De l'esprit de clôcher dans le village global
Une première chronique pour se faire des amis!
Avez-vous remarqué comme des choses changent et d'autres pas? Les mentalités par exemple. Dur à changer les mentalités. Très dur! Plus que la techno. Beaucoup plus que la techno!
On vous donne une auto à la fin du XIXe et vous accrochez un cheval devant. On vous offre un réseau mondial d'échange et vous plantez une clôture autour de votre clôcher... Bizarre!
Les écoles
On vous donne Internet et vous faîtes des pages Web ad nauseam. Regardez les écoles. Combien d'écoles ont leur pages Web? Des dixaines de milliers. Partout dans le monde.
Ce besoin d'exister est incroyable... La naissance sur Internet est un phénomène de masse. Et dans cette masse, il y a des perles... impossibles à trouver puisqu'elles sont noyées dans une mer de sites superfétatoires.
Car ce qui compte, c'est de planter sa clôture. C'est d'être là. Exister, même bêtement. Pouvoir dire: "Mon école est sur Internet", "Va voir, je suis sur le Net", "Avez-vous vu ma classe en ligne?".
Re-production virtuelle d'une production connue (le journal 
de
classe, l'exposition de peintures dans le gymnase, etc.), l'opération connaît les beaux
jours d'un phénomène "in" car elle offre un second souffle au prof.
Re-motivation des enfants dans le cyberespace. Pour combien de temps?
Effet pervers garanti: j'y viens...
L'information
Êtes-vous innondé d'infos redondantes? Moi oui. Je reçois régulièrement deux ou trois fois les mêmes informations par le biais des listes de diffusion et de bulletins électroniques. Une information qui est supposément libre, mais se répercute à l'infini dans la boîte noire de la fatuité des diffuseurs.
Chacun de créer son domaine. Être roi derrière son petit parapet, serait-ce au risque du bien public.
Vous posez une question dans une liste? La réponse favorite: "Allez donc voir mon site X ou Y". Redondance dans la redondance!
Effet pervers garanti: j'y viens...
Les ressources pédagogiques
Même phénomène du côté des ressources pédagogiques. Les lieux de ressources se multiplient. Au moment où l'on aurait besoin d'un lieu d'entrée privilégié pour aider les pédagogues à s'y retrouver, nous assistons à l'inexorable déploiement de l'esprit de clôcher. Les ressources augmentent tout comme la difficulté à les trouver : sites polyvalents ou sites dédiés à des sujets particuliers: maths, histoire, géo, etc.
Effet pervers garanti: j'y viens...
Oh, miroir...
À l'évidence nous en sommes à l'enfance de l'art, à une phase première du développement, au b-a ba d'Internet en classe. Phase miroir (cf. Lacan). Re-vision spéculaire où notre existence virtuelle ne peut passer que par le regard d'une re-production du soi ailleurs.
Pour caricaturer: je me vois sur Internet, donc j'existe!
Mince plaisir... mais passage obligé.
Vu d'ailleurs: nous en sommes au début d'un processus de diffusion de l'innovation dans les écoles. Phase de connaissance ou de persuasion. Selon Rogers (Rogers, 1995) suivront : décision, implantation et confirmation. Parler d'implantation aujourd'hui est une pure vue de l'esprit. Un discours politique, une prière, une manipulation idéologique.
Double évidence: ce sont essentiellement les mordus qui ont adopté les nouvelles technologies.
De:http://www.gsu.edu/~wwwitr/docs/diffusion/index.html
Les abonnements aux listes de diffusion montrent qu'il n'y a pas plus de 1% des pédagogues abonnés... Calcul privé selon des données piratées.
- Alors....
- Alors quoi?
- Les effets pervers...
- Simple: la perversion, c'est de traiter l'innvovation comme une mode.
Les effets pervers, ce sont les résidus de cette mutation : utilisation des nouvelles techno pour tenir les ti-cul tranquilles, pour capitaliser du pouvoir, pour pusher de l'idéologie (ah, la révolution pédagogique!), etc. Quand la mode est passée, l'espace médiatique (virtuel ici) saturé se désagrège.... Peau de chagrin.
Les systèmes éducatifs connaissent bien ce pattern: audio-visuel, informatique, maintenant Internet!
En sommes-nous encore là?
