Etude expérimentale

Préambule

Cette étude est menée en collaboration avec la société B.S.L.industrie, partenaire industriel, et la société CASTOLIN EUTECTIC, en charge de la fabrication et la vente de produits et consommables pour les métiers du soudage et du brasage. Les objectifs de ce travail sont de définir, dans un premier temps, des formulations de flux solides en vue d’applications aux aciers inoxydables ainsi qu’aux alliages de titane, puis d’analyser les mécanismes d’activation des flux au passage de l’arc électrique.

En raison du caractère confidentiel des produits développés par l’Ecole Centrale et B.S.L.i, produits en phase de commercialisation par CASTOLIN EUTECTIC, la nature des compositions ne sera pas divulguée dans ce document.

Nous commencerons donc par nous fixer un cahier des charges, défini en fonction des exigences industrielles, concernant les objectifs du procédé ATIG. Nous présenterons alors notre démarche de formulation des flux solides appliqués aux alliages de titane et aux aciers inoxydables, les caractérisations mécaniques et la recherche de paramètres opératoires optimaux pour bénéficier de l’efficacité des produits activants. Nous tenterons de mettre en avant une méthodologie globale de détermination de flux d’activation pour le soudage ATIG en vue de développements pour d’autres matériaux.

Suivront, ceci posé, la mise en évidence des phénomènes intervenant au cours du soudage ATIG, les interactions entre le flux et l’arc électrique (modification des densités d’énergie, de la tension d’arc et de l’usure de l’électrode) ainsi que les modifications de comportement au sein du bain de fusion (inversion des courants de convection par modification spatiale des tensions de surface). Il nous faudra alors dissocier ces deux mécanismes pour quantifier leur efficacité propre, soit en simulant une source thermique par faisceau Laser, soit en réalisant des éprouvettes sandwich, emprisonnant du flux entre une fine tôle et la pièce à souder, afin d’éviter les interactions avec l’arc électrique. Ces expériences conduiront en effet à démontrer l’importance des effets des courants thermo-capillaires sur la morphologie finale du cordon soudé.

Pour achever cette étude, nous présenterons des assemblages et réalisations industrielles exécutés en collaboration avec la société B.S.L.i. Les différentes configurations de soudage réalisées essayent de balayer l’ensemble des possibilités du soudage ATIG, présentant des réalisations simplifiées par la réduction du nombre de passes mais aussi des applications jusqu’alors réservées aux procédés à haute densité d’énergie. Les configurations de soudage orbital tube-tube ou tube sur plaque seront très largement abordées, puisqu’elles sont les plus courantes dans le cas de fabrication d’appareils à pression. Une application industrielle réalisée au sein de B.S.L.i sera détaillée en mettant en avant les gains de temps de production et les économies réalisées avec l’utilisation du soudage ATIG. Enfin, nous réaliserons une comparaison technico-économique entre les procédés TIG, ATIG et plasma pour situer le soudage ATIG en terme de gains de production et de gammes de fabrication accessibles.

Mais avant toute choses, une description complète du matériel utilisé est nécessaire.

III. Présentation du matériel

Cette partie présente de manière succincte les différents matériels utilisés pour cette étude. Elle se décomposera en cinq dominantes :

  • les postes TIG (générateur, torche, électrode, gaz, automates),
  • le système d’acquisition de paramètres électriques,
  • le système d’acquisition et d’analyse vidéo,
  • les procédures d’essais TIG ainsi que le LASER CO2 utilisé pour simuler la densité d’énergie de l’arc TIG,
  • les matériaux utilisés.

III.1. Présentation des postes TIG

Cette étude a été réalisée sur deux postes de soudage TIG automatique distincts. Les différences entre ces deux postes se situent au niveau de l’automatisation et des paramètres de mesure possibles. Le premier poste, semi-automatique, permettra la réalisation de soudures en conditions industrielles. La mesure d’informations précises sur l’arc (tension, intensité, images), ou la réalisation d’essais moins conventionnels s’effectuera sur le poste « Laser ».

Nous allons maintenant décrire ces deux ensembles en présentant leurs différentes possibilités.

III.1.1. Poste semi-automatique

Le poste semi-automatique est composé d’un générateur TIG dont la torche est solidaire d’un chariot de translation. On peut ainsi réaliser des lignes de fusions ou des soudures linéaires à vitesse contrôlée. La hauteur d’arc est réglée avant l’opération, la tension d’arc résultante sera donc imposée par le point de fonctionnement du générateur.

