurs souvenirs, tout agités de leurs impressions, nous révèlent l’esprit et le caractère des partis et nous apprennent à les comprendre. Peut-être le moment où les acteurs vont expirer est-il le plus propre à écrire l’histoire : on peut recueillir leur témoignage sans partager toutes leurs passions.

Quoi qu’il en soit, j’ai tâché d’apaiser en moi tout sentiment de haine ; je me suis tour à tour figuré que, né sous le chaume, animé de juste ambition, je voulais acquérir ce que l’orgueil des hautes classes m’avait injustement refusé ; ou bien qu’élevé dans les palais, héritier d’antiques privilèges, il m’était douloureux de renoncer à une possession que je prenais pour propriété légitime. Dès lors je n’ai pu m’irriter ; j’ai plaint les combattants, et je me suis dédommagé en adorant les âmes généreuses.

TORRE DEL FILOSOFO
Par Haroun Tazieff

Je n’ai pris ma première colère – mais effrayante – qu’à dix-huit ans et ne me suis découvert, stupéfait et désolé, un premier ennemi personnel qu’à trente-cinq. C’est dire que congénitalement, j’avais une bonne nature. J’ai dû m’ingénier à la gâter, puisque mes colères sont désormais innombrables et que j’éprouve à l’éclosion de chaque nouvel ennemi une joie ambiguë dans laquelle le plaisir quelque peu pervers du mépris qu’il m’inspire et de la vengeance future qu’aussitôt je savoure s’allie aux exaltations de la lutte et du donquichottisme (car est-il besoin de préciser puisque cela va de soi : ces ennemis sont vaniteux ou malhonnêtes et par conséquent méprisables).

Je suis français, après avoir été russe, polonais, apatride, belge… Je suis en effet né à Varsovie lorsque cette ville faisait partie encore, en 1914, de l’empire des tsars. Guerres et révolutions nous ont poussés, ma mère venue avec moi dans les bras, du nord vers le sud et de l’est vers l’ouest de l’Europe, de même que tant d’autres alors et depuis.

De sept à dix-sept ans, j’ai fermement cru que je serais marin et explorateur polaire. Je suis devenu terrien et ma vie professionnelle s’est déroulée presque toute entière entre les tropiques. Lorsque le capitaine du splendide quatre-mâts, barque qu’était le navire-école sur lequel je venais d’embarquer, m’eut fait comprendre que le métier de marin ne ressemblait décidément plus à ce qu’il avait été du temps de Coste et de Lapérouse, il me fallut d’un seul coup balayer bien des châteaux, ceux de poupe et ceux en Espagne, que je bâtissais depuis dix ans. Et apprendre un métier ! Je finis par choisir l’Agro, le biais des Eaux et Forêts me permettant de glisser du romantisme du Grand Nord marin de Franklin et d’Amundsen à celui du Grand Nord continental de Jack London et de James Oliver Curwood. Cela montre combien un jeune homme, quoique élevé intelligemment par des gens cultivés, peut se montrer infantile dans ses déterminations les plus importantes.

Les hasards de la clandestinité durant la deuxième guerre mondiale et le caractère essentiellement nocturne de mes occupations de partisan, spécialisé dans le sabotage des voies de communication, me permirent – la journée se trouvant disponible et la guerre se prolongeant – d’entamer et de terminer de nouvelles études d’ingénieur des mines tour d’abord, de géologue ensuite : mes songes de mers et d’océans, qui s’étaient dissipés au contact chaleureux des terres labourées, achevaient de s’anéantir ici dans l’apparente solidité de l’écorce terrestre.

Les débuts capricieux de ma carrière – assistant d’ethnologie à l’Agro, puis de minéralogie à la fac et enfin de géologie minière, ingénieur dans des mines d’étain au Katanga, géologue fonctionnaire au Kivu, à nouveau universitaire – plutôt que d’un quelconque dilettantisme relevaient de mes rêveries d’enfant : exercer un métier digne de passion… Il est possible que la désinvolture avec laquelle je quittais pour une oui ou pour un non places, postes ou situations dits «d’avenir» ressortissait aussi de ma propension, slave sans doute mais développée au contact de ce poète parfait qu’est mon second père, à la contemplation des nuages et à la paresse béate.

J’avais trente-quatre ans d’âge mais beaucoup moins en maturité lorsque l’éruption du Kituro me fit découvrir la fascination, tout ensemble esthétique, sportive et scientifique, que le volcanisme peut exercer sur un individu de mon espèce. La volcanologie était alors en léthargie profonde et les facultés qu’avaient développées en moi la pratique de l’escalade et celle de la boxe de combat me servirent beaucoup pour affronter les obstacles qui me furent dès lors opposés tant par les cratères que par l’indifférence, voire l’hostilité, que soulevait alors toute tentative d’étudier les volcans actifs avec quelque dynamisme et un minimum de méthode. Cette lutte dura une longue vingtaine d’années, jusqu’au jour où le C.N.R.S. m’offrit les moyens de relancer cette discipline en ressemblant sur le terrain et en laboratoire des équipes suffisamment divers, suffisamment experts, suffisamment outillés, suffisamment enthousiastes, suffisamment désintéressés, suffisamment solides et suffisamment intelligents pour tenter d’analyser et de comprendre l’un des phénomènes les plus essentiels de notre planète.

Au contraire de Monsieur Jadis de mon cher Antoine Blondin, je serais plutôt un Monsieur Après-Demain, pour lequel le présent existe à peine et s’oublie aussitôt passé, un Monsieur Futur qui vit dans ce qu’il fabriquera plus tard, qui échafaude des projets, imagine des avenirs, bref, se raconte des histoires. Lorsque j’étais gosse, cela me valait des réprimandes, des colles et d’autres inconvénients. A présent, cela me permet de monter des «manipes» passionnantes et d’avoir l’impression de faire quelque chose. Cette impression est grisante et pour un peu je me laisserais éblouir par les miroitements de ce que l’on appelle la célébrité, voire, tel un «mandarin» de faculté, je me prendrais au sérieux. Et ce faisant, j’oublierais combien tout cela, de même que tout le reste, est un jeu aussi fugace, et parfois aussi plaisant, pour ceux qui ont de la chance dans la distribution des cartes, qu’une partie de rugby, mais jeu qui simplement dure quelques années au lieu de quelques minutes. Me prenant au sérieux, j’oublierais que toute notre merveilleuse et écœurante humanité, qui après tout n’existe que depuis le dernier et minuscule quart de millième de l’âge de la Terre, aura disparu avec toute ses œuvre «immortelles», ses injustices, ses splendeurs et abominations, dans un laps de temps qui sera aussi bref sans doute que celui de son passé. Mais la vanité ne figure guère parmi mes défauts, ce qui me permet de bien connaître et tellement apprécier ce qu’il y a de meilleur au monde : l’irremplaçable et multiple bonheur que donne la camaraderie, l’amitié et l’amour.

En 1362, une humble école pour les enfants du quartier se rattache à un monastère bénédictin dont le souvenir est gardé actuellement par l'église dotée d'un beffroi génois et accompagné d'un portique à colonnes. 1607: le roi Henry IV y envoie les Jésuites français pour développer l'Ecole. Ces derniers agissent sous la protection de l'Ambassadeur de France, Jean Gontran de Biron, baron de Salignac, qui est enterré dans l'église de Saint Benoît. 1783:par arrêt du roi Louis XVI, les Jésuites sont remplacés par les Lazaristes qui ouvrent de suite le Collège Saint-Benoît, le lycée actuel. A la même époque, grâce à Monsieur Guizot, Ministre des Affaires Etrangères, ils vont établir une imprimerie polyglotte qui fonctionnera jusqu'en 1866. 1880, après l'achat d'une partie des remparts et des fossés de Galata, on reconstruit les bâtiments en les mettant au nom de l'Ambassade de France qui en est donc le propriétaire officiel. C'est le Lycée Français Saint-Benoît d'aujourd'hui qui essaie de poursuivre activement sa mission éducative scolaire et culturelle au service de la France et pour le bien de la Turquie, avec l'aide des Lazaristes, ses fondateurs, et sous la direction d'un laïc, Mr Michel Goupil.

Les finalités de l'association des élèves du Lycée Français Saint-Benoît d'Istanbul

"Etre élève dans un lycée francophone ce n'est pas seulement apprendre certaine valeurs de cette culture, c'est aussi les vivre au quotidien, tout en restant profondément attachés à celles de notre culture maternelle. Le monde, à l'aube du XXIe siècle, est encore marqué du sceau de l'intolérance, de l'ignorance, du fanatisme voire de l'obscurantisme. Nous souhaitons développer chez nos camarades, au lycée, les valeurs opposées : ouverture d'esprit, tolérance, esprit critique, respect des différences. Nous pensons que c'est par le développement d'une véritable éducation et d'une culture authentique que l'on peut y parvenir. Dans un monde où aucun pays ne peut plus vivre replier sur lui-même, c'est en s'ouvrant sur le monde, en accueillant avec lucidité les différences des autres cultures que l'on peut vraiment servir et être utile à son pays. Dans notre esprit, cette idée n'empêche pas de rester soi-même, au contraire. Notre démarche, dans ce sens, c'est largement inspiré des textes qui ont été publiés récemment sur les droits de enfants et plus généralement sur les droits de l'homme qui ont vocation à devenir universel. Les élèves du Lycée français privé Saint-Benoît seront demain des citoyens. Ils souhaitent pouvoir bénéficier des meilleures conditions pour pouvoir développer les capacités nécessaires qui leur permettront, dans leur vie professionnelle et sociale future, d'exercer cette importante responsabilité d'une manière efficace et active. Actuellement, ils ne peuvent pas, dans les cours et dans les activités proposées, développer les capacités de base qui sont indispensables : savoir prendre des initiatives, des responsabilités, savoir gérer des projets en autonomie, savoir être créatif, savoir gérer un projet… L'association, que nous mettons en place, se propose d'être un lieu d'expérimentation où chaque élève pourra s'initier progressivement à ces capacités. Ainsi nous pourrons devenir des citoyens actifs et responsables dans notre pays, des professionnels efficaces dans les entreprises dans lesquelles nous travaillerons, des hommes et des femmes capables de se réaliser dans leur vie personnelle. C'est à partir de ces finalités générales que nous avons réfléchi afin de définir les objectifs, les moyens qui nous sont nécessaires pour les atteindre, les structures et le fonctionnement de notre association. Il va de soi que dans le cahier des charges de notre association figure la volonté d'exister et de travailler dans le respect précis et total des règlements du Ministère de l'Éducation Nationale Turque et des valeurs humanistes des personnes et institutions qui ont fondé notre lycée."

