Appel international en solidarité avec les prisonniers d'Action Directe (France) 

  

        Nous, l'Internationalistisches Komitee, nous adressons ici aux organisations et personnes, communistes, révolutionnaires et progressistes
dans le monde et nous faisons appel à votre solidarité envers les prisonniers d'Action Directe. 

        Dans le monde, partout où il y a eu, où il y a des luttes pour la libération, pour la destruction du capitalisme et pour l'élaboration d'une
société juste, partout où des hommes et des femmes s'opposent aux effets de l'exploitation et oppression impérialistes, la répression étant la réponse
à ce combat légitime, il y a des prisonniers politiques.
        Destruction ou soumission sont la logique de la politique contre-révolutionnaire. Cette politique ne s'arrête pas avec tel ou tel cycle de
luttes : juste, selon les circonstances, elle s'adapte.
        Les prisonniers sont enterrés, dans des prisons souterraines, comme au Pérou, ou derrière un mur de silence, comme en France; soumis à
des tortures sanglantes comme en Turquie ou à l'isolement total et à des détentions d'exception, comme dans de nombreux pays européens; escadrons
de la mort, comme en Amérique Latine ou peine de mort comme aux USA; état d'exception et incarcérations administratives comme en Palestine ou
normalisation et dépolitisation - les méthodes sont différentes, pas le but. 

        Lorsque, autour du débat des années 70, des organisations révolutionnaires armées, dans la métropole ouest-européenne et aux USA,
engagèrent la lutte, reliant leur combat pour la libération aux mouvements de libération et révolutionaires dans les Trois Continents, ce fut un saut
historique dans la longue marche vers l'émancipation. "Comme l'avenir serait rayonnant et proche" avait dit le Che. Ces luttes ouvraient la porte
sur l'horizon d'une nouvelle phase de l'internationalisme. Attaquant les centres de décisions dans les métropoles, ces luttes n'étaient pas seulement
un espoir pour les peuples opprimés des Trois Continents. Elles étaient aussi une perspective pour ceux qui, dans le vide du quotidien
métropolitain, masqué par la consommation et les réformismes de toutes engeances, cherchaient, nombreux, à élaborer une autre société.
        En nous souvenant de cette phase, nous ne cherchons pas éveiller une quelconque nostalgie de la révolution. Ce texte n'est pas non plus le
lieu pour faire la critique des faiblesses et des erreurs commises. En revanche, parce qu'aujourd'hui, ce ne sont pas seulement les différents
gouvernements qui cherchent à tout prix à fermer définitivement cette porte mais nombre d'anciens protagonistes de cette lutte, cela nous semble
important d'affirmer qu'il ne s'agit pas d'un épisode soldé dont seules demeureraient des anecdotes personnelles.
        Au contraire, la question, mise à l'ordre du jour par ces luttes, n'a aujourd'hui rien perdu de sa pertinence, presque 30 ans après cet élan : la
praxis d'un internationalisme prolétarien correspondant au niveau atteint par la globalisation du système impérialiste.
        Et c'est seulement ainsi qu'est compréhensible pourquoi les prisonniers, issus de ce cycle de luttes, même quand leurs organisations sont
depuis longtemps détruites, marginalisées ou se sont auto-dissoutes, continuent d'être, aujourd'hui comme hier, au centre de cette confrontation. 

        Les militants d'Action Directe ont fait partie de ce cycle de luttes. Depuis 12 ans, Joëlle Aubron, Nathalie Ménigon, Jean-Marc Rouillan
et Georges Cipriani sont incarcérés en France en raison de leur appartenance à Action Directe, organisation de la guérilla communiste. Des tribunaux
d'exception les ont condamnés à la prison à vie dont 18 ans incompressibles. 