Le générateur TIG est une source SAF PRESTOTIG 300 qui délivre un courant alternatif ou continu (lisse ou pulsé) d’intensité maximale 300A. Les tensions de soudage sont alors comprises entre 10 et 22V suivant la longueur d’arc et le gaz d’assistance. La torche de soudage, PROTIG 30W, est refroidie par un circuit d’eau.

Pour ce qui est du cycle de soudage, il peut être décrit comme suit :

t1 t2 t3 t4 t5 t6
t1 t2 I1 t3 Is t4 I2 : temps de pré-gaz, : temps de pré-courant, : intensité de pré-courant, : rampe de montée en courant, : intensité de soudage, : évanouissement d’arc, : intensité de post courant, t5 t6 Ih Ib f : temps de post-courant, : temps de post-gaz. Courant pulsé : intensité haute, : intensité basse, : fréquence de pulsation.

Figure III.1: Cycle de soudage

Le déplacement linéaire est assuré par un chariot motorisé. La gamme de vitesses accessibles varie continûment de 5 à 200cm/min.

Pour la phase de soudage, les échantillons sont montés sur une platine support possédant une rainure centrale nécessaire à la protection envers des cordons réalisés (cf. Figure III.2). Un traînard, solidaire de la torche de soudage, vient assurer la protection endroit des cordons au cours du refroidissement (essentiellement pour les alliages de titane).

Arrivée de gaz (protection endroit)

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Platine support

Figure III.2 : Schéma du montage de soudage (platine support et protections gazeuses)

III.1.2. Poste « Laser »

Ce poste utilise l’automatisation du robot de soudage Laser. La torche TIG est placée de façon à être solidaire de la tête de soudage Laser.

Le générateur électrique est un générateur SAF, NERTABLOC 260 MP, délivrant un courant continu, alternatif ou pulsé jusqu’à 250A (les fréquences de pulsations sont comprises entre 1 et 10Hz). Comme précédemment, la tension d’arc n’est pas maîtrisable, elle découle de la hauteur d’arc fixée et du gaz utilisé. Le cycle de soudage utilisé est identique à celui présenté Figure III.1.

La torche est solidaire de la tête de soudage Laser, montée sur un robot portique disposant de trois axes de déplacement linéaires. De plus, un système de positionnement en rotation permet la réalisation d’assemblages circulaires. L’ensemble est commandé par un ordinateur industriel ROBONUM 800. Nous ne sommes limités ni par les courses (course maximale de 2400mm) ni par les vitesses (vitesse maximale 1m/s) pour la réalisation des pièces.

Le directeur de commande assure le contrôle des déplacements ainsi que les débuts et fins de cycles de soudage (initiation et arrêt d’arc, déclenchement des gaz). Il est donc possible de bien maîtriser les temps de soudage, notamment dans le cas de points de fusion.

S’ajoute, à cet ensemble, un système de mélangeur qui permet de faire varier, au besoin, la composition des gaz de protection dans la buse ou dans les traînards.

De plus, ce poste est complété par un système de mesure des paramètres électriques au cours du soudage (intensité et tension), ainsi que par un ensemble d’acquisition vidéo.

III.2. Acquisitions électriques

La connaissance des énergies incidentes au cours des opérations de soudage, passe par la mesure de la tension, de l’intensité d’arc et par la connaissance de la vitesse de travail. Il sera alors possible de comparer deux soudures entre elles au vu des énergies mises en jeu.

Faute de matériel adapté aux contraintes du soudage TIG (durée d’acquisition, amorçage d’arc), nous avons conçu et dimensionné un système d’acquisition des paramètres électriques. Ces acquisitions (tension et intensité d’arc) nécessitent de relier un circuit de mesure sur le circuit de soudage (composé du générateur TIG, de la torche et de la pièce à souder). Or, l’amorçage de l’arc s’effectue par haute fréquence entre l’électrode et la pièce. Ajouter un circuit parallèle de mesure risque alors de favoriser l’apparition de l’arc dans le système d’acquisition plutôt qu’en bout d’électrode. Il faut donc assurer l’isolation des instruments de mesure tant que l’arc n’est pas stabilisé.

De plus, contrairement aux appareils industriels présents sur le marché qui limitent les durées d’acquisition, le système doit permettre d’assurer une mesure sur la longueur de cordon réalisée. Typiquement, le système doit pouvoir prendre des informations pendant 2 à 10 minutes.

Enfin, la bande passante du système de mesure doit être suffisante pour identifier la présence de défauts (éjections, effondrement, puckering), mais doit filtrer les inévitables perturbations dues à l’environnement.