The Butterfly Effect is the concept that if a butterfly flaps its wings in China, there is the possibility that the weather in New York could change.

Kids, below is a text about chaos theory. You will probably not understand all the ideas developed but take note of the names and search the Internet to find their biographies (the story of their lives). You may after that reread this text and debate with friends and teachers.

CHAOS THEORY

Dialectical materialism, elaborated by Karl Marx and Frederick Engels, was concerned with much more than political economy: it was a world view. Nature, as Engels in particular sought to demonstrate in his writings, is proof of the correctness of both materialism and dialectics. "My recapitulation of mathematics and the natural sciences," he wrote, "was undertaken in order to convince myself also in detail…that in nature amid the welter of innumerable changes, the same dialectical laws of motion force their way through as those which in history govern the apparent fortuitousness of events…" • Since their day, every important new advance in scientific discovery has confirmed the Marxian outlook although scientists, because of the political implications of an association with Marxism, seldom acknowledge dialectical materialism. Now, the advent of chaos theory provides fresh backing for the fundamental ideas of the founders of scientific socialism. Up to now chaos has been largely ignored by scientists, except as a nuisance or something to be avoided. A tap drips, sometimes regularly, sometimes not; the movement of a fluid is either turbulent or not; the heart beats regularly but sometimes goes into a fibrillation; the weather blows hot or cold. Wherever there is motion that appears to be chaotic—and it is all around us—there is generally little attempt to come to terms with it from a strictly scientific point of view. • What then, are the general features of chaotic systems? Having described them in mathematical terms, what application does the mathematics have? One of the features given prominence by Gleick and others is what has been dubbed "the butterfly effect." Lorenz, had discovered on his computer-simulated weather a remarkable development. One of his simulations was based on twelve variables, including, as we said, non-linear relationships. He found that if he started his simulation with values that were only slightly different from the original—the difference being that one set were down to six decimal places and the second set down three places—then the "weather" produced by the computer soon veered wildly from the original. Where perhaps a slight perturbation might have been expected, there was, only after a brief period of recognisable similarity, a completely different pattern. • This means that in a complex, non-linear system, a small change in the input could produce a huge change in the output. In Lorenz’s computer world, it was equivalent to a butterfly’s wing-beat causing a hurricane in another part of the world; hence the expression. The conclusion that can be drawn from this is that, given the complexity of the forces and processes that go to determine the weather, it can never be predicted beyond a short period of time ahead. In fact, the biggest weather computer in the world, in the European centre for Medium-range Weather Forecasting, does as many as 400 million calculations every second. It is fed 100 million separate weather measurements from around the world every day, and it processes data in three hours of continuous running, to produce a ten day forecast. Yet beyond two or three days the forecasts are speculative, and beyond six or seven they are worthless. Chaos theory, then, sets definite limits to the predictability of complex non-linear systems. It is strange, nevertheless, that Gleick and others have paid so much attention to the butterfly effect, as if it injects a strange mystique into chaos theory. It is surely well established (if not accurately modelled mathematically) that in other similarly complex systems a small input can produce a large output, that an accumulation of "quantity" can be transformed to "quality." There is only a difference of less than two per cent, for example, in the basic genetic make-up of human beings and chimpanzees—a difference that can be quantified in terms of molecular chemistry. Yet in the complex, non-linear processes that are involved in translating the genetic "code" into a living animal, this small dissimilarity means the difference between one species and another. • Marxism applies itself to perhaps the most complex of all non-linear systems—human society. With the colossal interaction of countless individuals, politics and economics constitute so complex a system that alongside it, the planet’s weather systems looks like clockwork. Nevertheless, as is the case with other "chaotic" systems, society can be treated scientifically—as long as the limits, like the weather, are understood. Unfortunately, Gleick’s book is not clear on the application of chaos theory to politics and economics. He cites an exercise by Mandelbrot, who fed his IBM computer with a hundred year’s worth of cotton prices from the New York exchange. "Each particular price change was random and unpredictable," he writes. "But the sequence of changes was independent of scale: curves for daily and monthly price changes matched…the degree of variation had remained constant over a tumultuous 60-year period that saw two world wars and a depression." • This passage cannot be taken on face value. It may be true that within certain limits, it is possible to see the same mathematical patterns that have been identified in other models or chaotic systems. But given the almost limitless complexity of human society and economics, it is inconceivable that major events like wars would not disrupt these patterns. Marxists would argue that society does lend itself to scientific study. In contrast to those who see only formlessness, Marxists see human development from the starting point of material forces, and a scientific description of social categories like classes, and so on. If the development of chaos science leads to an acceptance that the scientific method is valid in politics and economics, then it is a valuable plus. However, as Marx and Engels have always understood, theirs is an inexact science, meaning that broad trends and developments could be traced, but detailed and intimate knowledge of all influences and conditions is not possible. • Cotton prices notwithstanding, the book gives no evidence that this Marxist view is wrong. In fact, there is no explanation as to why Mandelbrot apparently saw a pattern in only 60 years’ prices when he had over 100 years’ of data to play with. In addition, elsewhere in the book, Gleick adds that "economists have looked for strange attractors in stock market trends but so far had not found them." Despite the apparent limitations in the fields of economics and politics, however, it is clear that the mathematical "taming" of what were thought to be random or chaotic systems has profound implications for science as a whole. It opens up many vistas for the study of processes that were largely out of bounds in the past. • Division of Labour • One of the main characteristics of the great scientists of the Renaissance was that they were whole human beings. They had an all-rounded development, which enabled, for example, Leonardo da Vinci to be a great engineer, mathematician and mechanician, as well as an artist of genius. The same was true of Dührer, Machiavelli, Luther, and countless others, of whom Engels wrote: "The heroes of that time were not yet in thrall to the division of labour, the restricting effects of which, with its production of one-sidedness, we so often notice in their successors." The division of labour, of course, plays a necessary role in the development of the productive forces. However, under capitalism, this has been carried to such an extreme that it begins to turn into its opposite. • The extreme division, on the one hand, between mental and manual labour means that millions of men and women are reduced to a life of unthinking drudgery on the production line, denied of any possibility to display the creativity and inventiveness which is latent in every human being. At the other extreme, we have the development of a kind of intellectual priestly caste which has arrogated to itself the sole right to the title of "guardians of science and culture." To the degree that these people become remote from the real life of society, this has a negative effect on their consciousness. They develop in an entirely narrow, one-sided way. Not only is there an abyss separating "artists" from scientists, but the scientific community itself is riven with ever-increasing divisions between increasingly narrow specialisations. It is ironic that, precisely when the "lines of demarcation" between physics, chemistry and biology are breaking down, the gulf which divides even different branches of, say, physics has become virtually unbridgeable. • James Gleick describes the situation thus: "Few laymen realise how tightly compartmentalised the scientific community had become, a battleship with bulkheads sealed against leaks. Biologists had enough to read without keeping up with the mathematical literature—for that matter, molecular biologists had enough to read without keeping up with population biology, physicists had better ways to spend their time than sifting through the meteorology journals." • In recent years, the advent of chaos theory is one of the indications that something is beginning to change in the scientific community. Increasingly, scientists from different fields feel that they have somehow reached a dead end. It is necessary to break out in a new direction. The birth of chaos mathematics, therefore, is a proof as Engels would have said, of the dialectical character of nature, a reminder that reality consists of whole dynamic systems, or even one whole system, and not of models (however useful) abstracted from them. What are the main features of chaos theory? Gleick describes them in the following way: "To some physicists, chaos is a science of process rather than state, of becoming rather than being." "They feel that they are turning back a trend in science towards reductionism, the analysis of systems in terms of their constituent parts: quarks, chromosomes, or neutrons. They believe that they are looking for the whole." The method of dialectical materialism is precisely to look at "process rather than state, of becoming rather than being." "More and more over the past decade, he’d begun to sense that the old reductionist approaches were reaching a dead end, and that even some of the hard-core physical scientists were getting fed up with mathematical abstractions that ignored the real complexities of the world. They seemed to be half-consciously groping for a new approach—and in the process, he thought, they were cutting across the traditional boundaries in a way they hadn’t done in years. Maybe centuries." • Because chaos is a science of whole dynamic systems, rather than separate parts, it represents, in effect, an unacknowledged vindication of the dialectical view. Up to now, scientific investigation has been too much isolated into its constituent parts. In pursuit of the "parts" the scientific specialist becomes too specialised not infrequently losing all sight of the "whole." Experimentation and theoretical rationalisations thus became increasingly removed from reality. More than a century ago, Engels criticised the narrowness of what he called the metaphysical method, which consisted of looking at things in an isolated way, which lost sight of the whole. The starting point of the supporters of chaos theory was a reaction against precisely this method, which they call "reductionism." Engels explained that the "reduction" of the study of nature to separate disciplines is to some extent necessary and inevitable. "When we reflect on nature or the history of mankind or our own intellectual activity, at first we see the picture of an endless maze of connections in which nothing remains what, where and as it was, but everything moves, changes, comes into being and passes away… • "But this conception, correctly as it expresses the general character of the picture of phenomena as a whole, does not suffice to explain the details of which this picture is made up, and so long as we cannot do this, we are not clear about the whole picture. In order to understand these details we must detach them from their natural or historical connection and examine each one separately according to its nature, special causes and effects, etc." But as Engels warned, too great a retreat into "reductionism" can lead to an undialectical view, or a drift to metaphysical ideas. • "The analysis of nature into its individual parts, the division of the different natural processes and objects into definite classes, the study of the internal anatomy of organic bodies in their manifold forms—these were the fundamental conditions for the gigantic strides in our knowledge of nature that have been made during the last four hundred years. But this has bequeathed us the habit of observing natural objects and processes in isolation, detached from the general context; of observing them not in their motion, but in their state of rest; not as essentially variable elements, but as constant ones; not in their life, but in their death." • Now compare this with the following passage from Gleick’s book: "Scientists break things apart and look at them one at a time. If they want to examine the interaction of subatomic particles, they put two or three together. There is complication enough. The power of self-similarity, though, begins at much greater levels of complexity. It is a matter of looking at the whole." If we substitute the word "reductionism" for "the metaphysical mode of thought," we see that the central idea is identical. Now see what conclusion Engels drew from his criticism of reductionism ("the metaphysical method"): "But for dialectics, which grasps things and their images, ideas, essentially in their interconnection, in their sequence, their movement, their birth and death, such processes as those mentioned above are so many corroborations of its own method of treatment. Nature is the test of dialectics, and it must be said for modern natural science that it has furnished extremely rich and daily increasing materials for this test, and has thus proved that in the last analysis Nature’s process is dialectical and not metaphysical. • "But the scientists who have learnt to think dialectically are still few and far between, and hence the conflict between the discoveries made and the old traditional mode of thought is the explanation of the boundless confusion which now reigns in theoretical natural science and reduces both teachers and students, writers and readers to despair." • Over one hundred years ago, old Engels accurately describes the state of the physical sciences today. This is acknowledged by Ilya Prigogine (Nobel-prize winner for chemistry 1977) and Isabelle Stengers in their book Order Out of Chaos, Man’s New Dialogue with Nature, where they writes the following: "To a certain extent, there is an analogy between this conflict (between Newtonian physics and the new scientific ideas) and the one that gave rise to dialectical materialism…The idea of a history of nature as an integral part of materialism was asserted by Marx and, in greater detail, by Engels. Contemporary developments in physics, the discovery of the constructive role played by irreversibility, have thus raised within the natural sciences a question that has long been asked by materialists. For them, understanding nature meant understanding it as being capable of producing man and his societies. • "Moreover, at the time Engels wrote his Dialectics of Nature, the physical sciences seemed to have rejected the mechanistic world view and drawn closer to the idea of an historical development of nature. Engels mentions three fundamental discoveries: energy and the laws governing its qualitative transformations, the cell as the basic constituent of life, and Darwin’s discovery of the evolution of species. In view of these great discoveries, Engels came to the conclusion that the mechanistic world view was dead." • Despite all the wonderful advances of science and technology, there is a deep-seated feeling of malaise. An increasing number of scientists are beginning to rebel against the prevailing orthodoxies and seek new solutions to the problems facing them. Sooner or later, this is bound to result in a new revolution in science, similar to the one effected by Einstein and Planck nearly a century ago. Significantly, Einstein himself was far from being a member of the scientific establishment. "The mainstream for most of the twentieth century," Gleick remarks, "has been particle physics, exploring the building blocks of matter at higher and higher energies, smaller and smaller scale, shorter and shorter times. Out of particle physics have come theories about the fundamental forces of nature and about the origin of the universe. Yet some young physicists have grown dissatisfied with the direction of the most prestigious of sciences. Progress has begun to seem slow, the naming of new particles futile, the body of theory cluttered. With the coming of chaos, younger scientists believed they were seeing the beginnings of a course change for all of physics. The field had been dominated long enough, they felt, by the glittering abstractions of high-energy particles and quantum mechanics." • Chaos and Dialectics • It is as yet too early to form a definitive view of chaos theory. However, what is clear is that these scientists are groping in the direction of a dialectical view of nature. For example, the dialectical law of the transformation of quantity into quality (and vice versa) plays a prominent sole in chaos theory: "He (Von Neumann) recognised that a complicated dynamical system could have points of instability—critical points where a small push can have large consequences, as with a ball balanced at the top of a hill." • And again: "In science as in life, it is well known that a chain of events can have a point of crisis that could magnify small changes. But chaos meant that such points were everywhere. They were pervasive." • These and many other passages reveal a striking resemblance between certain aspects of chaos theory and dialectics. Yet the most incredible thing is that most of the pioneers of "chaos" seem to have not the slightest knowledge not only of the writings of Marx and Engels, but even of Hegel! In one sense, this provides even more striking confirmation of the correctness of dialectical materialism. But in another, it is a frustrating thought that the absence of an adequate philosophical framework and methodology has been denied to science needlessly and for such a long time. • For 300 years, physics was based on linear systems. The name linear refers to the fact that if you plot such an equation on a graph, it emerges as a straight line. Indeed, much of nature appears to work precisely in this way. This is why classical mechanics is able to describe it adequately. However, much of nature is not linear, and cannot be understood through linear systems. The brain certainly does not function in a linear manner, nor does the economy, with its chaotic cycle of booms and slumps. A non-linear equation is not expressed in a straight line, but takes into account the irregular, contradictory and frequently chaotic nature of reality. • "All this makes me feel very unhappy about cosmologists who tell us that they’ve got the origins of the Universe pretty well wrapped up, except for the first millisecond or so of the Big Bang. And with politicians who assure us that not only is a solid dose of monetarism going to be good for us, but they’re so certain about it that a few million unemployed must be just a minor hiccup. The mathematical ecologist Robert May voiced similar sentiments in 1976. ‘Not only in research, but in the everyday world of politics and economics, we would all be better off if more people realised that simple systems do not necessarily possess simple dynamical properties.’" • The problems of modern science could be overcome far more easily by adopting a conscious (as opposed to an unconscious, haphazard, empirical) dialectical method. It is clear that the general philosophical implications of chaos theory are disputed by its scientists. Gleick quotes Ford, "a self-proclaimed evangelist of chaos" as saying that chaos means "systems liberated to randomly explore their every dynamic possibility…" Others refer to apparently random systems. Perhaps the best definition comes from Jensen, a theoretical physicist at Yale, who defines "chaos" as "the irregular, unpredictable behaviour of deterministic, non-linear dynamical systems." • Rather than elevate randomness to a principle of nature, as Ford seems to do, the new science does the opposite: it shows irrefutably that processes that were considered to be random (and may still be so considered, for everyday purposes) are nevertheless driven by an underlying determinism—not the crude mechanical determinism of the 18th century but dialectical determinism. • Some of the claims being made for the new science are very grand, and with the refinement and development of methods and techniques, may well prove true. Some of its exponents go so far as to say that the 20th century will be known for three things: relativity, quantum mechanics and chaos. Albert Einstein, although one of the founders of quantum theory, was never reconciled to the idea of a non-deterministic universe. In a letter to the physicist Neils Bohr, he insisted that "God does not play dice." Chaos theory has not only shown Einstein to be correct on this point, but even in its infancy, it is a brilliant confirmation of the fundamental world view put forward by Marx and Engels over a hundred years ago. It is really astonishing that so many of the advocates of chaos theory, who are attempting to break with the stultifying "linear" methodology and work out a new "non-linear" mathematics, which is more in consonance with the turbulent reality of ever-changing nature, appear to be completely unaware of the only genuine revolution in logic in two millennia—the dialectical logic elaborated by Hegel, and subsequently perfected on a scientific and materialist basis by Marx and Engels. How many errors, blind alleys and crises in science could have been avoided if scientists had been equipped with a methodology which genuinely reflects the dynamic reality of nature, instead of conflicting with it at every turn!