        Les conditions actuelles des prisonniers d'Action Directe sont déterminés par le dictat de la prétendue normalité. Après 9 ans d'isolement,
dont 2 d'isolement total, la question reste de les nier comme prisonniers politiques, d'assécher leurs relations politiques et sociales et de les
asphyxier dans la normalité. Maintenir indéfiniment en détention des prisonniers, devenus malades en prison, n'est rien d'autre qu'une tentative de
détruire totalement leur intégrité psychique et physique.
        Leur communication, entre aux et avec des ami(e)s et des camarades à l'extérieur, continue d'être drastiquement limitée. Depuis 9 ans, à
quelques exceptions près, toute nouvelle demande de permis de visite de heurte à un refus; en excluant la famille, seule une poignée de personnes ont
pu visiter ces prisonniers en 12 ans.
        La promesses de parloirs entre eux, faite par le ministère de la justice à la suite de leur seconde grève de la faim en 1989, n'a jamais été
respectée. Joëlle et Nathalie sont des cellules contiguës de la prison de Fleury-Mérogis. Jean-Marc est depuis 1994 à la centrale de Lannemezan. Si
ce n'est en promenade, les 2 femmes ne peuvent pas se voir à cause d'un statut de DPS (détenu particulièrement surveillé), interdisant de participer
en commun aux activités.
        Fin 1996, Nathalie avait un accident vasculaire-cérébral. Depuis, son bras et sa jambe gauches sont faible et elle a perdu en acuité
visuelle; une autre conséquence est qu'elle souffre d'une dépression et que ses réserves physiques et psychiques sont affectées. En dépit de l'urgence de
la situation, la demande d'une cellule communiquante avec Joëlle ne fut pas prise en compte.
        Depuis 1993, Georges Cipriani souffre de graves problèmes psychiques, conséquence de l'isolement, et pour lesquels il fut transféré de
force dans un hôpital psychiatrique. En 1993, il se séparait du collectif des prisonniers et est incarcéré depuis 1994 à Ensisheim. Son état continue
de s'aggraver. 

        Les prisonniers politiques ne sont pas seulement le lien qui doit être rompu entre les luttes actuelles et celles passées. A travers eux, un
message doit pouvoir être exemplarisé : la lutte est vaine, elle conduira à la mort ou à une incarcération à vie; dans une lente destruction psychique
et physique, nous vous étoufferons. 

        Notre solidarité, toute entière, va à tous les prisonniers politiques dans le monde qui, en dépit des faiblesses des mouvements
révolutionnaires, défendent leurs vies et leurs identités avec une constance exigeant beaucoup de force.
        La stratégie de l'Etat est de les rendre invisibles et d'effacer ainsi leurs expériences de lutte. Pour contrer cette stratégie, nous devons faire
entendre leurs voix et lutter pour que changent leurs conditions de détention. 

        Aujourd'hui, il y a de nombreux points essentiels, il y a partout des prisonniers qui sont dans des situations particulièrement urgentes et
dont la vie est directement menacée ou dont l'état de santé et les réserves physiques sont tellement altérées qu'ils ne peuvent plus se rétablir dans le
cadre carcéral. La nécessité de changer immédiatement et rapidement la situation est évidente.
        Le problème n'est pas d'une alternative, des solutions immédiates ou une révolution lointaine, mais qu'il n'y a pas de solution sans
développement et réappropriation d'une perspective révolutionnaire. Si la libération de tous les prisonniers politiques n'est pas vue comme élémént
de la pacification, alors elle est inséparable de la question du développement d'une politique révolutionnaire et d'un changement du rapport de force. 

        Dans leur déclaration de soutien à la conférence internationale de Berlin (avril 1999), les prisonniers d'Action Directe écrivent : Il est
primordial de comprendre dans la problématique de la détention politique que ce n'est pas notre vie qu'il faut garantir en priorité mais la vie du
combat qui fut et est toujours le nôtre. 

        Les campagnes internationales pour la libération de tel ou tel prisonnier ou groupe de prisonniers dans tel ou tel pays ne peuvent pas
seules répondre à cette question. Elles sont néanmoins un moment basique de la solidarité internationale et de la lutte contre le projet
contre-révolutionnaire. La nécessité et les possibilités d'une lutte commune deviennent pratiques à travers elles. Elles peuvent obtenir d'importants
succès, comme par exemple, avoir empêché jusqu'ici l'exécution de Mumia Abu-Jamal, la libération d'Irmgard Möller, de Souha Béchara et
Mohamad Rafan n'rat. Elles peuvent être des moments du processus pour se réapproprier l'histoire des luttes et de son actuel développement. 

        Nous vous appelons à soutenir les revendications des prisonniers d'Action Directe et à leur envoyer des messages comme expression
concrète de votre solidarité. 

Pour la libération sans condition des prisonniers dont l'état de santé est incompatible avec la détention !
Pour le droit à la vie politique ! 

  

Adresses des prisonniers 

Joëlle Aubron
MAF 31504U
9, av. des Peupliers
91705 Fleury-Mérogis 

Nathalie Ménigon
MAF 32091G
9, av. des Peupliers
91705 Fleury-Mérogis 

Jean-Marc Rouillan
969 B202
BP 166, rue des Saligues
65300 Lannemezan 

Georges Cipriani
Maison Centrale
49, rue de la 1ère Armée
68190 Ensisheim 

D'autres informations et des textes des prisonniers au Internationalistisches Komitee, Alte Feuerwache, Landwehrplat 2, 66111 Saarbrücken 

  


                                                                                                                                              

                                                                                                                     

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