Tout cela étant très contraignant, nous avons donc choisi de mesurer l’intensité d’arc en utilisant une pince ampère-métrique à effet HALL (le gain en amplitude du signal est de 0,3, ce qui correspond à un facteur de 1000 entre le signal réel et le signal mesuré). La mesure de tension d’arc est prise au plus près de l’arc, entre la torche de soudage et la masse reliant la pièce au générateur. Sur le circuit de mesure, nous avons, de plus, positionné un interrupteur de sécurité, isolant les appareils de mesure du circuit électrique tant que l’arc n’est pas stabilisé. Cet interrupteur sert aussi de commande pour la mesure.

La partie du système adaptée à un ordinateur se compose d’une carte d’instrumentation et d’une carte de conditionnement de signal (la fréquence de coupure peut être choisie à 10Hz ou à 10kHz). Les fréquences des mesures sont comprises entre 1Hz et 100kHz. Enfin, le traitement sous tableur réduit à 16000 points le nombre de mesures possibles au cours d’une acquisition.

Le système est implanté sur le poste de soudage « Laser ». On peut alors suivre, en continu, l’évolution des paramètres électriques et donc les énergies incidentes.

Il faut tout de suite noter que le générateur asservit l’intensité d’arc (Figure III.3). Ceci est commun à nos deux générateurs TIG et plus généralement à l’ensemble des générateurs TIG. Cependant, certains postes automatisés, soucieux de maîtriser l’énergie incidente, réalisent aussi un asservissement de la tension d’arc. L’opérateur programme alors l’intensité, la tension et la vitesse de travail souhaitée (donc l’énergie nominale incidente) et la tête de soudage, motorisée, va adapter la hauteur d’arc pour obtenir la tension de consigne demandée.

1

Figure III.3 : Mesure de paramètres électriques

Dans notre d’étude, la présence ou non de flux actif, nous le verrons, modifie la tension d’arc. Un asservissement en tension de l’arc serait alors perturbé par la présence de flux solide. L’étude de cette perturbation, et la réponse de la chaîne d’asservissement, sont l’objet des travaux réalisés par MIDDEL et OUDEN [Ati 15].

Le système d’acquisition électrique étant présenté, faisons de même pour la partie vidéo.

III.3. Acquisitions vidéo

La forme de l’arc et de son plasma, la forme du bain et ses mouvements en surface nous renseignent sur la répartition des énergies et des températures au sein de l’arc ainsi que sur les mouvements internes du bain métallique. Ainsi, visualiser les évolutions de l’arc et du bain est nécessaire pour comprendre et comparer les comportements en soudage TIG et ATIG.

Nous réaliserons donc des suivis vidéo d’arc au moyen d’une caméra CCD noir et blanc Sony XC-75/CE. Les acquisitions d’images et leur stockage sont effectués par un ordinateur. La fréquence d’acquisition maximale, fonction de la taille de l’image que nous filmons, est limitée à 10Hz (une sauvegarde directe est réalisée sur la mémoire du disque dur de l’ordinateur). Cette technique limite peu les durées des acquisitions vidéo au détriment de la rapidité de prise d’images. Elle permet un suivi global de l’évolution de l’arc et du bain en cours d’opération.

Nous utilisons deux objectifs distincts : un premier objectif, de focale réglable de 15 à 75mm qui permet des vues d’ensemble et un second objectif macroscopique de focale 200mm qui permet de zoomer sur l’arc ou sur le bain de fusion. Tous deux sont équipés d’un diaphragme réglable qui limite l’éblouissement des capteurs dû au plasma d’arc.

Cependant, les arcs TIG et ATIG sont très lumineux et les diaphragmes des objectifs ne sont pas suffisants pour éviter l’éblouissement des cellules de la caméra. Nous utilisons alors des filtres teintés, ou des verres pour masque de soudage, afin de réduire la luminosité (indices 12 à 16).

L’ensemble reste fixe par rapport à la torche de soudage, soit en solidarisant la caméra à la tête de soudage Laser (sur laquelle est fixée la torche TIG), soit en utilisant le déplacement transversal de la table sur laquelle est fixée la pièce à souder (cf. Figure III.4). Ceci permet de conserver la mise au point pendant l’opération de soudage.

Tête de soudage Laser

Caméra vidéo Torche TIGd’acquisition

Traînard
de protection

La caméra peut être positionnée en avant, en arrière ou latéralement par rapport à l’arc. De plus, il est possible de l’incliner pour obtenir des vues plongeantes du bain (cf. Figure III.5).