GOD DOES NOT PLAY DICE WITH THE UNIVERSE. Albert Einstein.

Albert Einstein sent his last letter to Queen Elisabeth of Belgium.

Le 1er mars 2003, Lavinia, accompagnée de son papa, a trouvé par hasard ce papillon au marché aux puces place du jeu de Balles à Bruxelles. Elle l'a acheté pour la somme de 1 Euro. Elle a aussi vu et entendu un clochard qui criait sa révolte.

Le papillon aussi l'a entendu et gracieusement il se mit à battre des ailes vers le Ciel.

Briefe an einen jungen Dichter
Letters To A Young Poet
By Rainer Maria Rilke

Letter Six

Rome, December 23, 1903

My dear Mr. Kappus,

I don't want you to be without a greeting from me when Christmas comes and when you, in the midst of the holiday, are bearing your solitude more heavily than usual. But when you notice that it is vast, you should be happy; for what (you should ask yourself) would a solitude be that was not vast; there is only one solitude, and it is vast, heavy, difficult to bear, and almost everyone has hours when he would gladly exchange it for any kind of sociability, however trivial or cheap, for the tiniest outward agreement with the first person who comes along, the most unworthy. . . . But perhaps these are the very hours during which solitude grows; for its growing is painful as the growing of boys and sad as the beginning of spring. But that must not confuse you. What is necessary, after all, is only this: solitude, vast inner solitude. To walk inside yourself and meet no one for hours - that is what you must be able to attain. To be solitary as you were when you were a child, when the grown-ups walked around involved with matters that seemed large and important because they looked so busy and because you didn't understand a thing about what they were doing.

And when you realize that their activities are shabby, that their vocations are petrified and no longer connected with life, why not then continue to look upon it all as a child would, as if you were looking at something unfamiliar, out of the depths of your own solitude, which is itself work and status and vocation? Why should you want to give up a child's wise not-understanding in exchange for defensiveness and scorn, since not-understanding is, after all, a way of being alone, whereas defensiveness and scorn are participation in precisely what, by these means, you want to separate yourself from. Think, dear Sir, of the world that you carry inside you, and call this thinking whatever you want to: a remembering of your own childhood or a yearning toward a future of your own - only be attentive to what is arising within you, and place that above everything you perceive around you. What is happening on your innermost self is worthy of your entire love; somehow you must find a way to work at it, and not lose too much time or too much courage in clarifying your attitude toward people. Who says that you have any attitude at all? - I know, your profession is hard and full of things that contradict you, and I foresaw your lament and knew that it would come. Now that it has come, there is nothing I can say to reassure you, I can only suggest that perhaps all professions are like that, filled with demands, filled with hostility toward the individual, saturated as it were with the hatred of those who find themselves mute and sullen in an insipid duty. The situation you must live in now is not more heavily burdened with conventions, prejudices, and false ideas than all the other situations, and if there are some that pretend to offer a greater freedom, there is nevertheless note that is, in itself, vast and spacious and connected to the important Things that the truest kind of life consists of. Only the individual who is solitary is placed under the deepest laws like a Thing, and when he walks out into the rising dawn or looks out into the event-filled evening and when he feels what is happening there, all situations drop from him as if from a dead man, though he stands in the midst of pure life. What you, dear Mr. Kappus, now have to experience as an officer, you would have felt in just the same way in any of the established professions; yes, even if, outside any position, you had simply tried to find some easy and independent contact with society, this feeling of being hemmed in would not have been spared you. - It is like this everywhere; but that is no cause for anxiety or sadness; if there is nothing you can share with other people, try to be close to Things; they will not abandon you; and the nights are still there, and the winds that move through the trees and across many lands; everything in the world of Things and animals is still filled with happening, which you can take part in; and children are still the way you were as a child, sad and happy in just the same way - and if you think of your childhood, you once again live among them, and the grown-ups are nothing, and their dignity has no value.

And if it frightens and torments you to think of childhood and of the simplicity and silence that accompanies it, because you can no longer believe in God, who appears in it everywhere, when ask yourself, dear Mr. Kappus, whether you have really lost God. Isn't it much truer to say that you have never yet possessed him? For when could that have been? Do you think that a child can hold him, him whom grown men bear only with great effort and whose weight crushes the old? Do you suppose that someone who really has him could lose him like a little stone? Or don't you think that someone who once had him could only be lost by him? - But if you realize that he did not exist in your childhood, and did not exist previously, if you suspect that Christ was deluded by his yearning and Muhammad deceived by his pride - and if you are terrified to feel that even now he does not exist, even at this moment when we are talking about him - what justifies you then, if he never existed, in missing him like someone who has passed away and in searching for him as though he were lost?

Why don't you think of him as the one who is coming, who has been approaching from all eternity, the one who will someday arrive, the ultimate fruit of a tree whose leaves we are? What keeps you from projecting his birth into the ages that are coming into existence, and living your life as a painful and lovely day in the history of a great pregnancy? Don't you see how everything that happens is again and again a beginning, and couldn't it be His beginning, since, in itself, starting is always so beautiful? If he is the most perfect one, must not what is less perfect precede him, so that he can choose himself out of fullness and superabundance? - Must not he be the last one, so that he can include everything in himself, and what meaning would we have if he whom we are longing for has already existed? As bees gather honey, so we collect what is sweetest out of all things and build Him. Even with the trivial, with the insignificant (as long as it is done out of love) we begin, with work and with the repose that comes afterward, with a silence or with a small solitary joy, with everything that we do alone, without anyone to join or help us, we start Him whom we will not live to see, just as our ancestors could not live to see us. And yet they, who passed away long ago, still exist in us, as predisposition, as burden upon our fate, as murmuring blood, and as gesture that rises up from the depths of time. Is there anything that can deprive you of the hope that in this way you will someday exist in Him, who is the farthest, the outermost limit?

Dear Mr. Kappus, celebrate Christmas in this devout feeling, that perhaps He needs this very anguish of yours in order to being; these very days of your transition are perhaps the time when everything in you is working at Him, as you once worked at Him in your childhood, breathlessly. Be patient and without bitterness, and realize that the least we can do is to make coming into existence no more difficult for Him than the earth does for spring when it wants to come.

And be glad and confident.

Yours,

Rainer Maria Rilke

Wether you believe in God or not, here are the latin texts of the sign of the Cross, the Credo, the Pater Noster and the Ave Maria.

IN NOMINE Patris, et Filii, et Spiritus Sancti. Amen

CREDO in Deum Patrem omnipotentem, Creatorem caeli et terrae. Et in Iesum Christum, Filium eius unicum, Dominum nostrum, qui conceptus est de Spiritu Sancto, natus ex Maria Virgine, passus sub Pontio Pilato, crucifixus, mortuus, et sepultus, descendit ad inferos, tertia die resurrexit a mortuis, ascendit ad caelos, sedet ad dexteram Dei Patris omnipotentis, inde venturus est iudicare vivos et mortuos. Credo in Spiritum Sanctum, sanctam Ecclesiam catholicam, sanctorum communionem, remissionem peccatorum, carnis resurrectionem, vitam aeternam. Amen.

PATER NOSTER, qui es in caelis, sanctificetur nomen tuum. Adveniat regnum tuum. Fiat voluntas tua, sicut in caelo et in terra. Panem nostrum quotidianum da nobis hodie, et dimitte nobis debita nostra sicut et nos dimittimus debitoribus nostris. Et ne nos inducas in tentationem, sed libera nos a malo. Amen.

AVE MARIA, gratia plena, Dominus tecum. Benedicta tu in mulieribus, et benedictus fructus ventris tui, Iesus. Sancta Maria, Mater Dei, ora pro nobis peccatoribus, nunc, et in hora mortis nostrae. Amen.

Patrick Le Clercq a reçu le sacrement de Confirmation des mains de son Excellence Monseigneur Descamps Recteur de l'Université Catholique de Louvain et a fait sa Profession Solennelle de Foi en la Chappelle du Collège Saint-Pierre à Uccle le 10 mai 1969.

Kids, here we would like to bring our moral support to the students and teachers of the Collège Saint-Pierre in Uccle (Brussels). They went through tough times these last years, but further to information received recently, it appears that they are still at the top for education quality. I would like here to express my personal gratitude to Monsieur Brillet, Mathematics teacher, who did a superb job in 1975 preparing and motivating a group of Latin-Mathématique students for the Examen d'Admission aux Etudes de Candidat Ingénieur Civil at the Université Catholique de Louvain while finishing at the same time their last year of Humanités. For each member of this group, it was a personal achievement. The risk of failure was real. It was very rewarding in these circumstances to work hard and extract the best of our brains and succeed. I am confident that if the Collège Saint-Pierre applies Monsieur Brillet methodology of hard work, motivating humor, team spirit and perpetuates Erasme heritage then it will be the best in Brussels.

Université Catholique de Louvain

Nous, Président, Secrétaire et Membres de la Commission chargée par le Recteur de l’Université Catholique de Louvain, de faire subir l’examen d’admission aux études de candidat ingénieur civil, institué en vertu de l’article 5§2 de la loi du 8 juin 1964, modifiant les lois coordonnées du 31 décembre 1949 sur la collation des grades académiques et le programme des examens universitaires ;

Vu l’arrêté royal du 1er juillet 1974 ;

Attendu que Monsieur Patrick LE CLERCQ, né à Uccle le 3 avril 1957, est titulaire d’un diplôme d’aptitude délivré le 21 juin 1975, attestant qu’il a remplit les conditions indiquées à l’article 5§2 des lois coordonnées sur la collation des grades académiques et le programme des examens universitaires modifiées par la loi du 8 juin 1964 ;

Considérant qu’il a été interrogé sur les matières suivantes : 1° l’algèbre ; 2° la géométrie plane ; 3° la géométrie dans l’espace ; 4° la géométrie analytique ; 5° l’analyse ; 6° la trigonométrie ; 7° le calcul numérique ;

Certifions que Monsieur Patrick LE CLERCQ a été reçu à l’examen d’admission aux études de candidat ingénieur civil ;

En foi de quoi, nous lui avons délivré le présent diplôme.

Donné à Louvain-la-Neuve, le 6 septembre 1975.

(s) Le Recteur, Le Secrétaire, Le Président, Les Examinateurs

AUX ENFANTS QUI LIRONT CE LIVRE
Par Henri Davignon en 1937

Voici cinq aventures vraies. Je vous le garantis, car je n'aurais pu les inventer. En observant, naguère, mes enfants livrés aux jeux de leur âge, j'ai réellement entendu ces dialogues et vu se dérouler ces mystères. Hallucination ou prodige? Aujourd'hui, après bien des années, je crois plutôt à une substitution providentielle. Leurs anges gardiens ont organisé pour eux ces charades sacrées où les échos de l'Evangile répondent au caractère de chacun, dans le décor authentique de chez nous. En tenant la plume, en la laissant courir, j'ai obéi moi-même à la suggestion double de la foi chrétienne et de l'amour paternel. Et quand ma fille aînée, mère de famille à présent, a essayé, à douze ans, de tirer d'un morceau de linoléum des images sur mon texte, elle a correspondu à une inspiration analogue Après avoir lu ces pièces, jouez-les entre vous. Si vous en avez envie, n'hésitez pas il y ajouter des personnages, à leur faire dire tout ce qui vous viendra à l'esprit. On n'a jamais fini d'explorer l'Evangile. Grands et petits, nous sommes tous appelés à essayer d'être des anges, d'incarner la Vierge, Saint-Joseph et les apôtres. Et quant à l'imitation de Jésus, elle est notre vocation même. C'est pour que nous soyons Lui, qu'Il a voulu se faire nous.

Enfin, chers enfants, chers lecteurs, suivez votre fantaisie jusque dans ses inventions les plus hardies. Tous les enfants sont des poètes-nés et des fées en puissance. Sous leur baguette, chiens, chats, bœuf, âne, arbres, sources, pierres deviennent des êtres doués de la parole et portant témoignage de la création. Ainsi naît et se déploie le drame ou la comédie de notre destinée. Petits mystères dans le grand, il n'est que d'y jouer son rôle sans jamais renoncer à mêler le ciel à la terre, comme l'idéal à la réalité.

H. D.

PERSONNAGES

CLAIRE, 12 ans.
MARIE-COLETTE, 11 ans.
PIERRE et ANNE jumeaux, 10 ans.
JACQUELlNE, 7 ans.
JULIEN, 4 ans.
CHANTAL, dix-huit mois.

LE CINQUIEME PETIT MYSTERE

LE DERNIER JOUR

(La fin d'un long mois de sécheresse coïncidant avec le dernier jour des vacances. Les enfants sont partis en pique-nique dans le vallon de Cheslery, au cœur d'une forêt ardennaise. La coupe récente du taillis fait saillir au milieu des deux versants se faisant face à gauche, un rocher noir issu d'un massif de poudingue volcanique, à droite, une longue pierre grise, dorée par le soleil et couronnée d'une haute croix de bois peinte en blanc. Dans le fond un mince filet d'eau se perd parmi des pierres luisantes. Aucun horizon. La voûte du ciel, alourdie par la chaleur du jour finissant, pèse sur les faîtes de la vallée où les arbres épargnés par la coupe font arc-boutant. Les sept enfants, Chantal à califourchon sur le dos de Claire cherchent un endroit frais où camper. Ils sont suivis d'un chien étrange et de race, un «pékinois».)

MARIE-COLETTE : N'allons pas plus haut. Nous ne trouverons rien de mieux. Asseyons-nous sur les pierres et déballons les provisions.

JACQUELINE : Marie-Colette ne pense qu'à manger. Nous ne sommes pas assez loin.

PIERRE : Je propose de grimper à gauche sur les rochers et de trouver une caverne.

JULIEN : Mais si elle est habitée ? ...