Figure III.5 : Orientations possibles de la caméra

Ces orientations vont permettre d’obtenir des clichés de l’arc en vue de face et de côté, ainsi que des images du bain. Nous pourrons particulièrement observer les fronts de liquéfaction et de solidification ainsi que la dépression du bain. Toutes ces informations vont nous aider à comprendre les événements propres à l’arc et au bain pour le soudage ATIG par rapport au soudage TIG.

Pour pouvoir comparer les formes et les intensités d’arc, on effectue des traitements d’images par décomposition en niveaux de gris, obtenant alors une cartographie par zones d’intensités lumineuses (via les niveaux des iso-intensités). Il est possible d’obtenir ainsi un découpage de l’image sous forme de zones d’intensités proches. Il devient alors beaucoup plus facile de comparer les formes des plasmas enregistrés (cf. Figure III.6).

Figure III.6 : Traitement d’image en niveaux de gris d’un arc en vue latérale

Un tel traitement permet d’identifier les zone d’émission plus intenses au sein de l’arc. Ces zones évoluent en fonction des opérations de soudage (par exemple : présence ou non de flux). Il est alors possible de mesurer la surface ou la largeur d’une de ces zones et d’étudier son évolution au cours du temps. Notons qu’il y a très souvent des réflexions de l’arc dans le bain et sur la tôle. Il faudra, dans ce cas, masquer ou supprimer les zones réfléchies.

Il faut pourtant rester prudent quant à l’interprétation des zones très intenses observées avec notre matériel vidéo. Nous n’avons pas de caméra thermique, aussi ne peut-on pas toujours associer les intensités lumineuses aux champs de températures. En effet, l’image de l’arc sera modifiée si des éléments dissociés émettent un fort rayonnement lumineux. Des zones plus intenses vont alors apparaître pouvant laisser croire à une augmentation de la température.

Nous avons représenté sur les Figures III.7 et III.8 les principaux éléments lumineux dans le cas du soudage ATIG des aciers inoxydables et du titane. Il ressort que le fluor est l’élément le plus émissif et qu’il illuminera alors intensément l’arc. Par contre, l’utilisation d’oxydes ne perturbe pas l’intensité lumineuse de l’arc. Il serait alors possible de comparer, en présence d’oxydes, les iso-intensités suivant les niveaux de température. Par contre, une telle analogie en présence d’éléments fluorés ne sera même pas envisagé. Nous nous garderons tout de même de tirer des conclusions abusives et sûrement erronées des répartitions de température en fonction de la simple analyse d’images vidéo.

Figure III.7 : Intensités lumineuses (unités arbitraires) dans le cas du soudage des aciers inoxydables

50 000 45 000 40 000 35 000 30 000 25 000 20 000 15 000 10 000 5 000 0

Titane

Argon

Fluor

Aluminium

Intensité lumineuse

Figure III.8 : Intensités lumineuses (unités arbitraires) dans le cas du soudage du titane

III.4. Configuration d’essais

Au cours du développement des compositions des flux ATIG ainsi que dans l’étude de mise en évidence des mécanismes d’activation, différentes configurations d’essai ont été utilisées. Nous présenterons ici les configurations principales que sont les soudures TIG-ATIG et les points de fusion.

Mais, tout d’abord, décrivons les configurations propres à la torche de soudage.

III.4.1. Paramètres d’expérimentation

Fixant ainsi la nature, la géométrie et la position de l’électrode, la nature et le débit gazeux, ainsi que le type de courant et la polarité utilisée, les paramètres expérimentaux choisis sont les suivants (cf. Figure III.9).

Figure III.9 : Paramètres géométriques de la torche de soudage

Sauf indications contraires, les résultats présentés seront réalisés dans cette configuration. Nous réduisons ainsi le nombre des paramètres opératoires qui vont changer d’un essai à l’autre. Seules l’intensité d’arc et la vitesse de soudage sont les paramètres qui vont être modifiés. Ne disposant pas de systèmes asservis en tension, il ne nous est pas possible d’imposer une valeur et donc de fixer une énergie incidente.

Nous allons ainsi réaliser, pour chercher une formulation optimale de flux activant, deux grandes familles d’essais qui sont présentés ci-après. D’une part, la réalisation de cordons et de lignes de fusion va nous renseigner sur l’effet des flux concernant la morphologie fondue, les largeurs et pénétrations de bain. D’autre part, la réalisation de points de fusion va permettre de caractériser l’efficacité du produit activant à faire diffuser le flux thermique dans l’épaisseur de la pièce à souder.