ANNE : Il n’y a personne que nous dans le bois, sauf les lapins et les chevreuils.

CLAIRE : Oui, vraiment, on peut le dire, nous sommes les derniers humains.

MARIE-COLETTE : Pourquoi pas ? C'est bien la fin de tout, la fin du monde; puisqu'on rentre en ville demain et qu'il faut reprendre les classes...

JACQUELINE : Dis tout de suite que le feu du ciel va détruire l'univers...

ANNE : Que les pierres vont s'entr’ouvrir.

PIERRE : Les hommes dessécher de frayeur.

CLAIRE : Et les morts renaître...

MARIE-COLETTE : Il n'y aura plus de morts. Il n'y aura plus que des vivants devant le Fils de l'homme debout sur une nuée.

JULIEN : Est-ce qu'il faudra mourir de nouveau ?

CLAIRE : Pas les justes ; les réprouvés seulement.

MARIE-COLETTE : Ceux-là, le Diable les emportera.

JULIEN : Mais d’où sortira-t’il ?

PIERRE : De son rocher noir là-haut, puisqu’on l’appelle déjà le rocher du Diable.

JULIEN : Est-ce qu’il y est déjà ?

MARIE-COLETTE : Non. Il se promène en attendant dans le corps de certains animaux. Tchoung est certainement possédé par lui.

JACQUELINE : Ce n'est pas vrai : Tchoung est un bon chien.

MARIE-COLETTE : II a tous les vices : gourmand, paresseux, égoïste et... chinois.

CLAIRE : Chinois, ce n'est pas sa faute, puisqu'il est Pékinois de naissance.

PIERRE. : La Chine est le pays des diables jaunes.

JULIEN : Je ne veux plus que Tchoung lèche Chantal.

CHANTAL (appelant) : Tchoung !

PIERRE : Voyez : il ne répond même pas quand elle 1'appelle.

JACQUELINE : Naturellement. Chantal est encore un peu ange.

ANNE : C'est vrai que la figure de ce chien est tout en grimaces.

MARIE-COLETTE : On la voit très bien vomissant des flammes.

JULIEN : Va-t-en, Tchoung, va-t-en vilain Diable !

(Il lui lance un caillou.)

PIERRE : Voyez, voyez : il s’enfuit la queue entre les jambes. Il grimpe aux rochers, il disparaît sous les pierres. Le Diable est rentré dans son antre.

(Coup de tonnerre.)

MARIE-COLETTE : Et voilà le signal de la fin.

CLAIRE : N'effraye donc pas les petits. Nous allons avoir un orage voilà tout. Ce sera la fin de cette longue sécheresse.

JACQUELINE : Ma bouche aussi est desséchée.

MARIE-COLETTE : Hé bien, buvons.

(Elle dévisse un «thermos», mais, maladroite, le laisse échapper. Il se brise sur les pierres.)

ANNE : Nous voilà sans boisson !

PIERRE : Il y a l'eau du ruisseau...

JACQUELINE : Où ça; Je ne vois plus qu'un amas de pierres...

MARIE-COLETTE : Mon Dieu ! C'est vrai, On entend encore son murmure, mais l’eau s'est perdue dans une fissure, Le rocher l'a bue,

ANNE : Je vous le dis : les pierres s'entrouvrent.

JULIEN (tombant assis) : J'étouffe. Je ne peux plus marcher.

JACQUELINE : Ma bouche est en feu...

MARIE-COLETTE : Et voilà encore le tonnerre.

CLAIRE : Ne vous énervez donc pas comme cela. L'approche de l’orage met de l'électricité dans l'air. La pluie ramènera le calme.

PIERRE : Mais il faut trouver une caverne pour s'abriter...

JULIEN (hurlant) : Je ne veux pas de caverne. Je ne veux pas être emporté par le Diable.

ANNE : Voyez, voyez : les arbres sont saisis d'un frisson. Un souffle maudit les secoue. Et la terre est brûlante.

MARIE-COLETTE : C'est bien la fin du monde. Courons...

(Un grand éclair.)

PIERRE (signant) : Jésus !

JULIEN : Au secours !

CLAIRE : Suivez-moi, prenons le chemin de la Croix blanche...

PIERRE : C'est le côté des justes...

CLAIRE : Trop tard ! Voilà la pluie. Mettons-nous sous le gros hêtre. Il n'y a pas de danger de foudre : les arbres des deux versants sont tous plus hauts que celui-ci.

MARIE-COLETTE : C'est nous les morts sortis des tombeaux...

PIERRE : Je veux bien être le roi David...

ANNE : Moi la douce Ruth, la femme de Booz.

JACQUELINE : Moi la petite sœur Thérèse. C'est plus sûr,

JULIEN : Et moi Adam le premier homme.

CLAIRE : Rien à craindre alors ; ce sont tous des saints.

PIERRE : Mais David et Adam ont péché. On va le savoir par le livre ouvert. On va dire à haute voix leurs crimes...

CLAIRE : Qu'importe ! On proclamera aussi leurs repentirs. A la lueur des éclairs voyez-vous la croix sur le rocher gris. Les deux plateaux de la balance pendent à ses bras...

(Sur un coup de tonnerre plus violent, une avalanche sort de la caverne où s'est enfui le chien, dévalle la pente et vient s'abattre devant les enfants avec un rauque gémissement.)

PIERRE : Holà ! Qu'est-ce que c'est ? Voilà le flot des réprouvés...

CLAIRE : C'est un pauvre chevreuil lancé par Tchoung ou effrayé par l'orage. Il ne se relèvera plus. Il s'est rompu les reins.

MARIE-COLETTE : Comme Judas après que la corde du sycomore auquel il s'était pendu se fut brisée.

PIERRE : Judas est le seul vrai damné. Que personne n'approche du cadavre. Il pue le péché de désespoir et de trahison. Allez le banni de Dieu-le-Père. Allez au feu éternel !...

CHANTAL : Jésus !

JACQUELINE : Chantal a vu quelque chose ! Elle tend les bras...

ANNE : C'est en haut du rocher : la croix éclairée !

MARIE-COLETTE : Qu'est-ce qui vole au-dessus ? Une colombe...

PIERRE : Le Saint-Esprit.

JULIEN : Ah ! la belle lumière...

CLAIRE : L'orage a pris fin, la pluie cesse. Voilà l'arc-en-ciel.

JACQUELINE : Est-ce que le monde a fini ? Sommes-nous déjà au paradis ?

JULIEN : Ecoutez, écoutez : j'entends des cloches.

CLAIRE : Celles de Cornesse et de Goffontaine : l'angelus du soir...

PIERRE : Ou du matin. On ne sait plus le temps qu'il est.

MARIE-COLETTE : Peut-être n'y a-t-il plus de temps.

ANNE : Alors nous sommes dans l’éternité. Il faut faire comme les anges : chanter.

JACQUELINE : Mais nous ignorons les chants du ciel...

CLAIRE : Ce sont les mêmes que ceux de la terre, sans fausses notes, toujours en mesure et sur des paroles qui disent tout.

PIERRE : Et la musique ? …

PIERRE : Celle du vent...

JACQUELINE : Du ruisseau...

MARIE-COLETTE : Des feuilles...

CLAIRE : Chantal, toi, tu pourrais les chanter encore. Chante...

CHANTAL (d'une voix surprenante) : La, la, la, la, la, la, la, la !

PIERRE : Tiens, mais la belle cadence !

ANNE : Cela ne ressemble à aucun air connu.

JACQUELINE : C'est bien joli.

JULIEN : Pourtant elle ne dit que : la, la, la !

MARIE-COLETTE : Avec une voix tellement claire!

CLAIRE : Et voyez : ses lèvres ne bougent pas. On dirait que l’air lui sort de l’âme.

PIERRE : Elle regarde toujours en haut vers la croix. Qui voit-elle ?

JACQUELINE : Mon Dieu, mon Dieu, si c'est Vous, vous n'allez pas nous la prendre ?

JULIEN : Elle se couche sur la terre...

ANNE : Ses yeux se ferment.

MARIE-COLETTE : Elle ne chante plus…

JULIEN : Elle est morte !

(Les enfants atterrés s'agenouillent autour du bébé.)

CLAIRE : Non, non. Dieu ne prend pas les enfants comme cela... Elle dort. Elle continue le mystère en rêve. L'orage est fini, c'est la détente, Le monde renaît, plus beau, meilleur. Et demain le travail recommence.

(Les enfants se sont assis près de leur sœur endormie. Ils ouvrent le panier du goûter et mangent.)

FIN.

Kids, we can only agree with Archbishop Desmond M. Tutu when he says that "It is immoral that adults should want children to fight their wars for them... There is simply no excuse, no acceptable argument for arming children."

Currently, infant mortality rates in Angola are among the highest in the world. According to UNICEF's 1998 State of the World's Children report, infant mortality rates in Angola are 170 per 1,000 live births, and the under-5 mortality rate is 292 per 1,000 live births. In neighboring Namibia, those rates are 60 and 77 respectively. Almost one in five Angolan children are born with low birth weight. Close to 1.5 million children live in a state of absolute poverty, and over 100,000 have lost touch with their parents. Many Angolan girls are forced into prostitution, exposing themselves to sexually transmitted diseases and AIDS.

Hopefully, economic conditions are changing fast which should permit improvement of this catastrophic humanitarian situation. A promising oil deposit was discovered near the Kuito oil field off the Angolan enclave of Cabinda, confirming the huge potential of Angolan offshore oil reserves, French oil conglomerate Total announced. Total holds 20 percent of concession identified as "Bloc 14", off Cabinda some 440 meters under the seabed. American oil company Chevron holds 31 percent, Petrogal of Portugal 9 percent, Angolan National Fuel Company (Sonangol) and Italian company AGIP hold 20 percent each. According to Total, the Kuito field will gradually be operated with a production set to reach 50 000 barrels per day in 1999. A series of tests and the opening of three new oil wells are planned for this year. On March 2, 1998, Sonangol, the Angolan national oil company, concessionaire, and Elf, the operator, announced a new oil discovery in Angola on Block 17, located in deep water 200 kilometers northwest of Luanda. This is the fourth exploration well drilled on Block 17 by Elf Exploration Angola, a wholly owned subsidiary of Elf Aquitaine. The discovery well, Rosa-1, is located 14 kilometers northwest of Girassol and 17 kilometers northwest of Dalia. The well was drilled in a water depth of 1,405 meters and encountered a new oil bearing reservoir with good characteristics and good fluid quality. Production tests carried out on one part of the reservoir gave a flow-rate of 12,000 barrels of oil per day. Further appraisal work must be carried out in order to evaluate the economy of the discovery. This new success significantly confirms the commercial potential of Block 17. Elf Exploration Angola is the operator for the following association: Elf Exploration Angola (operator) 35%, Esso Exploration Angola (Block 17) 20%, BP Exploration Angola Ltd 17%, Den Norske Stats Oljeseskap a.s. 13%, Norsk Hydro ASA 10%, Fina Exploration M.B., B.V. 5%. Angola has an oil refinery at Luanda with a nominal capacity of 1.75 million tones (35,000 b/d) per annum although current throughput is around 1.6 million tones. The refinery is operated by Fina Petroleos de Angola, a company owned 64.1% by Petrofina and 34% by the Angolan government through it state oil company, Sonangol, with the remainder of the shares in private hands. Angola refines about 30,000 b/d for its domestic market and exports lubricating oils, bunkering oils and heavy fuel oil. Plans to build a new and bigger petroleum refinery in the south of the country were announced in August 1992 and again in late 1997. However, this project depends on raising the US$ 2,000 million to finance its construction as well as improved export prospects and lasting political stability. Distribution and marketing of fuels products is carried out by Sonangol, Petrofina and a new joint venture company, Sonangalp, a joint venture between Petrogal (49%) and Sonangal (51%) marketing products under the Galp trade name. Sonangol has announced its intention of attracting a further three or four foreign companies into the domestic market, aiming to retain only 40%. However, its small size and lack of basic transport infrastructure is unlikely to attract the major companies who are more eager to exploit its upstream potential. The number of functioning retail service stations in Angola is estimated at around 250, the majority located in and around Luanda. In the rural areas, much of the distribution infrastructure, including retail sites, was destroyed during the civil war and financing for its rehabilitation is slow in arriving.

"Give a person a fish, and he lives for one day. Teach him to fish, and he can live for his whole life." Expatriate life in Angola is difficult for couples. Many couples divorce when they come back to their native country. Why not instead of expatriating people develop a massive long term training plan for the people of Angola to develop skills in the oil sector and so achieve this knowledge transfer required and critical for the economic development. I have personally met a Vietnamese student at the University Catholic of Louvain who escaped Vietnam hanging to a US helicopter when Saïgon felt and I can tell you not to worry about the motivation of young people having known war. They want peace. They want to study and find a job and raise a family.

One day, Antoine de Saint-Exupéry reminisces, when his plane was forced down in the Sahara, a thousand miles from help, he encountered a most extraordinary small person. "If you please," said the stranger, "draw me a sheep." And thus begins the remarkable history of the Little Prince. The Little Prince [Le Petit Prince in French or O Principezinho in Portuguese] lived alone on a tiny planet no larger than a house. He owned three volcanoes, two active and one extinct. He also owned a flower, unlike any flower in all the galaxy, of great beauty and of inordinate pride. It was this pride that ruined the serenity of the Little Prince's world and started him on the interplanetary travels that brought him to Earth, where he learned, finally, from a fox, the secret of what is really important in life. There are a few stories that in some way, in some degree, change the world forever for their readers. This is one. "

RISKS
By the Mahatma Gandhi

“When nonviolence is defined as a dynamic challenge, then it is consciously born suffering. It does not mean willing surrender to the will of a tyrant. It means that we should oppose the oppressor with all our spiritual strength. According to this principle, which actually governs our very existence, an individual can defy the will to power of an unjustly acting world power, to preserve his own dignity, his faith, and his soul, and can initiate the overthrow of this power or even its moral renewal.

No great, extensive movement can reach its goal without risks, and a life is not worthy of being lived when no risks are taken and no dangers are faced. Does not the history of the world show us that it was the great challenges which gave life its attraction and poetry? It is a sign of degeneration when prominent people, the pillars of society, ring their hands in confusion and irritation at the slightest manifestation of a hazard on the horizon.”

RSLP
à Madame Aymar de Potter d'Indoye née vicomtesse Claire Davignon
1910-2001

Monsieur et Madame Aymar de Potter d'Indoye, aidés par leurs enfants et beaux-enfants, ont reçu de nombreux amis, les samedi 27 et dimanche 28 juin 1964, au «Verloren Kost» à Torhout. Ceux-ci furent conviés à visiter les installations modernisées de leur ferme et l'usine Kosto. Un soleil radieux accompagna les visiteurs dans leur randonnée.