III.4.2. Cordons et lignes de fusions TIG - ATIG

Afin de visualiser et de mesurer les différences entre les soudages TIG et ATIG, nous effectuons des soudures et des lignes de fusion avec préalablement un dépôt de produit activant ou non sur une demi-longueur de l’assemblage à réaliser (cf. Figure III.10). On s’assure ainsi de comparer, à paramètres opératoires identiques (intensité et hauteur d’arc, vitesse de soudage), les cordons obtenus par procédés TIG et ATIG.

Figure III.10 : Configuration de soudage TIG-ATIG

L

P

e

Figure III.11 : Morphologie comparative de cordon soudé TIG et ATIG

L’impact sur les géométries fondues va se mesurer sur les grandeurs caractéristiques des joints soudés, c’est-à-dire principalement la largeur et la pénétration (cf. Figure III.11). Les cordons seront donc, après soudure, tronçonnés, polis mécaniquement et attaqués chimiquement afin de faire ressortir la zone fondue et la Z.A.T. Ces coupes transversales permettent entre autre de mesurer les caractéristiques géométriques des cordons soudés, largeur, pénétration et section fondue.

Par l’analyse de l’évolution de ces valeurs, il sera possible de corréler l’activation des produits aux variations de morphologie de bain fondu. Nous déterminerons donc le ou les composés efficaces qui serviront de base à la formulation de notre flux optimum.

L’effet d’un produit considéré comme efficace dans un premier temps, consistera en une augmentation de la pénétration accompagnée d’une réduction de la largeur endroit fondue. Nous verrons au cours de l’étude que la forme et la taille du cratère de fin de cordon peut aussi être un indicateur d’efficacité des produits testés.

Cependant, certains flux testés et jugés efficaces peuvent conduire à la formation de défauts (cordons endroits perturbés, bourrelets proéminents, caniveaux…), à la présence d’un laitier post opératoire difficile à retirer ou imposer des contraintes très sévères sur les paramètres de soudage à utiliser, comme la hauteur d’arc par exemple (cf. Figure III.12).

D : endroit D : endroit

Zone fondue
Front thermique

d : envers d : envers

Face endroit Face envers Face endroit Face envers

TIG ATIG

Figure III.13 : Points de fusion, variation du transfert de flux thermique - T40 [Ati 22]

III.4.3. Points de fusion

En parallèle des essais précédents, nous réalisons des points de fusion à temps d’interaction maîtrisé. Ceci permet de compléter les indications sur l’efficacité des flux testés. Cet essai consiste à établir un arc stationnaire entre l’électrode et la pièce pendant une durée limitée.

La zone fondue et le transfert thermique au sein de la pièce seront affectés par la présence de flux. Il est alors possible de comparer le diamètre endroit de la partie fondue ainsi que le diamètre envers de la zone oxydée (il ne sera pas utilisé de protection inertante en envers pour marquer la zone oxydée, image de la pénétration du flux thermique dans la pièce) (cf. Figure III.13) .

Les produits potentiellement efficaces devront conduire à une réduction de la surface fondue en endroit ainsi qu’à une augmentation du diamètre oxydé en envers. Par analogie avec l’essai précédent, les évolutions du diamètre endroit fondu et du diamètre envers oxydé doivent correspondre aux variations de largeur de cordon endroit et de pénétration du bain.

Nous définissons un facteur d’efficacité propre à cet essai. Il traduit le transfert d’énergie thermique dans la pièce. Nous le caractérisons par un coefficient proportionnel au rapport des diamètres :

⎞⎟⎠⎛⎜⎝

d

d

Efficacité = Équation III.1

⎞⎟⎠

D flux

D sans flux

⎛⎜⎝

Le rapport des diamètres envers sur endroit (d/D) caractérise la diffusion du flux thermique au sein de la pièce ; le coefficient que nous avons défini traduit l’activation ou non des flux utilisés. Cette valeur d’efficacité est voisine de 1 si la diffusion thermique est préférentiellement dans le volume de la pièce (l’écoulement thermique est alors tridimensionnel se dissipant dans les grandes longueurs des échantillons comme c’est le cas pour le métal de base). Elle sera d’autant plus grande que la diffusion thermique se fait dans l’épaisseur de la pièce (l’écoulement thermique est alors bidimensionnel, le flux de chaleur entrant au droit du bain de fusion et traversant l’épaisseur de l’échantillon). Par contre, les valeurs inférieures à l’unité caractérisent des composés qui jouent un rôle défavorable sur la pénétration (cf. Tableau III.1) .