Etaient présents: Monsieur et Madame Roger Le Clercq, Monsieur et Madame Claude de Potter d'Indoye, Monsieur et Madame Eric de Potter d'Indoye, Frère François de Potter d'Indoye, Monsieur et Madame Luc de Potter d'Indoye, Monsieur Henri de Potter d'Indoye, Mesdemoiselles Marie-Claire, Elisabeth, Vinciane, Brigitte et Annick de Potter d'Indoye, Baronne d'Udekem d'Acoz, Baronne Guy de Borchgrave, Baron Henri d'Udekem d'Acoz, Monsieur et Madame Jules van der Belen, Baron et Baronne Etienne Kervyn de Volkaersbeke, Monsieur et Madame Pierre Nolf et leur fille, Baron et Baronne A. de Jamblinne de Meux, Mademoiselle Nicole van der Rest, Monsieur Pierre Regnier, Monsieur et Madame Christian Le Clercq, Monsieur et Madame Michel de Hemptinne, Monsieur et Madame Jean de Voghel, Baron et Baronne Jean Kervyn de Marcke ten Driessche et leur fils, Monsieur et Madame van den Bogaerde, Monsieur et Madame Jean de Volder, Monsieur et Madame Etienne Eeman, Madame Ovyn, Monsieur et Madame Yves de Schrevel, Chevalier et Madame Schellekens et leurs enfants, Monsieur et Madame Adrien Schellekens, Monsieur et Madame André Mahieu, Monsieur et Madame Jean Maertens de Noordhout, Baron et Baronne Gillès de Pélichy et leur fils, Monsieur et Madame Biebuyck, Madame de le Court, Monsieur et Madame de Busschere, Baron et Baronne Ludovic van Caloen, Monsieur et Madame A. Janssens de Bisthoven et leur fille, Monsieur Jean-Luc de Bonfils, Baron et Baronne de Meester de Betzenbroeck et leur fille et Madame René Lamarche, Monsieur et Madame Jacques Lefebvre, Monsieur et Madame Baudouin de Schietere de Lophem, Monsieur et Madame Jacques Damman, Monsieur et Madame René Cauwe, Monsieur Albert de Schietere de Lophem, Monsieur et Madame Georges de Potter de ten Broeck, Monsieur et Madame Charles de Brouwer, Monsieur et Madame Luc de Beco, général et Madame Fontigny, Monsieur et Madame Paul de Schaetzen et leurs enfants, Chevalier et Madame Léon van Outryve d'Ydewalle, Baron et Baronne Verhaegen, Monsieur et Madame Christian de la Kethulle de Ryhove et leurs fils, Monsieur et Madame Jacques de Hemptinne, Monsieur et Madame Xavier d'Hoop, Monsieur et Madame Baudouin Verhaegen et leur fille, Monsieur et Madame André Schöller, Chevalier et Madame Pierre van Outryve d'Ydewalle et leurs enfants, Monsieur et Madame Mols et leurs enfants, Monsieur et Madame Jacques Dor, Baron et Baronne van Caloen de Basseghem, Monsieur et Madame René Nieuwland, Monsieur et Madame Ch. Fer. Nothomb, Madame de Halleux, Baron et Baronne Jean van Zuylen van Nyevelt, Monsieur et Madame Edouard van Wylick, Monsieur et Madame Claude Carron de la Carrière Moyencourt, Monsieur et Madame Fernand Casier et leurs enfants, Monsieur et Madame José Casier, Baronne Monsieur Osy de Zegwaart, Baron et Baronne René de Crombrugghe de Picquendaele, Mademoiselle de Schietere de Lophem, Baron et Baronne Henry de Crombrugghe de Looringhe et leurs enfants, Monsieur et Madame Jacques Kervyn de Marcke ten Driessche, Monsieur et Madame Marcel de Wandeleer, Monsieur et Madame Christian van de Kerchove, Comte Louis d'Ursel, Monsieur et Madame J.G. Bregentzer et leurs enfants, Baron et Baronne de Bassompierre, Monsieur et Madame Waucquez, Major et Madame Coppieters de ter Zaele, Monsieur et Madame van Wassenhove, Chevalier et Madame Christian de Ghellinck Vaernewyck, Comte Hervé de Hemptinne, Monsieur et Madame Robert Dupret, Monsieur et Madame de Schietere de Lophem, Baron et Baronne Frédéric de Jamblinne de Meux, Monsieur et Madame Jean Goethals, Monsieur et Madame Freddy Cartuyvels, Monsieur et Madame de Potter d'Indoye et leurs enfants, Monsieur et Madame A. Janssens de Bisthoven et leurs enfants, Madame Livette Dautricourt, Chevalier Claude de Ghellinck Vaernewyck,Monsieur et Madame Matthieu de Wynendaele, Madame Deudon de le Vielleuze, Monsieur Deudon de le Vielleuze, Monsieur et Madame Roger Willocx et leur fils, Monsieur et Madame Jean Goffin, Monsieur et Madame Moreau de Melen, Monsieur et Madame van Mossevelde et leur fille, Monsieur et Madame de Sillet de Naeyer, Monsieur et Madame Jean van der Plancke, Monsieur Breuls de Tiecken et sa fille, Monsieur et Madame Em. Coppieters de ter Zaele, Monsieur et Madame Albert Thibaut de Maisières, Monsieur et Madame Jacques van der Ghote, Monsieur et Madame Henri Halflants, Chevalier Xavier de Ghellinck d'Elseghem, Baron et Baronne Pierre-Damien van Caloen, Baron et Baronne Patrick de Crombrugghe de Picquendaele, Monsieur et Madame Raymond Biebuyck, Baron et Baronne de Penaranda de Franchimont, Monsieur et Madame Roger Regout, Monsieur et Madame Philippe van der Plancke, Baron et Baronne Tony del Marmol, Monsieur et Madame Louis Mignot, Madame de Raymond, Vicomte et Vicomtesse le Hardy de Beaulieu, Monsieur et Madame Etienne Cardon de Lichthuer, Madame Ignace del Fosse et d'Espierres, Monsieur et Madame Roger Goethals, Monsieur et Madame G. de Meester de Betzenbroeck, Monsieur et Madame de Wandeleer, Monsieur et Madame Alain d'Udekem d'Acoz, Monsieur et Madame Carton de Wiart, Baronne van Hoobrouck d'Aspre, Chevalier et Madame Jacques vau Outryve d'Ydewalle, Monsieur et Madame Henry Maertens de Noordhout, Baron et Baronne de Beco, Comtesse Carton de Wiart, Monsieur et Madame Henri Florin de Duikingberg et leur fille, Monsieur J. Powis de Tenbossche, Monsieur et Madame Cardon de Lichthuer, Monsieur et Madame Hubert de Kemmeter, Monsieur et Madame Willy Hanssens, Monsieur et Madame Kesteloot, Baron et Baronne Stany de Vinck, Monsieur et Madame Jean-Benoit Janssens de Varebeke, Monsieur et Madame van Renynghe de Voxvrie, Baron et Baronne Paul Houtart et leurs fils, Monsieur et Madame Mergeay et leurs enfants, Monsieur et Madame Lekeu, Baron et Baronne Jean-Pierre de Crombrugghe de Picquendaele, Chevalier et Madame Xavier de Schaetzen, Monsieur et Madame Henri le Docte, Monsieur et Madame Léon Helbig de Balzac, Baron et Baronne Didrik Snoy, Dr et Madame Stroobants et leur fils, Monsieur et Madame Jean de Beco, Monsieur et Madame Léon van Nispen tot Sevenaer, Baron et Baronne Pierre de Béthune, Monsieur et Madame Albert Ortegat, Comtessee Gaby de Lannoy, Baron et Baronne Emm. de Moffarts, Comte et Comtesse Henri de Hemptinne, Monsieur et Madame Christian Janssens de Varebeke, Monsieur et Madame Idès Janssens de Bisthoven, Monsieur et Madame Etienne van Caloen de Basseghem, Monsieur et Madame Tytgadt et leur fille, Monsieur et Madame Joseph Maréchal et leurs fils, Miles van der Plancke, Chevalier et Madame Eric de Schaetzen, Baron et Baronne Yves Kervyn de Volkaersbeke, Monsieur et Madame d'Udekem d'Acoz, Monsieur et Madame de Meester de Betzenbroeck, Monsieur et Madame Rogival, Mademoiselle Ghislaine Joos de ter Beerst, Monsieur et Madame Robert Pecsteen et leur fille, Monsieur et Madame Géry de Limelette, Monsieur et Madame Léon van Essche et leur fils, Monsieur et Madame Jacques Gilmont, Monsieur et Madame Jean Roberte, Chevalier et Madame Marc de Schaetzen, Monsieur et Madame Jean Louis Reyners, Monsieur et Madame Raymond Geelhand de Merxem, Monsieur et Madame Pierre de Maere d'Aertrycke et leurs filles, Monsieur et Madame Emile Dupret et leurs enfants Comte et Comtesse Marc le Grelle, Monsieur et Madame Guy van Renynghe de Voxvrie, Monsieur et Madame B. Sibille, Comte et Comtesse Roland d'Oultremont, Monsieur et Madame Fernand Becker, Monsieur et Madame Charles Case et leurs fils, Monsieur et Madame de Potter de ten Broeck, Monsieur et Madame Yves Dautricourt et leur fille, Monsieur et Madame Thierry Dumont de Chassart, capitaine et Madame Hubert de Maere d'Aertrycke, Monsieur et Madame Edmond Hennuy, Monsieur et Madame Ant. de Limon Triest, Monsieur Alfred de Limon Triest, Monsieur et Madame Daniel de Schietere de Lophem, Monsieur et Madame Idès Le Fevere de ten Hove, Monsieur et Madame Fernand De Clerck, Madame Albert Dehaene, Monsieur et Madame Philippe Verhoosel, Monsieur et Madame Paul de Brouwer, Monsieur et Madame Marc Regout, Baron et Boone Kervyn d'Oudt Mooreghem, Baron et Baronne Jean de Vinck et leur fils, Monsieur et Madame Coppieters, Monsieur et Madame Thierry Hautart, Monsieur et Madame François Henry de Frahan, Baron et Baronne Henry de Dorlodot, Monsieur et Madame Serge Goemaere, Monsieur et Madame Xavier van de Werve et leur fille, Monsieur et Madame Alain Nobels, Monsieur et Madame André Marchant, Monsieur et Madame Michel van de Put, Chevalier et Madame Jacques de Patoul, Monsieur et Madame Albert van der Haert, Comte et Comtesse Eric le Grelle, Monsieur et Madame Etienne Claeys-Boùùaert, Monsieur et Madame Yves Smits Vicomte et Vicomtesse Georges Vilain XIIII, Monsieur et Madame Thierry Terlinden, Monsieur et Madame José de Schietere de Lophem, Monsieur et Madame Jacques de Lantsheere et leur fille, Chevalier et Madame van Outryve d'Ydewalle, Monsieur et Madame Stany Hage, Baronne Patrick Snoy, Monsieur et Madame Monnoyer, Monsieur et Madame Iweins d'Eeckhoutte, Monsieur et Madame Jean Lantonnois van Rode, Monsieur et Madame Philippe Dumont, Baron et Baronne Henry Bonaert, Madame van Outryve d'Ydewalle, Comte et Comtesse Philippe de Limburg Stirum, Baron et Baronne Jean-Paul de Crombrugghe de Looringhe, Monsieur et Madame Thierry Guyot de Mishaegen, Monsieur et Madame René Verhaegen, Comte et Comtesse de Hemptinne, Monsieur et Madame Guibert Morel de Westgaver, Monsieur et Madame Marc Taymans, Baron et Baronne Ernest van Caloen, Baron et Baronne Marc van der Straten Waillet, Comte et Comtesse van der Stegen de Schrieck, Baron et Baronne Emmanuel Fallon, Baronne Monsieur Gendebien, Baron Henri van der Straten Waillet, Monsieur et Madame Jacques Petre, Baronne Jean Greindl, Monsieur et Madame Henri Nolf, Monsieur et Madame Olivier Regout, Monsieur et Madame Marcel Pouppez de Kettenis de Hollaeken et leurs enfants, Comte et Comtesse André le Grelle, Chevalier Biebuyck et Mademoiselle Christiane Biebuyck, Baron et Baronne Peers de Nieuwburgh, Monsieur et Madame Arnould van Houtryve, Monsieur et Madame Jean t' Kint de Roodenbeke, Messieurs François et Patrick van Houtryve, Monsieur et Madame Guy t'Serstevens, Comte et Comtesse du Parc Locmaria et leurs enfants, Baron et Baronne Olivier de Crombrugghe de Picquendaele, Docteur et Madame F. van Damme, Monsieur et Madame Félix de Hemptinne, Baron et Baronne de Potesta de Waleffe Chevalier et Madame Michel de Ghellinck d'Eiseghem, Monsieur et Madame Maxime van de Werve de Schilde, Monsieur et Madame Christian van de Walle de Ghelcke, Baron et Baronne Guy Gillès de Pélichy, Monsieur et Madame Paul de Sillet de Naeyer, Monsieur et Madame Guy de Potter d'Indoye, Monsieur et Madame Jacques Lambert, Baron et Baronne van Caloen, Monsieur et Madame Raymond Bartholomeus, Monsieur et Madame Georges Moeneclaey et leur fils, Monsieur et Madame Antoine Goethals, Monsieur et Madame Christian Cardon de Lichthuer, Monsieur et Madame van de Velde et leurs enfants, Monsieur et Madame Joseph de Mahieu, Monsieur et Madame P. Geuens, Monsieur et Madame Max van Zeebroeck, Monsieur et Madame Paul Aigrain, Monsieur et Madame Honoré Standaert et leurs enfants, Comte et Comtesse Lippens, Comtesse de Marchant et d'Ansembourg, Monsieur et Madame De Vries, Monsieur et Madame Goethals, général et Madame Henri Glorieux, Monsieur et Madame Ferdinand Storms, Monsieur Humbert Pecsteen, Monsieur et Madame Lucien Périlleux, Baron et Baronne Monsieur de Crombrugghe de Looringhe, Monsieur René Janssens de Bisthoven, Comte et Comtesse de Lichtervelde, Monsieur et Madame Jacques Nève de Mévergnies, Monsieur et Madame du Trieu de Terdonck, Baronne Janssens de Bisthoven, Monsieur et Madame Frédéric Maertens, Chevalier et Madame Joseph van Outryve d'Ydewalle, Monsieur et Madame Pierre Coget, Baronne Josine de Crombrugghe, Monsieur et Madame John Mignot et leur fils, Monsieur et Madame Guy de Schietere de Lophem, Monsieur et Madame Ghislain de Potter d'Indoye, Madame Veranneman de Watervliet, Monsieur Jean Veranneman de Watervliet, Monsieur et Madame M. Nolet de Brauwere van Steeland, Monsieur et Madame Vincent van der Meersch, Monsieur et Madame Jean de Cazes, Colonel Joly, Monsieur et Madame Albéric Motte, Monsieur et Madame Jacq. van Caillie, Baron et Baronne Yves de Vinck, Monsieur et Madame Martial Deudon de le Vielleuze, Monsieur et Madame Henry Cruysmans, Monsieur et Madame Joseph de Potter d'Indoye, Baron et Baronne Woot de Jannée, Baron et Baronne Guy Kervyn de Volkaersbeke, Baronne Xavier della Faille d'Huysse et ses enfants, Monsieur et Madame Henry Godbille et leur fille, Madame Robert Kervyn de Meerendré, Chevalier et Madame Jean van Tieghem de ten Berghe, Monsieur et Madame Albert de Hemptinne, Monsieur et Madame Jean de Brabandere, Monsieur et Madame Eugène de Hemptinne, Monsieur et Madame Pierre de Hemptinne, Comte et Comtesse Roger de Meeüs d'Argenteuil, Baron Louis de Borrekens, Baronne Solange de Borchgrave d'Altena, Monsieur et Madame Bruno de Brouwer, Monsieur et Madame Edmond Bekaert, Comte et Comtesse de Montblanc, Baronne Hélène de Vinck, Monsieur et Madame Jean Coens et leur fille, Comte et Comtesse Joseph de Hemptinne, Comte et Comtesse Jacques de Meeüs d'Argenteuil, Vicomte et Vicomtesse Jacques Davignon, Comtesse André de Liedekerke et son fils, Monsieur et Madame Jean Cruysmans, colonel et Madame Walter van Belle, Baron et Baronne Jacques Pecsteen, Baron et Baronne Carl van Caloen, Chevalier et Madame de Jamblinne de Meux, Mademoiselle Suzanne Iweins de Wavrans, Comtesse Jules de Meeus d'Argenteuil, Baron et Baronne Jacques van der Bruggen, Monsieur et Madame Marc Wittock, Monsieur et Madame Pol Boël, Baron et Baronne Albert Greindl, Comte et Comtesse de Bousies, Baronne Raymond de Crawhez, Monsieur et Madame Jean Casier, Baronne della Faille d’Huysse, Monsieur et Madame Marcel Stas de Richelle, Mademoiselle Elisabeth van de Walle, Comte et Comtesse Albert de Castellane, Madame Jacques du Roy de Blicquy, Monsieur et Madame Olivier Vraters, Chevalier et Madame Ulric de Schaetzen et leurs filles, Baron et Baronne de Maere d'Aertrycke, Madame Manderbach, Monsieur et Madame Geoffroy de Halleux et leur fille, Chevalier et Madame Henri de Theux de Meylandt et Montjardin, Monsieur et Madame Powis de Tenbossche, Chevalier et Madame Leyniers, Comte et Comtesse Charles de Briey, Monsieur et Madame Guy van Zeeland, Monsieur et Madame Christian van Caloen de Basseghem, Chevalier et Madame Emmanuel van Outryve d'Ydewalle, Monsieur et Madame Gryffroy, Monsieur et Madame Georges Massange de Colloms, Chevalier Ruzette, Monsieur Henri De Clercq, Madame Skatchkof et ses enfants, Monsieur et Madame Elleboudt et leurs enfants, Monsieur et Madame Guy Torrekens, Monsieur et Madame Sannen, Monsieur Alstrom, Baronne Rotsart de Hertaing, Mademoiselle Patricia de Brouwer, Monsieur Janssens, Baron Alec van der Straten Waillet, Chevalier Axel van Outryve d'Ydewalle, Mademoiselle Danielle de Theux de Meylandt et Montjardin, Monsieur Domin. de Patoul, Mademoiselle Claire de Béthune, Monsieur et Madame Michel Geeuns…

As final word of his book “Teach your child how to think”, Dr de Bono said: “Teaching your children to think may well be the most important thing you can do for your children. They will be growing up to live in a complex world. Information, qualifications and professional skills will not be enough. They will have to be able to think things out on a business, professional and personal level. That is going to require a lot of thinking. It is better if that thinking is skilled than if it is a moment-to-moment argument. Teaching your children to think may well be the most important thing you can do for society and for the world. The future well being of the world is going to require a lot of thinking both by experts and by ordinary people. There is going to be a need to think through problems and to look after values (environmental and others). Critical thinking will never be enough. We also need thinking that is constructive, generative and creative. There is also a need for better thinking in disputes and conflicts. The old adversarial methods are slow, wasteful and increasingly dangerous. […] I believe that thinking is a skill that can be learned, practised and enjoyed. Once we can detach the ego from thinking and get past the “I am right – You are wrong” attitude, then thinking is a pleasure. […] The book is concerned with “operacy” and the thinking skills needed for getting things done. I feel that society has never paid sufficient direct attention to such matters. Traditionally thinking has been contemplative, analytical and critical. This can no longer be enough. […] Thinking is not intelligence, or information, or being right but an operating skill that can be improved. Whatever the existing level of thinking skill may be, that skill can be improved if we want to improve it. […]”

Edward de Bono was born in Malta in 1933. He attended St Edward's College, Malta, during World War II and then the University of Malta where he qualified in medicine. He proceeded, as a Rhodes Scholar, to Christ Church, Oxford, where he gained an honours degree in psychology and physiology and then a Ph D in medicine. He also holds a Ph D from Cambridge and an MD from the University of Malta. He has held appointments at the universities of Oxford, London, Cambridge and Harvard. Dr Edward de Bono is one of the very few people in history who can be said to have had a major impact on the way we think. In many ways he could be said to be the best-known thinker internationally. He has written numerous books with translations into 34 languages (all the major languages plus Hebrew, Arabic, Bahasa, Urdu, Slovene, Turkish etc). He has been invited to lecture in 52 countries around the world. In the University of Buenos Aires five faculties use his books as required reading. In Venezuela, by law, all school children must spend an hour a week on his programmes. In Singapore 102 secondary schools use his work. In Malaysia the senior science schools have been using his work for ten years. In the U.S.A., Canada, Australia, New Zealand, the Republic of Ireland and the UK there are thousands of schools using Dr de Bono's programmes for the teaching of thinking. At the International Thinking Meeting in Boston (1992) He was given an award as a key pioneer in the direct teaching of thinking in schools. In 1988 he was awarded the first Capire prize in Madrid for a significant contribution to humankind. What is unique about Dr de Bono is the response to his work across an unusually wide spectrum. At the special request of the delegates Dr de Bono was asked to address the Commonwealth Law Conference in Vancouver in August 1996 (2,300 senior lawyers, judges etc from 52 Commonwealth countries and other invited countries such as China). This followed an address which was regarded as the highlight of a previous Conference held in Auckland. Dr de Bono has worked with many of the major corporations in the world such as IBM, Du Pont, Prudential, AT&T, British Airways, British Coal, NTT (Japan), Ericsson (Sweden), Total (France), etc. The largest corporation in Europe, Siemens (370,000 employees) is teaching his work across the whole corporation, following Dr de Bono's talk to the senior management team. When Microsoft held their first ever marketing meeting, they invited Edward de Bono to give the keynote address in Seattle to the five hundred top managers. Edward de Bono's special contribution has been to take the mystical subject of creativity and, for the first time in history, to put the subject on a solid basis. He has shown that creativity was a necessary behaviour in a self-organising information system. His key book, 'The Mechanism of Mind' was published in 1969. In it he showed how the nerve networks in the brain formed asymmetric patterns as the basis of perception. The leading physicist in the world, Professor Murray Gell Mann, said of this book that it was ten years ahead of mathematicians dealing with chaos theory, non-linear and self-organising systems. From this basis, Edward de Bono developed the concept and tools of lateral thinking. What is so special is that instead of his work remaining hidden in academic texts he has made it practical and available to everyone, from five years olds to adults. The late Lord Mountbatten once invited Dr de Bono to talk to all his admirals. Dr de Bono was asked to open the first ever Pentagon meeting on Creativity. At the UN Social Summit in Copenhagen he was asked to address the banking and finance group. The term 'lateral thinking' was introduced by Edward de Bono and is now so much part of the language that it is used equally in a physics lecture and in a television comedy. Traditional thinking is to do with analysis, judgment and argument. In a stable world this was sufficient because it was enough to identify standard situations and to apply standard solutions. This is no longer so in a changing world where the standard solutions may not work. There is a huge need worldwide for thinking that is creative and constructive and can design the way forward. Many of the major problems in the world cannot be solved by identifying and removing the cause. There is a need to design a way forward even if the cause remains in place. Edward de Bono has provided the methods and tools for this new thinking. He is the undisputed world leader in what may be the most important field of all in the future: constructive and creative thinking. In 1996 The European Creativity Association surveyed their members across Europe to ask who had most influenced them. Dr de Bono's name came so far ahead that they requested the official naming committee of the International Astronomical Union (in Massachusetts) to name a planet after him. So DE73 became EdeBono. In 1995 the Malta Government awarded Edward de Bono the 'Order of Merit'. This is the highest award available and is limited to only twenty living persons. For many thousands, indeed millions, of people worldwide, Edward de Bono's name has become a symbol of creativity and new thinking. In December 1996, The Edward de Bono Foundation in Dublin will be hosting a European Union sponsored conference on "the teaching of thinking in schools". In 1972 Edward de Bono established the Cognitive Research Trust as a charitable organisation devoted to the teaching of thinking in schools (see CoRT Thinking Lessons). Edward de Bono founded the International Creative Forum which has had as members many of the leading corporations in the world: IBM, Du Pont, Prudential, Nestle, British Airways, Alcoa, CSR etc. The International Creativity Office in New York to work with The UN and member countries to produce new ideas on international issues - has been set up by Dr de Bono. Dr de Bono has made two TV series: de Bono's Course in Thinking (BBC) and The Greatest Thinkers (WDR, Germany) Peter Ueberroth, whose organisation of the 1984 Olympic Games in Los Angeles rescued the Games from oblivion, attributed his success to his use of de Bono's lateral thinking. So did John Bertrand, skipper of the successful 1983 challenger for the America's Cup yacht race. Ron Barbaro, President of Prudential Insurance (USA) also attributed his invention of living needs benefits to de Bono's methods. Perhaps what is so unique about Edward de Bono is that his work spans from teaching 7 years olds in primary schools to working with senior executives in the world's largest corporations. His work also spans many cultures: Europe, North and South America, Russia, The Middle East, Africa, SE Asia, Japan, Korea, Australia, New Zealand etc. In September 1996 there was launched in Melbourne a 'de Bono Institute' as a world centre for new thinking. The Andrews Foundation has donated $8.5 million to make this possible. In 1997 Dr de Bono has been invited to be one of the major speakers at the first ecology conference to be held in Beijing, China. His role is to provide the 'new thinking' element.

Creative Thinking is a new field and Dr de Bono is generally regarded as the leading world authority in this area.

METTERNICH, furieux.[furious]

Mais je suis le chancelier d’Autriche ! [I am the chancelor of Austria!]
Mais je suis tout ! Mais je peux tout ! [But I am everything! But I can do everything!]

FLAMBEAU.

Mais je m’en fiche ! [But I do not care!]

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Kids, as a final word, we place this page under the protection of the first amendment of the constitution of the United States of America which we believe is the strongest guarantee for the freedom of speech of citizens all over the world:

Amendment I

"Congress shall make no law respecting an establishment of religion, or prohibiting the free exercise thereof; or abridging the freedom of speech, or of the press; or the right of the people peaceably to assemble, and to petition the government for a redress of grievances."