Valeur du coefficient d’efficacité Caractérisation du flux
Ef = 1 Flux inactif
Ef < 1 Flux défavorable
Ef > 1 Flux actif

Tableau III.1 : Critère d’efficacité des points de fusion ATIG

A l’issue de ces deux séries d’essais appliqués aux produits initialement pris un par un, ceux qui amélioreront le pouvoir pénétrant seront conservés pour servir de base au développement d’un produit plus élaboré, répondant aux critères que nous avons défini.

Les forts gains de pénétration, nous le verrons, conduisent généralement à des défauts de surface importants, ils seront donc mélangés à d’autres éléments dont l’efficacité activante n’est pas forcément importante. L’objectif final est d’obtenir deux formulations (appliquées aux alliages de titane et aux aciers inoxydables) dont l’utilisation aisée, en manuel et en automatique conduit à des cordons acceptables pour les chaudronniers.

Nous pourrons alors établir des domaines de validité du procédé, que ce soit en pénétration ou en vitesses de soudage maximales accessibles. Il faudra de plus s’assurer que les assemblages ATIG ont des caractéristiques qui répondent aux exigences imposées aux assemblages soudés en chaudronnerie d’appareils à pression.

III.5. Matériaux utilisés

Les deux flux développés au cours de cette étude sont dédiés au soudage ATIG des aciers inoxydables et des alliages de titane.

Les nuances d’acier inoxydable les plus utilisées dans les industries de la chaudronnerie sont les aciers inoxydables austénitiques qui forment la majeure partie des matériaux de base des composants à fabriquer. Nous avons donc choisi de travailler sur les nuances 304 et 304L. Afin de s’assurer que l’on ne se limite pas au développement d’un produit dédié à une famille réduite de matériaux, nous avons aussi utilisé des aciers inoxydables austénitiques 316 et 316L, des nuances stabilisées au titane ainsi que des aciers inoxydables duplex austénoferritique de type Uranus. Nous allons ainsi pouvoir simuler des changements de nuances de coulées ou réaliser des assemblages hybrides.

En ce qui concerne les applications soumises à des contraintes de corrosion très importantes, l’utilisation du titane est incontournable. La nuance de titane la plus utilisée en chaudronnerie est le titane commercialement pur grade 2 (T40) qui sera la matériau de base de notre développement. Nous utiliserons aussi du titane grade 5 (TA6V), principalement dédié aux applications aéronautiques, afin de vérifier l’efficacité des flux développés sur le T40 exempt d’éléments d’addition.

Sont représentées dans le Tableau III.2, ci dessous, les caractéristiques tirées des certificats de conformité matière, délivrés pour les matériaux utilisés.

Désignation et composition chimique Rp0,2 (MPa) Rp1 (MPa) Rm (MPa) A (%) Dureté
Inoxydable 304 292 330 607 54 200 Hv
X 5 Cr Ni 18 - 10 : 0,039% C - 0,42% Si - 1,30% Mn - 0,030% P - 0,007% S - 18,18% Cr 8,68% Ni - 0,021% N
Inoxydable 304L 261 288 578 53 200 Hv
X 2 Cr Ni 19 -11 : 0,021% C - 0,4% Si - 1,28% Mn - 0,028% P - 0,007% S - 18,18% Cr 10,06% Ni - 0,26% Mo - 0,25% Cu - 0,005% Ti - 0,09% Co
Stabilisé titane 284 313 591 55
X 6 Cr Ni Ti 18 - 10 : 0,041% C - 0,53% Si - 1,53% Mn - 0,032% P - 0,0025% S - 17,7% Cr 0,37% Mo - 9,59% Ni - 0,323% Ti
Duplex Uranus 45N 560 - 780 34 225 Hv
0,023% C - 0,38% Si - 1,29% Mn - 0,015% P - 0,0005% S - 22,24% Cr - 3,34% Mo - 5,45% Ni 0,172% N
Grade 2 - T40 331 - 414 28 150 HV
0,06% C - 0,03% N - 0,038% Fe - 0,002% H - 0,06% O - autres < 50 ppm
Grade 5 - TA6V 948 - 1002 11 -
0,01% C - 0,07% N - 0,19% Fe - 6,18% Al - 3,96% V - 0,14% O - autres < 50 ppm

Tableau III.2: Caractéristiques mécaniques et compositions chimiques des matériaux utilisés